Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure
Mme A... C... a demandé au tribunal administratif de Nantes d'annuler la décision du 9 janvier 2020 par laquelle le préfet de la Sarthe lui a refusé la délivrance d'un titre de séjour.
Par un jugement n° 2003085 du 14 décembre 2022, le tribunal administratif de Nantes a rejeté la requête de Mme C....
Procédure devant la cour :
Par une requête enregistrée le 21 avril 2023, Mme A... C..., représentée par Me Murillo, demande à la cour :
1°) d'annuler le jugement du 14 décembre 2022 du tribunal administratif de Nantes ;
2°) d'annuler la décision du 9 janvier 2020 par laquelle le préfet de la Sarthe lui a refusé la délivrance d'un titre de séjour ;
3°) d'enjoindre au préfet de la Sarthe de lui délivrer un titre de séjour " vie privée et familiale " dans le délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 150 euros par jour de retard après l'expiration de ce délai, ou, à défaut, de procéder dans le même délai et sous la même astreinte, à un nouvel examen de sa demande et de lui délivrer, dans cette attente, une autorisation provisoire de séjour ;
3°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 2 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.
Elle soutient que :
- le refus de séjour qui lui est opposé sur le fondement de l'article L. 423-23 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile est entaché d'erreur manifeste d'appréciation ;
- il porte atteinte au respect de son droit à une vie privée et familiale et méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.
Par un mémoire enregistré le 8 mars 2024, le préfet de la Sarthe conclut au rejet de la requête.
Il fait valoir que les moyens soulevés par Mme C... ne sont pas fondés.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- la convention internationale relative aux droits de l'enfant, signée à New-York le 26 janvier 1990 ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
- le code de justice administrative.
Mme C... a été admise au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 23 février 2023.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Le rapport de M. Vergne a été entendu au cours de l'audience publique.
Considérant ce qui suit :
1. Mme C..., ressortissante congolaise, née le 27 novembre 1948, et qui séjournait en Italie depuis plusieurs années chez une de ses filles, a sollicité, par des courriers reçus à la préfecture de la Sarthe le 22 octobre 2018 et le 18 juillet 2019, un titre de séjour, sans en préciser la nature ni le fondement. Elle a demandé au tribunal administratif de Nantes l'annulation de la décision du 9 janvier 2020 par laquelle le préfet de la Sarthe, qui s'est fondé sur les dispositions de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile alors en vigueur, a refusé de lui délivrer le titre de séjour sollicité. Mme C... relève appel du jugement du 14 décembre 2022 par lequel le tribunal administratif de Nantes a rejeté sa requête tendant à l'annulation de cette décision.
Sur les conclusions à fin d'annulation :
2. Aux termes des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. / 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui ". Pour l'application de ces stipulations et dispositions, l'étranger qui invoque la protection due à son droit au respect de sa vie privée et familiale en France doit apporter toute justification permettant d'apprécier la réalité et la stabilité de ses liens personnels et familiaux effectifs en France au regard de ceux qu'il a conservés dans son pays d'origine. L'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, en vigueur à la date de la décision attaquée, disposait que : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " est délivrée de plein droit : (...) 7° A l'étranger ne vivant pas en état de polygamie, qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, dont les liens personnels et familiaux en France, appréciés notamment au regard de leur intensité, de leur ancienneté et de leur stabilité, des conditions d'existence de l'intéressé, de son insertion dans la société française ainsi que de la nature de ses liens avec la famille restée dans le pays d'origine, sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus, sans que la condition prévue à l'article L. 313-2 soit exigée. L'insertion de l'étranger dans la société française est évaluée en tenant compte notamment de sa connaissance des valeurs de la République ; (...) ".
3. Il ressort des pièces du dossier que Mme C... n'était en France, où elle est entrée, selon ses écritures d'appel, le 1er juin 2018, à l'âge de soixante-neuf ans, que depuis un peu plus de dix-huit mois à la date de la décision attaquée. Si elle fait valoir que six de ses neuf enfants résident régulièrement en France, dont cinq au Mans (Sarthe), notamment l'une de ses filles, B..., avec laquelle elle vivait auparavant en Italie et qui l'héberge, et que les autres vivent en Allemagne et en Afrique du Sud, elle n'établit pas l'ancienneté et l'intensité des liens qu'elle entretient avec ses enfants présents en France et leurs propres enfants. Si elle fait valoir que, ne disposant plus d'aucune attache familiale dans son pays d'origine, " à partir de 2012, elle a commencé à quitter progressivement son pays pour se rendre très régulièrement en Italie, puis définitivement en 2015, lors de son installation en France ", elle n'établit ni n'allègue clairement sa présence en France depuis 2015, et elle ne démontre pas y avoir tissé des liens d'une particulière intensité, ou y être particulièrement intégrée. Il ne ressort pas des pièces du dossier qu'elle serait dépourvue de liens, familiaux ou autres, dans le pays dont elle a la nationalité. Dans ces conditions, c'est sans violation du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, alors en vigueur, dont les dispositions ont été recodifiées à l'article L. 423-23 de ce code, sans méconnaître le droit au respect de la vie privée et familiale de Mme C..., garanti par les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, et sans commettre d'erreur manifeste d'appréciation que le préfet de la Sarthe a refusé de faire droit à la demande de titre de séjour présentée par l'intéressée.
4. Il résulte de ce qui précède que Mme C... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande.
Sur les conclusions à fin d'injonction :
5. Le présent arrêt n'implique aucune mesure d'exécution. Dès lors, les conclusions à fin d'injonction dont est sont assortie la requête de Mme C... ne sauraient être accueillies.
Sur les frais liés au litige :
6. Les dispositions des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique font obstacle à ce que soit mis à la charge de l'État, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, le versement d'une somme au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Les conclusions présentées à ce titre par l'avocat de Mme C... ne peuvent, par suite, être accueillies.
DECIDE :
Article 1er : La requête de Mme C... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme A... C... et au ministre de l'intérieur et des outre-mer.
Copie en sera adressée, pour information, au préfet de la Sarthe.
Délibéré après l'audience du 14 mars 2024, à laquelle siégeaient :
Mme Brisson, présidente,
M. Vergne, président-assesseur,
Mme Lellouch, première conseillère.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 29 mars 2024.
Le rapporteur,
G.-V. VERGNE
La présidente,
C. BRISSON
Le greffier,
R. MAGEAU
La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des outre-mer, en ce qui le concerne, et à tous mandataires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
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N° 23NT01174