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06/02/2024 | FRANCE | N°22NT01591

France | France, Cour administrative d'appel, 6ème chambre, 06 février 2024, 22NT01591


Vu la procédure suivante :



Procédure contentieuse antérieure :



M. A... B... a demandé au tribunal administratif de Nantes d'annuler, d'une part, l'arrêté du 18 mars 2022 par lequel le préfet de Maine-et-Loire a décidé son transfert aux autorités espagnoles en vue de l'examen de sa demande d'asile et, d'autre part, l'arrêté du même jour prononçant son assignation à résidence.



Par un jugement no 2204068 du 4 avril 2022, le magistrat désigné du tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande.



Procédure devant la cour :



Par une requête, enregistrée le 24 mai 2022, M. B..., représenté par M...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A... B... a demandé au tribunal administratif de Nantes d'annuler, d'une part, l'arrêté du 18 mars 2022 par lequel le préfet de Maine-et-Loire a décidé son transfert aux autorités espagnoles en vue de l'examen de sa demande d'asile et, d'autre part, l'arrêté du même jour prononçant son assignation à résidence.

Par un jugement no 2204068 du 4 avril 2022, le magistrat désigné du tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 24 mai 2022, M. B..., représenté par Me Perrot, demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Nantes du 4 avril 2022 ;

2°) d'annuler, d'une part, l'arrêté du 18 mars 2022 par lequel le préfet de Maine-et-Loire a décidé son transfert aux autorités espagnoles en vue de l'examen de sa demande d'asile et, d'autre part, l'arrêté du même jour prononçant son assignation à résidence ;

3°) d'enjoindre, à titre principal, au préfet de la Maine et Loire de lui délivrer une attestation de demande d'asile en procédure normale dans le délai de 7 jours à compter de la date de l'arrêt à intervenir ou, à titre subsidiaire, de réexaminer sa situation dans les meilleurs délais ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat le versement à son conseil d'une somme de 1 500 euros au titre des dispositions combinées des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991.

Il soutient que :

En ce qui concerne la décision de transfert :

- elle est insuffisamment motivée ;

- elle méconnait les dispositions de l'article 5 du règlement (UE) 604/2013 du 26 juin 2013 ;

- l'administration préfectorale n'a pas procédé à un examen personnalisé de sa situation ;

- elle méconnaît les stipulations des articles 4 de la Charte UE et 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- elle méconnaît les dispositions de l'article 17 du règlement (UE) n° 604/2013.

Par un mémoire en défense, enregistré le 26 aout 2022, le préfet de Maine-et-Loire conclut au rejet de la requête.

Il soutient que les moyens soulevés par M. B... ne sont pas fondés.

Vu la lettre du 6 octobre 2022 par laquelle les parties ont été informées, en application de l'article R. 611-7 du code de justice administrative, que la cour était susceptible de soulever d'office un moyen d'ordre public tiré du non-lieu à statuer sur les conclusions de la requête tendant à l'annulation de l'arrêté de transfert en raison de l'expiration du délai de 6 mois prévu au 1 de l'article 29 du règlement n° 604/2013 du 26 juin 2013.

Vu la réponse au moyen d'ordre public produite par le préfet de Maine-et-Loire, enregistrée le 10 octobre 2022.

M. B... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 26 avril 2022.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le règlement (UE) n° 604/2013 du Parlement européen et du Conseil en date du 26 juin 2013 ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991, modifiée, relative à l'aide juridique ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé la rapporteure publique, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de M. Pons a été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. M. B..., de nationalité mauritanienne, a déclaré être entré irrégulièrement en France le 1er janvier 2022. Il s'est présenté devant le guichet unique des demandeurs d'asile le 10 janvier 2022 pour solliciter le statut de réfugié. Les recherches conduites par l'administration sur le fichier " Eurodac " ont fait apparaître que l'intéressé avait franchi irrégulièrement la frontière espagnole en provenance d'un État tiers à l'Union européenne dans la période précédant les douze mois du dépôt de sa première demande d'asile. Les autorités espagnoles, saisies le 17 janvier 2022 sur le fondement du paragraphe 1 de l'article 13 du règlement (UE) n° 604/2013 du 26 juin 2013 pour une prise en charge de l'intéressé, ont donné leur accord explicite le 24 janvier 2022. Le préfet de Maine-et-Loire a alors pris à l'encontre de M. B..., le 18 mars 2022, une décision de transfert et, par un arrêté du même jour, l'a assigné à résidence pour une durée de quarante-cinq jours dans le département de la Loire Atlantique. M. B... a demandé au tribunal administratif de Nantes l'annulation de ces décisions. Il relève appel du jugement du 26 mai 2023 par lequel le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande.

Sur l'étendue du litige :

2. Aux termes de l'article 29 du règlement n° 604/2013 du Parlement européen et du Conseil en date du 26 juin 2013 : " Le transfert du demandeur ou d'une autre personne visée à l'article 18, paragraphe 1, point c) ou d), de l'Etat membre requérant vers l'Etat membre responsable s'effectue conformément au droit national de l'Etat membre requérant, après concertation entre les Etats membres concernés, dès qu'il est matériellement possible et, au plus tard, dans un délai de six mois à compter de l'acceptation par un autre Etat membre de la requête aux fins de prise en charge ou de reprise en charge de la personne concernée ou de la décision définitive sur le recours ou la révision lorsque l'effet suspensif est accordé conformément à l'article 27, paragraphe 3. /2. Si le transfert n'est pas exécuté dans le délai de six mois, l'Etat membre responsable est libéré de son obligation de prendre en charge ou de reprendre en charge la personne concernée et la responsabilité est alors transférée à l'Etat membre requérant. Ce délai peut être porté à un an au maximum s'il n'a pas pu être procédé au transfert en raison d'un emprisonnement de la personne concernée ou à dix-huit mois au maximum si la personne concernée prend la fuite. ".

3. Il résulte de ces dispositions que lorsque le délai de six mois fixé pour l'exécution de la mesure de transfert a été interrompu par l'introduction d'un recours, il recommence à courir à compter de la décision juridictionnelle qui n'est plus susceptible de faire obstacle à la mise en œuvre de la procédure de remise. Quel que soit le sens de la décision rendue par le premier juge, ce délai court à compter du jugement qui, l'appel étant dépourvu de caractère suspensif, rend à nouveau la mesure de transfert susceptible d'exécution.

4. Il ressort des pièces du dossier que le délai initial de six mois dont disposait le préfet de Maine-et-Loire pour procéder à l'exécution de sa décision de transférer M. B... aux autorités espagnoles a été interrompu par la saisine du magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Nantes. Ce délai a recommencé à courir à compter de la notification à l'administration du jugement du 4 avril 2022 rendu par ce dernier, puis il a été prolongé à dix-huit mois du fait du constat de la fuite du demandeur, dont les autorités espagnoles ont été informées le 4 octobre 2022. Toutefois, ce délai a expiré le 4 octobre 2023 et la France est devenue responsable de l'examen de la demande de protection de M. B.... Par suite, la décision de transfert est devenue caduque à la date du présent arrêt et les conclusions de M. B... tendant à l'annulation de l'arrêté de transfert du 18 mars 2022 sont devenues sans objet. Il n'y a plus lieu d'y statuer.

5. En revanche, l'arrêté portant assignation à résidence de l'intéressé ayant été exécuté et ayant produit des effets, il y a lieu de statuer sur les conclusions de la requête tendant à son annulation.

Sur les conclusions dirigées contre l'arrêté portant assignation à résidence :

6. M. B... ne soulevant dans sa requête aucun moyen dirigé contre la mesure d'assignation à résidence contestée, ses conclusions tendant à l'annulation de cette mesure ne peuvent qu'être rejetées.

7. Il résulte de ce qui précède que M. B... n'est pas fondé à demander l'annulation du jugement du tribunal administratif de Nantes du 4 avril 2022 ayant rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 18 mars 2022 du préfet de Maine-et-Loire l'assignant à résidence.

Sur les conclusions à fin d'injonction :

8. Le présent arrêt n'implique aucune mesure d'exécution. Il y a lieu, par suite, de rejeter les conclusions à fin d'injonction.

Sur les frais liés au litige :

9. Il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire application des dispositions combinées de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique.

DECIDE :

Article 1er : Il n'y a pas lieu de statuer sur les conclusions de M. B... dirigées contre l'arrêté du 18 mars 2022 décidant son transfert aux autorités espagnoles.

Article 2 : Le surplus des conclusions de la requête de M. B... est rejeté.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... B..., à Me Perrot et au ministre de l'intérieur et des outre-mer.

Une copie en sera adressée, pour information, au préfet de Maine-et-Loire.

Délibéré après l'audience du 19 janvier 2024, à laquelle siégeaient :

- M. Gaspon, président de chambre,

- M. Coiffet, président-assesseur,

- M. Pons, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 6 février 2024.

Le rapporteur,

F. PONSLe président,

O. GASPON

La greffière,

I. PETTON

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des outre-mer en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

N° 22NT01591 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de NANTES
Formation : 6ème chambre
Numéro d'arrêt : 22NT01591
Date de la décision : 06/02/2024
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. GASPON
Rapporteur ?: M. François PONS
Rapporteur public ?: Mme BOUGRINE
Avocat(s) : PERROT

Origine de la décision
Date de l'import : 11/02/2024
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel;arret;2024-02-06;22nt01591 ?
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