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13/01/2023 | FRANCE | N°22NT02788

France | France, Cour administrative d'appel de Nantes, 3ème chambre, 13 janvier 2023, 22NT02788


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. C... B... a demandé au tribunal administratif de Rennes, sous le n° 2202358, d'annuler l'arrêté du 4 avril 2022 du préfet du Finistère lui refusant la délivrance d'un titre de séjour, l'obligeant à quitter le territoire français dans un délai de trente jours, fixant le pays de destination et lui interdisant un retour sur le territoire français pour une durée d'un an.

Mme A... E... a demandé au tribunal administratif de Rennes, sous le n° 2202359, d'annuler l'arrêté du 4 avril 2022 du pré

fet du Finistère l'obligeant à quitter le territoire français dans un délai de trente ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. C... B... a demandé au tribunal administratif de Rennes, sous le n° 2202358, d'annuler l'arrêté du 4 avril 2022 du préfet du Finistère lui refusant la délivrance d'un titre de séjour, l'obligeant à quitter le territoire français dans un délai de trente jours, fixant le pays de destination et lui interdisant un retour sur le territoire français pour une durée d'un an.

Mme A... E... a demandé au tribunal administratif de Rennes, sous le n° 2202359, d'annuler l'arrêté du 4 avril 2022 du préfet du Finistère l'obligeant à quitter le territoire français dans un délai de trente jours, fixant le pays de destination et lui interdisant un retour sur le territoire français pour une durée d'un an et, sous le n° 2203392, d'annuler l'arrêté du 13 juin 2022 du préfet du Finistère lui refusant la délivrance d'un titre de séjour, l'obligeant à quitter le territoire français dans un délai de trente jours, fixant le pays de destination et lui interdisant un retour sur le territoire français pour une durée d'un an.

Par un jugement n°s 2202358, 2202359, 2203392 du 21 juillet 2022, le tribunal administratif de Rennes a rayé la requête n° 2203392 du registre du greffe du tribunal et joint les productions enregistrés sous ce numéro à la requête n° 2202359, d'une part, et rejeté le surplus des demandes, d'autre part.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 25 août 2022, M. B... et Mme E..., représentés par Me Maony, demandent à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Rennes du 21 juillet 2022 ;

2°) d'annuler l'arrêté du 4 avril 2022 pris à l'encontre de M. B... et l'arrêté du

13 juin 2022 pris à l'encontre de Mme E... portant à l'égard de chacun d'eux refus de titre de séjour, obligation de quitter le territoire et fixation du pays de renvoi.

3°) d'enjoindre au préfet du Finistère, à titre principal, de leur délivrer une carte de séjour portant la mention " vie privée et familiale " dans un délai de trois jours à compter de la notification de l'arrêt à intervenir ou, à titre subsidiaire, de réexaminer leur situation et de leur délivrer dans l'attente des autorisations provisoires de séjour, le tout dans un délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir et sous astreinte de 50 euros par jour de retard ;

4°) de mettre à la charge de l'État, au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, la somme de 2 000 euros à verser à son conseil dans les conditions fixées à l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.

Ils soutiennent qu'en ne prononçant pas un non-lieu à statuer sur la requête n° 2203392 et en omettant de répondre aux moyens invoqués dans cette requête, le tribunal a entaché son jugement d'irrégularité ;

En ce qui concerne l'arrêté du 4 avril 2022 pris à l'encontre de M. B... :

- la décision portant refus de titre de séjour a été prise en méconnaissance des dispositions de l'article L. 425-9 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- l'illégalité de cette décision prive de base légale la décision portant obligation de quitter le territoire français ;

- la décision portant obligation de quitter le territoire français a été prise en méconnaissance des dispositions du 9° de l'article L. 611-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- elle a été prise en méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- l'illégalité de la décision d'obligation de quitter le territoire prive de base légale la décision fixant le pays de renvoi ;

- elle a été prise en méconnaissance des stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et des dispositions de l'article L. 721-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- l'illégalité de la décision portant obligation de quitter le territoire français prive de base légale la décision portant interdiction de retour sur le territoire français ;

- la décision portant interdiction de retour sur le territoire français pour une durée d'un an est entachée d'une insuffisance de motivation ;

- elle a été prise en méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.

En ce qui concerne l'arrêté du 13 juin 2022 pris à l'encontre de Mme E... :

- la décision portant refus de titre de séjour a été prise en méconnaissance des dispositions de l'article L. 425-9 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et est entachée d'une erreur d'appréciation ;

- l'illégalité de cette décision prive de base légale la décision portant obligation de quitter le territoire français ;

- la décision portant obligation de quitter le territoire français a été prise en méconnaissance des dispositions du 9° de l'article L. 611-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation ;

- cette décision a été prise en méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- l'illégalité de la décision portant obligation de quitter le territoire prive de base légale la décision fixant le pays de renvoi ;

- la décision fixant le pays de renvoi a été prise en méconnaissance des stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et des dispositions de l'article L. 721-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- l'illégalité de la décision portant obligation de quitter le territoire français prive de base légale la décision portant interdiction de retour sur le territoire français ;

- la décision portant interdiction de retour sur le territoire français pour une durée d'un an est entachée d'une insuffisance de motivation et d'un défaut d'examen particulier de sa situation ;

- cette décision a été prise en méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.

Par un mémoire en défense enregistré le 4 octobre 2022, le préfet du Finistère conclut au rejet de la requête.

Il fait valoir que les moyens invoqués par les requérants ne sont pas fondés.

Mme E... a été admise au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 29 août 2022.

La demande d'aide juridictionnelle présentée par M. B... a été rejetée par une décision du 29 août 2022.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code des relations entre le public et l'administration ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de Mme D... a été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. M. B..., ressortissant géorgien né le 15 août 1972 et Mme E..., ressortissante russe née le 10 janvier 1972, sont entrés en France le 12 février 2019, selon leurs déclarations. Le bénéfice de l'asile leur a été refusé par des décisions du 6 avril 2020 du directeur de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides, confirmées par des décisions du 28 mars 2022 de la Cour nationale du droit d'asile. M. B... et

Mme E... ont sollicité, respectivement les 12 juillet 2021 et 5 janvier 2022, leur admission au séjour pour raisons médicales. Par deux arrêtés du 4 avril 2022, le préfet du Finistère a refusé la délivrance d'un titre de séjour à M. B..., a obligé les intéressés à quitter le territoire français dans un délai de trente jours, fixé le pays de renvoi et leur a interdit un retour sur le territoire français pour une durée d'un an. Par des requêtes enregistrées respectivement sous les n°s 2202358 et 2202359, M. B... et Mme E... ont demandé l'annulation de ces arrêtés au tribunal administratif de Rennes. Par un nouvel arrêté du 13 juin 2022, le préfet du Finistère a abrogé l'arrêté n° 29-2022-143 du 4 avril 2022 faisant obligation à Mme E... de quitter le territoire et par un autre arrêté du même jour, portant le n° 29-2022-256 du 13 juin 2022, il a refusé à cette dernière la délivrance d'un titre de séjour, l'a obligée à quitter le territoire français dans un délai de trente jours, a fixé le pays de renvoi et lui a interdit un retour sur le territoire français pour une durée d'un an. L'intéressée a demandé l'annulation de cet arrêté par une requête présentée devant le même tribunal sous le n° 2203392. Par un jugement du 21 juillet 2022, le tribunal administratif de Rennes a, d'une part, rayé du registre du greffe du tribunal la requête n° 2203392 présentée par Mme E... et joint les productions enregistrés sous ce numéro à sa requête n° 2202359 et, d'autre part, rejeté les demandes tendant à l'annulation de l'arrêté du 4 avril 2022 pris à l'encontre de M. B... et de l'arrêté du 13 juin 2022 pris à l'encontre de Mme E.... Les intéressés relèvent appel de ce jugement.

Sur la régularité du jugement attaqué :

2. Il ressort des pièces du dossier que postérieurement à l'édiction de son arrêté du 4 avril 2022 obligeant Mme E... à quitter le territoire français dans un délai de trente jours, fixant le pays de renvoi et lui interdisant un retour sur le territoire français pour une durée d'un an, le préfet du Finistère, tenant compte de la demande de titre de séjour pour raisons médicales présentée le 5 janvier 2022 par l'intéressée, après avoir procédé à l'abrogation de l'arrêté du 4 avril 2022, a pris un nouvel arrêté, le 13 juin 2022, lui refusant la délivrance d'un titre de séjour, l'obligeant à quitter le territoire français dans un délai de trente jours, fixant le pays de renvoi et lui interdisant le retour sur le territoire français pendant une durée d'un an.

3. Ayant constaté que l'abrogation n'était pas devenue définitive à la date à laquelle a été pris l'arrêté du 13 juin 2022, les premiers juges, ont estimé que ce second arrêté s'était substitué au précédent, et par le jugement attaqué, le tribunal en a tiré la conséquence que les conclusions de la requête présentée par Mme E... sous le n° 2202359 aux fins d'annulation de l'arrêté du 4 avril 2022 devaient être regardées comme étant dirigées contre le nouvel arrêté du 13 juin 2022. Ces conclusions n'ayant pas perdu leur objet, les premiers juges n'ont pas entaché leur jugement d'irrégularité en ne prononçant pas de non-lieu à statuer sur la demande dont ils étaient saisis sous ce n° 2202359.

4. S'il ressort des termes de sa requête enregistrée sous le n°2203392 que Mme E... a certes indiqué qu'elle entendait saisir le juge d'une demande tendant à l'annulation de cette décision du 13 juin 2022, elle n'a, dans ses écritures de première instance, présenté de moyens qu'à l'encontre de l'obligation de quitter le territoire et de l'interdiction de retour sur le territoire français. Dans ces conditions, la requérante n'est pas fondée à soutenir que le tribunal aurait omis d'examiner les moyens présentés dans la demande enregistrée sous le n° 2203392 en tant qu'ils auraient été dirigés contre le refus de titre de séjour et que le jugement attaqué serait, par suite, entaché d'irrégularité.

Sur les conclusions à fin d'annulation de l'arrêté du 4 avril 2022 pris à l'encontre de M. B... :

En ce qui concerne la décision portant refus de titre de séjour :

5. Aux termes de l'article L. 425-9 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'étranger, résidant habituellement en France, dont l'état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait avoir pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité et qui, eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé dans le pays dont il est originaire, ne pourrait pas y bénéficier effectivement d'un traitement approprié, se voit délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " d'une durée d'un an. La condition prévue à l'article L. 412-1 n'est pas opposable. / La décision de délivrer cette carte de séjour est prise par l'autorité administrative après avis d'un collège de médecins du service médical de l'Office français de l'immigration et de l'intégration, dans des conditions définies par décret en Conseil d'Etat (...) ".

6. Par son avis du 18 octobre 2021 que le préfet du Finistère s'est approprié, le collège de médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration (OFII) a estimé notamment que si l'état de santé de M. B... nécessitait une prise en charge médicale dont le défaut pouvait entraîner des conséquences d'une exceptionnelle gravité, il pouvait bénéficier effectivement d'un traitement approprié dans son pays d'origine. L'intéressé fait valoir qu'il présente des antécédents de cirrhose hépatique virale avec varices œsophagiennes, une insuffisance veineuse des membres inférieurs et un syndrome anxieux réactionnel pris en charge, selon le certificat médical du 20 avril 2022 qu'il produit, par une surveillance régulière et un suivi psychologique. Ni les certificats médicaux produits par M. B..., ni les considérations générales sur le système de santé en Géorgie qu'il invoque, ni l'ordonnance pharmaceutique établie postérieurement à l'arrêté contesté, ne permettent de remettre en cause le sens de l'avis précité du collège de médecins de l'OFII et à établir qu'il ne pourrait bénéficier effectivement dans son pays d'origine d'une prise en charge appropriée à son état de santé. Par suite, le moyen tiré de ce qu'en refusant de délivrer au requérant un titre de séjour pour raisons médicales, le préfet du Finistère aurait méconnu les dispositions de l'article L. 425-9 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile doit être écarté.

En ce qui concerne la décision portant obligation de quitter le territoire français :

7. Le présent arrêt ne prononçant pas l'annulation de la décision portant refus de titre de séjour prise à son encontre, M. B... n'est pas fondé à soutenir que la décision l'obligeant à quitter le territoire français doit être annulée par voie de conséquence de l'annulation de cette décision.

8. Pour les mêmes motifs que ceux exposés au point 6, le moyen tiré de ce que la décision portant obligation de quitter le territoire français aurait été prise en méconnaissance des dispositions du 9° de l'article L. 611-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile doit être écarté.

9. C'est au terme d'une exacte motivation, qu'il y a par suite lieu d'adopter, que les premiers juges ont écarté, au point 12 de leur jugement, le moyen tiré de ce que la décision obligeant M. B... à quitter le territoire français aurait été prise en méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ou serait entachée d'une erreur manifeste d'appréciation.

En ce qui concerne la décision fixant le pays de renvoi :

10. Le présent arrêt ne prononçant pas l'annulation de la décision portant obligation de quitter le territoire français, M. B... n'est pas fondé à soutenir que la décision fixant le pays de renvoi doit être annulée par voie de conséquence de l'annulation de cette décision.

11. Si M. B... soutient que son état de santé fait obstacle à son retour en Géorgie,

il n'établit pas, ainsi qu'il a été dit ci-dessus, qu'il ne pourrait bénéficier effectivement d'un traitement approprié à son état de santé dans son pays d'origine. Par suite, les moyens tirés de ce que la décision fixant le pays de renvoi aurait été prise en méconnaissance des stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et des dispositions de l'article L. 721-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile doivent être écartés.

En ce qui concerne la décision portant interdiction de retour sur le territoire français :

12. Le présent arrêt ne prononçant pas l'annulation de la décision portant obligation de quitter le territoire français, M. B... n'est pas fondé à soutenir que la décision lui interdisant un retour sur le territoire français pour une durée d'un an doit être annulée par voie de conséquence de l'annulation de cette décision.

13. Aux termes de l'article L. 612-8 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Lorsque l'étranger n'est pas dans une situation mentionnée aux articles

L. 612-6 et L. 612-7, l'autorité administrative peut assortir la décision portant obligation de quitter le territoire français d'une interdiction de retour sur le territoire français. / Les effets de cette interdiction cessent à l'expiration d'une durée, fixée par l'autorité administrative, qui ne peut excéder deux ans à compter de l'exécution de l'obligation de quitter le territoire français ". Aux termes de l'article L. 612-10 du même code : " Pour fixer la durée des interdictions de retour mentionnées aux articles L. 612-6 et L. 612-7, l'autorité administrative tient compte de la durée de présence de l'étranger sur le territoire français, de la nature et de l'ancienneté de ses liens avec la France, de la circonstance qu'il a déjà fait l'objet ou non d'une mesure d'éloignement et de la menace pour l'ordre public que représente sa présence sur le territoire français. Il en est de même pour l'édiction et la durée de l'interdiction de retour mentionnée à l'article L. 612-8 (...) ".

14. L'arrêté contesté comporte les considérations de droit et de fait qui constituent le fondement de la décision et interdisant à M. B... un retour sur le territoire français pour une durée d'un an. En particulier, cet arrêté vise les dispositions du l'article L. 612-8 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, relève la présence récente de l'intéressé et l'absence d'attache pérenne en France et indique qu'il doit être tenu compte de l'absence de précédente mesure d'éloignement et de menace à l'ordre public. Par suite, la décision contestée est suffisamment motivée et traduit ainsi un examen particulier de la situation de l'intéressé.

15. Si M. B..., qui est entré en France en 2019 et qui n'y a séjourné, ainsi que son épouse, qu'au titre de l'examen de leurs demandes d'asile et de titre de séjour, invoque une stabilité de leur présence en France, le suivi médical dont ils y ont bénéficié et l'absence de menace à l'ordre public, ces circonstances ne suffisent pas à établir qu'en interdisant à l'intéressé un retour sur le territoire français pour une durée d'un an, le préfet du Finistère aurait porté à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels elle a été prise. Dès lors, le moyen tiré de ce que cette décision aurait été prise en méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales doit être écarté.

Sur les conclusions à fin d'annulation de l'arrêté du 13 juin 2022 pris à l'encontre de Mme E... :

En ce qui concerne la décision portant refus de titre de séjour :

16. Par son avis du 7 avril 2022 que le préfet du Finistère s'est approprié, le collège de médecins de l'OFII a estimé notamment que si l'état de santé de Mme E... nécessitait une prise en charge médicale dont le défaut pouvait entraîner des conséquences d'une exceptionnelle gravité, elle pouvait bénéficier effectivement d'un traitement approprié dans son pays d'origine. L'intéressée fait valoir qu'elle est atteinte de diabète, d'hyperthyroïdie et de troubles psychiatriques. D'une part, la circonstance que la requérante se serait vu prescrire un nouveau traitement contre ses troubles anxio-dépressifs postérieurement à l'avis précité du collège de médecins de l'OFII n'est pas par elle-même de nature à remettre en cause le bien-fondé de cet avis, dont le sens n'est davantage contredit ni par les certificats médicaux produits par Mme E..., ni par les considérations générales sur le système de santé en Russie dont elle fait état. Par suite, la requérante n'établissant pas être dans l'impossibilité de bénéficier effectivement dans son pays d'origine d'une prise en charge appropriée à son état de santé, le moyen tiré de ce qu'en refusant de lui délivrer un titre de séjour pour raisons médicales, le préfet du Finistère aurait méconnu les dispositions de l'article L. 425-9 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile doit être écarté. Dans ces conditions et sans qu'il soit besoin de se prononcer sur la recevabilité des conclusions dirigées contre le refus de titre de séjour, Mme B... n'est pas fondée à en demander l'annulation.

En ce qui concerne la décision portant obligation de quitter le territoire français :

17. Le présent arrêt ne prononçant pas l'annulation de la décision portant refus de titre de séjour prise à son encontre, Mme E... n'est pas fondée à soutenir que la décision l'obligeant à quitter le territoire français doit être annulée par voie de conséquence de l'annulation de cette décision.

18. Compte tenu de ce qui a été dit au point 16, le moyen tiré de ce que la décision portant obligation de quitter le territoire français aurait été prise en méconnaissance des dispositions du 9° de l'article L. 611-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile doit être écarté.

19. C'est au terme d'une exacte motivation, qu'il y a par suite lieu d'adopter, que les premiers juges ont écarté, aux points 12 et 22 de leur jugement, le moyen tiré de ce que la décision obligeant Mme E... à quitter le territoire français aurait été prise en méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.

En ce qui concerne la décision fixant le pays de renvoi :

20. Le présent arrêt ne prononçant pas l'annulation de la décision portant obligation de quitter le territoire français, Mme E... n'est pas fondée à soutenir que la décision fixant le pays de renvoi doit être annulée par voie de conséquence de l'annulation de cette décision.

21. Si Mme E... soutient que son état de santé fait obstacle à son retour en Russie, elle n'établit pas, ainsi qu'il a été dit au point 15 du présent arrêt, qu'elle ne pourrait bénéficier effectivement d'un traitement approprié à son état de santé dans son pays d'origine. Par suite, le moyen tiré de ce que la décision fixant le pays de renvoi aurait été prise en méconnaissance des stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et des dispositions de l'article L. 721-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile doivent être écarté.

En ce qui concerne la décision portant interdiction de retour sur le territoire français :

22. Le présent arrêt ne prononçant pas l'annulation de la décision portant obligation de quitter le territoire français, Mme E... n'est pas fondée à soutenir que la décision lui interdisant un retour sur le territoire français pour une durée d'un an doit être annulée par voie de conséquence de l'annulation de cette décision.

23. Aux termes de l'article L. 612-8 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Lorsque l'étranger n'est pas dans une situation mentionnée aux articles

L. 612-6 et L. 612-7, l'autorité administrative peut assortir la décision portant obligation de quitter le territoire français d'une interdiction de retour sur le territoire français. / Les effets de cette interdiction cessent à l'expiration d'une durée, fixée par l'autorité administrative, qui ne peut excéder deux ans à compter de l'exécution de l'obligation de quitter le territoire français ". Aux termes de l'article L. 612-10 du même code : " Pour fixer la durée des interdictions de retour mentionnées aux articles L. 612-6 et L. 612-7, l'autorité administrative tient compte de la durée de présence de l'étranger sur le territoire français, de la nature et de l'ancienneté de ses liens avec la France, de la circonstance qu'il a déjà fait l'objet ou non d'une mesure d'éloignement et de la menace pour l'ordre public que représente sa présence sur le territoire français. Il en est de même pour l'édiction et la durée de l'interdiction de retour mentionnée à l'article L. 612-8 (...) ".

24. L'arrêté contesté comporte les considérations de droit et de fait qui constituent le fondement de la décision interdisant à Mme E... un retour sur le territoire français pour une durée d'un an. En particulier, cet arrêté vise les dispositions du l'article L. 612-8 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, relève la présence récente de l'intéressée et l'absence d'attache pérenne en France et indique qu'il doit être tenu compte de l'absence de précédente mesure d'éloignement et de menace à l'ordre public. Par suite, la décision contestée est suffisamment motivée et révèle qu'il a été procédé à un examen particulier de la situation de l'intéressée.

25. Pour les mêmes motifs que ceux exposés au point 15, le moyen tiré de ce que la décision interdisant à Mme E... un retour sur le territoire français pour une durée d'un an aurait été prise en méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales doit être écarté.

26. Il résulte de tout ce qui précède que M. B... et Mme E... ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Rennes a rejeté leurs demandes. Par voie de conséquence, leurs conclusions à fin d'injonction sous astreinte et celles tendant à l'application des dispositions des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 doivent également être rejetées.

D E C I D E :

Article 1er : La requête de M. B... et Mme E... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. C... B..., à Mme A... E... et au ministre de l'intérieur et des outre-mer.

Copie en sera adressée, pour information, au préfet du Finistère.

Délibéré après l'audience du 15 décembre 2022, à laquelle siégeaient :

M. Salvi, président,

Mme Brisson, présidente-assesseure,

Mme Lellouch, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 13 janvier 2023.

La rapporteure,

C. D...

Le président,

D. Salvi

La greffière,

A. Martin

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des outre-mer en ce qui le concerne, et à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

N° 22NT027882


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nantes
Formation : 3ème chambre
Numéro d'arrêt : 22NT02788
Date de la décision : 13/01/2023
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. SALVI
Rapporteur ?: Mme Christiane BRISSON
Rapporteur public ?: M. BERTHON
Avocat(s) : MAONY

Origine de la décision
Date de l'import : 18/01/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nantes;arret;2023-01-13;22nt02788 ?
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