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12/04/2024 | FRANCE | N°23NT01807

France | France, Cour administrative d'appel de NANTES, 3ème chambre, 12 avril 2024, 23NT01807


Vu la procédure suivante :



Procédure contentieuse antérieure :



M. A... B... a demandé au tribunal administratif de Rennes d'annuler l'arrêté du 31 mars 2023 du préfet du Morbihan portant obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et fixation du pays de destination.



Par un jugement n° 2302158 du 17 mai 2023, le magistrat désigné tribunal administratif de Rennes a rejeté sa demande.



Procédure devant la cour :



Par une requête, enregistrée l

e 19 juin 2023, M. B..., représenté par Me Richard, demande à la cour :



1°) d'annuler ce jugement du 17 mai 2023 ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A... B... a demandé au tribunal administratif de Rennes d'annuler l'arrêté du 31 mars 2023 du préfet du Morbihan portant obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et fixation du pays de destination.

Par un jugement n° 2302158 du 17 mai 2023, le magistrat désigné tribunal administratif de Rennes a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 19 juin 2023, M. B..., représenté par Me Richard, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du 17 mai 2023 du magistrat désigné du tribunal administratif de Rennes ;

2°) d'annuler cet arrêté du 31 mars 2023 du préfet du Morbihan ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 3 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- le jugement attaqué est insuffisamment motivé ;

- le rejet de sa demande d'asile ne peut pas être regardé comme définitif dès lors qu'un pourvoi a été formé devant le Conseil d'Etat ;

- il doit bénéficier de la protection temporaire accordée aux personnes résidant en Ukraine qui ne peuvent repartir en sécurité dans leur pays et doit donc être regardé comme étant entré régulièrement en France.

- la décision fixant le pays de destination méconnaît les stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Par un mémoire en défense, enregistré le 26 février 2024, le préfet du Morbihan conclut au rejet de la requête.

Il soutient que les moyens présentés par M. B... dans sa requête ne sont pas fondés.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la directive n° 2001/55/CE du Conseil du 20 juillet 2020 ;

- la décision d'exécution (UE) n° 2022/382 du Conseil du 4 mars 2022 ;

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code de justice administrative.

La présidente de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de Mme Brisson a été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. M. B..., ressortissant de la République démocratique du Congo, né le 15 janvier 1995, est entré irrégulièrement en France le 28 février 2022 et a sollicité son admission au statut de réfugié le 7 avril suivant. Sa demande a été rejetée par l'Office français de protection des réfugiés et apatrides (OFPRA) le 16 septembre 2022, puis par la Cour nationale du droit d'asile le 23 février 2023. Par un arrêté du 31 mars 2023, le préfet du Morbihan lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel il pourrait être éloigné. M. B... relève appel du jugement du 17 mai 2023 du magistrat désigné du tribunal administratif de Rennes rejetant sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté.

Sur la régularité du jugement attaqué :

2. Il résulte des motifs mêmes du jugement attaqué que le magistrat désigné du tribunal administratif de Rennes a répondu de façon suffisante aux moyens présentés par M. B... dans ses écritures en première instance. Ce jugement satisfait aux exigences posées par l'article L. 9 du code de justice administrative. Dès lors le moyen tiré de ce que le jugement attaqué serait entaché d'irrégularité faute d'être suffisamment motivé doit être écarté.

Sur le bien-fondé du jugement attaqué :

En ce qui concerne l'obligation de quitter le territoire français :

3. Aux termes de l'article L. 542-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, en sa rédaction alors applicable : " Lorsqu'un recours contre la décision de rejet de l'office a été formé dans le délai prévu à l'article L. 532-1, le droit du demandeur de se maintenir sur le territoire français prend fin à la date de la lecture en audience publique de la décision de la Cour nationale du droit d'asile ou, s'il est statué par ordonnance, à la date de la notification de celle-ci. ". Aux termes de l'article L. 611-1 du même code : " L'autorité administrative peut obliger un étranger à quitter le territoire français lorsqu'il se trouve dans les cas suivants : / (...) 4° La reconnaissance de la qualité de réfugié ou le bénéfice de la protection subsidiaire a été définitivement refusé à l'étranger ou il ne bénéficie plus du droit de se maintenir sur le territoire français en application des articles L. 542-1 et L. 542-2, à moins qu'il ne soit titulaire de l'un des documents mentionnés au 3° (...).

4. En premier lieu, dès lors que le pourvoi en cassation formé par M. B... le 19 avril 2023 devant le Conseil d'Etat contre la décision du 23 février 2023 par laquelle la Cour nationale du droit d'asile a rejeté son recours dirigé contre la décision de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides du 16 septembre 2022 rejetant sa demande d'asile, n'a pas de caractère suspensif, l'intéressé n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que le préfet du Morbihan, en retenant qu'il avait été définitivement débouté de l'asile, l'a obligé à quitter le territoire français sur le fondement des dispositions du 4° de l'article

L. 611-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.

5. En deuxième lieu, il ressort des pièces du dossier que si M. B... fait état de risques encourus en cas de retour en République démocratique du Congo en raison de l'orientation politique de son père et de son activité de journaliste, il n'apporte pas, tant en première instance, qu'en appel, d'éléments probants permettant d'établir l'existence des risques auxquels il serait personnellement exposé en cas de retour en République démocratique du Congo. Au surplus, sa demande d'asile a été rejetée par l'OFPRA puis par la Cour nationale du droit d'asile qui a relevé le caractère peu circonstancié et contradictoire de ses déclarations et l'absence d'éléments pertinents permettant d'établir la réalité de ses allégations. Dans ces conditions, le moyen tiré de la méconnaissance de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales doit être écarté.

6. En troisième lieu, aux termes de l'article 5 de la directive 2001/55/CE du Conseil du 20 juillet 2001 relative à des normes minimales pour l'octroi d'une protection temporaire en cas d'afflux massif de personnes déplacées et à des mesures tendant à assurer un équilibre entre les efforts consentis par les États membres pour accueillir ces personnes et supporter les conséquences de cet accueil : " 1. L'existence d'un afflux massif de personnes déplacées est constatée par une décision du Conseil (...) / (...) / 3. La décision du Conseil a pour effet d'entraîner, à l'égard des personnes déplacées qu'elle vise, la mise en œuvre dans tous les États membres de la protection temporaire conformément aux dispositions de la présente directive (...) ". Aux termes de l'article 1er de la décision d'exécution (UE) 2022/382 du Conseil du 4 mars 2022 constatant l'existence d'un afflux massif de personnes déplacées en provenance d'Ukraine, au sens de l'article 5 de la directive 2001/55/CE, et ayant pour effet d'introduire une protection temporaire : " L'existence d'un afflux massif dans l'Union de personnes déplacées qui ont dû quitter l'Ukraine en raison d'un conflit armé est constatée ". Aux termes de l'article 2 de cette décision : " 1. La présente décision s'applique aux catégories suivantes de personnes déplacées d'Ukraine le 24 février 2022 ou après cette date, à la suite de l'invasion militaire par les forces armées russes qui a commencé à cette date : (...) / 2. Les États membres appliquent la présente décision ou une protection adéquate en vertu de leur droit national à l'égard des apatrides, et des ressortissants de pays tiers autres que l'Ukraine, qui peuvent établir qu'ils étaient en séjour régulier en Ukraine avant le 24 février 2022 sur la base d'un titre de séjour permanent en cours de validité délivré conformément au droit ukrainien, et qui ne sont pas en mesure de rentrer dans leur pays ou leur région d'origine dans des conditions sûres et durables.

7. M. B..., qui ne disposait que d'un titre de séjour provisoire en Ukraine, n'est pas fondé à soutenir qu'il devrait bénéficier en application des dispositions précitées, de la protection temporaire accordée aux personnes résidant en Ukraine qui ne peuvent repartir en sécurité dans leur pays et qu'il devrait être regardé comme étant entré régulièrement en France. Les moyens tirés de ce que l'arrêté attaqué serait entaché d'erreur de fait et d'erreur de droit doivent donc être écartés.

En ce qui concerne la décision fixant le pays de destination :

8. Le moyen tiré de la méconnaissance, par la décision fixant le pays de destinations, des stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme doit être écarté pour les mêmes motifs que ceux énoncés au point 5 ci-dessus.

9. Il résulte de tout ce qui précède que M. B... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Rennes a rejeté sa demande. Par voie de conséquence, ses conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative doivent également être rejetées.

D E C I D E :

Article 1er : La requête de M. B... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... B... et au ministre de l'intérieur et des outre-mer.

Copie en sera adressée, pour information, au préfet du Morbihan.

Délibéré après l'audience du 28 mars 2024, à laquelle siégeaient :

- Mme Brisson, présidente,

- M. Vergne, président-assesseur,

- Mme Lellouch, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 12 avril 2024.

La présidente-rapporteure,

C. BRISSON

Le président-assesseur,

GV. VERGNE

Le greffier,

R. MAGEAU

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des outre-mer en ce qui le concerne, et à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

N° 23NT018072


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de NANTES
Formation : 3ème chambre
Numéro d'arrêt : 23NT01807
Date de la décision : 12/04/2024
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : Mme BRISSON
Rapporteur ?: Mme Christiane BRISSON
Rapporteur public ?: M. BERTHON
Avocat(s) : SCP RICHARD

Origine de la décision
Date de l'import : 21/04/2024
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel;arret;2024-04-12;23nt01807 ?
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