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24/03/2023 | FRANCE | N°21NT01825

France | France, Cour administrative d'appel de Nantes, 3ème chambre, 24 mars 2023, 21NT01825


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. C... D... a demandé au tribunal administratif de Rennes d'annuler l'arrêté du 5 février 2018 par lequel la présidente du conseil départemental du Finistère a refusé de reconnaître l'imputabilité au service de la pathologie dont il souffre.

Par un jugement n° 1800861 du 20 mai 2021, le tribunal administratif de Rennes a prononcé un non-lieu à statuer sur les conclusions de la demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 5 février 2018 et a rejeté le surplus de cette demande, en tant not

amment qu'elle doit être regardée comme dirigée contre l'arrêté du 24 juillet 2018 par...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. C... D... a demandé au tribunal administratif de Rennes d'annuler l'arrêté du 5 février 2018 par lequel la présidente du conseil départemental du Finistère a refusé de reconnaître l'imputabilité au service de la pathologie dont il souffre.

Par un jugement n° 1800861 du 20 mai 2021, le tribunal administratif de Rennes a prononcé un non-lieu à statuer sur les conclusions de la demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 5 février 2018 et a rejeté le surplus de cette demande, en tant notamment qu'elle doit être regardée comme dirigée contre l'arrêté du 24 juillet 2018 par lequel la présidente du conseil départemental du Finistère a refusé de reconnaître l'imputabilité au service de la pathologie dont souffre M. D....

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 6 juillet 2021, M. D..., représenté par Me Garet, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Rennes du 20 mai 2021 en tant qu'il rejette le surplus de sa demande ;

2°) d'annuler l'arrêté du 24 juillet 2018 ;

3°) d'enjoindre au président du conseil départemental du Finistère de le placer en congé de maladie imputable au service à compter du 16 février 2016, et de le rétablir dans ses droits et ce, dans un délai de deux mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 300 euros par jour de retard ;

4°) de mettre à la charge du département du Finistère la somme de 3 600 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- la décision contestée est entachée d'une erreur de droit, dès lors que la présidente du conseil départemental n'a pas exercé sa compétence et s'est bornée à reprendre la position de la directrice des ressources humaines du département ;

- elle est entachée d'une erreur d'appréciation, dès lors qu'il existe un lien direct entre le service et la dépression et les troubles anxieux sévères dont il souffre et qui ont donné lieu aux congés de maladie à compter du 16 février 2016.

Par un mémoire en défense enregistré le 10 décembre 2021, le département du Finistère, représenté par la Selarl Cabinet Coudray, conclut au rejet de la requête et demande à la cour de mettre à la charge de M. D... la somme de 2 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que les moyens soulevés par M. D... ne sont pas fondés.

Vu les autres pièces des dossiers.

Vu :

- la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. B...,

- les conclusions de M. Berthon, rapporteur public,

- et les observations de Me Saulnier, représentant le département du Finistère.

Considérant ce qui suit :

1. M. C... D..., né le 29 août 1970, a été titularisé le 1er avril 2008 en qualité d'adjoint administratif au sein des services du département du Finistère. Le 14 juin 2016, il a sollicité la reconnaissance de l'imputabilité au service de la dépression sévère dont il souffre. La commission de réforme a émis le 30 novembre 2017 un avis défavorable à cette reconnaissance. Par un arrêté du 5 février 2018, la présidente du conseil départemental du Finistère a rejeté la demande de M. D.... Ce dernier a formé, le 12 février 2018, un recours gracieux contre cet arrêté. Le 14 mai 2018, la présidente du conseil départemental a, dans le cadre d'un réexamen de la situation de l'intéressé, ressaisi la commission de réforme qui a émis, le 28 juin 2018, un nouvel avis défavorable à la reconnaissance de l'imputabilité au service de la maladie de

M. D.... Par un arrêté du 24 juillet 2018, l'autorité administrative a décidé, de refuser de reconnaître l'imputabilité au service de la pathologie de M. D.... Ce dernier a demandé au tribunal administratif de Rennes d'annuler l'arrêté du 5 février 2018. Par un jugement du 20 mai 2021, le tribunal a prononcé un non-lieu à statuer sur les conclusions de la demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 5 février 2018 et a rejeté le surplus de cette demande en tant qu'elle devait être regardée comme également dirigée contre l'arrêté du 24 juillet 2018. M. D... relève appel de ce jugement en tant qu'il rejette sa demande d'annulation de ce dernier arrêté.

2. En premier lieu, il ne ressort pas des pièces du dossier que la présidente du conseil départemental du Finistère, qui a consulté par deux fois la commission de réforme compétente, se serait estimée liée par la position prise par la directrice des ressources humaines du département relativement à la situation de l'intéressé. Le moyen tiré de l'erreur droit, tenant à ce qu'elle aurait omis d'exercer sa compétence en matière de reconnaissance de l'imputabilité au service des maladies concernant les agents de cette collectivité doit, dès lors, être écarté.

3. En second lieu, aux termes de l'article 57 de la loi du 26 janvier 1984, alors en vigueur : " Le fonctionnaire en activité a droit : (...) 2° A des congés de maladie dont la durée totale peut atteindre un an pendant une période de douze mois consécutifs en cas de maladie dûment constatée mettant l'intéressé dans l'impossibilité d'exercer ses fonctions. Celui-ci conserve alors l'intégralité de son traitement pendant une durée de trois mois ; ce traitement est réduit de moitié pendant les neuf mois suivants. (...) / Toutefois, si la maladie provient de l'une des causes exceptionnelles prévues à l'article L. 27 du code des pensions civiles et militaires de retraite ou d'un accident survenu dans l'exercice ou à l'occasion de l'exercice de ses fonctions, le fonctionnaire conserve l'intégralité de son traitement jusqu'à ce qu'il soit en état de reprendre son service ou jusqu'à la mise à la retraite. Il a droit, en outre, au remboursement des honoraires médicaux et des frais directement entraînés par la maladie ou l'accident (...) Dans le cas visé à l'alinéa précédent, l'imputation au service de l'accident ou de la maladie est appréciée par la commission de réforme instituée par le régime des pensions des agents des collectivités locales (...) ".

4. Une maladie contractée par un fonctionnaire, ou son aggravation, doit être regardée comme imputable au service si elle présente un lien direct avec l'exercice des fonctions ou avec des conditions de travail de nature à susciter le développement de la maladie en cause, sauf à ce qu'un fait personnel de l'agent ou toute autre circonstance particulière conduise à détacher la survenance ou l'aggravation de la maladie du service.

5. Il ressort des pièces du dossier que M. D... occupait, lorsqu'il a contracté la dépression et l'anxiété sévères en cause, des fonctions d'agent administratif " volant ". Depuis 2009, il avait ainsi été employé au sein de sept directions du département du Finistère dans différentes fonctions pour des durées allant généralement de deux à dix mois. A compter d'avril 2010, il a été plusieurs fois placé en congé pour longue maladie du 26 avril 2010 au 13 mars 2011, du 2 octobre 2012 au 1er avril 2013 et du 12 mai 2014 au 30 juin 2015, ainsi qu'en congé pour maladie ordinaire. Dès le 14 juin 2013, le médecin de prévention a préconisé de revoir sa situation concernant l'affectation sur un poste d'agent " volant " au vu des antécédents médicaux. Les deux experts psychiatres, qui l'ont examiné, dans le cadre de l'instruction de sa demande de reconnaissance d'imputabilité de sa pathologie au service ont conclu à cette imputabilité, par des avis du 6 février 2017 et du 15 janvier 2018. Ainsi, le Dr A... a relevé qu'il n'y avait pas d'antécédent ou de facteur déclenchant ou précipitant personnel de l'affection en cause. Le Dr D. a relevé, pour sa part, que l'intéressé vivait très mal le caractère volant de son poste et le fait de devoir constamment se réadapter à de nouvelles fonctions. Si, selon les termes du rapport du 7 juillet 2017 établi par le médecin de prévention, " il ne semble pas exister un lien direct et surtout strictement certain entre, d'une part, la maladie présentée par M. D... et l'ayant conduit à son arrêt de travail en cours depuis le 18 février 2016 et, d'autre part, son poste de travail de volant ou ses conditions d'exercice professionnel dans la collectivité depuis 2009 ", ce dernier médecin a toutefois relevé dans ce rapport que l'intéressé avait finalement développé une forme d'intolérance psychologique à son poste de travail d'agent volant qui n'a cessé de s'aggraver depuis 2010 en se décompensant progressivement sur un mode anxio-dépressif de plus en plus aigu. Ainsi, la pathologie doit être regardée, dans les circonstances de l'espèce, comme étant en lien direct avec l'exercice des fonctions et les conditions de travail du requérant.

6. Toutefois, le département avait prévu d'affecter M. D..., avec son accord, sur l'un des deux postes fixes disponibles au sein du comité départemental d'action sociale de E..., à l'issue d'une période probatoire de trois mois débutée le 1er juillet 2015. Cette affectation n'a cependant pu se poursuivre en raison d'une sanction disciplinaire d'exclusion temporaire qui a été infligée à l'intéressé le 15 mars 2016 pour un comportement dont il est établi qu'il s'est rendu responsable et qui rendait impossible son maintien dans ce service. Par suite, ce comportement doit être regardé comme étant la cause déterminante du maintien des fonctions et des conditions de travail qui sont à l'origine de la pathologie anxio-dépressive du requérant. Ce comportement constituant un fait personnel de nature à détacher la survenance de la maladie du service, le moyen tiré de ce que l'arrêté contesté est entaché d'une erreur d'appréciation quant au lien entre cette maladie et le service doit être écarté.

7. Il résulte de ce qui précède que M. D... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Rennes a rejeté sa demande. Ses conclusions aux fins d'injonction et d'astreinte et celles présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative doivent, par voie de conséquence, être rejetées. Il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à sa charge la somme que demande le département du Finistère en application de ce même article, au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de M. D... est rejetée.

Article 2 : Les conclusions présentées par le département du Finistère au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. C... D... et au département du Finistère.

Délibéré après l'audience du 9 mars 2023, à laquelle siégeaient :

- M. Salvi, président,

- Mme Brisson, présidente-assesseure,

- M. Catroux, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 24 mars 2023.

Le rapporteur

X. B...Le président

D. Salvi

Le greffier

R. Mageau

La République mande et ordonne au préfet du Finistère en ce qui le concerne, et à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

2

No 21NT01825


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nantes
Formation : 3ème chambre
Numéro d'arrêt : 21NT01825
Date de la décision : 24/03/2023
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. SALVI
Rapporteur ?: M. Xavier CATROUX
Rapporteur public ?: M. BERTHON
Avocat(s) : CABINET COUDRAY CONSEIL et CONTENTIEUX

Origine de la décision
Date de l'import : 14/04/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nantes;arret;2023-03-24;21nt01825 ?
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