Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
Mme D... B... et M. C... A... ont demandé au tribunal administratif de Nantes d'annuler la décision implicite, née le 20 mars 2022, par laquelle la commission de recours contre les décisions de refus de visa d'entrée en France a rejeté le recours contre la décision du 16 décembre 2021 de l'autorité consulaire française à Alger refusant de délivrer à Mme B... un visa de court séjour en vue de se marier en France avec M. A....
Par un jugement n°2210905 du 9 mai 2023, le tribunal administratif de Nantes a annulé cette décision et enjoint au ministre de l'intérieur et des outre-mer de délivrer à Mme B... le visa sollicité dans un délai de deux mois, sous réserve de la justification d'une nouvelle date de mariage.
Procédure devant la cour :
Par une requête enregistrée le 7 juillet 2023, le ministre de l'intérieur et des outre-mer demande à la cour de prononcer le sursis à exécution de ce jugement en application des dispositions de l'article R. 811-15 du code de justice administrative.
Il soutient que :
- faute de se prononcer sur la légalité interne du refus de visa, le tribunal administratif ne pouvait enjoindre la délivrance du visa sollicité ;
- aucune demande régulière de communication des motifs n'est parvenue à l'administration ;
- M. A... n'a pas les ressources nécessaires pour accueillir Mme B... en France ;
- compte tenu de la réouverture des frontières et de la possibilité pour le couple de se rencontrer en Algérie, l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales n'a pas été méconnu au titre du droit à la vie familiale ; l'article 12 de la même convention relatif au droit de se marier n'a pas davantage été méconnu compte tenu de ce que le projet de mariage n'apparait pas vraisemblable matériellement et de ce que l'intention matrimoniale de Mme B... est sujette à caution.
Par un mémoire en défense enregistré le 30 août 2023, M. A... et Mme B..., représentés par Me Pollono, concluent au rejet de la requête et à ce que soit mis à la charge de l'Etat le versement de de la somme de 1 800 euros à leur avocate au titre des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 et subsidiairement, en cas de refus de la demande d'aide juridictionnelle, le versement de la même somme aux requérants au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Ils soutiennent que :
- aucune disposition légale n'interdisait aux premiers juges d'enjoindre à la délivrance du visa à la suite d'une annulation pour un motif de légalité externe ;
- aucun autre moyen de la requête n'apparaît sérieux et de nature à justifier, outre l'annulation du jugement attaqué, le rejet des conclusions à fin d'annulation accueillies par ce jugement.
Par décision du 21 septembre 2023, le bureau d'aide juridictionnelle près le tribunal judiciaire de Nantes (section administrative) a admis Mme B... au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale.
Vu :
- la requête n°23NT02027 enregistrée le 7 juillet 2023, par laquelle le ministre de l'intérieur et des outre-mer a demandé l'annulation du même jugement ;
- les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Après avoir entendu au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Francfort, président ;
- et les observations de Me Pavy, substituant Me Pollono, pour Mme B....
Considérant ce qui suit :
1. Aux termes de l'article R. 222-25 du code de justice administrative, " Les affaires sont jugées soit par une chambre siégeant en formation de jugement, soit par une formation de chambres réunies, soit par la cour administrative d'appel en formation plénière, qui délibèrent en nombre impair. / Par dérogation à l'alinéa précédent, le président de la cour ou le président de chambre statue en audience publique et sans conclusions du rapporteur public sur les demandes de sursis à exécution mentionnées aux articles R. 811-15 à R. 811-17 ". Aux termes de l'article R. 811-15 du même code : " Lorsqu'il est fait appel d'un jugement de tribunal administratif prononçant l'annulation d'une décision administrative, la juridiction d'appel peut, à la demande de l'appelant, ordonner qu'il soit sursis à l'exécution de ce jugement si les moyens invoqués par l'appelant paraissent, en l'état de l'instruction, sérieux et de nature à justifier, outre l'annulation ou la réformation du jugement attaqué, le rejet des conclusions à fin d'annulation accueillies par ce jugement ".
2. Mme D... B..., ressortissante algérienne, a sollicité la délivrance d'un visa auprès des autorités consulaires françaises à Alger en vue de se marier en France avec M. A..., ressortissant français. Par une décision du 16 décembre 2021, ces autorités ont refusé de lui délivrer ce visa. Par une décision implicite née le 20 mars 2022 la commission de recours contre les décisions de refus de visa d'entrée en France a rejeté le recours formé contre cette décision consulaire. Par un jugement du 9 mai 2023, le tribunal administratif de Nantes a annulé cette décision de la commission de recours et a enjoint au ministre de l'intérieur et des outre-mer de délivrer le visa sollicité dans un délai de deux mois à compter de la notification de ce jugement, sous réserve de la justification d'une nouvelle date de mariage.
3. Le moyen tiré par le ministre de ce que le défaut de motivation du refus de visa opposé par la commission de recours contre les décisions de refus de visa d'entrée en France manque en fait, à défaut de justification d'une demande de communication des motifs restée sans réponse, paraît, en l'état de l'instruction, sérieux et de nature à justifier l'annulation du jugement attaqué en tant qu'il a annulé le refus de séjour.
4. En outre le moyen tiré de ce que le défaut de motivation, à le supposer constitué, n'impliquait pas nécessairement la délivrance du visa paraît, en l'état de l'instruction, sérieux et de nature à justifier l'annulation du jugement attaqué en tant qu'il a fait injonction au ministre de l'intérieur et des outre-mer de délivrer le visa en litige.
5. Ces moyens paraissent en outre, en l'état de l'instruction, de nature à justifier le rejet de la demande de première instance.
6. En conséquence, il y a lieu de décider le sursis à exécution du jugement n°2210905 du 9 mai 2023 du tribunal administratif de Nantes.
7. Par voie de conséquence, doivent être rejetées les conclusions présentées par M. A... et Mme B... au titre des frais engagés pour l'instance, dès lors que l'Etat n'est pas, au sens des dispositions articles L.761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991, la partie perdante dans la présente instance.
DECIDE :
Article 1er : Jusqu'à ce qu'il ait été statué sur la requête n° 23NT02027 tendant à l'annulation du jugement n°2210905 du 9 mai 2023 du tribunal administratif de Nantes, il sera sursis à l'exécution de ce jugement.
Article 2 : Les conclusions présentées par M. A... et Mme B... au titre des articles
L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 sont rejetées.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié au ministre de l'intérieur et des outre-mer à Mme D... B... et à M. C... A....
Rendu public par mise à disposition au greffe de la Cour le 22 septembre 2023.
Le président-rapporteur,
J. FRANCFORT
La greffière,
S. PIERODE
La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des outre-mer en ce qui le concerne, et à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
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N° 23NT02028