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04/07/2023 | FRANCE | N°22NT00561

France | France, Cour administrative d'appel de Nantes, 6ème chambre, 04 juillet 2023, 22NT00561


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A... B... a demandé au tribunal administratif de Rennes, tout d'abord, d'annuler la décision du 7 juin 2019 par laquelle le président du conseil départemental des Côtes-d'Armor a refusé de le placer en congé pour invalidité temporaire imputable au service, ainsi que la décision du 25 juillet 2019 par laquelle cette autorité a rejeté son recours gracieux, ensuite, d'enjoindre au département des Côtes-d'Armor de réexaminer sa demande dans un délai d'un mois à compter de la notification du jugement,

enfin, de mettre à la charge de cette collectivité la somme de 2 000 euros su...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A... B... a demandé au tribunal administratif de Rennes, tout d'abord, d'annuler la décision du 7 juin 2019 par laquelle le président du conseil départemental des Côtes-d'Armor a refusé de le placer en congé pour invalidité temporaire imputable au service, ainsi que la décision du 25 juillet 2019 par laquelle cette autorité a rejeté son recours gracieux, ensuite, d'enjoindre au département des Côtes-d'Armor de réexaminer sa demande dans un délai d'un mois à compter de la notification du jugement, enfin, de mettre à la charge de cette collectivité la somme de 2 000 euros sur le fondement des dispositions de l'article L. 761- 1 du code de justice administrative.

Par un jugement n° 1904830 du 27 décembre 2021, le tribunal administratif de Rennes a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 24 février 2022 et un mémoire complémentaire enregistré le 5 octobre 2022, M. B..., représenté par Me Boulais, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Rennes du 27 décembre 2021 ;

2°) d'annuler les décisions du 7 juin 2019 et du 25 juillet 2019 du président du conseil départemental des Côtes-d'Armor ;

3°) d'enjoindre au département des Côtes-d'Armor de réexaminer sa demande dans un délai d'un mois à compter de la notification de la décision à intervenir ;

4°) de mettre à la charge du département des Côtes-d'Armor la somme de 2000 euros à verser à son conseil sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.

Il soutient que :

- les premiers juges ont appliqué à tort les délais de l'article 15 du décret n° 2019-301 dès lors que le département a méconnu les dispositions transitoires du décret n° 2019-301 et, plus spécifiquement, le dernier alinéa de son article 15 ;

- la décision du 7 juin 2019 a été prise au terme d'une procédure irrégulière en ce que la commission de réforme n'a pas été préalablement saisie ;

- cette décision a été prise en méconnaissance de l'article 37-3 du décret du 30 juillet 1987 en ce qu'il se trouvait dans l'incapacité absolue de transmette la déclaration d'accident de service dans le délai prévu par cet article.

Par un mémoire en défense, enregistré le 7 septembre 2022 et un mémoire enregistré le 17 novembre 2022, le département des Côtes-d'Armor, représenté par Me Magnaval conclut au rejet de la requête.

Il soutient que les moyens soulevés par M. B... ne sont pas fondés.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le décret du n°87-602 du 30 juillet 1987 ;

- le décret n°2019-301 du 10 avril 2019 ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Coiffet,

- les conclusions de Mme Malingue, rapporteure publique,

- et les observations de Me Potterie, substituant Me Magnaval, représentant le département des Côtes-d'Armor.

Considérant ce qui suit :

1. M. B... fonctionnaire titulaire, employé au grade de technicien principal de 2ème classe par le département des Côtes-d'Armor, a transmis à son employeur un certificat médical initial d'arrêt de travail du 16 mai 2019 faisant état d'un accident de service et d'un " syndrome anxio-dépressif post traumatique psychologique - harcèlement moral ". Par un courrier du 7 juin 2019 le président du conseil départemental a informé M. B... de son placement en congé de maladie ordinaire à compter du 16 mai 2019. Le recours gracieux formé par M. B... contre cette décision a été rejeté le 25 juillet 2019.

2. M. B... a, le 25 septembre 2019, saisi le tribunal administratif de Rennes, d'une demande tendant à l'annulation des décisions du 7 juin 2019 et du 25 juillet 2019 du président du conseil départemental des Côtes-d'Armor. L'intéressé relève appel du jugement du 27 décembre 2021 par lequel cette juridiction a rejeté sa demande.

Sur les conclusions à fin d'annulation :

3. Aux termes, d'une part, de l'article 37-2 du décret du 30 juillet 1987 pris pour l'application de la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984, article introduit par le décret n° 2019-601 du 10 avril 2019 relatif au congé pour invalidité temporaire imputable au service dans la fonction publique territoriale : " Pour obtenir un congé pour invalidité temporaire imputable au service, le fonctionnaire, ou son ayant- droit, adresse par tout moyen à l'autorité territoriale une déclaration d'accident de service, (...) accompagnée des pièces nécessaires pour établir ses droits. / La déclaration comporte :/ 1° Un formulaire précisant les circonstances de l'accident ou de la maladie. Ce formulaire est transmis par l'autorité territoriale à l'agent qui en fait la demande, dans un délai de quarante- huit heures suivant celle- ci et, le cas échéant, par voie dématérialisée, si la demande le précise ;/ 2° Un certificat médical indiquant la nature et le siège des lésions résultant de l'accident ou de la maladie ainsi que, le cas échéant, la durée probable de l'incapacité de travail en découlant. ". L'article 37- 3 de ce décret dispose : " I.- La déclaration d'accident de service (...) est adressée à l'autorité territoriale dans le délai de quinze jours à compter de la date de l'accident. / Ce délai n'est pas opposable à l'agent lorsque le certificat médical prévu au 2° de l'article 37- 2 est établi dans le délai de deux ans à compter de la date de l'accident. Dans ce cas, le délai de déclaration est de quinze jours à compter de la date de cette constatation médicale. (...) / IV. - Lorsque les délais prévus aux I et II ne sont pas respectés, la demande de l'agent est rejetée. / Les délais prévus aux I, II et III ne sont pas applicables lorsque le fonctionnaire entre dans le champ de l'article L. 169- 1 du code de la sécurité sociale ou s'il justifie d'un cas de force majeure, d'impossibilité absolue ou de motifs légitimes. ". D'autre part, le décret du 10 avril 2019 prévoit par ailleurs dans ses dispositions transitoires que les conditions de délais ne s'appliquent qu'à compter du 1er juin 2019 si la déclaration est antérieure au 1er juin 2019.

4. Le président du conseil départemental des Côtes-d'Armor, dans la décision contestée du 7 juin 2019, après avoir rappelé précisément les dispositions - citées au point précédent - des articles 37-2 et 37-3 du décret du 30 juillet 1987, a, tout d'abord, indiqué : " A ce jour, il apparaît que cette déclaration - déclaration d'accident de service - n'a pas été réceptionnée par la collectivité " puis a ajouté " Aussi, dans la mesure où le délai imparti est arrivé à échéance, je vous informe que vous êtes placé en congé de maladie ordinaire, et non en congé pour maladie imputable au service " en précisant qu'était joint également à ce pli " un arrêté plaçant l'intéressé en congé de maladie ordinaire du 16 mai au 28 juin 2019 ". La décision du 25 juillet 2019, intervenue sur recours gracieux de M. B..., est fondée sur la même motivation rappelant à l'agent que " sa demande n'a pu dès lors être instruite ".

5. Il ressort des pièces du dossier que M. B... a, le 20 mai 2019, transmis à la direction des ressources humaines du conseil départemental un certificat médical d'arrêt de travail établi le 16 mai 2019 par son médecin traitant faisant état d'un accident de service survenu le jour même. Il est constant qu'il n'a pas, comme le retiennent les décisions contestées, accompagné cette transmission à la collectivité territoriale d'une déclaration d'accident de service, en particulier du formulaire évoqué par le 1° de l'article 37-2 du décret n° 87-602 précisant les circonstances de l'accident et qui fait partie intégrante de la déclaration d'accident de service, dans le délai de 15 jours précité qui courait en l'espèce à compter de la date d'établissement du certificat médical. Il est également constant que M. B... n'a pas davantage, postérieurement à ce délai, adressé à son employeur le formulaire en question.

6. Pour contester le bien-fondé du motif fondant les décisions de refus contestées, rappelé au point 4, M. B... soutient tout d'abord, qu'on ne saurait lui reprocher de ne pas avoir respecté le délai de 15 jours qui ne lui était pas opposable du fait des dispositions transitoires prévues par le décret du 10 avril 2019. Toutefois, s'il est exact que les dispositions du décret du 10 avril 2019 précisent effectivement que ces conditions de délai " ne s'appliquent qu'à compter du 1er juin 2019 si la déclaration est antérieure au 1er juin 2019 ", elles n'ont pas pour objet et ne sauraient avoir pour effet de dispenser l'agent de déposer une déclaration d'accident de travail constituée à la fois d'un certificat médical et d'un formulaire. Or, ainsi qu'il a été rappelé, M. B... n'a jamais adressé à son employeur le formulaire précisant les circonstances de la maladie, prescrit par le 1° de l'article 37-2 du décret du 30 juillet 1987, rappelé au point 3. Le moyen sera écarté dans cette branche.

7. M. B... verse ensuite aux débats, pour justifier du non-respect du délai de 15 jours, un certificat médical du 27 juin 2019 de son médecin traitant indiquant qu'il se trouvait " dans l'incapacité absolue de transmettre une déclaration écrite dans le délai de 15 jours afin de reconnaître l'accident de travail imputable au service " et il a, en appel, produit trois témoignages établis en janvier 2022, soit plus de trois ans après la période en litige, évoquant sans être davantage circonstanciés " son caractère anxieux et dépressif ". Toutefois, ces seuls documents insuffisamment circonstanciés, ne permettent pas de démontrer que l'intéressé se trouvait dans la situation prévue par les dispositions précitées du IV de l'article 37- 3 du décret du 30 juillet 1987 - cas de " force majeure, d'impossibilité absolue ou de motifs légitimes " - dans laquelle le délai de quinze jours n'est pas applicable. En tout état de cause, comme indiqué au point précédent, M. B... n'a jamais adressé à son employeur le formulaire précisant les circonstances de la maladie, prescrit par le 1° de l'article 37-2 du décret du 30 juillet 1987, ne permettant pas de considérer qu'il avait transmis à son employeur une déclaration d'accident de service complète.

8. M. B... soutient enfin, pour la première fois en appel, qu'en vertu de l'article 37-2 du décret du 30 juillet 1987, il appartenait au conseil départemental de lui transmettre le formulaire de demande d'accident de travail, ce que son employeur s'est abstenu de faire. Il résulte cependant de ces dispositions que, si la transmission du formulaire est effectivement à la charge de l'autorité territoriale dans un délai de 48 heures, cette transmission fait suite à la demande de l'agent. Par suite, M. B... ne saurait utilement soutenir que le département ne pouvait légalement lui opposer un refus faute de lui avoir transmis le formulaire. Le département justifie au demeurant avoir rappelé à ses agents, par les termes de l'article 15 de son règlement intérieur santé et sécurité au travail signé le 1er février 2019 et les informations figurant sur l'intranet du service, les démarches à accomplir dans le cadre d'une demande de CITIS.

9. Il résulte de ce qui vient d'être dit que l'administration n'a pu instruire la demande de congé pour invalidité temporaire imputable au service de M. B... faute pour l'agent, dûment informé, d'avoir transmis la déclaration d'accident de service complète dont le contenu est précisément fixé par les dispositions précitées de l'article 37-2 du décret du 30 juillet 1987. Par suite, le moyen tiré de l'absence de saisine préalable de la commission de réforme, qui ne pouvait être utilement invoqué, doit être écarté pour ce motif.

10. Il résulte de l'ensemble de ce qui précède que M. B... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Rennes a rejeté sa demande

Sur les frais liés au litige :

11. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mis à la charge du conseil départemental des Côtes-d'Armor, qui n'est pas, dans la présente instance la partie perdante, le versement à M. B... de la somme qu'il demande au titre des frais liés au litige. Il n'y a pas lieu, en revanche, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de M. B... le versement à cette collectivité de la somme qu'elle demande au titre des mêmes dispositions.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de M. B... est rejetée.

Article 2 : Les conclusions du conseil départemental des Côtes-d'Armor tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... B... et au conseil départemental des Côtes-d'Armor.

Délibéré après l'audience du 16 juin 2023, à laquelle siégeaient :

- M. Gaspon, président,

- M. Coiffet, président-assesseur,

- Mme Gélard, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe, le 4 juillet 2023.

Le rapporteur,

O. COIFFETLe président,

O. GASPON

La greffière,

P. BONNIEU

La République mande et ordonne au ministre de la cohésion des territoires et des relations avec les collectivités territoriales en ce qui le concerne, et à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

N° 22NT00561 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nantes
Formation : 6ème chambre
Numéro d'arrêt : 22NT00561
Date de la décision : 04/07/2023
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. GASPON
Rapporteur ?: M. Olivier COIFFET
Rapporteur public ?: Mme MALINGUE
Avocat(s) : CENTAURE AVOCATS CLAISSE

Origine de la décision
Date de l'import : 10/08/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nantes;arret;2023-07-04;22nt00561 ?
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