Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. A... B... a demandé au tribunal administratif de Rennes d'annuler l'arrêté du 28 décembre 2022 du préfet d'Ille-et-Vilaine portant refus de titre de séjour, obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et fixation du pays de destination.
Par un jugement n° 2301628 du 30 mai 2023, le tribunal administratif de Rennes a rejeté sa demande.
Procédure devant la cour :
Par une requête, enregistrée le 28 septembre 2023, M. B..., représenté par
Me Salin, demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du 30 mai 2023 du tribunal administratif de Rennes ;
2°) d'annuler l'arrêté du 28 décembre 2022 du préfet d'Ille-et-Vilaine ;
3°) d'enjoindre au préfet d'Ille-et-Vilaine de lui délivrer un titre de séjour dans un délai de trois jours à compter de la notification de l'arrêt à intervenir ou de réexaminer sa situation et de le munir, dans l'attente, d'une autorisation provisoire de séjour ;
4°) de mettre à la charge de l'État, au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, la somme de 1 500 euros à verser à son conseil dans les conditions fixées à l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.
Il soutient que :
- les décisions portant refus de titre de séjour et obligation de quitter le territoire français sont insuffisamment motivées et n'ont pas été précédées d'un examen de sa situation personnelle ;
- elles sont entachées d'un vice de procédure dès lors que le requérant n'a pas été examiné par les médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration ;
- elles méconnaissent les dispositions de l'article L. 425-9 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, celles du 9° de l'article L. 611-3 de ce même code et sont entachées d'erreur manifeste d'appréciation ;
- elles méconnaissent les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et celles du 1 de l'article 3 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant ;
- la décision fixant le pays de destination méconnaît les stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.
M. B... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 30 août 2023.
La requête a été communiquée au préfet d'Ille-et-Vilaine qui n'a pas produit de mémoire en défense.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- la convention internationale relative aux droits de l'enfant ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la loi n°91-647 du 10 juillet 1991 ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
La présidente de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Le rapport de Mme Brisson a été entendu au cours de l'audience publique.
Considérant ce qui suit :
1. M. B..., né le 27 avril 1987, de nationalité arménienne, déclare être entré en France le 23 décembre 2018. Après avoir échoué à obtenir la reconnaissance de la qualité de réfugié, l'intéressé a sollicité la délivrance d'un titre de séjour pour raison de santé, le
21 octobre 2021. Par un arrêté du 20 juin 2022, le préfet d'Ille-et-Vilaine a refusé de lui délivrer un titre de séjour et a pris à son encontre une obligation de quitter le territoire français. Par un jugement du 24 novembre 2022, le tribunal administratif de Rennes a annulé cet arrêté et a enjoint au préfet de réexaminer la situation du requérant. Par un arrêté du
28 décembre 2022, le préfet d'Ille-et-Vilaine a, de nouveau, refusé de délivrer un titre de séjour à M. B..., l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination. L'intéressé relève appel du jugement du 30 mai 2023 du tribunal administratif de Rennes rejetant sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté.
2. En premier lieu, aux termes des dispositions de l'article L. 425-9 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'étranger, résidant habituellement en France, dont l'état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait avoir pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité et qui, eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé dans le pays dont il est originaire, ne pourrait pas y bénéficier effectivement d'un traitement approprié, se voit délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " d'une durée d'un an. (...). / La décision de délivrer cette carte de séjour est prise par l'autorité administrative après avis d'un collège de médecins du service médical de l'Office français de l'immigration et de l'intégration, dans des conditions définies par décret en Conseil d'Etat. / (...) / Si le collège de médecins estime dans son avis que les conditions précitées sont réunies, l'autorité administrative ne peut refuser la délivrance du titre de séjour que par une décision spécialement motivée ". Aux termes des dispositions de l'article R. 425-11 du même code : " Pour l'application de l'article L. 425-9, le préfet délivre la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " au vu d'un avis émis par un collège de médecins à compétence nationale de l'Office français de l'immigration et de l'intégration. / L'avis est émis dans les conditions fixées par arrêté du ministre chargé de l'immigration et du ministre chargé de la santé au vu, d'une part, d'un rapport médical établi par un médecin de l'office et, d'autre part, des informations disponibles sur les possibilités de bénéficier effectivement d'un traitement approprié dans le pays d'origine de l'intéressé ". Aux termes de l'article R. 425-12 de ce code : " Le rapport médical mentionné à l'article R. 425-11 est établi par un médecin de l'Office français de l'immigration et de l'intégration à partir d'un certificat médical établi par le médecin qui suit habituellement le demandeur ou par un médecin praticien hospitalier inscrits au tableau de l'ordre, dans les conditions prévues par l'arrêté mentionné au deuxième alinéa du même article. / Le médecin de l'office peut solliciter, le cas échéant, le médecin qui suit habituellement le demandeur ou le médecin praticien hospitalier. Il en informe le demandeur. Il peut également convoquer le demandeur pour l'examiner et faire procéder aux examens estimés nécessaires. Le demandeur présente au service médical de l'office les documents justifiant de son identité. A défaut de réponse dans le délai de quinze jours, ou si le demandeur ne se présente pas à la convocation qui lui a été fixée, ou s'il n'a pas présenté les documents justifiant de son identité le médecin de l'office établit son rapport au vu des éléments dont il dispose et y indique que le demandeur n'a pas répondu à sa convocation ou n'a pas justifié de son identité. Il transmet son rapport médical au collège de médecins. (...). ".
3. Il résulte des dispositions précitées de l'article R. 425-12 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile que la possibilité pour le médecin de l'Office français de l'immigration et de l'intégration (OFII) de convoquer l'étranger pour l'examiner ne constitue qu'une simple faculté dont il est libre de faire usage. M. B..., qui a été convoqué pour examen médical le 12 avril 2022, fait valoir qu'à la suite d'une erreur de sa structure d'hébergement, il n'a pas reçu la convocation qui lui a été adressée pour cet examen, et qu'il a sollicité, par le biais d'une intervenante de cette structure, une nouvelle convocation. Toutefois, alors que le médecin instructeur n'a pas estimé nécessaire d'adresser une nouvelle convocation à l'intéressé, il ne ressort pas des pièces du dossier que le collège de médecins de l'OFII n'aurait pas disposé des éléments utiles pour établir un avis médical circonstancié. Dans ces conditions, le requérant n'est pas fondé à soutenir que l'avis du collège des médecins de l'OFII serait irrégulier faute d'avoir été précédé d'un examen médical.
4. S'il est saisi, à l'appui de conclusions tendant à l'annulation de la décision de refus, d'un moyen relatif à l'état de santé du demandeur, aux conséquences de l'interruption de sa prise en charge médicale ou à la possibilité pour lui d'en bénéficier effectivement dans le pays dont il est originaire, il appartient au juge administratif de prendre en considération l'avis médical rendu par le collège des médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration. Si le demandeur entend contester le sens de cet avis, il appartient à lui seul de lever le secret relatif aux informations médicales qui le concernent, afin de permettre au juge de se prononcer en prenant en considération l'ensemble des éléments pertinents, notamment l'entier dossier du rapport médical au vu duquel s'est prononcé le collège des médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration, en sollicitant sa communication, ainsi que les éléments versés par le demandeur au débat contradictoire.
5. Il ressort des pièces du dossier que par un avis 18 mai 2022, sur lequel s'est fondé le préfet d'Ille-et-Vilaine pour prendre l'arrêté litigieux, le collège des médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration (OFII) a estimé que si l'état de santé de
M. B... nécessite une prise en charge médicale, le défaut de celle-ci ne devrait pas entraîner des conséquences d'une exceptionnelle gravité et qu'il peut voyager sans risque vers son pays d'origine. Si l'intéressé fait état de son suivi par le centre médical Louis Guilloux à Rennes depuis 2019, et produit des certificats médicaux et des ordonnances datés de 2020, 2021 et 2022, ainsi qu'un rapport médical établi dans une clinique psychiatrique en Allemagne, l'ensemble de ces documents médicaux, insuffisamment circonstanciés, ne permet toutefois pas de remettre en cause l'avis médical sur lequel s'est fondé le préfet
d'Ille-et-Vilaine pour refuser au requérant la délivrance d'un titre de séjour. Dès lors, le préfet n'a pas méconnu les dispositions de l'article L. 425-9 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.
6. Pour les mêmes motifs que ceux exposé au point précédent, les moyens tirés de la méconnaissance des dispositions du 9° de l'article L. 611-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et de l'erreur d'appréciation de son état de santé doivent être écartés.
7. En deuxième lieu, il convient d'écarter, par adoption des motifs retenus à bon droit par les premiers juges, d'une part, les moyens tirés de ce que les décisions portant refus de titre de séjour et obligation de quitter le territoire français sont insuffisamment motivées et n'ont pas été précédées d'un examen suffisant de sa situation, de la méconnaissance, par ces décisions, des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, de celles du 1 de l'article 3 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant des stipulations et, d'autre part, le moyen tiré de la méconnaissance, par la décision fixant le pays de destination, des stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; moyens que M. B... réitère en appel sans apporter d'élément nouveau.
8. Il résulte de tout ce qui précède que M. B... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Rennes a rejeté sa demande. Par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction et celles tendant à l'application des dispositions des article L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 doivent également être rejetées.
D E C I D E :
Article 1er : La requête de M. B... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... B... et au ministre de l'intérieur et des outre-mer.
Copie en sera adressée, pour information, au préfet d'Ille-et-Vilaine.
Délibéré après l'audience du 23 mai 2024, à laquelle siégeaient :
- Mme Brisson, présidente,
- M. Vergne, président-assesseur,
- Mme Lellouch, première conseillère.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 7 juin 2024.
La présidente-rapporteure,
C. BRISSON
Le président-assesseur,
G-V. VERGNE
Le greffier,
R. MAGEAU
La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des outre-mer en ce qui le concerne, et à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
N° 23NT028632