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02/07/2024 | FRANCE | N°23NT00761

France | France, Cour administrative d'appel de NANTES, 6ème chambre, 02 juillet 2024, 23NT00761


Vu la procédure suivante :



Procédure contentieuse antérieure :



M. B... A... a demandé au tribunal administratif de Rennes d'annuler le titre exécutoire émis le 11 juin 2019 par le directeur départemental des finances publiques du Finistère pour le recouvrement de la somme de 22 682,67 euros relative au remboursement de frais de scolarité de l'École spéciale militaire de Saint-Cyr, ou, à titre subsidiaire, de réévaluer ce montant.



Par un jugement n°2002645 du 18 janvier 2023, le tribunal administratif de Rennes a an

nulé le titre exécutoire émis le 11 juin 2019 et a accordé à M. A... la décharge de l'obligation d...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B... A... a demandé au tribunal administratif de Rennes d'annuler le titre exécutoire émis le 11 juin 2019 par le directeur départemental des finances publiques du Finistère pour le recouvrement de la somme de 22 682,67 euros relative au remboursement de frais de scolarité de l'École spéciale militaire de Saint-Cyr, ou, à titre subsidiaire, de réévaluer ce montant.

Par un jugement n°2002645 du 18 janvier 2023, le tribunal administratif de Rennes a annulé le titre exécutoire émis le 11 juin 2019 et a accordé à M. A... la décharge de l'obligation de payer cette somme.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 20 mars 2023, le ministre des armées, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du 18 janvier 2023 ;

2°) de rejeter la demande présentée par M. A... devant le tribunal administratif.

Il soutient que :

- c'est à tort que les premiers juges ont estimé que le titre exécutoire émis le 11 juin 2019 était illégal au motif que nommé à compter du 1er septembre 2017 en qualité de professeur certifié stagiaire puis titularisé l'année suivante. M. A... occupait ainsi, depuis le 1er septembre 2017, un emploi permanent dans la fonction publique au sens de dispositions de l'article 18 du décret du 12 septembre 2008 fixant certaines dispositions applicables aux élèves militaires des écoles militaires d'élèves officiers de carrière ;

- les dispositions de l'article 18 doivent être lues comme ayant vocation à ne s'appliquer que dans le cas où l'officier de carrière est radié des cadres pour concomitamment occuper un emploi permanent dans la fonction publique de l'Etat, ce qui n'a pas été le cas de M. A....

La requête a été communiquée le 13 avril 2023 à M. A..., qui n'a pas produit de mémoire en défense.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Coiffet,

- et les conclusions de Mme Bougrine, rapporteure publique.

Considérant ce qui suit :

1. À la suite de son admission le 15 juillet 2014 en qualité d'élève officier à l'école spéciale militaire de Saint-Cyr, M. A... a souscrit un contrat d'engagement d'une durée d'un an avec le grade de soldat. Le 27 février 2015, il a souscrit un nouveau contrat pour servir pour la durée de sa scolarité à l'école spéciale militaire de Saint-Cyr avec le grade de sous-lieutenant à compter du 1er août 2014. Après avoir demandé, le 1er août 2015, son admission à l'état d'officier de carrière à l'issue de sa scolarité et s'être engagé à servir dans cette carrière pendant six ans, M. A... a sollicité la résiliation de son contrat d'engagement et a, par un arrêté du 17 décembre 2015, été radié des cadres de l'armée de terre à compter du 8 janvier 2016. Le 2 mai 2019, le centre expert des ressources humaines et de la solde de l'armée de terre a informé M. A... qu'il était redevable de la somme de 22 682,67 euros au titre du remboursement de ses frais de scolarité de l'École militaire de Saint-Cyr. Le 11 juin 2019, un titre de perception correspondant au remboursement de ses frais de scolarité a été émis et réexpédié le 26 juillet 2019. Les recours administratifs exercés contre ce titre ont été rejetés.

2. M. A... a, le 3 juillet 2020, saisi le tribunal administratif de Rennes d'une demande regardée comme tendant à la décharge de l'obligation de payer la somme mise à sa charge par le titre de perception émis à son encontre le 11 juin 2019. Par un jugement du 18 janvier 2023, cette juridiction a annulé le titre exécutoire émis le 11 juin 2019 par le directeur général des finances publiques du Finistère et a accordé à M. A... la décharge de l'obligation de payer cette somme. Le ministre des armées relève appel de ce jugement.

Sur le bien-fondé du titre de perception du 11 juin 2019 :

3. Aux termes de l'article 5 du décret du 12 septembre 2008 fixant certaines dispositions applicables aux élèves militaires des écoles militaires d'élèves officiers de carrière : " Lors de leur admission en école, les élèves officiers de carrière présentent une demande en vue d'être admis à l'état d'officier de carrière à l'issue de leurs études et s'engagent à servir en cette qualité pour une période, fixée par arrêté du ministre de la défense (...), comprise entre six et huit ans. / Au cours de cette période, la démission des intéressés ne peut être acceptée que pour des motifs exceptionnels (...) ". Aux termes de son article 16 : " I. Sont tenus à remboursement : (...) / 2° Dans les conditions fixées à l'article 18, les officiers de carrière (...) ". Aux termes de l'article 18 du même décret : " Les officiers de carrière ne satisfaisant pas à l'engagement prévu à l'article 5 sont tenus au remboursement des frais de formation. / L'action en remboursement des frais de formation est différée pour les officiers de carrière qui occupent un emploi permanent dans la fonction publique. La dispense de remboursement des sommes restant dues est définitivement acquise lorsque les intéressés justifient avoir accompli de façon continue dans un tel emploi des services de la durée nécessaire pour parfaire celle de l'engagement souscrit (...) ".

4. Le ministre des armées soutient que l'article 18 précité du décret du 12 septembre 2008, régissant la situation de M. A..., qui prévoit que l'action en remboursement des frais de scolarité puisse être différée ne peut cependant trouver à s'appliquer, s'agissant de cette modalité, que dans l'hypothèse d'une continuité entre la fin de l'état militaire de l'intéressé et l'entrée en service dans la fonction publique civile, ce qui n'est pas le cas de M. A.... Il ajoute, en particulier, que les dispositions de cet article devraient être lues comme ayant vocation à ne s'appliquer que dans le cas où l'officier de carrière est radié des cadres pour concomitamment occuper un emploi permanent dans la fonction publique de l'Etat. Toutefois, cette interprétation, qui ajoute au texte qu'elle est susceptible de contredire, alors que l'article 18 du décret du 12 septembre 2008 prévoit clairement dans le temps, d'abord, une dispense provisoire de remboursement des frais de scolarité pour les officiers de carrière qui occupent un emploi permanent dans la fonction publique, puis le cas où cette dispense est susceptible de revêtir un caractère définitif, ne saurait être retenue.

5. Au cas d'espèce, il ressort des pièces du dossier qu'après avoir demandé, le 1er août 2015, son admission à l'état d'officier de carrière à l'issue de sa scolarité à l'école spéciale militaire de Saint-Cyr et s'être engagé à servir dans cette carrière pendant six ans, M. A... a sollicité sa démission et a été radié des cadres de l'armée de terre le 8 janvier 2016. Il résulte de l'instruction qu'à cette date, il avait passé cinq mois et sept jours au service de l'État en qualité d'officier de carrière. Il a ensuite été lauréat du certificat d'aptitude au professorat de l'enseignement du second degré en lettres modernes et a été nommé, à compter du 1er septembre 2017, en qualité de professeur certifié stagiaire puis titularisé l'année suivante. Il ressort ainsi des pièces du dossier que M. A... occupe ainsi, depuis le 1er septembre 2017, un emploi permanent dans la fonction publique au sens des dispositions de l'article 18 du décret du 12 septembre 2008 fixant certaines dispositions applicables aux élèves militaires des écoles militaires d'élèves officiers de carrière. Par suite, c'est par une exacte application de ces dispositions que les premiers juges ont estimé que M. A... occupait un emploi permanent dans la fonction publique à la date d'émission du titre de perception litigieux, et qu'il était, pour ce motif, fondé à soutenir que l'action en remboursement de ses frais de formation devait être différée.

6. Il résulte de l'ensemble de ce qui précède que le ministre des armées n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Rennes a annulé le titre exécutoire émis le 11 juin 2019 par le directeur général des finances publiques du Finistère et a accordé à M. A... la décharge de l'obligation de payer la somme de 22 682,67 euros relatif au remboursement de frais de scolarité.

7. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, de mettre à la charge de l'Etat le versement à M. A... d'une somme de 1 500 euros au titre des frais exposés et non compris dans les dépens.

DECIDE :

Article 1er : La requête du ministre des armées est rejetée.

Article 2 : L'Etat versera à M. A... la somme de 1500 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié au ministre des armées et à M. B... A....

Une copie pour information en sera adressée au directeur départemental des finances publiques du Finistère.

Délibéré après l'audience du 14 juin 2024, à laquelle siégeaient :

- M. Gaspon, président,

- M. Coiffet, président-assesseur,

- Mme Gélard, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 2 juillet 2024.

Le rapporteur,

O. COIFFETLe président,

O. GASPON

La greffière,

I. PETTON

La République mande et ordonne à la ministre de l'éducation et de la jeunesse en ce qui la concerne, et à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

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Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de NANTES
Formation : 6ème chambre
Numéro d'arrêt : 23NT00761
Date de la décision : 02/07/2024
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : M. GASPON
Rapporteur ?: M. Olivier COIFFET
Rapporteur public ?: Mme BOUGRINE

Origine de la décision
Date de l'import : 07/07/2024
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel;arret;2024-07-02;23nt00761 ?
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