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12/07/2024 | FRANCE | N°23NT03211

France | France, Cour administrative d'appel de NANTES, 3ème chambre, 12 juillet 2024, 23NT03211


Vu les procédures suivantes :



Procédures contentieuses antérieures :



M. C... F... a demandé au tribunal administratif de Nantes d'annuler l'arrêté du

30 septembre 2022 par lequel le préfet de la Loire-Atlantique a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel il pourra être reconduit d'office à l'expiration de ce délai.



Par un jugement n° 2214730 du 19 octobre 2023, le tribunal administratif de Nantes

a rejeté la requête de M. F....



Mme A... H... a demandé au tribunal administratif de Nantes d'annuler...

Vu les procédures suivantes :

Procédures contentieuses antérieures :

M. C... F... a demandé au tribunal administratif de Nantes d'annuler l'arrêté du

30 septembre 2022 par lequel le préfet de la Loire-Atlantique a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel il pourra être reconduit d'office à l'expiration de ce délai.

Par un jugement n° 2214730 du 19 octobre 2023, le tribunal administratif de Nantes a rejeté la requête de M. F....

Mme A... H... a demandé au tribunal administratif de Nantes d'annuler l'arrêté du 30 septembre 2022 par lequel le préfet de la Loire-Atlantique a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligée à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel elle pourra être reconduite d'office à l'expiration de ce délai.

Par un jugement n° 2214733 du 19 octobre 2023, le tribunal administratif de Nantes a rejeté la requête de Mme H....

Procédures devant la cour :

I. Par une requête enregistrée le 7 novembre 2023, M. C... F..., représenté par

Me Philippon, demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 2214730 rendu le 19 octobre 2023 par le tribunal administratif de Nantes ;

2°) d'annuler l'arrêté du 30 septembre 2022 par lequel le préfet de la Loire-Atlantique a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel il pourra être reconduit d'office à l'expiration de ce délai ;

3°) d'enjoindre au préfet de la Loire-Atlantique, à titre principal, de lui délivrer une autorisation de séjour dans un délai de cinq jours à compter de la notification du présent jugement, sous astreinte de 25 euros par jour de retard, à titre subsidiaire, de réexaminer sa situation dans les mêmes conditions de délai et d'astreinte, enfin, de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour l'autorisant à travailler ;

4°) de mettre à la charge de l'État une somme de 3 000 euros à verser à son conseil en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.

Il soutient que :

En ce qui concerne la régularité du jugement :

- la minute du jugement attaqué n'est pas signée ;

- le jugement est entaché d'une omission à statuer sur une branche d'un moyen qui n'était pas inopérante ;

En ce qui concerne la décision portant refus de titre de séjour :

- elle est entachée de vices de procédure résultant de la méconnaissance des articles

R. 425- 11, R. 425-12 et R. 425-13 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- elle est entachée d'un défaut d'examen, eu égard au temps écoulé entre l'établissement du rapport médical confidentiel et l'avis du collège de médecins de l'OFII ;

- elle est entachée d'une erreur de fait et d'une méconnaissance des dispositions de l'article L. 425-9 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

En ce qui concerne l'obligation de quitter le territoire français :

- elle est entachée d'un défaut de base légale compte tenu de l'illégalité de la décision portant refus de titre de séjour ;

- elle méconnaît les stipulations de l'article 3.1 de la convention internationale des droits de l'enfant.

Par un mémoire en défense enregistré le 22 décembre 2023, le préfet de la Loire-Atlantique conclut au rejet de la requête de M. F....

Il fait valoir que les moyens invoqués par ce requérant ne sont pas fondés.

II. Par une requête enregistrée le 7 novembre 2023, Mme A... H..., représentée par Me Philippon, demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 2214733 rendu le 19 octobre 2023 par le tribunal administratif de Nantes ;

2°) d'annuler l'arrêté du 30 septembre 2022 par lequel le préfet de la Loire-Atlantique a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligée à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel elle pourra être reconduite d'office à l'expiration de ce délai ;

3°) d'enjoindre au préfet de la Loire-Atlantique, à titre principal, de lui délivrer une autorisation de séjour dans un délai de cinq jours à compter de la notification du présent jugement, sous astreinte de 25 euros par jour de retard, à titre subsidiaire, de réexaminer sa situation dans les mêmes conditions de délai et d'astreinte, enfin, de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour l'autorisant à travailler ;

4°) de mettre à la charge de l'État une somme de 3 000 euros à verser à son conseil en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.

Elle soutient que :

En ce qui concerne la régularité du jugement :

- la minute du jugement attaqué n'est pas signée ;

- le jugement est entaché d'une omission à statuer sur une branche d'un moyen qui n'était pas inopérante ;

En ce qui concerne la décision portant refus de titre de séjour :

- elle est entachée de vices de procédure résultant de la méconnaissance des articles

R. 425- 11, R. 425-12 et R. 425-13 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- elle est entachée d'un défaut d'examen, eu égard au temps écoulé entre l'établissement du rapport médical confidentiel et l'avis du collège de médecins de l'OFII ;

- elle est entachée d'une erreur de fait et d'une méconnaissance des dispositions de l'article L. 425-9 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

En ce qui concerne l'obligation de quitter le territoire français :

- elle est entachée d'un défaut de base légale compte tenu de l'illégalité de la décision portant refus de titre de séjour ;

- elle méconnaît les stipulations de l'article 3.1 de la convention internationale des droits de l'enfant.

Par un mémoire en défense enregistré le 22 décembre 2023, le préfet de la Loire-Atlantique conclut au rejet de la requête de Mme H....

Il fait valoir que les moyens invoqués par cette requérante ne sont pas fondés.

En réponse à une mesure d'instruction de la cour, le directeur général de l'Office français de l'immigration et de l'intégration (OFII) a produit le 30 avril 2024 une attestation de compétence concernant le médecin du médecin de l'OFII auteur du rapport médical transmis au collège des médecins de l'Office pour l'appréciation de la situation de M. F....

M. F... et Mme H... ont été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par deux décisions du 8 février 2024.

Vu les autres pièces des dossiers.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- la convention internationale relative aux droits de l'enfant, signée à New-York le 26 janvier 1990 ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 modifiée ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

La présidente de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Vergne,

- et les observations de Me Philippon, représentant M. F... et Mme H....

Considérant ce qui suit :

1. M. C... F..., ressortissant géorgien né en 1988, et son épouse, Mme A... H..., née en 1987, également géorgienne, déclarent être entrés en France le 3 mai 2021, accompagnés de leurs deux enfants jumeaux, nés en 2017. Ils ont déposé chacun une demande d'asile, qui a été rejetée par l'Office de protection des réfugiés et apatrides (OFPRA) le 31 août 2021 puis par la Cour nationale du droit d'asile (CNDA) le 30 décembre 2021. Ils ont aussi sollicité la délivrance de titres de séjour en qualité de parents d'un enfant malade, en se prévalant de l'état de santé de leur fils mineur, B... F..., né le 20 juillet 2017. Par deux arrêtés du 30 septembre 2022, le préfet de la Loire-Atlantique a refusé de leur délivrer un titre de séjour, les a obligés à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel ils pourront être reconduits d'office à l'expiration de ce délai, s'ils ne se conforment pas eux-mêmes à leur obligation de départ. Par deux requêtes enregistrées sous le n° 22NT03211 et le n°23NT03212, qu'il y a lieu de joindre pour y statuer par un seul arrêt, ils relèvent appel des jugements du 19 octobre 2023 par lesquels le tribunal a rejeté leurs demandes d'annulation de ces décisions administratives.

Sur la régularité des jugements attaqués :

2. En premier lieu, aux termes de l'article R. 741-7 du code de justice administrative : " Dans les tribunaux administratifs et les cours administratives d'appel, la minute de la décision est signée par le président de la formation de jugement, le rapporteur et le greffier d'audience ".

3. Il ressort des jugements attaqués qu'ils comportent l'ensemble des signatures prévues par les dispositions de l'article R. 741-7 du code de justice administrative, aucune disposition n'imposant, par ailleurs, que l'expédition notifiée aux parties comporte ces signatures. Le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions de cet article, et, par suite, de l'irrégularité des jugements attaqués doit donc être écarté.

4. En second lieu, contrairement à ce que soutiennent les requérants, dont le moyen d'irrégularité des jugements attaqués manque ainsi en fait, le tribunal administratif de Nantes a bien répondu à leur argumentation selon laquelle Mme D..., directrice des migrations et de l'intégration à la préfecture de la Loire-Atlantique, bénéficiait d'une délégation de signature du préfet de ce département en date du 5 septembre 2022, régulièrement publiée au recueil des actes administratifs du même jour, à l'effet de signer notamment les décisions portant refus de titre de séjour, obligation de quitter le territoire et fixant le pays de destination.

Sur le bien-fondé du jugement attaqué :

En ce qui concerne la décision portant refus de titre de séjour :

5. En premier lieu, aux termes de l'article L. 425-9 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'étranger, résidant habituellement en France, dont l'état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait avoir pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité et qui, eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé dans le pays dont il est originaire, ne pourrait pas y bénéficier effectivement d'un traitement approprié, se voit délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " d'une durée d'un an. La condition prévue à l'article L. 412-1 n'est pas opposable. La décision de délivrer cette carte de séjour est prise par l'autorité administrative après avis d'un collège de médecins du service médical de l'Office français de l'immigration et de l'intégration, dans des conditions définies par décret en Conseil d'Etat. (...) ". Aux termes de l'article L. 425-10 du même code : " Les parents étrangers de l'étranger mineur qui remplit les conditions prévues à l'article L. 425-9, ou l'étranger titulaire d'un jugement lui ayant conféré l'exercice de l'autorité parentale sur ce mineur, se voient délivrer, sous réserve qu'ils justifient résider habituellement en France avec lui et subvenir à son entretien et à son éducation, une autorisation provisoire de séjour d'une durée maximale de six mois. La condition prévue à l'article L. 412-1 n'est pas opposable. (...) / Elle est délivrée par l'autorité administrative, après avis d'un collège de médecins du service médical de l'Office français de l'immigration et de l'intégration, dans les conditions prévues à l'article L. 425-9. ".

6. Aux termes de l'article R. 425-11 de ce code : " Pour l'application de l'article

L. 425-9, le préfet délivre la carte de séjour au vu d'un avis émis par un collège de médecins à compétence nationale de l'Office français de l'immigration et de l'intégration. L'avis est émis (...) au vu, d'une part, d'un rapport médical établi par un médecin de l'Office français de l'immigration et de l'intégration et, d'autre part, des informations disponibles sur les possibilités de bénéficier effectivement d'un traitement approprié dans le pays d'origine de l'intéressé. (...) ". Aux termes de l'article R. 425-12 du même code : " Le rapport médical mentionné à l'article R. 425-11 est établi par un médecin de l'Office français de l'immigration et de l'intégration à partir d'un certificat médical établi par le médecin qui suit habituellement le demandeur ou par un médecin praticien hospitalier inscrits au tableau de l'ordre, dans les conditions prévues par l'arrêté mentionné au deuxième alinéa du même article. Le médecin de l'office peut solliciter, le cas échéant, le médecin qui suit habituellement le demandeur ou le médecin praticien hospitalier. Il en informe le demandeur. (...) ". Aux termes de l'article R. 425-13 de ce code : " (...) Le collège à compétence nationale mentionné à l'article R. 425-12 est composé de trois médecins, il émet un avis dans les conditions de l'arrêté mentionné au premier alinéa du même article. La composition du collège et, le cas échéant, de ses formations est fixée par décision du directeur général de l'Office français de l'immigration et de l'intégration. Le médecin ayant établi le rapport médical ne siège pas au sein du collège. / (...) / L'avis est rendu par le collège dans un délai de trois mois à compter de la transmission du certificat médical. / (...) ". Aux termes de l'article 6 de l'arrêté du 27 décembre 2016 pris pour l'application des dispositions précitées : " Au vu du rapport médical mentionné à l'article 3, un collège de médecins désigné pour chaque dossier dans les conditions prévues à l'article 5 émet un avis, conformément au modèle figurant à l'annexe C du présent arrêté, précisant: / a) si l'état de santé de l'étranger nécessite ou non une prise en charge médicale ; / b) si le défaut de cette prise en charge peut ou non entraîner des conséquences d'une exceptionnelle gravité sur son état de santé ; / c) si, eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé dans le pays dont le ressortissant étranger est originaire, il pourrait ou non y bénéficier effectivement d'un traitement approprié ; / d) la durée prévisible du traitement. / Dans le cas où le ressortissant étranger pourrait bénéficier effectivement d'un traitement approprié, eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé dans le pays dont il est originaire, le collège indique, au vu des éléments du dossier du demandeur, si l'état de santé de ce dernier lui permet de voyager sans risque vers ce pays. / Cet avis mentionne les éléments de procédure. / Le collège peut délibérer au moyen d'une conférence téléphonique ou audiovisuelle. L'avis émis à l'issue de la délibération est signé par chacun des trois médecins membres du collège ".

7. Le préfet de la Loire-Atlantique produit l'avis émis par le collège des médecins de l'OFII relatif à l'état de santé du fils des requérants, établi selon le modèle figurant à l'annexe C de l'arrêté du 27 décembre 2016, ainsi que le bordereau de transmission signé pour le directeur général de l'OFII.

8. D'une part, il ressort de ces éléments que l'avis du collège de trois médecins du service médical de l'OFII a été rendu le 11 mai 2022 par les trois praticiens, docteurs en médecine et régulièrement désignés, que mentionne cet avis, et sur le rapport d'un autre médecin, établi le 4 avril 2022 et transmis au collège de médecins le 15 avril 2022, soit en temps utile afin de permettre à celui-ci de se prononcer sur la situation de l'intéressé. Alors qu'il ne ressort d'aucune disposition législative ou réglementaire que le médecin chargé du rapport médical visé à l'article R. 313-22 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ne serait compétent à cet effet qu'à la condition de figurer sur la liste des médecins désignés par décision du directeur de l'OFII pour participer au collège à compétence nationale de l'Office, les requérants ne sont pas fondés à soutenir que le rapport médical établi sur la situation de santé de leur fils B... aurait été rédigé par un médecin non habilité à cet effet au motif que son nom ne figure pas sur cette liste, une telle liste, régulièrement actualisée, ne concernant que les médecins désignés comme membres du collège des médecins de l'OFII et non l'ensemble des médecins de l'OFII ou auxquels l'OFII fait appel. La compétence des médecins auteurs de l'avis du 11 mai 2022 n'est pas non plus valablement contestée alors qu'ils figurent sur la liste arrêtée par le directeur de l'OFII et qui était en vigueur à la date à laquelle cet avis a été rendu. Enfin, en réponse à une mesure d'instruction de la cour, le directeur général de l'OFII a produit le

30 avril 2024 une attestation de compétence concernant le docteur E... G... en tant que médecin de l'OFII auteur du rapport médical transmis au collège des médecins de l'Office pour l'appréciation de la situation du jeune B... F... et il ressort des pièces du dossier que ce médecin n'était pas au nombre des trois médecins formant ce collège. Il ressort également de l'avis du collège de médecins qu'il comporte tous les éléments de motivation prévus par les dispositions précitées et nécessaires à l'édiction de la décision attaquée. Ainsi, et alors qu'aucune disposition législative ou réglementaire n'impose au préfet de communiquer à l'étranger l'avis du collège de médecins émis dans le cadre de l'instruction d'une demande de titre de séjour, le moyen tiré du vice de procédure doit être écarté.

9. D'autre part, si les dispositions précitées de l'article R. 425-13 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile prévoient que l'avis du collège de médecins est rendu dans un délai de trois mois à compter de la transmission par le demandeur des éléments médicaux le concernant, le respect de ce délai n'est pas prescrit à peine d'irrégularité de la procédure. En tout état de cause, il ne ressort pas des pièces du dossier que, comme il est soutenu, le certificat médical confidentiel concernant B... F... requis dans le cadre de l'instruction de la demande de titre de séjour de ses parents et destiné au médecin rapporteur de l'OFII aurait été transmis à celui-ci dès le 11 mai 2021, ainsi qu'il est soutenu, le certificat portant cette date produit par les requérants ayant été établi dans le cadre d'une autre procédure administrative tendant à l'octroi d'un logement adapté au handicap et à la vulnérabilité de leur fils, demandé par M. F... et Mme H..., dont la demande d'asile était alors en cours d'examen. Le moyen tiré de ce que, en raison d'une durée excessive qui se serait écoulée entre la remise par les requérants des documents médicaux concernant B... F... et leur examen par l'OFII puis par le préfet, l'avis du premier et la décision du second seraient entachés d'un défaut d'examen particulier doit être écarté, les requérants ne faisant valoir au surplus aucune évolution de l'état de santé de leur enfant qui aurait rendu caduques les éléments sur lesquels le médecin rapporteur de l'OFII, puis le collège de médecins se sont fondés.

10. En deuxième lieu, s'il est saisi, à l'appui de conclusions tendant à l'annulation de la décision de refus, d'un moyen relatif à l'état de santé du demandeur, aux conséquences de l'interruption de sa prise en charge médicale ou à la possibilité pour lui d'en bénéficier effectivement dans le pays dont il est originaire, il appartient au juge administratif de prendre en considération l'avis médical rendu par le collège des médecins de l'OFII. Si le demandeur entend contester le sens de cet avis, il lui appartient, à lui seul, de lever le secret relatif aux informations médicales qui le concernent, afin de permettre au juge de se prononcer en prenant en considération l'ensemble des éléments pertinents, notamment, l'entier dossier du rapport médical au vu duquel s'est prononcé le collège des médecins de l'OFII, dont il peut demander la communication s'il estime utile cette mesure d'instruction au regard des éléments versés par le demandeur au débat contradictoire.

11. Pour refuser la délivrance du titre de séjour sollicité par Mme H... en raison de l'état de santé de son fils, B... F..., le préfet de la Loire-Atlantique s'est notamment fondé sur l'avis du collège de médecins de l'OFII du 11 mai 2022, lequel conclut que, si l'état de santé de l'enfant des requérants nécessite une prise en charge médicale dont le défaut peut entraîner des conséquences d'une exceptionnelle gravité, il peut, eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé dans le pays dont il est originaire, y bénéficier effectivement d'un traitement approprié. Il a aussi précisé que l'intéressé pouvait voyager sans risque à destination de son pays d'origine.

12. Il ressort des pièces du dossier que B... F..., fils des requérants, souffre d'un diabète de type I, de la maladie cœliaque et d'une lipodysthrophie des deux cuisses et du bras gauche, nécessitant en particulier un traitement quotidien par insuline, une surveillance pluriquotidienne de la glycémie, un régime sans gluten ainsi qu'un suivi médical régulier. Pour contester l'avis du collège de médecins de l'OFII, M. F... et Mme H... produisent plusieurs certificats médicaux qui indiquent que B... F... suit un traitement composé de Tresiba et de Novorapid, qu'il doit toujours avoir sur lui son traitement et le système de surveillance que sa maladie impose, que tout arrêt de traitement, même court, peut engendrer un risque vital pour sa santé et qu'en cas d'aggravation, il doit avoir accès à des soins médicaux le plus rapidement possible. Par ailleurs, les requérants produisent des extraits du site internet de l'Organisation Mondiale de la Santé qui indiquent que la Géorgie ne dispose d'aucune politique de lutte contre les différents diabètes et d'aucune politique de promotion de l'activité physique comme moyen de prévention et de traitement du diabète, ainsi que d'un rapport de juin 2020 de l'Organisation suisse d'aide aux réfugiés qui mentionnent que les médicaments pour lutter contre le diabète de type I ne sont pas subventionnés. Toutefois, ces éléments ne permettent pas de justifier que, contrairement à ce qu'a estimé le collège des médecins de l'OFII, leur enfant ne pourrait pas bénéficier d'un traitement approprié à la prise en charge de son état de santé dans son pays d'origine et qu'il ne serait pas en mesure de voyager. Par ailleurs, le préfet de la Loire-Atlantique produit en défense une fiche pays et des rapports de l'Organisation Internationale pour les Migrations établissant que le diabète est pris en charge en Géorgie, ainsi que la liste des médicaments disponibles dans ce pays indiquant que le Tresiba et le Novorapid y sont disponibles. Et si M. F... et Mme H... allèguent qu'ils ne perçoivent ensemble qu'environ 800 lari par mois, ils n'établissent pas par ce seul argument l'inaccessibilité dans leur pays d'origine des traitements et de la prise en charge de l'état de santé de leur fils. Dans ces conditions, et sans qu'il soit besoin de demander à l'OFII la communication du dossier médical de B... F..., les moyens tirés par les requérants de l'erreur de fait, de la méconnaissance des dispositions précitées de l'article L. 425-10 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, ainsi que de l'erreur d'appréciation de la disponibilité d'une prise en charge médicale en Géorgie doivent être écartés.

Sur les décisions portant obligation de quitter le territoire français et fixant le pays de destination :

13. Les décisions portant refus de titre de séjour prises à l'encontre des requérants n'étant pas annulées, les moyens tirés de ce que les décisions leur faisant obligation de quitter le territoire français et fixant le pays à destination duquel ils pourront être éloignés doivent être annulées par voie de conséquence ne peuvent qu'être rejetés.

14. Il résulte de ce qui précède que M. F... et Mme H... ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nantes a rejeté leurs conclusions tendant à l'annulation des arrêtés du 30 septembre 2022 par lesquels le préfet de la Loire-Atlantique a refusé de leur délivrer un titre de séjour, leur a fait obligation de quitter le territoire français et a fixé le pays de destination de ces mesures d'éloignement. Leurs conclusions à fin d'annulation doivent donc être rejetées ainsi que, par voie de conséquence, celles aux fins d'injonction et celles présentées au titre des frais liés au litige.

DECIDE

Article 1er : Les requêtes n°23NT03211 et 213NT03212 présentées par M. F... et

Mme H... sont rejetées.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. C... F..., à Mme A... H... et au ministre de l'intérieur et des outre-mer.

Une copie en sera adressée pour information au préfet de la Loire-Atlantique.

Délibéré après l'audience du 4 juillet 2024, à laquelle siégeaient :

- Mme Brisson, présidente,

- M. Vergne, président-assesseur,

- Mme Lellouch, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 12 juillet 2024.

Le rapporteur,

G.-V. VERGNE

La présidente,

C. BRISSON

Le greffier,

R. MAGEAU

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des outre-mer, en ce qui le concerne, et à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

2

Nos 23NT03211, 23NT03212


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de NANTES
Formation : 3ème chambre
Numéro d'arrêt : 23NT03211
Date de la décision : 12/07/2024
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : Mme BRISSON
Rapporteur ?: M. Georges-Vincent VERGNE
Rapporteur public ?: M. BERTHON
Avocat(s) : PHILIPPON

Origine de la décision
Date de l'import : 21/07/2024
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel;arret;2024-07-12;23nt03211 ?
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