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31/10/2023 | FRANCE | N°22NT01652

France | France, Cour administrative d'appel de Nantes, 6ème chambre, 31 octobre 2023, 22NT01652


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A... B... a demandé au tribunal administratif de Rennes, tout d'abord, d'annuler la décision du 16 juillet 2019 par laquelle le directeur régional des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l'emploi de Bretagne a prononcé à son encontre une amende administrative d'un montant de 5 000 euros en application de l'article L. 4752-1 du code du travail, ensuite, à titre subsidiaire, de réduire le montant de l'amende, enfin, de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1500 euros en

application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

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Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A... B... a demandé au tribunal administratif de Rennes, tout d'abord, d'annuler la décision du 16 juillet 2019 par laquelle le directeur régional des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l'emploi de Bretagne a prononcé à son encontre une amende administrative d'un montant de 5 000 euros en application de l'article L. 4752-1 du code du travail, ensuite, à titre subsidiaire, de réduire le montant de l'amende, enfin, de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1500 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Par un jugement n° 1904796 du 4 avril 2022, le tribunal administratif de Rennes a rejeté la demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête et un mémoire complémentaire, enregistrés les 30 mai et 31 août 2022, M. B..., représenté par Me Sibillotte demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du 4 avril 2022 ;

2°) à titre principal, d'annuler la décision du 16 juillet 2019 par laquelle le directeur régional des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l'emploi de Bretagne a prononcé à son encontre une amende administrative d'un montant de 5 000 euros ;

3°) à titre subsidiaire, de réduire le montant de l'amende administrative ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat le versement d'une somme de 1500 euros sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- la décision contestée est entachée d'une insuffisance de motivation ; s'agissant de la motivation en droit, les textes régissant le travail en hauteur ne sont pas visés (articles R4323-58, R4534-85, R4323-59, R 4323-77, R4323-84, R4534-86 et L4311-7du code du travail) ni même ceux relatifs aux modalités du contrôle de la législation applicable (L4731- 1, L4731-2, L8112-1, L4111-6 ou L4321-4 du code du travail) ; ainsi, il est impossible à la lecture de la décision de la DIRECCTE de connaître les textes qui n'auraient pas été respectés ; s'agissant de la motivation en fait, la date des évènements litigieux n'est pas visée, le salarié concerné par le risque de chute non plus et il n'est pas précisé en quoi l'échafaudage et les équipements mis à disposition ne répondent pas aux impératifs fixés par le code du travail ;

- la décision contestée est entachée d'un vice de procédure à défaut de procédure contradictoire en méconnaissance des articles L. 121-1 et L. 122-1 du code des relations entre le public et l'administration ;

- elle est entachée d'une erreur de droit faute pour l'administration de lui avoir notifié sa décision d'arrêt de travaux dans les formes prescrites par l'article R. 4731-2 du code du travail ; il ne peut lui être reproché de ne pas avoir respecté une décision qui ne lui avait pas encore été valablement notifiée ;

- elle est entachée d'une erreur de droit en méconnaissance des articles L. 8113-7 et L. 8115-1 du code du travail dès lors qu'un procès-verbal a été dressé le 7 janvier 2019 à son encontre et transmis au procureur de la République pour l'engagement de poursuites pénales ; la DIRECCTE ne pouvait, en sus des poursuites pénales, prononcée une amende administrative sans contrevenir aux textes précités ;

- l'amende prononcée présente un caractère disproportionné.

Par un mémoire en défense, enregistré le 14 février 2023, le ministre du travail, du plein emploi et de l'insertion conclut au rejet de la requête.

Il soutient que les moyens soulevés par la société ne sont pas fondés.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code du travail ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendu au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Coiffet,

- les conclusions de Mme Bougrine, rapporteure publique,

- et les observations de Mme C..., représentant la direction régionale des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l'emploi.

Considérant ce qui suit :

1. Le 21 novembre 2018, les agents de contrôle de l'inspection du travail ont effectué un contrôle sur le chantier de construction du lotissement " Domaine Saint-Hélier " situé à Saint-Brieuc. Ils ont constaté que les protections collectives contre le risque de chute de hauteur installées sur le chantier par l'entreprise ... n'étaient pas conformes à la réglementation alors que deux travailleurs - le gérant de l'entreprise et une salariée - étaient en train d'effectuer des travaux de couverture en hauteur et de soudure sur une gouttière. Cette situation étant de nature à caractériser un " danger grave et imminent ", les agents de contrôle ont alors demandé aux salariés concernés de quitter leur poste de travail. A la suite d'un échange avec les agents de contrôle, le gérant de la société leur a indiqué qu'aucune protection supplémentaire ne serait installée. Informé qu'une décision d'arrêt temporaire des travaux serait prise, M. B... et sa salariée ont cependant repris les travaux, le gérant invectivant et menaçant les agents qui rédigeaient la décision en cause. Le lendemain, soit le 22 novembre 2018, lors d'une nouvelle visite sur le chantier, les agents de contrôle ont constaté que le travail se poursuivait dans les mêmes conditions. Par une décision du 16 juillet 2019, le directeur régional des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l'emploi de Bretagne, a prononcé à l'encontre de M. B..., couvreur, une amende administrative d'un montant de 5 000 euros sur le fondement de l'article L. 4752-1 du code du travail à défaut pour celui-ci de s'être conformé à une décision d'arrêt de travaux.

2. M. B... a, le 24 septembre 2019, saisi le tribunal administratif de Rennes d'une demande tendant à l'annulation de la décision du 4 avril 2022 et, à titre subsidiaire, à la réduction du montant de l'amende administrative. Il relève appel du jugement du 11 mars 2022 par lequel cette juridiction a rejeté sa demande.

Sur la contestation de l'amende administrative :

3. Aux termes, d'une part, de l'article L. 4731-1 du code du travail : " L'agent de contrôle de l'inspection du travail mentionné à l'article L. 8112-1 peut prendre toutes mesures utiles visant à soustraire immédiatement un travailleur qui ne s'est pas retiré d'une situation de danger grave et imminent pour sa vie ou sa santé, constituant une infraction aux obligations des décrets pris en application des articles L. 4111-6, L. 4311-7 ou L. 4321-4, notamment en prescrivant l'arrêt temporaire de la partie des travaux ou de l'activité en cause, lorsqu'il constate que la cause de danger résulte : / 1° Soit d'un défaut de protection contre les chutes de hauteur ; (...) ". Aux termes, d'autre part, de l'article L. 4752-1 du code du travail : " Le fait pour l'employeur de ne pas se conformer aux décisions prises par l'agent de contrôle de l'inspection du travail mentionné à l'article L. 8112-1 en application des articles L. 4731-1 ou L. 4731-2 est passible d'une amende au plus égale à 10 000 euros par travailleur concerné par l'infraction ".

En ce qui concerne la motivation de la décision contestée et la régularité de la procédure suivie :

4. M. B... soutient qu'il est impossible, à la lecture de la décision de la DIRECCTE, de connaître les textes qui n'auraient pas été respectés et que, s'agissant de la motivation en fait, la date des évènements litigieux n'est pas visée, le salarié concerné par le risque de chute non identifié et il n'est pas précisé en quoi l'échafaudage et les équipements mis à disposition ne répondent pas aux impératifs fixés par le code du travail.

5. En premier lieu, aux termes, de l'article L. 211-2 du code des relations entre le public et l'administration : " Les personnes physiques ou morales ont le droit d'être informées sans délai des motifs des décisions administratives individuelles défavorables qui les concernent. / A cet effet, doivent être motivées les décisions qui : (...) / 2° Infligent une sanction ; (...) ". Cette motivation consiste, selon l'article L.211-5 du même code, en " l'énoncé des considérations de fait et de droit qui constituent le fondement de la décision ".

6. Il ressort des pièces versées au dossier que la décision contestée du 16 juillet 2019 vise expressément les articles 4731-1 et 4731-2 du code du travail, relatifs aux mesures et procédures d'urgence, dont les arrêts temporaires d'activité, l'article L.4752-1 prévoyant l'amende dont est passible l'employeur qui ne se conforme pas aux décisions prises par l'inspecteur du travail en matière de santé et de sécurité au travail et, enfin, les articles 4721-1, L.8115-4 à L.8115-7, R.8115-1, R.8115-9 et R.8115-10 du même code relatifs à la procédure d'édiction des amendes administratives. Elle précise en ses points 1, 2 et 3, la date - le 21 novembre 2018 - le nom de la salariée concernée par le manquement - Mme B... - et les motifs ayant conduit l'agent de contrôle à prendre une décision d'arrêt de travaux soit l'insuffisance de protection contre les chutes en hauteur - gardes corps non fixés, absence de gardes corps latéraux, absence de protection en rives - les conditions dans lesquelles la décision a été notifié à M. B..., et en particulier - point 6 de la décision - les difficultés rencontrées par les agents de contrôle pour remettre cette décision en mains propres à l'intéressé, les constats portants sur le non-respect de ces dispositions par le gérant de l'entreprise qui a poursuivi les travaux. La décision du 16 juillet 2019 qui énonce précisément les considérations de fait et les motifs de droit est suffisamment motivée. Le moyen sera écarté.

7. En second lieu, aux termes, d'une part, de l'article L. 121-1 du même code : " Exception faite des cas où il est statué sur une demande, les décisions individuelles qui doivent être motivées en application de l'article L. 211-2, ainsi que les décisions qui, bien que non mentionnées à cet article, sont prises en considération de la personne, sont soumises au respect d'une procédure contradictoire préalable ". Aux termes de l'article L. 122-1 de ce même code : " Les décisions mentionnées à l'article L. 211-2 n'interviennent qu'après que la personne intéressée a été mise à même de présenter des observations écrites et, le cas échéant, sur sa demande, des observations orales. Cette personne peut se faire assister par un conseil ou représenter par un mandataire de son choix. (...) ". Aux termes de l'article L. 4751-1 du code du travail : " Les amendes prévues au présent titre sont prononcées et recouvrées par l'autorité administrative compétente dans les conditions définies aux articles L. 8115-4, L. 8115-5 et L. 8115-7, sur rapport de l'agent de contrôle de l'inspection du travail mentionné à l'article L. 8112-1. (...) ". Aux termes, d'autre part, de l'article L. 8115-5 du même code : " Avant toute décision, l'autorité administrative informe par écrit la personne mise en cause de la sanction envisagée en portant à sa connaissance le manquement retenu à son encontre et en l'invitant à présenter, dans un délai fixé par décret en Conseil d'Etat, ses observations. / A l'issue de ce délai, l'autorité administrative peut, par décision motivée, prononcer l'amende et émettre le titre de perception correspondant. (...) ". Il résulte de l'article R. 8115-2 de ce même code que le délai prévu par l'article L. 8115-5 est fixé à quinze jours. Enfin, aux termes de l'article L. 8113-7 du code du travail : " Les agents de contrôle de l'inspection du travail mentionnés à l'article L. 8112-1 et les fonctionnaires de contrôle assimilés constatent les infractions par des procès-verbaux qui font foi jusqu'à preuve du contraire. (...) ".

8. M. B... soutient que la procédure contradictoire préalable au prononcé de la sanction n'aurait pas été respectée dès lors qu'il n'a pas été invité à présenter ses observations, contrairement à ce qui est indiqué dans la décision litigieuse.

9. Il ressort des pièces versées au dossier que M. B... a, par un courrier du 25 février 2019, été informé du grief qui lui était reproché - à savoir le non-respect d'une décision administrative d'arrêt des travaux et de la procédure de reprise des travaux -, de ce que ces manquements étaient passibles d'une amende d'un montant maximal de 10 000 euros et de la possibilité de présenter ses observations sur la procédure de sanction administrative en cours à son encontre. S'il soutient n'avoir jamais reçu ce courrier, il est cependant établi que ce dernier lui a bien été présenté mais qu'il n'est pas allé le retirer ainsi que l'atteste le formulaire de retour du courrier renvoyé par les services postaux à l'inspection du travail le 26 février 2019, portant la mention " pli avisé et non réclamé ". Dans ces conditions, alors même qu'il n'a pas retiré le pli qui lui était adressé, M. B... n'est pas fondé à soutenir que la DIRECCTE de Bretagne n'aurait pas satisfait à son obligation d'engager une procédure contradictoire. D'autre part, si le courrier de retour renvoyé à l'administration par les services postaux mentionne effectivement, s'agissant de la date de présentation de ce pli du 25 février 2019, deux dates différentes - les 26/02/2019 et 26/02/2018 - il s'agit d'une erreur matérielle sans incidence. Il n'est pas contesté au demeurant que l'administration a réitéré sa démarche le 15 mars 2019 par lettre simple qui précisait notamment que M. B... y trouverait la copie du courrier recommandé avec accusé de réception qui lui avait été adressé le 25 février 2019. Le moyen tiré du vice de procédure sera écarté dans toutes ses branches.

En ce qui concerne le bien fondé de l'amende administrative prononcée :

10. En premier lieu, M. B... soutient que la décision de la DIRECCTE de Bretagne du 16 juillet 2019 est entachée d'une première " erreur de droit " faute pour l'administration de lui avoir notifié sa décision d'arrêt de travaux dans les formes prescrites par l'article R. 4731-2 du code du travail. Il fait valoir qu'aucune décision ne lui a été remise en main propre le jour du contrôle et que celle-ci ne lui a été notifié par courrier que le 23 novembre 2018.

11. Aux termes de l'article R. 4731-1 du code du travail : " Pour l'application de l'article L. 4731-1, l'agent de contrôle de l'inspection du travail mentionné à l'article L. 8112-1 relève les éléments caractérisant la situation de danger grave et imminent et précise les mesures qu'il prend pour y remédier. / Sa décision, qui est d'application immédiate, fait l'objet d'un écrit ". Aux termes de l'article R. 4731-2 du même code, dans sa version alors en vigueur : " Lorsque l'employeur ou son représentant est présent sur le chantier, la décision lui est remise directement contre récépissé. / A défaut, elle est adressée d'urgence à l'employeur par tous moyens appropriés et confirmée au plus tard dans le délai d'un jour franc par lettre recommandée avec avis de réception. / Toutefois, cette décision, ou copie de celle-ci dans le cas où elle lui a déjà été adressée dans les formes prévues au premier alinéa, est remise directement, contre récépissé, à l'employeur qui s'est porté à la rencontre de l'inspecteur du travail. Cette procédure se substitue alors à celle définie au deuxième alinéa ". Enfin, aux termes de l'article R.4731-4 du même code : " L'employeur informe, par tout moyen donnant date certaine à la réception de cette information, l'agent de contrôle de l'inspection du travail mentionné à l'article L. 8112-1 des mesures qu'il a prises pour faire cesser la situation de danger grave et imminent. ".

12. Il résulte de l'instruction, en particulier du procès-verbal de contrôle, que l'inspecteur du travail a établi le 7 janvier 2019 à l'attention du procureur de la République près le tribunal de grande instance de Saint-Brieuc, procès-verbal qui fait foi jusqu'à preuve du contraire, ainsi qu'il est énoncé à l'article L. 8113-7 du code du travail précité, que, le 21 novembre 2018, M. B... a mis fin à la discussion engagée avec les agents de contrôle qui lui avaient signifié une situation de " danger grave et imminent " pour la sécurité des travailleurs, a refusé de mettre en place toute protection supplémentaire sur le chantier, a enjoint à son employée de regagner son poste de travail, a lui-même regagné son chantier et a ensuite proféré des insultes et des menaces à l'encontre des agents qui lui avaient signifié qu'ils prenaient une décision d'arrêt temporaire des travaux dans l'attente de mise en place de protections collectives. L'inspecteur du travail a également relevé dans ce procès-verbal que M. B... avait alors expressément refusé de recevoir notification, contre récépissé, de la décision d'arrêt des travaux établie par cet inspecteur. Alors qu'il a accepté une composition pénale pour avoir porté outrage aux agents de contrôle de l'inspection du travail, il ne saurait sérieusement nier les faits circonstanciés exposés dans le procès-verbal. Dans ces conditions, l'inspecteur du travail était fondé à lui remettre cette décision par tous moyens appropriés. M. B... ne saurait enfin se borner à affirmer ne pas avoir trouvé la décision d'arrêt des travaux sur le pare-brise de son véhicule utilitaire alors qu'il est indiqué dans ce procès-verbal que la décision d'arrêt des travaux de l'inspecteur du travail a finalement été posée sur ce pare-brise à titre de notification. Il résulte également de l'instruction que cette décision d'arrêt des travaux a été notifiée à l'intéressé par courrier daté du 21 novembre 2018 adressé dans le délai d'un jour franc mentionné par l'article R. 4731-2 du code du travail. Enfin, M. B... ne saurait utilement se prévaloir du fait qu'il aurait mis en place des protections après avoir reçu notification de la décision contestée le 23 novembre 2022 dès lors que les dispositions de l'article R.4731- 4 du code du travail lui imposent, ce qu'il n'a pas fait, de solliciter l'autorisation de l'inspection du travail avant de reprendre les travaux sur le chantier litigieux. Par suite, le moyen tiré de la méconnaissance de dispositions rappelées au point précédent sera écarté.

13. M. B... soutient, en second lieu, que la décision de la DIRECCTE de Bretagne du 16 juillet 2019 serait entachée d'une seconde " erreur de droit " du fait de l'existence de poursuites pénales concomitantes pour des manquements identiques.

14. Aux termes, d'une part, du second alinéa de l'article L. 8113-7 du code du travail, les procès-verbaux, qui constatent les infractions relevées, : " sont transmis au procureur de la République. Un exemplaire est également adressé au représentant de l'Etat dans le département. (...) / Lorsqu'il constate des infractions pour lesquelles une amende administrative est prévue au titre V du livre VII de la quatrième partie ou à l'article L. 8115-1, l'agent de contrôle de l'inspection du travail peut, lorsqu'il n'a pas dressé un procès-verbal à l'attention du procureur de la République, adresser un rapport à l'autorité administrative compétente, dans le cadre de la procédure prévue au chapitre V du présent titre ". Aux termes, d'autre part, de l'article L. 8115-1 du même code : " L'autorité administrative compétente peut, sur rapport de l'agent de contrôle de l'inspection du travail mentionné à l'article L. 8112-1, et sous réserve de l'absence de poursuites pénales, soit adresser à l'employeur un avertissement, soit prononcer à l'encontre de l'employeur une amende en cas de manquement : (...) 5° Aux dispositions prises pour l'application des obligations de l'employeur relatives aux installations sanitaires, à la restauration et à l'hébergement prévues au chapitre VIII du titre II du livre II de la quatrième partie, ainsi qu'aux mesures relatives aux prescriptions techniques de protection durant l'exécution des travaux de bâtiment et génie civil prévues au chapitre IV du titre III du livre V de la même partie pour ce qui concerne l'hygiène et l'hébergement. ".

15. Il résulte de l'instruction que les agents de contrôle ont, sur le fondement de l'article 40 du code de procédure pénale, procédé le 7 janvier 2019 à un signalement au Procureur de la République pour des faits d'outrage et de menaces à l'encontre de deux agents de contrôle de l'inspection du travail dans l'exercice de leur mission, signalement qui a fait l'objet d'une composition pénale validée le 4 septembre 2019. Cette procédure, qui n'avait ainsi pas trait aux manquements à la réglementation du travail constatés en matière d'hygiène et de sécurité, porte sur des faits distincts de la procédure administrative engagée par la DIRECCTE de Bretagne pour non-respect d'une décision d'arrêt de travaux représentant " une situation de danger grave et imminent " pour les travailleurs ayant conduit, par la décision du 16 juillet 2019, au prononcé de l'amende administrative en litige. Par suite, M. B... n'est pas fondé à soutenir que cette amende aurait été prononcée contre lui en méconnaissance du dernier alinéa de l'article L. 8113-7 du code du travail.

En ce qui concerne le montant de l'amende :

16. Aux termes de l'article L. 8115-4 du code du travail : " Pour déterminer si elle prononce un avertissement ou une amende et, le cas échéant, pour fixer le montant de cette dernière, l'autorité administrative prend en compte les circonstances et la gravité du manquement, le comportement de son auteur, notamment sa bonne foi, ainsi que ses ressources et ses charges ".

17. D'une part, la DIRECCTE fait valoir, sans que M. B... remette en cause ces éléments, qu'elle a, pour fixer le montant de l'amende en litige, et indépendamment de la gravité et de la persistance des manquements constatés, tenu compte également des antécédents du requérant en matière de non-respect des règles de sécurité et d'hygiène sur les chantiers et notamment le fait qu'il avait déjà fait l'objet au cours de l'année 2015 d'une mesure d'arrêt des travaux, de son comportement menaçant lors des opérations de contrôle alors que l'administration avait tenté de renouer le dialogue, comme dans les suites de ce contrôle. La DIRRECTE de Bretagne justifie en effet qu'elle lui a préalablement demandé de présenter ses observations et de s'expliquer quant à la teneur des propos tenus envers les agents de contrôle de l'inspection du travail et il est constant que M. B... s'est abstenu alors de présenter toute justification. D'autre part, alors que le requérant s'était abstenu également de transmettre au service des éléments relatifs à ses charges et à ses ressources et ce, malgré deux demandes faites en ce sens les 25 février et 15 mars 2019, il verse désormais aux débats des éléments d'ordre financier - emprunt personnel d'un montant de 20 000 euros souscrit le 2 février 2022, prêt professionnel de 92 000 euros contracté le 5 juin 2006 dont le terme est venu à échéance le 5 juin 2023, factures EDF Entreprise pour des montants allant de 37 à 65 euros par mois et une facture de la compagnie des eaux d'un montant de 232 euros pour le mois de novembre 2021 - qui ne permettent pas de considérer que le montant de l'amende administrative prononcée à son encontre, soit 5 000 euros pour une salariée alors que le maximum légal est fixé à 10 000 euros, présenterait un caractère disproportionné. Ses demandes tendant à l'annulation, comme à titre subsidiaire, à la minoration de l'amende en litige ne peuvent qu'être rejetées.

18. Il résulte de l'ensemble de ce qui précède que M. B... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif a rejeté sa demande.

Sur les frais liés au litige :

19. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que l'État, qui n'a pas la qualité de partie perdante, verse à M. B... la somme que celui-ci réclame au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de M. B... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... B... et à la ministre du travail, de l'emploi et de l'insertion.

Une copie en sera adressée pour information à la directrice régionale de l'économie, de l'emploi, du travail et des solidarités (DREETS) de Bretagne.

Délibéré après l'audience du 13 octobre 2023, à laquelle siégeaient :

- M. Gaspon, président de chambre,

- M. Coiffet, président-assesseur,

- Mme Gélard, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 31 octobre 2023.

Le rapporteur,

O. COIFFETLe président,

O. GASPON

La greffière,

I. PETTON

La République mande et ordonne au ministre du travail, du plein emploi et de l'insertion en ce qui le concerne, et à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

N°22NT01652 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nantes
Formation : 6ème chambre
Numéro d'arrêt : 22NT01652
Date de la décision : 31/10/2023
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. GASPON
Rapporteur ?: M. Olivier COIFFET
Rapporteur public ?: Mme BOUGRINE
Avocat(s) : SCP MARION LEROUX SIBILLOTTE ENGLISH

Origine de la décision
Date de l'import : 22/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nantes;arret;2023-10-31;22nt01652 ?
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