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29/03/2024 | FRANCE | N°23NT01111

France | France, Cour administrative d'appel de NANTES, 3ème chambre, 29 mars 2024, 23NT01111


Vu la procédure suivante :



Procédure contentieuse antérieure :



M. D... C... a demandé au tribunal administratif de Caen d'annuler l'arrêté du 6 décembre 2022 par lequel le préfet de l'Orne lui a refusé la délivrance d'un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays à destination il serait susceptible d'être éloigné d'office.



Par un jugement n° 2202934 du 24 mars 2023, le tribunal administratif de Caen a rejeté sa demande.



Procédure devant la cour :



Par une requête et des mémoires , enregistrés les 17 avril 2023, 19 juillet 202...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. D... C... a demandé au tribunal administratif de Caen d'annuler l'arrêté du 6 décembre 2022 par lequel le préfet de l'Orne lui a refusé la délivrance d'un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays à destination il serait susceptible d'être éloigné d'office.

Par un jugement n° 2202934 du 24 mars 2023, le tribunal administratif de Caen a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête et des mémoires , enregistrés les 17 avril 2023, 19 juillet 2023 et

7 mars 2024 M. D... C..., représenté par Me Cavelier, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Caen du 24 mars 2023 ;

2°) d'annuler l'arrêté du 6 décembre 2022 du préfet de l'Orne ;

3°) d'enjoindre au préfet de l'Orne de procéder au réexamen de sa demande de titre de séjour, de prendre une nouvelle décision dans un délai de deux mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir et de lui délivrer dans l'attente d'une autorisation provisoire de séjour ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 200 euros sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- l'arrêté contesté méconnaît les dispositions de l'article L. 114-5 du code des relations entre le public et l'administration ;

- le préfet a fait une inexacte application de l'article L. 423-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile en estimant qu'il ne justifiait pas de la réalité de sa vie commune avec son épouse ;

- l'obligation de quitter le territoire français méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.

Par un mémoire en défense, enregistré le 14 février 2024, le préfet de l'Orne conclut au rejet de la requête.

Il soutient que les moyens invoqués par M. C... ne sont pas fondés.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- l'accord franco-marocain du 9 octobre 1987 en matière de séjour et d'emploi ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de justice administrative.

La présidente de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de Mme Lellouch a été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. M. D... C..., ressortissant marocain né en 1988, est entré en France le 5 mai 2021 sous couvert d'un visa d'entrée et de long séjour. Il relève appel du jugement du 24 mars 2023 par lequel le tribunal administratif de Caen a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 6 décembre 2022 du préfet de l'Orne portant refus de titre de séjour, obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et fixant le pays à destination duquel il est susceptible d'être éloigné d'office.

Sur les conclusions à fin d'annulation :

2. Aux termes de l'article 9 de l'accord franco-marocain du 1987 : " Les dispositions du présent Accord ne font pas obstacle à l'application de la législation des deux Etats sur le séjour des étrangers sur tous les points non traités par l'Accord. " Aux termes de l'article L. 423-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'étranger marié avec un ressortissant français, se voit délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " d'une durée d'un an lorsque les conditions suivantes sont réunies : / 1° La communauté de vie n'a pas cessé depuis le mariage ; (...) ".

3. Il ressort des pièces du dossier qu'après son mariage le 4 janvier 2021 au Maroc avec Mme B... A..., ressortissante française, M. C... est entré en France sous couvert d'un visa de long séjour le 5 mai 2021 en mentionnant l'adresse de son épouse à

Saint-Bômer-les-Forges (Orne) comme adresse de domiciliation. Le contrat de travail à durée indéterminée qu'il a conclu avec la société SNV à compter du 20 décembre 2021 mentionne également cette adresse. Si les bulletins de salaire établis entre janvier et décembre 2022 font mention d'une adresse à Domfront, dans le même département, M. C... produit une attestation du propriétaire de ce logement attestant avoir loué le logement dont il est propriétaire à cette adresse à M. C... et à son épouse ainsi qu'un " relevé d'informations automobile " du directeur général de la Macif attestant de la souscription d'un contrat d'assurance du 4 novembre 2021 au 13 juin 2022 adressé à Mme C... à cette même adresse de Domfront. En outre, M. C... produit un contrat de bail établi, postérieurement à l'arrêté litigieux, aux noms des deux époux pour la location d'un appartement à Flers (Orne) ainsi qu'un contrat d'abonnement eau-assainissement établi le 22 décembre 2022 à leurs deux noms. Enfin, M. C... produit des attestations de proches, établies en avril 2023, mais relatives à une situation de fait existante à la date de la décision litigieuse, ainsi que des photographies non datées représentant le couple, corroborant ses déclarations. Dans ces conditions, le préfet de l'Orne a fait une inexacte application des dispositions de l'article L. 423-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile en estimant que la communauté de vie depuis le mariage n'était pas établie et en refusant pour ce motif à M. C... le titre de séjour sollicité.

4. Il résulte de ce qui précède que M. C... est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Caen a rejeté sa demande tendant à l'annulation du refus de titre de séjour qui lui a été opposé. La mesure d'obligation de quitter le territoire français et la décision fixant le pays de renvoi doivent être annulées par voie de conséquence.

Sur les conclusions à fin d'injonction :

5. L'exécution du présent arrêt implique nécessairement, ainsi que le demande M. C..., le réexamen de sa demande de titre de séjour en qualité de conjoint d'une ressortissante française. Il y a lieu, dès lors, d'enjoindre au préfet de l'Orne de procéder à ce réexamen dans un délai de deux mois à compter du présent arrêt et de lui délivrer dans l'attente une autorisation provisoire de séjour l'autorisant à travailler.

Sur les frais liés au litige :

6. En application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 200 euros au titre des frais exposés par M. C... et non compris dans les dépens.

DECIDE :

Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Caen du 24 mars 2023 et l'arrêté du préfet de l'Orne du 6 décembre 2022 sont annulés.

Article 2 : Il est enjoint au préfet de l'Orne de procéder au réexamen de la demande de M. C... dans un délai de deux mois à compter de la mise à disposition du présent arrêt et de lui délivrer dans l'attente une autorisation provisoire de séjour l'autorisant à travailler.

Article 3 : L'Etat versera à M. C... une somme de 1 200 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à M. D... C... et au ministre de l'intérieur et des outre-mer.

Une copie en sera transmise, pour information, au préfet de l'Orne.

Délibéré après l'audience du 14 mars 2024 à laquelle siégeaient :

- Mme Brisson, présidente,

- M. Vergne, président-assesseur,

- Mme Lellouch, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 29 mars 2024.

La rapporteure,

J. LELLOUCH

La présidente,

C. BRISSON

Le greffier,

R. MAGEAU

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des outre-mer en ce qui le concerne, et à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

2

N° 23NT01111


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de NANTES
Formation : 3ème chambre
Numéro d'arrêt : 23NT01111
Date de la décision : 29/03/2024
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : Mme BRISSON
Rapporteur ?: Mme Judith LELLOUCH
Rapporteur public ?: M. BERTHON
Avocat(s) : CAVELIER

Origine de la décision
Date de l'import : 07/04/2024
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel;arret;2024-03-29;23nt01111 ?
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