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19/11/2024 | FRANCE | N°23NT03571

France | France, Cour administrative d'appel de NANTES, 6ème chambre, 19 novembre 2024, 23NT03571


Vu la procédure suivante :



Procédure contentieuse antérieure :



M. B... A... a demandé au tribunal administratif de Rennes d'annuler la décision du 17 août 2021 par laquelle le recteur de l'académie de Rennes a rejeté son recours formé contre la décision de ne pas renouveler son contrat de travail pour la rentrée scolaire 2021 ainsi que les avis émis respectivement par son chef d'établissement et l'inspecteur d'académie relativement à ce renouvellement.



Par un jugement n° 2105590 du 4 octobre 2023, le tribunal ad

ministratif de Rennes a rejeté sa demande.



Procédure devant la cour :



Par une ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B... A... a demandé au tribunal administratif de Rennes d'annuler la décision du 17 août 2021 par laquelle le recteur de l'académie de Rennes a rejeté son recours formé contre la décision de ne pas renouveler son contrat de travail pour la rentrée scolaire 2021 ainsi que les avis émis respectivement par son chef d'établissement et l'inspecteur d'académie relativement à ce renouvellement.

Par un jugement n° 2105590 du 4 octobre 2023, le tribunal administratif de Rennes a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête et des mémoires, enregistrés le 1er décembre 2023, le 29 juillet 2024 et le 9 septembre 2024, ce dernier mémoire n'ayant pas été communiqué, M. A..., représenté par Me Larre, demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Rennes du 4 octobre 2023 ;

2°) d'annuler la décision du 10 juin 2021 par laquelle le recteur de l'académie de Rennes n'a pas renouvelé son contrat de travail ainsi que la décision du 17 août 2021 par laquelle cette même autorité a rejeté le recours gracieux formé contre cette décision de non renouvellement ;

3°) d'enjoindre au recteur de l'académie de Rennes de réexaminer sa situation ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat le versement à son conseil, Me Larre, de la somme de 3 000 euros sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique.

Il soutient que :

- le jugement est insuffisamment motivé ;

- contrairement à ce qu'ont considéré les premiers juges, les moyens tirés des irrégularités entachant les avis du chef d'établissement et de l'inspecteur d'académie n'étaient pas irrecevables ;

- le tribunal s'est, à tort, abstenu d'user de ses pouvoirs d'instruction afin de vérifier s'il avait effectivement bénéficié d'un accompagnement institutionnel ;

- les avis émis par le chef d'établissement et l'inspecteur pédagogique ne sont pas signés et ne portent pas la mention des noms et qualités de leurs auteurs ;

- l'inspecteur pédagogique a émis son avis avant même de le recevoir en entretien ;

- les avis du chef d'établissement et de l'inspecteur pédagogique ne lui ont pas été communiqués de sorte qu'il n'a pas été mis à même de présenter des observations, en méconnaissance du principe du contradictoire et de celui des droits de la défense ;

- l'appréciation portée sur sa manière de servir est entachée d'erreur manifeste d'appréciation ;

- il n'a pas bénéficié d'un dispositif d'accompagnement et de formation adapté.

Par des mémoires en défense, enregistrés le 5 juin 2024 et le 21 août 2024, le recteur de l'académie de Rennes conclut au rejet de la requête de M. A....

Il fait valoir que :

- le requérant n'est pas recevable à invoquer en appel des moyens de légalité externe, faute d'avoir soulevé, devant le tribunal et dans le délai de recours contentieux, un moyen se rattachant à cette cause juridique ;

- les autres moyens soulevés par le requérant ne sont pas fondés.

M. A... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle partielle (55%) par une décision du 29 janvier 2024.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la loi du 22 avril 1905 portant fixation du budget des dépenses et des recettes de l'exercice 1905 ;

- la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 ;

- la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le décret n° 86-83 du 17 janvier 1986 ;

- l'arrêté du 1er juillet 2013 relatif au référentiel des compétences professionnelles des métiers du professorat et de l'éducation ;

- l'arrêté du 29 août 2016 relatif à l'évaluation professionnelle des agents contractuels recrutés pour exercer des fonctions d'enseignement, d'éducation et d'orientation dans les écoles, les établissements publics d'enseignement du second degré ou les services relevant du ministre chargé de l'éducation nationale ;

- le code des relations entre le public et l'administration ;

- le code de justice administrative.

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Bougrine,

- les conclusions de Mme Bailleul, rapporteure publique,

- et les observations de Me Larre, représentant M. A....

Une note en délibéré, enregistrée le 5 novembre 2024, a été produite pour M. A....

Considérant ce qui suit :

1. M. A... a été recruté par le recteur de l'académie de Rennes, en qualité d'agent contractuel, pour enseigner la technologie, au sein du collège de Brocéliande à Guer (Morbihan), du 14 janvier au 6 juillet 2021. Par une décision du 10 juin 2021, le recteur a refusé de renouveler ce contrat à durée déterminée. Le 17 août suivant, cette même autorité a rejeté le recours gracieux formé par M. A... contre cette décision de non renouvellement. M. A... relève appel du jugement du 4 octobre 2023 par lequel le tribunal administratif de Rennes a rejeté sa demande tendant à l'annulation des décisions rectorales des 10 juin et 17 août 2021.

Sur la régularité du jugement attaqué :

2. En premier lieu, en énonçant que le moyen tiré de l'irrégularité de la procédure " qui n'est pas d'ordre public, a été présenté plus de deux mois après l'expiration du délai de recours contentieux, lequel court, au plus tard à compter de la date de la saisine du tribunal, et ce, alors qu'aucun moyen de légalité externe n'a été invoqué dans ce délai " de sorte que ce moyen revêtait le " caractère d'une prétention nouvelle tardivement présentées et, par suite, irrecevable ", le tribunal a suffisamment motivé sa réponse au moyen considéré.

3. En deuxième lieu, il appartient au juge de l'excès de pouvoir de former sa conviction sur les points en litige au vu des éléments versés au dossier par les parties. S'il peut écarter des allégations qu'il jugerait insuffisamment étayées, il ne saurait exiger de l'auteur du recours que ce dernier apporte la preuve des faits qu'il avance. Le cas échéant, il revient au juge, avant de se prononcer sur une requête assortie d'allégations sérieuses non démenties par les éléments produits par l'administration en défense, de mettre en œuvre ses pouvoirs généraux d'instruction des requêtes et de prendre toutes mesures propres à lui procurer, par les voies de droit, les éléments de nature à lui permettre de former sa conviction, en particulier en exigeant de l'administration compétente la production de tout document susceptible de permettre de vérifier les allégations du demandeur.

4. En fondant son appréciation sur les pièces produites par le recteur d'académie de Rennes faisant état de ce que M. A... avait bénéficié d'un accompagnement, sans exiger de l'administration qu'elle produise davantage d'éléments de nature à établir la réalité de cet accompagnement, que le requérant contestait, le tribunal, qui s'est estimé suffisamment éclairé, a formé sa conviction sur les points en litige au vu des éléments versés aux débats par les parties. En procédant ainsi, sans mettre en œuvre ses pouvoirs généraux d'instruction, il n'a pas méconnu les règles rappelées au point précédent ni, en tout état de cause, entaché son jugement d'irrégularité.

5. En troisième lieu, à supposer que M. A... ait entendu soutenir qu'en se fondant sur les pièces produites par le recteur de l'académie de Rennes, les premiers juges auraient méconnu le caractère contradictoire de la procédure, il ressort des pièces du dossier de procédure que les deux mémoires en défense produits devant le tribunal par le recteur ont été communiqués au demandeur, lequel en a pris connaissance, respectivement, le 19 juillet 2022 et le 26 juillet 2023.

Sur le bien-fondé du jugement attaqué :

6. En premier lieu, il résulte de l'article R. 411-1 du code de justice administrative qu'après l'expiration du délai de recours contentieux, sont irrecevables, sauf s'ils sont d'ordre public, les moyens présentés par le requérant qui ne se rattachent pas à l'une des causes juridiques invoquées dans la requête avant l'expiration de ce délai, une telle irrecevabilité étant d'ordre public.

7. Il ressort du dossier de procédure que si, dans sa requête introductive de première instance, M. A... a contesté la teneur des avis recueillis par le recteur auprès de son chef d'établissement et de l'inspecteur pédagogique de sa discipline dans la perspective du renouvellement de son contrat, les irrégularités qui auraient entaché les conditions dans lesquelles ces avis ont été recueillis ainsi que la procédure précédant la décision de non renouvellement n'ont été invoquées devant le tribunal que postérieurement à l'expiration du délai de recours contentieux, intervenue le 8 novembre 2021. Ces moyens de légalité externe, qui ne sont pas d'ordre public, relèvent d'une cause juridique différente de celle à laquelle se rattachent les moyens invoqués dans la demande avant l'expiration de ce délai. Ils sont, dès lors, irrecevables. Il en va de même des autres moyens de légalité externe soulevés pour la première fois en appel par M. A... et tirés de la méconnaissance des principes du contradictoire et des droits de la défense et du défaut de signature et de mention des noms et qualités des auteurs des avis susmentionnés.

8. En second lieu, un agent public qui a été recruté par un contrat à durée déterminée ne bénéficie pas d'un droit au renouvellement de son contrat. Toutefois, l'administration ne peut légalement décider, au terme de son contrat, de ne pas le renouveler que pour un motif tiré de l'intérêt du service. Un tel motif s'apprécie au regard des besoins du service ou de considérations tenant à la personne de l'agent.

9. Le référentiel des compétences professionnelles des métiers du professorat et de l'éducation annexé à l'arrêté du 1er juillet 2013 prévoit notamment, parmi les compétences attendues des enseignants, la capacité d' " adapter son enseignement et son action éducative à la diversité des élèves ", de " préparer les séquences de classe " et de construire " des situations d'enseignement et d'apprentissage prenant en compte la diversité des élèves ", d'"utiliser un langage clair et adapté aux différents interlocuteurs ", de faire respecter, " en éducateur responsable ", le règlement intérieur et les chartes d'usage et de " maintenir un climat propice à l'apprentissage ", de " s'engager dans une démarche individuelle (...)

de développement professionnel " en " identifi[ant] ses besoins de formation et [en] mett[ant] en œuvre les moyens de développer ses compétences en utilisant les ressources disponibles ".

10. Il ressort des pièces du dossier, en particulier des avis émis le 7 avril 2021 et le 29 avril 2021 par, respectivement, le chef de l'établissement où était affecté M. A... en 2021 et l'inspecteur pédagogique de technologie, que le requérant a rencontré des difficultés particulières dans la gestion de ses classes et n'a pas fait montre de l'investissement et du sérieux attendus dans la préparation de ses cours. L'inspecteur pédagogique a également relevé que l'intéressé n'avait " pas pris la mesure de l'exigence de la mission qui lui a été confiée ". Parmi les savoir-faire évalués, seul un item a été jugé satisfaisant par le chef d'établissement et aucun par l'inspecteur pédagogique. En outre, il ressort des éléments recueillis en décembre 2021 par le nouveau chef d'établissement que l'enseignant auquel a il a été demandé d'apporter un soutien à M. A... a très tôt alerté ce dernier sur le caractère inadapté de ses cours aux élèves de collège et lui a proposé un accompagnement dont M. A... n'a pas entendu profiter, ce que corroborent les écritures de première instance du demandeur. Si le requérant se prévaut de l'évaluation menée par le chef de l'établissement au sein duquel il assuré un service d'enseignement en 2019 et faisant état d'une manière de servir très satisfaisante, ce seul élément, établi au regard d'un service hebdomadaire de huit heures seulement et accompli, en exécution d'un autre contrat de travail, auprès d'un public de lycéens, ne suffit pas à infirmer les appréciations portées en 2021 sur lesquelles le recteur de l'académie de Rennes s'est fondé. Enfin, ainsi que cela ressort du procès-verbal de la commission consultative paritaire qui s'est réunie le 7 juin 2021, si le renouvellement de contrat assorti d'un protocole d'accompagnement est privilégié au non renouvellement lorsque l'agent contractuel se heurte à des difficultés dues à son manque d'expérience, il est, en revanche, exclu lorsque l'agent refuse l'accompagnement ou ne parvient pas, en dépit du soutien proposé, à améliorer sa pratique professionnelle. Au regard de l'ensemble de ces circonstances, le recteur de l'académie de Rennes n'a pas, en refusant de renouveler le contrat de M. A..., commis d'erreur manifeste dans l'appréciation de l'insuffisance professionnelle de l'intéressé, ni, par suite, de l'intérêt du service.

11. Il résulte de tout ce qui précède que M. A... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Rennes a rejeté sa demande.

Sur le surplus des conclusions :

12. Doivent être rejetées par voie de conséquence les conclusions à fin d'injonction présentées par le requérant ainsi que celles tendant au bénéfice des dispositions des articles 37 de la loi du 10 juillet 1991 et L. 761-1 du code de justice administrative.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de M. A... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... A... et à la ministre de l'éducation nationale.

Délibéré après l'audience du 25 octobre 2024, à laquelle siégeaient :

- M. Gaspon, président de chambre,

- M. Pons, premier conseiller,

- Mme Bougrine, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 19 novembre 2024.

La rapporteure,

K. BOUGRINELe président,

O. GASPON

La greffière,

C. VILLEROT

La République mande et ordonne à la ministre de l'éducation nationale en ce qui la concerne, et à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

2

N° 23NT03571


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de NANTES
Formation : 6ème chambre
Numéro d'arrêt : 23NT03571
Date de la décision : 19/11/2024
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. GASPON
Rapporteur ?: Mme Karima BOUGRINE
Rapporteur public ?: Mme BAILLEUL
Avocat(s) : LARRE

Origine de la décision
Date de l'import : 24/11/2024
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel;arret;2024-11-19;23nt03571 ?
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