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06/02/2024 | FRANCE | N°22NT03507

France | France, Cour administrative d'appel, 6ème chambre, 06 février 2024, 22NT03507


Vu la procédure suivante :



Procédure contentieuse antérieure :

Mme B... A... née C... a demandé au tribunal administratif de Nantes, d'abord, d'annuler la décision implicite par laquelle l'Office français de l'immigration et de l'intégration (OFII) lui a refusé le bénéfice des conditions matérielles d'accueil des demandeurs d'asile, ensuite, d'enjoindre, à titre principal, à l'OFII de procéder au calcul de l'allocation pour demandeur d'asile depuis le refus de ses conditions matérielles d'accueil dans un délai d'un mois à compter de la noti

fication de la décision et de condamner l'OFII à lui verser le montant correspondan...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme B... A... née C... a demandé au tribunal administratif de Nantes, d'abord, d'annuler la décision implicite par laquelle l'Office français de l'immigration et de l'intégration (OFII) lui a refusé le bénéfice des conditions matérielles d'accueil des demandeurs d'asile, ensuite, d'enjoindre, à titre principal, à l'OFII de procéder au calcul de l'allocation pour demandeur d'asile depuis le refus de ses conditions matérielles d'accueil dans un délai d'un mois à compter de la notification de la décision et de condamner l'OFII à lui verser le montant correspondant dans un délai de deux mois à compter de la notification de la décision à intervenir et, à titre subsidiaire, d'enjoindre à l'OFII de réexaminer ses droits aux conditions matérielles d'accueil selon les mêmes modalités, enfin, de mettre à la charge de l'OFII le versement à son conseil de la somme de 1 800 euros sur le fondement des dispositions combinées des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991.

Par un jugement n° 2004035 du 27 septembre 2022, le tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 10 novembre, Mme A..., représenté par Me Rodrigues-Devesas, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Nantes 27 septembre 2022, le tribunal administratif ;

2°) d'annuler la décision implicite de l'Office français de l'immigration et de l'intégration ;

3°) d'enjoindre à l'Office français de l'immigration et de l'intégration de procéder au calcul de l'allocation pour demandeur d'asile depuis le refus de ses conditions matérielles d'accueil dans un délai d'un mois à compter de la notification de la décision et de condamner l'OFII à lui verser le montant correspondant dans un délai de deux mois à compter de la notification de la décision à intervenir ;

4°) d'enjoindre à l'Office français de l'immigration et de l'intégration de procéder au calcul de l'allocation pour demandeur d'asile de réexaminer sa situation dans le délai de 15 jours à compter de la notification de l'arrêt à intervenir ;

5°) de mettre à la charge de l'Office français de l'immigration et de l'intégration le versement à son conseil, qui renonce à percevoir la part contributive de l'Etat au titre de l'aide juridictionnelle, d'une somme de 1 800 euros sur le fondement des dispositions combinées des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991.

Il soutient que :

- la décision contestée est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation au regard du 2° de l'article L.744-8 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; elle n'a pas sollicité l'asile pour un motif légitime.

Par un mémoire en défense, enregistré le 10 septembre 2023, l'Office français de l'immigration et de l'intégration, représenté par Me de Froment, conclut au rejet de la requête.

Il soutient que :

- la requête qui ne satisfait pas aux exigences de motivation est irrecevable ;

-à titre subsidiaire, les conclusions dirigées contre la décision rendue sur recours gracieux sont irrecevables ;

- que les moyens soulevés par Mme A... ne sont pas fondés.

Mme A... a été admise au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 19 octobre 2022.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991, modifiée, relative à l'aide juridique ;

- le décret n° 2020-1717 du 28 décembre 2020 ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Coiffet ;

- et les conclusions de Mme Bougrine, rapporteure publique.

Considérant ce qui suit :

1. Mme A..., ressortissante congolaise née le 1er octobre 1977 à Pointe-Noire (Congo), entrée irrégulièrement sur le territoire français le 26 décembre 2018 a sollicité le 10 septembre 2019 la reconnaissance du statut de réfugiée. Par une décision du même jour, l'OFII lui a refusé le bénéfice des conditions matérielles d'accueil au motif de la tardiveté de sa demande d'asile. Par un courrier réceptionné le 16 septembre 2019, Mme A... a formé un recours gracieux contre cette décision. Mme A... a, le 8 avril 2020, saisi le tribunal administratif de Nantes d'une demande tendant à l'annulation de la décision implicite par laquelle l'OFII a rejeté son recours gracieux. L'intéressée relève appel du jugement du 27 septembre 2022 par lequel le tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision implicite du directeur général de l'office français de l'immigration et de l'intégration rejetant sa demande.

Sur les conclusions à fin d'annulation :

2. Aux termes de l'article L. 744-8 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Outre les cas, mentionnés à l'article L. 744-7, dans lesquels il est immédiatement mis fin de plein droit au bénéfice des conditions matérielles d'accueil, le bénéfice de celles-ci peut être :/ (...) 2° Refusé si le demandeur présente une demande de réexamen de sa demande d'asile ou s'il n'a pas sollicité l'asile, sans motif légitime, dans le délai prévu au 3° du III de l'article L. 723-2.". Aux termes du III de l'article L.723-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile applicable à la situation en litige : " L'office statue également en procédure accélérée lorsque l'autorité administrative chargée de l'enregistrement de la demande d'asile constate que : / (...) / 3° Sans motif légitime, le demandeur qui est entré irrégulièrement en France ou s'y est maintenu irrégulièrement n'a pas présenté sa demande d'asile dans le délai de cent-vingt jours à compter de son entrée en France ; / (...). ".

3. Il est toujours loisible à la personne intéressée, sauf à ce que des dispositions spéciales en disposent autrement, de former à l'encontre d'une décision administrative un recours gracieux devant l'auteur de cet acte et de ne former un recours contentieux que lorsque le recours gracieux a été rejeté. L'exercice du recours gracieux n'ayant d'autre objet que d'inviter l'auteur de la décision à reconsidérer sa position, un recours contentieux consécutif au rejet d'un recours gracieux doit nécessairement être regardé comme étant dirigé, non pas tant contre le rejet du recours gracieux dont les vices propres ne peuvent être utilement contestés, que contre la décision initialement prise par l'autorité administrative. Il appartient, en conséquence, au juge administratif, s'il est saisi dans le délai de recours contentieux qui a recommencé de courir à compter de la notification du rejet du recours gracieux, de conclusions dirigées formellement contre le seul rejet du recours gracieux, d'interpréter les conclusions qui lui sont soumises comme étant aussi dirigées contre la décision administrative initiale.

4. Il ressort des pièces du dossier que Mme A... a déposé sa demande d'asile le 10 septembre 2019, soit plus de cent-vingt jours après la date déclarée de son entrée en France le 26 décembre 2018. L'intéressée soutient cependant qu'elle justifie d'un motif légitime expliquant ce retard dès lors qu'à son arrivée en France et jusqu'au mois de juillet 2019, elle a été hébergée, en échange de la garde des enfants présents au domicile, par une femme qui ne l'a pas aidée à déposer une demande d'asile, ni ne l'a informée à ce propos. Toutefois, de telles circonstances, qui ne sont au demeurant pas plus établies en appel qu'en première instance, ne sont pas constitutives d'un motif légitime permettant de présenter sa demande d'asile au-delà d'un délai de cent-vingt jours à compter de l'entrée en France. Si elle évoque également désormais ses angoisses et sa fragilité psychique qui requièrent un traitement médicamenteux - prescription régulière d'antidépresseurs et d'anxiolytiques - ces circonstances ne permettent pas d'établir que son état de santé l'aurait empêché de déposer une demande d'asile dans le délai prévu par l'article L.723-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ou qu'elle se trouverait dans une situation de vulnérabilité. Par conséquent, en l'absence de motif légitime, Mme A... se trouvait dans un des cas où, en application des dispositions de l'article L. 744-8 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, l'OFII pouvait légalement lui refuser le bénéfice des conditions matérielles d'accueil. Le moyen tiré de l'erreur manifeste d'appréciation sera écarté.

5. Il résulte de tout ce qui précède, et sans qu'il soit besoin d'examiner la fin de non-recevoir opposée par l'Office français de l'immigration et de l'intégration, que Mme A... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande.

Sur le surplus des conclusions :

6. Les conclusions aux fins d'injonction présentées par Mme A... et celles tendant au bénéfice des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 doivent être rejetées par voie de conséquence du rejet de ses conclusions principales.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de Mme A... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme B... A... et à l'Office français de protection des réfugiés et apatrides.

Délibéré après l'audience du 19 janvier 2024 à laquelle siégeaient :

- M. Gaspon, président de chambre,

- M. Coiffet, président-assesseur,

- Mme Gélard, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe, le 6 février 2024.

Le rapporteur,

O. COIFFETLe président,

O. GASPON

La greffière,

I. PETTON

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des outre-mer en ce qui le concerne, et à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

N°22NT03507 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de NANTES
Formation : 6ème chambre
Numéro d'arrêt : 22NT03507
Date de la décision : 06/02/2024
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. GASPON
Rapporteur ?: M. Olivier COIFFET
Rapporteur public ?: Mme BOUGRINE
Avocat(s) : RODRIGUES DEVESAS

Origine de la décision
Date de l'import : 11/02/2024
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel;arret;2024-02-06;22nt03507 ?
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