La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

13/10/2023 | FRANCE | N°22NT01767

France | France, Cour administrative d'appel de Nantes, 3ème chambre, 13 octobre 2023, 22NT01767


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

Mme Chilina Thérèse Guembaud Kititi a demandé au tribunal administratif de Nantes d'annuler les arrêtés des 26 novembre 2020 et 11 mai 2021 par lesquels le préfet de

Maine-et-Loire lui a fait obligation de quitter le territoire français sans délai, a assorti sa décision d'une interdiction de retour d'une durée d'un an et l'a assignée à résidence dans le département de Maine-et-Loire.

Par un jugement n° 2108420 du 18 mai 2022 le tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande.>
Procédure devant la cour :

Par une requête et un mémoire enregistrés les 8 juin 2022 et 1...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

Mme Chilina Thérèse Guembaud Kititi a demandé au tribunal administratif de Nantes d'annuler les arrêtés des 26 novembre 2020 et 11 mai 2021 par lesquels le préfet de

Maine-et-Loire lui a fait obligation de quitter le territoire français sans délai, a assorti sa décision d'une interdiction de retour d'une durée d'un an et l'a assignée à résidence dans le département de Maine-et-Loire.

Par un jugement n° 2108420 du 18 mai 2022 le tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête et un mémoire enregistrés les 8 juin 2022 et 11 juillet 2023, Mme GUEMBEAUD KITITI, représentée par Me Kogeorgos, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du 18 mai 2022 ;

2°) d'annuler les arrêtés du 26 novembre 2020 et 11 mai 2021 ;

3°) d'enjoindre au préfet du Maine-et-Loire de réexaminer sa situation et de lui délivrer dans l'attente une autorisation provisoire de séjour, sous astreinte de 100 euros par jour de retard à l'expiration d'un délai de 8 jours suivant la notification de l'arrêt à intervenir ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat, au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative la somme de 2 000 euros à verser à son conseil dans les conditions fixées à l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.

Elle soutient que :

- La décision lui faisant obligation de quitter le territoire français :

- est entachée d'un défaut de motivation en méconnaissance de l'article L. 211-2 du code des relations entre le public et l'administration ;

- est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation de sa situation personnelle et familiale en méconnaissance de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme ;

- La décision portant interdiction de retour sur le territoire français est illégale pour les mêmes motifs que ceux concernant l'obligation de quitter le territoire français ;

- La décision portant assignation à résidence est insuffisamment motivée ; elle est entachée d'une erreur d'appréciation et méconnaît l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ainsi que le paragraphe 1 de l'article 3 de la convention internationale des droits de l'enfant.

Par un mémoire en défense enregistré le 10 juillet 2023, le préfet de Maine-et-Loire conclut au rejet de la requête.

Il fait valoir qu'aucun moyen n'est fondé.

Les parties ont été informées, en application de l'article R. 611-7 du code de justice administrative, que la décision de la cour est susceptible d'être fondée sur un moyen relevé d'office tiré de ce que les conclusions de la requête à fins d'annulation des décisions portant obligation de quitter le territoire français, fixation du pays de destination et interdiction de retour sur le territoire national sont devenues sans objet compte tenu de la délivrance, le 6 mars 2023, par le préfet, d'une carte de séjour temporaire qui a pour effet d'abroger l'arrêté n° 2020-2889.

Un mémoire a été présenté le 22 août 2023 pour Mme GUEMBEAUD KITITI en réponse à ce moyen d'ordre public.

Mme GUEMBEAUD KITITI a été admise au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 15 juin 2022.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- la convention internationale des droits de l'enfant ;

- le code des relations entre le public et l'administration ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le décret n° 202-1717 du 28 décembre 2020 ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Vergne,

- et les conclusions de M. Berthon, rapporteur public.

Considérant ce qui suit :

1. Mme Chilina Thérèse Guembeaud Kititi, ressortissante de la République du Congo, née le 5 janvier 1979 à Brazzaville, est entrée en France le 13 décembre 2015 sous couvert d'un visa de court séjour et s'y est maintenue après l'expiration de ce visa. Le 11 décembre 2018, elle a présenté une demande de titre de séjour " vie privée et familiale ". Elle a donné naissance, le

17 juillet 2019, à un enfant français prénommé Noé-Esteban. Le 16 octobre 2019, un arrêté portant refus de séjour et obligation de quitter le territoire français a été édicté à son encontre. Le recours formé par l'intéressée contre cette décision a été rejeté pour irrecevabilité par un jugement du tribunal administratif de Nantes du 30 mars 2020, confirmé par un arrêt de la cour administrative d'appel de Nantes du 15 juillet 2020. Interpellée le 26 novembre 2020 par les services de police, l'intéressée a fait l'objet d'une vérification de sa situation administrative. Par deux arrêtés du 26 novembre 2020, le préfet de Maine-et-Loire, d'une part, lui a fait obligation de quitter le territoire sans délai et a assorti sa décision d'une interdiction de retour en France d'une durée d'un an, d'autre part, l'a assignée à résidence dans le département de Maine-et-Loire pour une durée de 6 mois, ce dernier arrêté ayant été renouvelé pour une nouvelle durée de

6 mois par un arrêté du 11 mai 2021. Mme GUEMBEAUD KITITI relève appel du jugement du

18 mai 2022 par lequel le tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande tendant à l'annulation de ces décisions.

2. Un recours pour excès de pouvoir dirigé contre un acte administratif n'a d'autre objet que d'en faire prononcer l'annulation avec effet rétroactif. Si, avant que le juge n'ait statué, l'acte attaqué est rapporté par l'autorité compétente et si le retrait ainsi opéré acquiert un caractère définitif faute d'être contesté dans le délai du recours contentieux, il emporte alors disparition rétroactive de l'ordonnancement juridique de l'acte contesté, ce qui conduit à ce qu'il n'y ait lieu pour le juge de la légalité de statuer sur le mérite du recours dont il était saisi. Il en va ainsi, quand bien même l'acte rapporté aurait reçu exécution. Dans le cas où l'administration se borne à procéder à l'abrogation de l'acte attaqué, cette circonstance prive d'objet le pourvoi formé à son encontre, à la double condition que cet acte n'ait reçu aucune exécution pendant la période où il était en vigueur et que la décision procédant à son abrogation soit devenue définitive.

Sur les conclusions dirigées contre l'arrêté portant obligation de quitter le territoire sans délai et interdiction de retour sur le territoire :

3. Il ressort des pièces du dossier que, le 6 mars 2023, le préfet de Maine-et-Loire a délivré à Mme GUEMBEAUD KITITI, postérieurement à l'introduction de sa requête, une carte de séjour temporaire l'autorisant à travailler valable jusqu'au 5 mars 2024. Ainsi, le préfet a implicitement mais nécessairement abrogé l'arrêté en litige du 26 novembre 2020 obligeant l'intéressée à quitter le territoire français, fixant le pays de destination et lui faisant interdiction de retour sur ce territoire pendant une durée d'un an. Cette abrogation est devenue définitive et il ne ressort d'aucune des pièces du dossier que les décisions en cause auraient été exécutées. Par suite, les conclusions à fin d'annulation dirigées contre les arrêtés préfectoraux portant obligation de quitter le territoire français, fixation du pays de destination et interdiction de retour sur le territoire français sont devenues sans objet.

4. Il s'ensuit qu'il n'y a plus lieu de statuer sur les conclusions de la requête d'appel de

Mme GUEMBEAUD KITITI tendant à l'annulation de l'arrêté du 26 novembre 2020 par lequel le préfet de Maine-et-Loire lui a fait obligation de quitter le territoire français sans délai et a prononcé à son encontre une interdiction de retour d'une durée d'un an.

Sur les conclusions dirigées contre l'arrêté d'assignation à résidence :

5. Il y a lieu, en revanche, de statuer sur la légalité des arrêtés du 26 novembre 2020 et du

11 mai 2021 par lesquels le préfet de Maine-et-Loire a assigné Mme GUEMBEAUD KITITI à résidence dans le département de Maine-et-Loire pour une durée de six mois et a prolongé cette assignation, ces décisions ayant nécessairement produit des effets pendant la période où elles étaient en vigueur.

6. Mme GUEMBEAUD KITITI fait valoir dans ses écritures qu'elle est mère d'un enfant français, ce qui lui confère le droit à la délivrance d'un titre de séjour sans avoir à justifier d'une communauté de vie durable avec le père de son enfant. Il est constant qu'elle a donné naissance, le 17 juillet 2019, à un enfant français, prénommé Noé-Esteban, et qu'elle s'occupe de cet enfant, avec qui elle vit depuis sa naissance en France. Dès lors que les dispositions de l'article

L. 423-7 du code de l'entrée et du séjour des étrangers prévoient la délivrance de plein droit d'un titre de séjour au parent d'un enfant français justifiant contribuer effectivement à son entretien et à son éducation, et que celles du 5° de l'article L. 611-3 du code font obstacle, sous les mêmes conditions, à l'édiction d'une obligation de quitter le territoire, le moyen tiré de ce que la décision d'assignation à résidence visant Mme GUEMBEAUD KITITI, et qui n'a d'autre fin que de permettre la mise à exécution de la mesure d'éloignement prise à son encontre, est entachée d'erreur d'appréciation, doit être accueilli. La requérante est, par suite, fondée à soutenir que c'est à tort que les premiers juges ont rejeté ses conclusions tendant à l'annulation de cette décision.

Sur les conclusions à fin d'injonction :

7. Le présent arrêt n'implique aucune mesure particulière d'exécution par l'administration. Dès lors les conclusions à fin d'injonction et d'astreinte présentées par la requérante ne peuvent qu'être rejetées.

Sur les frais d'instance :

8. Mme GUEMBEAUD KITITI a été admise au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale. Par suite son conseil peut se prévaloir des dispositions de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 et de l'article L 761-1 du code de justice administrative. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce et sous réserve que Me Kogeorgos renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'Etat, de mettre à la charge de l'Etat le versement à ce dernier de la somme de 1 200 euros.

DECIDE :

Article 1er : Il n'y a plus lieu de statuer sur les conclusions à fin d'annulation présentées par Mme GUEMBEAUD KITITI à l'encontre de l'arrêté du 26 novembre 2020 par lequel le préfet de Maine-et-Loire lui a fait obligation de quitter le territoire français sans délai et a prononcé à son encontre une interdiction de retour d'une durée d'un an et sur les conclusions à fin d'injonction tendant à la délivrance à l'intéressée d'un titre de séjour.

Article 2 : Les arrêtés du 26 novembre 2020 et du 11 mai 2021 par lesquels le préfet de Maine-et-Loire a assigné Mme GUEMBEAUD KITITI à résidence pour une durée de six mois et a prolongé cette assignation sont annulés.

Article 3 : L'Etat versera à Me Kogeorgos la somme de 1 200 euros dans les conditions fixées à l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à Mme Chilina Thérèse et au ministre de l'intérieur et des outre-mer.

Copie en sera adressée, pour information, au préfet de Maine et Loire.

Délibéré après l'audience du 26 septembre 2023, à laquelle siégeaient :

- Mme Brisson, présidente,

- M. Vergne, président-assesseur,

- Mme Lellouch, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 13 octobre 2023.

Le rapporteur,

G.-V. VERGNE

La présidente,

C. BRISSON

Le greffier,

R. MAGEAU

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des outre-mer, en ce qui le concerne, et à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

2

N° 22NT01767


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nantes
Formation : 3ème chambre
Numéro d'arrêt : 22NT01767
Date de la décision : 13/10/2023
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : Mme BRISSON
Rapporteur ?: M. Georges-Vincent VERGNE
Rapporteur public ?: M. BERTHON
Avocat(s) : KOGEORGOS

Origine de la décision
Date de l'import : 22/10/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nantes;arret;2023-10-13;22nt01767 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award