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07/06/2024 | FRANCE | N°24NT00260

France | France, Cour administrative d'appel de NANTES, 3ème chambre, 07 juin 2024, 24NT00260


Vu la procédure suivante :



Procédure contentieuse antérieure :



Mme C... a demandé au tribunal administratif de Rennes d'annuler la décision du 20 octobre 2022 par laquelle le préfet du Finistère lui a refusé la délivrance d'un titre de séjour en qualité de parent d'enfant français.



Par un jugement n° 2205600 du 24 janvier 2024, le tribunal administratif de Rennes a rejeté sa demande.



Procédure devant la cour :



Par une requête, enregistrée le 1er février 2024, Mme B..

. C..., représentée par Me Buors, demande à la cour :



1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Rennes...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme C... a demandé au tribunal administratif de Rennes d'annuler la décision du 20 octobre 2022 par laquelle le préfet du Finistère lui a refusé la délivrance d'un titre de séjour en qualité de parent d'enfant français.

Par un jugement n° 2205600 du 24 janvier 2024, le tribunal administratif de Rennes a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 1er février 2024, Mme B... C..., représentée par Me Buors, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Rennes du 24 janvier 2024 ;

2°) d'annuler la décision du 20 octobre 2022 portant refus de titre de séjour ;

3°) d'enjoindre au préfet du Finistère de réexaminer sa demande et de la munir d'une autorisation provisoire de séjour dans un délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 500 euros par jour de retard ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 2 000 euros à verser à son conseil au titre des article L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991.

Elle soutient que :

- le jugement attaqué est insuffisamment motivé en méconnaissance de l'article L. 9 du code de justice administrative, s'agissant de la réponse apportée aux moyens tirés de l'insuffisante motivation de la décision litigieuse, de la méconnaissance des dispositions des articles L. 423-7 et L. 423-8 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- la décision de refus de séjour litigieuse est insuffisamment motivée ;

- elle est entachée d'un défaut d'examen particulier de sa situation ;

- elle méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- elle méconnaît les dispositions des articles L. 423-7 et L. 423-8 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- elle méconnaît les stipulations de l'article 3.1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant.

Par un mémoire en défense, enregistré le 18 avril 2024, le préfet du Finistère conclut au rejet de la requête.

Il soutient que les moyens invoqués par Mme C... ne sont pas fondés.

Mme C... a été admise au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 2 avril 2024.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- la convention internationale relative aux droits de l'enfant ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de justice administrative.

La présidente de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de Mme Lellouch a été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. Mme B... C..., ressortissante comorienne née en 1987, est entrée en France le 3 octobre 2020, accompagnée de ses deux filles sans avoir obtenu l'autorisation spéciale sous forme de visa prévue par l'article L. 441-8 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile alors que le titre de séjour dont elle bénéficiait ne l'autorisait à séjourner que sur le territoire de Mayotte. Elle a sollicité le 21 juillet 2022, auprès des services de la préfecture du Finistère, la délivrance d'un titre de séjour en qualité de parent d'enfant français sur le fondement des articles L. 423-7 et L. 423-8 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Par décision du 20 octobre 2022, le préfet du Finistère a refusé de faire droit à sa demande. Mme C... relève appel du jugement du 23 janvier 2024 par lequel le tribunal administratif de Rennes a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cette décision.

Sur la régularité du jugement attaqué :

2. Il ressort des motifs du jugement attaqué que les premiers juges ont suffisamment motivé la réponse qu'ils ont apportée aux moyens de légalité invoqués devant eux, notamment ceux tirés de l'insuffisante motivation, de l'inexacte application des articles L. 423-7 et

L. 423-8 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et de la méconnaissance de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales. Le moyen tiré de l'insuffisante motivation du jugement attaqué doit dès lors être écarté.

Sur le bien-fondé du jugement attaqué ;

3. La décision litigieuse vise les articles L. 423-7 et L. 423-8 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, et indique que dans la mesure où le père de sa fille A... de nationalité française a reconnu l'enfant par déclaration anticipée en mairie, c'est l'article L. 423-8 qui s'applique à sa situation, lequel impose que l'auteur de la reconnaissance de paternité établisse une contribution effective à l'éducation et à l'entretien de son enfant. Le préfet du Finistère indique que Mme C... ne justifie que d'une contribution financière du père à l'entretien de sa fille sans apporter aucun élément sur les liens existants entre l'enfant et son père, et donc sur la contribution de ce dernier à l'éducation de l'enfant. Il précise enfin les éléments déterminants relatifs à la situation personnelle et familiale de Mme C... et de ses enfants qui l'ont conduit à estimer que ni le respect de sa vie privée et familiale et ni l'intérêt supérieur de ses enfants ne permettait de lui accorder un droit au séjour en France. Le refus de séjour en litige comporte ainsi les considérations de droit et de fait qui en constituent le fondement. Le moyen tiré de son insuffisante motivation doit dès lors être écarté.

4. Il ressort des motifs de la décision en litige que le préfet du Finistère a procédé à un examen particulier de la situation personnelle de Mme C....

5. Aux termes de l'article L. 423-7 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'étranger qui est père ou mère d'un enfant français mineur résidant en France et qui établit contribuer effectivement à l'entretien et à l'éducation de l'enfant dans les conditions prévues par l'article 371-2 du code civil, depuis la naissance de celui-ci ou depuis au moins deux ans, se voit délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " d'une durée d'un an, sans que soit opposable la condition prévue à l'article L. 412-1. ". L'article L. 423-8 du même code dispose que : " Pour la délivrance de la carte de séjour prévue à l'article L. 423-7, lorsque la filiation est établie à l'égard d'un parent en application de l'article 316 du code civil, le demandeur, s'il n'est pas l'auteur de la reconnaissance de paternité ou de maternité, doit justifier que celui-ci contribue effectivement à l'entretien et à l'éducation de l'enfant, dans les conditions prévues à l'article 371-2 du code civil, ou produire une décision de justice relative à la contribution à l'éducation et à l'entretien de l'enfant. / Lorsque le lien de filiation est établi mais que la preuve de la contribution n'est pas rapportée ou qu'aucune décision de justice n'est intervenue, le droit au séjour du demandeur s'apprécie au regard du respect de sa vie privée et familiale et au regard de l'intérêt supérieur de l'enfant ".

6. L'article 316 du code civil dispose que : " Lorsque la filiation n'est pas établie dans les conditions prévues à la section I du présent chapitre, elle peut l'être par une reconnaissance de paternité ou de maternité, faite avant ou après la naissance. / La reconnaissance n'établit la filiation qu'à l'égard de son auteur. / Elle est faite dans l'acte de naissance, par acte reçu par l'officier de l'état civil ou par tout autre acte authentique. / (...) ". Aux termes de l'article

371-2 du code civil : " Chacun des parents contribue à l'entretien et à l'éducation des enfants à proportion de ses ressources, de celles de l'autre parent, ainsi que des besoins de

l'enfant. : (...) ".

7. D'une part, il ressort des pièces du dossier que Mme C... a une fille prénommée A... de nationalité française, née en 2016 à Mayotte, reconnue de manière anticipée par son père de nationalité française auprès de la mairie de Pierre-Bénite (Rhône), en application de l'article 316 du code civil. La contribution effective à l'entretien et à l'éducation prévue à l'article L. 423-8 le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile s'apprécie sans condition de durée, mais à la date de la décision attaquée et, en l'absence d'une décision de justice relative à cette contribution, au regard du comportement du parent concerné durant les mois ayant précédé cette décision. Ainsi que l'ont indiqué les premiers juges, si Mme C... fait valoir que le père de l'enfant A... lui adresse des virements de 50 euros par mois pour l'entretien de leur fille, Mme C..., en France métropolitaine depuis octobre 2020, ne justifie avoir perçu du père de sa fille qu'une somme de 160 euros en 2021 et de 350 euros en 2022 sans apporter d'élément sur les ressources dont dispose le père de l'enfant A.... Les transferts d'argent les plus réguliers dont elle justifie avoir bénéficié de ce dernier sont antérieurs à son arrivée en métropole et lui ont permis d'obtenir un titre de séjour en qualité de parent d'enfant Français sur le territoire de Mayotte. En outre, Mme C... n'apporte pas d'éléments pour établir les liens noués par le père avec leur fille de nationalité française à la date de la décision litigieuse. L'attestation du père, établie quelques jours après le refus de séjour, selon laquelle il rendait visite régulièrement à sa fille, sans aucun autre élément, étant à cet égard insuffisante. Les billets pour un voyage de Quimper à Marseille en décembre 2022, soit postérieurement à l'intervention de la décision litigieuse, ainsi que quelques photographies non datées prises le même jour, ne sont pas davantage de nature à justifier d'une contribution effective du père à l'éducation de sa fille.

8. D'autre part, alors que Mme C... est hébergée par le département du Finistère à Quimper depuis le 4 octobre 2022, la scolarisation des enfants en maternelle et au collège pour les années 2020-2021 et 2021-2022 et l'expérience dont Mme C... justifie en intérim en qualité d'ouvrière de conserverie en septembre et octobre 2020, à peine un mois avant la décision litigieuse sont insuffisants pour considérer que le respect de sa vie privée et familiale et l'intérêt supérieur de ses enfants devraient lui ouvrir un droit au séjour.

9. Il résulte des motifs exposés aux points 7 et 8 que Mme C... n'est pas fondée à soutenir que le préfet du Finistère a fait une inexacte application des articles L. 423-7 et L. 423-8 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile en lui refusant la délivrance d'un titre de séjour en qualité de parent d'enfant français. Pour les mêmes motifs, les moyens tirés de la méconnaissance des articles 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et 3.1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfants doivent être écartés.

10. Il résulte de tout ce qui précède que Mme C... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Rennes a rejeté sa demande. Ses conclusions à fin d'injonction ainsi que la demande présentée au titre des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 doivent être rejetées par voie de conséquence.

DECIDE :

Article 1er : La requête de Mme C... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme B... C... et au ministre de l'intérieur et des outre-mer.

Une copie en sera transmise, pour information, au préfet du Finistère

Délibéré après l'audience du 23 mai 2024, à laquelle siégeaient :

- Mme Brisson, présidente,

- M. Vergne, président-assesseur,

- Mme Lellouch, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 7 juin 2024.

La rapporteure,

J. LELLOUCH

La présidente,

C. BRISSON

Le greffier,

R. MAGEAU

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des outre-mer en ce qui le concerne, et à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

2

N° 24NT00260


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de NANTES
Formation : 3ème chambre
Numéro d'arrêt : 24NT00260
Date de la décision : 07/06/2024
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : Mme BRISSON
Rapporteur ?: Mme Judith LELLOUCH
Rapporteur public ?: M. BERTHON
Avocat(s) : FRANCK BUORS

Origine de la décision
Date de l'import : 16/06/2024
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel;arret;2024-06-07;24nt00260 ?
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