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19/09/2023 | FRANCE | N°22NT01365

France | France, Cour administrative d'appel de Nantes, 6ème chambre, 19 septembre 2023, 22NT01365


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Le département de la Vendée a demandé au tribunal administratif de Nantes d'annuler l'avis du 4 octobre 2017 par lequel le conseil de discipline de recours de la région des Pays de la Loire a estimé qu'il y avait lieu de ne prononcer aucune sanction disciplinaire à l'encontre de Mme A... C....

Par un jugement n°1800022 du 7 mars 2022, le tribunal administratif de Nantes a annulé l'avis du conseil de discipline de recours de la région des Pays de la Loire du 4 octobre 2017.

Procédure devant l

a cour :

Par une requête, enregistrée le 5 mai 2022, Mme C..., représentée par Me G...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Le département de la Vendée a demandé au tribunal administratif de Nantes d'annuler l'avis du 4 octobre 2017 par lequel le conseil de discipline de recours de la région des Pays de la Loire a estimé qu'il y avait lieu de ne prononcer aucune sanction disciplinaire à l'encontre de Mme A... C....

Par un jugement n°1800022 du 7 mars 2022, le tribunal administratif de Nantes a annulé l'avis du conseil de discipline de recours de la région des Pays de la Loire du 4 octobre 2017.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 5 mai 2022, Mme C..., représentée par Me Grimaldi, demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Nantes du 7 mars 2022 ;

2°) de rejeter la demande présentée par Mme C... devant le tribunal administratif de Nantes ;

3) de mettre à la charge du département de la Vendée une somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- la matérialité des faits qui lui sont reprochés n'est pas établie :

* les griefs retenus reposent exclusivement sur les comptes rendus des entretiens, réalisés par la Direction des ressources humaines au sein de l'établissement, retranscrits par le conseil départemental de la Vendée, sans qu'aucune pièce probante ne soit produite au soutien desdits griefs ;

* les relations entre les agents du département étaient déjà conflictuelles avant son arrivée au sein de l'établissement, elle entretient d'excellentes relations avec ses collègues et ses compétences professionnelles sont reconnues.

Par un mémoire en défense, enregistré le 3 mars 2023, le département de la Vendée conclut au rejet de la requête et à ce qu'il soit mis à la charge de Mme C... une somme de 2 000 euros sur le fondement des dispositions de l'article L.761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que les moyens soulevés par Mme C... ne sont pas fondés.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code des relations entre le public et l'administration ;

- la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 ;

- la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 ;

- le décret n°89-677 du 18 septembre 1989 ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Pons,

- les conclusions de Mme Bougrine, rapporteure publique,

- et les observations de Me Bekpoli pour le département de la Vendée.

Considérant ce qui suit :

1. Mme C... est agent titulaire du département de la Vendée depuis le 1er juin 2008. Elle exerce, en qualité d'adjointe technique principale de 2ème classe et depuis le mois de juin 2011, les fonctions de cheffe de cuisine au sein du collège ... de ... (Vendée). A l'occasion d'entretiens avec la direction des ressources humaines du conseil départemental de la Vendée, les 30 janvier et 16 mars 2017, deux agents travaillant au sein de la cuisine de ce collège ont rapporté un certain nombre de faits, alors qualifié de " graves " concernant Mme C... et une de ses collègues. La direction des ressources humaines du conseil départemental a alors diligenté une enquête administrative et organisé, entre les mois de mars et avril 2017, des entretiens avec des agents travaillant au collège ou l'ayant quitté récemment. Le conseil de discipline de la fonction publique territoriale de Vendée a été saisi d'une proposition de révocation de Mme C... et s'est prononcé, le 19 juin 2017, à la majorité de ses membres, en faveur d'une absence de sanction. Par un arrêté du 10 juillet 2017, le président du conseil départemental de la Vendée a prononcé à l'encontre de Mme C... la sanction d'exclusion temporaire de fonctions de 12 mois à compter du 13 juillet 2017. La requérante a contesté cet arrêté devant le conseil de discipline de recours de la région des Pays de la Loire qui, par un avis du 4 octobre 2017, a estimé qu'il y avait lieu de ne prononcer aucune sanction disciplinaire à l'encontre de Mme C.... Par un jugement du 7 mars 2022, dont Mme C... relève appel, le tribunal administratif de Nantes a annulé l'avis du conseil de discipline de recours de la région des Pays de la Loire du 4 octobre 2017.

Sur le bien-fondé du jugement attaqué :

2. D'une part, aux termes de l'article 29 de la loi du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires, dans sa rédaction applicable au litige : " Toute faute commise par un fonctionnaire dans l'exercice ou à l'occasion de l'exercice de ses fonctions l'expose à une sanction disciplinaire sans préjudice, le cas échéant, des peines prévues par la loi pénale ". L'article 89 de la loi du 26 janvier 1984 susvisée portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique territoriale dispose : " Les sanctions disciplinaires sont réparties en quatre groupes. Premier groupe : l'avertissement ; le blâme ; - l'exclusion temporaire de fonctions pour une durée maximale de trois jours ; Deuxième groupe : l'abaissement d'échelon ; l'exclusion temporaire de fonctions pour une durée de quatre à quinze jours ; Troisième groupe : la rétrogradation ; l'exclusion temporaire de fonctions pour une durée de seize jours à deux ans. Quatrième groupe : la mise à la retraite d'office ; la révocation. (...) ".

3. D'autre part, aux termes de l'article 15 du décret du 18 septembre 1989 relatif à la procédure disciplinaire applicable aux fonctionnaires territoriaux, dans sa rédaction applicable au litige : " La décision portant sanction disciplinaire peut être portée par le fonctionnaire intéressé devant le conseil de discipline de recours compétent dans les cas et conditions prévus par les articles 18 à 28 du présent décret. / Si, dans l'hypothèse prévue au dernier alinéa de l'article 12, une sanction autre que l'une de celles du premier groupe a été prononcée, le fonctionnaire peut également saisir le conseil de discipline de recours. (...) ".

4. Il appartient au juge de l'excès de pouvoir, saisi de moyens en ce sens, de rechercher si les faits reprochés à un agent public ayant fait l'objet d'une sanction disciplinaire constituent des fautes de nature à justifier une sanction et si la sanction retenue est proportionnée à la gravité de ces fautes. Il lui appartient également de rechercher si la sanction proposée par un conseil de discipline de recours statuant sur le recours d'un fonctionnaire territorial est proportionnée à la gravité des fautes qui lui sont reprochées.

5. En l'espèce, la sanction d'exclusion temporaire de fonctions de douze mois prononcée par le conseil départemental à l'encontre de Mme C... est fondée sur la profération d'insultes, critiques, menaces, ainsi que l'existence d'humiliations et brimades répétées à l'encontre de collègues de la cuisine du collège, une mise en doute perpétuelle de leurs connaissances, des actes de vulgarité au quotidien, des actes délibérés en vue de pousser ses collègues à la faute, une surveillance à outrance des agents, une mise à l'écart systématique des agents n'acceptant pas ce mode de fonctionnement, un acharnement sur les agents les plus faibles, des manipulations et mensonges favorisant une ambiance délétère au sein du collège et de vives tensions entre agents travaillant dans l'équipe de la cuisine ou en dehors, un non-respect des règles en matière de pause-déjeuner, une iniquité de traitement entre agents, un exercice excessif et inapproprié de son pouvoir hiérarchique, une absence d'accompagnement et de formation des agents dans leur apprentissage du métier en cuisine et un manque d'exemplarité. Elle est également fondée sur les traumatismes psychologiques et l'impact destructeur ressentis par les agents et sur le fait que ce comportement professionnel caractérise un manquement à l'obligation de réserve dans ses relations avec ses subordonnés, un manque de conscience professionnelle dans l'exécution de ses tâches et est de nature à porter atteinte à l'image de la fonction publique.

6. En premier lieu, comme l'a relevé le tribunal, les faits et agissements reprochés à Mme C... sont matériellement établis par la plainte pénale déposée à son encontre, par la réunion de plusieurs témoignages concordants, précis, circonstanciés, non contradictoires et objectifs recueillis auprès de dix-sept agents du collège ..., agents techniques territoriaux, affectés à la cuisine ou à l'entretien des locaux et ayant travaillé avec l'appelante ou travaillant encore avec elle au moment de leur audition par la direction du service des ressources humaines du conseil départemental de la Vendée. M. B... fait notamment état, dans son témoignage du 9 mai 2017, du climat " vicieux et délétère " que Mme C... imposait à l'ensemble des agents de la cuisine du collège .... La circonstance que les relations entre les agents du département étaient déjà conflictuelles avant l'arrivée de la requérante au sein de l'établissement, que cette dernière entretienne d'excellentes relations avec certains de ses collègues et que ses compétences professionnelles soient reconnues, n'est pas de nature à remettre en cause la matérialité les faits reprochés à Mme C....

7. En second lieu, eu égard à leur gravité, à leur répétition caractérisée par des actes vexatoires et des insultes à l'encontre des subordonnés de la requérante, à la méconnaissance qu'ils traduisent des responsabilités afférentes à sa qualité de supérieure hiérarchique et aux conséquences qu'ils ont eues pour le personnel de l'établissement scolaire et plus précisément pour les agents techniques territoriaux ayant travaillé en contact avec Mme C..., les faits reprochés à cette dernière sont constitutifs de fautes de nature à justifier une sanction disciplinaire.

8. Il résulte de tout ce qui précède, que Mme C... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande.

Sur les frais liés au litige :

9. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge du département de la Vendée, qui n'est pas dans la présente instance partie perdante, la somme demandée par Mme C..., au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire droit aux conclusions du département de la Vendée présentées sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de Mme C... est rejetée.

Article 2 : Les conclusions du département de la Vendée tendant au bénéfice des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié au département de la Vendée et à Mme A... C....

Délibéré après l'audience du 1er septembre 2023, à laquelle siégeaient :

- M. Gaspon, président de chambre,

- M. Coiffet, président-assesseur,

- M. Pons, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe, le 19 septembre 2023.

Le rapporteur,

F. PONSLe président,

O. GASPON

La greffière,

I. PETTON

La République mande et ordonne au ministre de la cohésion des territoires et des relations avec les collectivités territoriales en ce qui le concerne, et à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

2

N° 22NT01365


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nantes
Formation : 6ème chambre
Numéro d'arrêt : 22NT01365
Date de la décision : 19/09/2023
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. GASPON
Rapporteur ?: M. François PONS
Rapporteur public ?: Mme BOUGRINE
Avocat(s) : CENTAURE AVOCATS CLAISSE

Origine de la décision
Date de l'import : 24/09/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nantes;arret;2023-09-19;22nt01365 ?
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