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13/10/2023 | FRANCE | N°23NT01117

France | France, Cour administrative d'appel de Nantes, 3ème chambre, 13 octobre 2023, 23NT01117


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

Mme D... C... a demandé au tribunal administratif de Rennes d'annuler l'arrêté du 23 mai 2022 par lequel le préfet d'Ille-et-Vilaine lui a refusé la délivrance d'un titre de séjour, l'a obligée à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a déterminé le pays de destination.

Par un jugement n° 2205506 du 1er février 2023, le tribunal administratif de Rennes a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 17 avril 2023, Mme

D... C..., représentée par Me Sémino, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du 1er février...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

Mme D... C... a demandé au tribunal administratif de Rennes d'annuler l'arrêté du 23 mai 2022 par lequel le préfet d'Ille-et-Vilaine lui a refusé la délivrance d'un titre de séjour, l'a obligée à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a déterminé le pays de destination.

Par un jugement n° 2205506 du 1er février 2023, le tribunal administratif de Rennes a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 17 avril 2023, Mme D... C..., représentée par Me Sémino, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du 1er février 2023 ;

2°) d'annuler ou, à titre subsidiaire, d'abroger l'arrêté du 23 mai 2022 ;

3°) d'enjoindre au préfet d'Ille-et-Vilaine, à titre principal, de lui délivrer un titre de séjour dans un délai de huit jours à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, et, à titre subsidiaire, d'enjoindre à ce préfet de procéder au réexamen de sa situation et de lui délivrer, dans l'attente, une autorisation provisoire de séjour ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat, au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative la somme de 2 000 euros à verser à son conseil dans les conditions fixées à l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.

Elle soutient que :

- le jugement est irrégulier en ce que, d'une part, il omet de répondre au moyen opérant tiré de ce qu'aucune obligation de quitter le territoire ne pouvait être édictée à son encontre dès lors qu'elle remplissait les conditions d'octroi d'un titre de séjour de plein droit, et, d'autre part, il répond ultra petita au moyen, qui n'était pas soulevé, tiré de la méconnaissance des dispositions de l'article L. 423-23 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- l'arrêté litigieux est insuffisamment motivé et entaché d'un défaut d'examen de sa situation particulière ;

- la décision portant refus de délivrance d'un titre de séjour est entachée d'une erreur d'appréciation, d'une erreur de droit et d'une erreur de fait et méconnaît les articles L. 422-1 et L. 433-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- les décisions de refus de titre et portant obligation de quitter le territoire sont entachées d'une erreur manifeste d'appréciation de leurs conséquences sur sa situation personnelle ;

- elles sont entachées d'une méconnaissance de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme ;

- à titre subsidiaire, les circonstances nouvelles tenant à son admission dans le master 1 qu'elle visait initialement et aux excellents résultats qu'elle y obtient rendent illégale la décision de refus de titre fondée sur l'absence de caractère réel et sérieux de ses études et justifient qu'il soit procédé à l'abrogation juridictionnelle de cette décision.

La requête a été communiquée au préfet d'Ille-et-Vilaine qui n'a pas produit de mémoire en défense.

Mme C... a été admise au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 9 mars 2023.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

La présidente de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Vergne,

- et les observations de Me Sémino, représentant Mme C..., présente à l'audience.

Considérant ce qui suit :

1. Mme D... C..., ressortissante camerounaise née en 1997, est entrée en France le 1er septembre 2015 sous couvert d'un visa portant la mention " mineur scolarisé " valable du 29 août 2015 au 27 octobre 2016. Elle a ensuite bénéficié de cartes de séjour portant la mention " étudiant ". Le 21 septembre 2021, Mme C... a sollicité auprès du préfet d'Ille-et-Vilaine le renouvellement de son titre de séjour temporaire. Par un arrêté du 23 mai 2022, le préfet d'Ille-et-Vilaine a rejeté sa demande, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans le délai de trente jours et a fixé le pays de destination. Mme C... relève appel du jugement du 1er février 2023 par lequel le tribunal administratif de Rennes a rejeté sa demande tendant à l'annulation de ces décisions.

Sur la régularité du jugement attaqué :

2. En premier lieu, dans un point " 3. Méconnaissance de l'article 8 de la CEDH - Erreur de droit " de son unique mémoire de première instance, présenté par un avocat, Mme C..., cite les stipulations conventionnelles susmentionnées, dont elle soutient qu'elles ont été méconnues, énonce qu'en conséquence, un refus de titre de séjour ne doit pas porter une atteinte disproportionnée à la vie privée et familiale de l'étranger, et rappelle la jurisprudence du Conseil d'Etat selon laquelle, lorsqu'un étranger remplit les conditions d'octroi d'un titre de séjour délivré de plein droit, il ne peut faire l'objet d'une obligation de quitter le territoire. Elle cite ensuite l'article L. 423-23 code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et expose les raisons pour lesquelles, au regard des critères d'appréciation posés par ce texte, elle peut prétendre à la délivrance d'un titre de séjour " vie privée et familiale " compte tenu de ses liens personnels et familiaux en France. Il a été suffisamment répondu à cet argumentaire, qui était dirigé à la fois contre le refus de titre de séjour et contre l'obligation de quitter le territoire, aux points 6 à 8 du jugement attaqué s'agissant du refus de titre, et aux points 9 et 10 s'agissant de la mesure d'éloignement. Le moyen tiré par le requérant d'une omission de répondre à ce moyen manque en fait et doit être écarté.

3. En second lieu, la requérante ne peut utilement faire valoir, en tout état de cause, que le tribunal aurait répondu à tort, au point 6 de son jugement, sans toutefois retenir ce moyen en raison de son inopérance, à un moyen, qui n'était pas soulevé selon elle, tiré de la méconnaissance par la décision de refus de titre de séjour des dispositions de l'article L. 423-23 code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.

Sur les conclusions à fin d'annulation :

En ce qui concerne les moyens communs aux décisions portant refus de titre de séjour et obligation de quitter le territoire :

4. L'arrêté attaqué comporte l'énoncé des considérations de droit et de fait qui en constituent le fondement et qui révèlent que le préfet a examiné la demande de Mme C... au vu des éléments pertinents relatifs à la demande de titre qui lui était faite et dont il est établi qu'ils avaient été portés à sa connaissance. Il précise les textes dont il est fait application, rappelle le parcours de l'intéressée et sa situation familiale, et statue, après une analyse précise des études en France de la requérante, sur sa demande de titre de séjour présentée par celle-ci en qualité d'étudiante sur le fondement des articles L. 422-1 à L. 422-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Le préfet d'Ille-et-Vilaine a également porté une appréciation sur la situation de Mme C... au regard notamment des stipulations des articles 3 et 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales en tenant compte des éléments portés à sa connaissance par l'intéressée et il a décidé de l'obliger à quitter le territoire français après avoir estimé que rien ne s'opposait à une telle mesure. L'arrêté attaqué comporte ainsi les considérations de droit et de fait sur lesquels le préfet s'est fondé pour rejeter la demande de titre de séjour de l'intéressée et l'obliger à quitter le territoire français. S'il mentionne les informations erronées que Mme C..., de nationalité camerounaise, est née au Cameroun alors qu'elle est née en France et qu'elle ne démontre pas être dépourvue d'attaches familiales dans son pays d'origine, où demeurent ses parents et son frère, alors que son père est décédé et que son frère réside en France, ces inexactitudes ne constituent pas une insuffisance de motivation, la régularité en la forme d'une décision ne dépendant pas du bien-fondé de ses motifs, ni ne caractérisent un défaut d'examen particulier de la situation personnelle de Mme C... par le préfet. Ainsi les moyens tirés du défaut de motivation et du défaut d'examen particulier de la situation de l'appelante doivent être écartés.

En ce qui concerne les autres moyens dirigés contre la décision portant refus de titre de séjour :

5. En premier lieu, aux termes de l'article L. 422-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'étranger qui établit qu'il suit un enseignement en France ou qu'il y fait des études et qui justifie disposer de moyens d'existence suffisants se voit délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention " étudiant " d'une durée inférieure ou égale à un an. / En cas de nécessité liée au déroulement des études ou lorsque l'étranger a suivi sans interruption une scolarité en France depuis l'âge de seize ans et y poursuit des études supérieures, l'autorité administrative peut accorder cette carte de séjour sous réserve d'une entrée régulière en France et sans que soit opposable la condition prévue à l'article L. 412-1 (...) ". L'article L. 433-1 du même code dispose que " A l'exception de la carte de séjour pluriannuelle portant la mention " salarié détaché ICT ", prévue à l'article L. 421-26, et de la carte de séjour pluriannuelle portant la mention " recherche d'emploi ou création d'entreprise ", prévue à l'article L. 422-10, qui ne sont pas renouvelables, le renouvellement de la carte de séjour temporaire ou pluriannuelle est subordonné à la preuve par le ressortissant étranger qu'il continue de remplir les conditions requises pour la délivrance de cette carte (...) ". Il appartient à l'autorité administrative saisie d'une demande de renouvellement d'une carte de séjour présentée en qualité d'étudiant de rechercher, à partir de l'ensemble du dossier, si l'intéressée peut être raisonnablement regardée comme poursuivant effectivement des études et d'apprécier, sous le contrôle du juge, la réalité et le sérieux des études poursuivies en tenant compte de l'assiduité, de la progression et de la cohérence du cursus suivi.

6. Il ressort des pièces du dossier qu'après un baccalauréat scientifique obtenu en 2015, Mme C... s'est inscrite en première année de licence pendant deux années consécutives, en " Économie gestion " pour l'année universitaire 2015-2016, puis l'année suivante en " Mathématiques et informatique appliquées aux sciences humaines et sociales (MIASHS) ", sans valider ces deux premières années d'études. Réinscrite en " Licence 1 et 2 MIASHS " pour l'année 2017-2018, elle a validé sa licence 1. Son inscription en " Licence 2 et 3 MIASHS " pour l'année suivante 2018-2019 ne lui a pas permis d'obtenir sa " Licence 3 MIASHS ", qu'elle a obtenue à l'issue de l'année universitaire 2020-2021, après cinq années d'études dans le même cursus. Elle a, par la suite, envisagé un changement d'orientation vers les métiers de l'enseignement mais sa candidature a été refusée dans les masters 1 " Métiers de l'enseignement, de l'éducation et de la formation ", " Sciences de l'éducation " et " Professeur des écoles " des universités de Rennes 2, Rennes 1, Nantes et de Cergy Paris. Elle s'est alors inscrite en septembre 2021 au certificat d'aptitude professionnelle (CAP) " accompagnant éducatif petite enfance ". La requérante explique avoir choisi cette solution faute d'avoir été admise aux masters qu'elle demandait et afin de compléter sa formation pour pouvoir renforcer son dossier et postuler à nouveau pour ces mêmes masters et devenir enseignante. Par ailleurs, contrairement à ce que soutient le préfet d'Ille-et-Vilaine, la circonstance qu'un certificat d'aptitude professionnelle n'équivaut pas à des études supérieures, ne fait pas obstacle à ce que Mme C... puisse bénéficier d'un titre de séjour portant la mention " étudiant " en application des dispositions de l'article L. 422-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dès lors qu'elle justifie suivre un enseignement réel et sérieux en France et disposer de moyens d'existence suffisants. Toutefois, en dépit des bons résultats qu'elle a obtenus en certificat d'aptitude professionnelle (CAP), du sérieux avec lequel elle suit cette formation et de ses qualités professionnelles reconnues par la formatrice de son CAP et par la directrice de l'institution dans laquelle elle a réalisé son stage de CAP, cette réorientation, qu'elle explique par le refus de sa candidature aux masters sollicités, ne constitue pas une progression dans son parcours et ne peut être regardée comme cohérente au regard de son cursus universitaire antérieur. Sur ce point, si la requérante expose qu'elle a " toujours souhaité s'orienter vers les métiers de l'enseignement et particulièrement celui de professeur des écoles ", la réalité d'un projet professionnel précis et déterminé préexistant en ce sens n'est pas démontrée, Mme C... ayant été inscrite, jusqu'en 2021, dans des cursus dont l'objet n'apparaît pas strictement en lien avec la préparation aux métiers de l'enseignement. De même, le préfet ayant constaté, à la date à laquelle il statuait, que Mme C... n'était pas inscrite en master 1 dans la spécialité qui était la sienne antérieurement, mais en CAP " petite enfance ", a pu, sans commettre l'erreur de fait qui lui est reprochée, considérer qu'elle avait " renoncé à poursuivre en Master dans sa formation initiale ". Ainsi, c'est sans méconnaître les dispositions précitées de l'article L. 422-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, ni commettre d'erreur d'appréciation, que le préfet, dont la légalité de la décision doit s'apprécier à la date à laquelle celle-ci a été prise, a estimé que le caractère réel et sérieux des études poursuivies par Mme C... n'était pas établi et a refusé de renouveler son titre de séjour. Il suit de là que les moyens tirés par la requérante de ce que la décision lui refusant un titre de séjour serait entachée de " Méconnaissance des dispositions des articles L. 422-1 et L. 433-1 du CESEDA - erreur d'appréciation, erreur de droit et erreur de fait " ne peuvent être accueillis.

7. En second lieu, les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales aux termes desquelles toute personne a droit au respect d'une vie familiale normale sont par elles-mêmes sans incidence sur l'appréciation par l'administration de la réalité et du sérieux des études poursuivies lors de l'instruction d'une demande de renouvellement de titre de séjour en qualité d'étudiant. Par suite, le moyen tiré par Mme C... de la violation desdites stipulations ne peut qu'être écarté comme inopérant.

En ce qui concerne la décision portant obligation de quitter le territoire français :

8. En premier lieu, aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale (...) ".

9. Si Mme C... se prévaut de la relation historique de sa famille avec la France, son grand-père ayant été élevé à la dignité de grand officier de la Légion d'Honneur en 1971, son père étant diplomate et elle-même étant née en France, ainsi que de sa présence régulière pendant plus de six ans sur le territoire, elle n'avait pas, eu égard à l'objet de son titre de séjour, vocation à rester en France après ses études, ni à y poursuivre une carrière d'enseignante. L'intéressée fait également valoir qu'elle vit en couple depuis deux ans avec un ressortissant français. Il n'est toutefois pas contesté que, lors de sa demande de titre de séjour, la requérante a déclaré être célibataire et sans enfant à charge et qu'elle n'a ultérieurement transmis à la préfecture aucune autre information sur sa situation personnelle. Les pièces produites à l'instance pour justifier de la relation entretenue avec M. B... A..., à savoir l'attestation établie le 20 juillet 2022 par ce dernier, des photographies et des justificatifs de billets de train et de locations de vacances, ainsi que les pièces produites en appel émanant de la famille de M. A... ne permettent d'établir ni une vie commune ni même une relation datant d'octobre 2020 comme il est soutenu, ou pouvant être considérée comme particulièrement stable et ancienne à la date de la décision litigieuse. Mme C... se prévaut enfin de la présence en France de son frère, qui bénéficie d'un passeport talent pluriannuel, d'une sœur de nationalité française dont elle n'avait pas fait état dans la fiche de parcours adressée à l'administration le 6 avril 2022, du décès de son père, et de ce que sa mère, qui réside au Cameroun, avec qui elle a perdu tout lien, souffre de schizophrénie. Elle n'apporte pas d'informations sur une sœur, Mme C... E..., dont elle avait déclaré dans la " fiche de parcours " adressée à l'administration qu'elle ne résidait pas en France. Si Mme C... établit avoir noué des relations amicales en France, elle ne justifie pas ne pas avoir conservé d'attaches au Cameroun bien qu'elle ait vécu plusieurs années hors de ce pays. Au vu de l'ensemble de ces éléments, et en dépit de la demande de naturalisation qu'elle a déposée et d'une réelle insertion dans la société française, la requérante n'est pas fondée à soutenir qu'en lui refusant la délivrance d'un titre de séjour, le préfet d'Ille-et-Vilaine a porté une atteinte disproportionnée à son droit au respect de sa vie privée et familiale. Par suite, le moyen tiré de la méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales doit être écarté.

10. En second lieu, pour les mêmes motifs que ceux exposés ci-dessus au point 9, le moyen tiré par la requérante de ce que, en décidant de l'obliger à quitter le territoire, le préfet d'Ille-et-Vilaine aurait commis une erreur manifeste d'appréciation des conséquences de sa décision sur sa situation personnelle ne peut être accueilli.

En ce qui concerne les décisions fixant le pays de destination et octroyant un délai de départ de trente jours :

11. Eu égard à ce qui a été dit ci-dessus, en l'absence d'annulation du refus de titre de séjour et de l'obligation de quitter le territoire français, la requérante n'est pas fondée à soutenir que les décisions fixant le pays de destination et lui octroyant un délai de 30 jours pour quitter le territoire devraient, par voie de conséquence, être annulées.

Sur les conclusions à fin d'injonction :

12. Aux termes de l'article L. 911-1 du code de justice administrative : " Lorsque sa décision implique nécessairement qu'une personne morale de droit public ou un organisme de droit privé chargé de la gestion d'un service public prenne une mesure d'exécution dans un sens déterminé, la juridiction, saisie de conclusions en ce sens, prescrit, par la même décision, cette mesure assortie, le cas échéant, d'un délai d'exécution ".

13. Le présent arrêt, qui rejette les conclusions à fin d'annulation, n'implique aucune mesure d'exécution. Dès lors, les conclusions à fin d'injonction dont elles sont assorties ne sauraient être accueillies.

Sur les conclusions à fin d'abrogation de l'arrêté du 23 mai 2022, présentées à titre subsidiaire :

14. Lorsqu'il est saisi de conclusions tendant à l'annulation d'un acte réglementaire, le juge de l'excès de pouvoir apprécie la légalité de cet acte à la date de son édiction. S'il le juge illégal, il en prononce l'annulation. Ainsi saisi de conclusions à fin d'annulation recevables, le juge peut également l'être, à titre subsidiaire, de conclusions tendant à ce qu'il prononce l'abrogation du même acte au motif d'une illégalité résultant d'un changement de circonstances de droit ou de fait postérieur à son édiction, afin que puissent toujours être sanctionnées les atteintes illégales qu'un acte règlementaire est susceptible de porter à l'ordre juridique. Il statue alors prioritairement sur les conclusions à fin d'annulation.

15. Toutefois, la légalité de l'arrêté en litige, qui a le caractère d'un acte individuel, s'appréciant à la date à laquelle il a été pris, Mme C... n'est pas fondée à en demander directement l'abrogation au juge administratif de l'excès de pouvoir, en s'appuyant sur des changements de fait ou de droit postérieurs à son édiction, notamment sur les résultats positifs qu'elle a pu obtenir dans le cursus de master " Métiers de l'enseignement, de l'éducation et de la formation " qu'elle a pu finalement rejoindre. Par suite, de telles conclusions, au demeurant présentées pour la première fois en appel, ne peuvent qu'être rejetées.

16. Il résulte de tout ce qui précède que Mme C... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Rennes a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 23 mai 2022 par lequel le préfet d'Ille-et-Vilaine a rejeté sa demande, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans le délai de trente jours et a fixé le pays de destination.

Sur les frais liés au litige :

17. Les dispositions des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique font obstacle à ce que soit mis à la charge de l'État, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, le versement d'une somme au titre des frais exposés et non compris dans les dépens.

DECIDE :

Article 1er : La requête de Mme C... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme D... C... et au ministre de l'intérieur et des outre-mer.

Copie en sera adressée, pour information, au préfet d'Ille-et-VIlaine.

Délibéré après l'audience du 26 septembre 2023, à laquelle siégeaient :

- Mme Brisson, présidente,

- M. Vergne, président-assesseur,

- Mme Lellouch, première conseillère,

Rendu public par mise à disposition au greffe le 13 octobre 2023.

Le rapporteur,

G.-V. VERGNE

La présidente,

C. BRISSON

Le greffier,

R. MAGEAU

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des outre-mer, en ce qui le concerne, et à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

2

N° 23NT01117


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nantes
Formation : 3ème chambre
Numéro d'arrêt : 23NT01117
Date de la décision : 13/10/2023
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : Mme BRISSON
Rapporteur ?: M. Georges-Vincent VERGNE
Rapporteur public ?: M. BERTHON
Avocat(s) : SEMINO

Origine de la décision
Date de l'import : 22/10/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nantes;arret;2023-10-13;23nt01117 ?
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