Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. B... E... a demandé au tribunal administratif de Nantes d'annuler l'arrêté du 15 juillet 2021 par lequel le préfet de Maine-et-Loire lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel il pourra être reconduit d'office lorsque ce délai sera expiré.
Par un jugement n°2108762 du 8 février 2022, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Nantes a fait droit à sa demande et annulé l'arrêté contesté.
Procédure devant la cour :
Par une requête enregistrée le 8 mars 2022, le préfet de Maine-et-Loire demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Nantes du 8 février 2022 ;
2°) de rejeter la demande présentée par M. E... devant ce tribunal.
Il soutient que :
- la compétence de l'auteur de l'acte est, contrairement à ce qu'a estimé le juge de première instance, établie par l'arrêté du 22 février 2021 régulièrement publié ;
- il s'en remet pour les autres motifs de rejet à ses écritures de première instance.
Par des mémoires enregistrés les 14 avril, 4 mai et 9 mai 2022 M. E..., représenté par Me Kaddouri, demande à la cour d'assurer l'exécution du jugement attaqué et conclut :
1°) au rejet de la requête ;
2°) à ce qu'il soit enjoint au préfet de Maine-et-Loire de procéder au réexamen de sa situation et de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour l'autorisant à travailler, dans le délai de deux mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir et sous astreinte de 200 euros ;
3°) à ce que soit mise à la charge de l'Etat la somme de 800 euros au titre des articles 37 de la loi du 10 juillet 1991 et L.761-1 du code de justice administrative.
Il fait valoir que les moyens invoqués par le préfet de Maine-et-Loire ne sont pas fondés.
M. E... a produit un mémoire qui a été enregistré le 23 mai 2022, après la clôture automatique de l'instruction.
M. E... a été maintenu au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 20 avril 2022.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
- le code de justice administrative.
La présidente de la formation de jugement a dispensé la rapporteure publique, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le rapport de Mme A... a été entendu au cours de l'audience publique.
Considérant ce qui suit :
1. M. E..., ressortissant arménien né le 18 février 1983, déclare être entré irrégulièrement en France le 19 avril 2019. Il a déposé une demande d'asile le 10 mai 2019. Par une décision du 23 avril 2021, le directeur général de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides a rejeté sa demande. L'intéressé a formé un recours devant la Cour nationale du droit d'asile le 31 mai 2021. Par un arrêté du 15 juillet 2021, le préfet de Maine-et-Loire a fait obligation à M. E... de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel il pourra être reconduit d'office. Par un jugement du 8 février 2022, le magistrat désigné par le président du tribunal a annulé l'arrêté contesté. Le préfet de Maine-et-Loire relève appel de ce jugement.
Sur le motif d'annulation retenu par le premier juge :
2. Il ressort des pièces du dossier que, par un arrêté n°2021-016 du 22 février 2021 régulièrement publié au recueil spécial des actes administratifs le préfet de Maine-et-Loire a donné délégation à Mme Magali Daverton, secrétaire générale de la préfecture, pour signer tous arrêtés et décisions à l'exception d'un certain nombre d'actes dont ne font pas partie les décisions relatives aux étrangers (article 1er), et a prévu qu'en cas d'absence ou d'empêchement de Mme D... cette délégation serait exercée par M. C... F..., sous-préfet de Cholet (article 5). Il s'ensuit, et dès lors que l'absence ou de l'empêchement de Mme D... ne sont pas contestés par M. E..., que M. F..., signataire de l'arrêté contesté, disposait d'une délégation régulière pour ce faire. C'est, par suite, à tort que le magistrat désigné du tribunal administratif de Nantes a, pour annuler l'arrêté contesté du 15 juillet 2021, retenu le motif tiré de l'incompétence de son signataire.
3. Il y a lieu de se prononcer, par la voie de l'effet dévolutif, sur les autres moyens soulevés par M. E... devant le tribunal administratif de Nantes.
Sur la légalité de l'arrêté du 15 juillet 2021 :
4. En premier lieu, l'arrêté contesté comporte l'ensemble des considérations de fait et de droit qui le fondent. Il est, ainsi, suffisamment motivé en toutes ses décisions.
5. En deuxième lieu, il ne ressort pas des pièces du dossier ni d'aucun des arguments invoqués par M. E... que le préfet de Maine-et-Loire n'aurait pas procédé à un examen particulier de sa situation personnelle.
6. En troisième lieu, dans le cas prévu au 4° du I de l'article L. 611-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, la décision faisant obligation de quitter le territoire français fait suite au constat de ce que la reconnaissance de la qualité de réfugié ou le bénéfice de la protection subsidiaire a été définitivement refusé à l'étranger ou de ce que celui-ci ne bénéficie plus du droit de se maintenir sur le territoire français en application des articles L. 542-1 et L.542-2 du même code, à moins qu'il ne soit titulaire d'un titre de séjour en cours de validité. Le droit d'être entendu n'implique alors pas que l'administration ait l'obligation de mettre l'intéressé à même de présenter ses observations de façon spécifique sur la décision l'obligeant à quitter le territoire français, dès lors qu'il a été entendu dans le cadre du dépôt de sa demande d'asile à l'occasion de laquelle l'étranger est conduit à préciser à l'administration les motifs pour lesquels il demande que lui soit reconnue la qualité de réfugié ou accordé le bénéfice de la protection subsidiaire et à produire tous éléments susceptibles de venir au soutien de cette demande. Il lui appartient, lors du dépôt de cette demande, laquelle doit en principe faire l'objet d'une présentation personnelle du demandeur en préfecture, d'apporter à l'administration toutes les précisions qu'il juge utiles. Il lui est loisible, au cours de l'instruction de sa demande, de faire valoir toute observation complémentaire, au besoin en faisant état d'éléments nouveaux. M. E... qui, au demeurant, ne pouvait ignorer que, depuis le rejet devenu définitif de sa demande d'asile, il était susceptible de faire l'objet d'une mesure d'éloignement, n'établit ni même n'allègue qu'il aurait sollicité en vain un entretien avec les services préfectoraux ni qu'il ait été empêché de présenter des observations avant que ne soit prise la décision portant obligation de quitter le territoire français. Par suite, il n'est pas fondé à soutenir que la décision a été prise en méconnaissance de son droit d'être entendu qu'il tient du principe général du droit de l'Union européenne, tel qu'il est notamment exprimé à l'article 41 de la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne.
7. En quatrième lieu, il ressort des pièces du dossier que M. E... est entré sur le territoire en avril 2019 à l'âge de 36 ans, que son épouse et ses enfants ne résident pas en France et qu'il a vécu éloigné de ses deux frères résidant en France jusqu'en 2019. Il ne justifie pas dans ces conditions de circonstances personnelles et familiales de nature à caractériser une atteinte à son droit à une vie privée et familiale dans ce pays. Par suite, les moyens tirés de la méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ainsi que de l'erreur manifeste d'appréciation dont serait entaché l'arrêté contesté ne peuvent qu'être écartés.
8. En cinquième lieu, la mesure d'éloignement contestée n'étant pas illégale, les moyens tirés de l'absence de base légale de la décision fixant le délai de départ et de la décision fixant le pays de destination ne peuvent qu'être écartés.
9. Enfin, M. E... n'avance aucun élément précis et argumenté de nature à établir que le renvoi dans son pays d'origine serait de nature à faire courir des risques pour sa vie au sens des stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et de l'article L.721-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.
10. Il résulte de ce qui précède que le préfet de Maine-et-Loire est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le magistrat désigné du tribunal administratif de Nantes a annulé son arrêté du 15 juillet 2021. Par suite, et en tout état de cause, les conclusions de M. E... tendant à ce que soit assurée l'exécution de ce jugement, ainsi que ses conclusions à fin d'injonction et de remboursement des frais exposés ne peuvent qu'être rejetées.
DÉCIDE :
Article 1er : Le jugement n°°2108762 du 8 février 2022 du magistrat désigné du tribunal administratif de Nantes est annulé.
Article 2 : La demande présentée par M. E... devant le tribunal administratif de Nantes et les conclusions présentes par lui devant la cour sont rejetées.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié au ministre de l'intérieur et à M. B... E....
Une copie sera transmise au préfet de Maine-et-Loire.
Délibéré après l'audience du 25 mai 2022, à laquelle siégeaient :
- Mme Perrot, présidente de chambre,
- M. Geffray, président-assesseur,
- M. Brasnu, premier conseiller.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 10 juin 2022.
La présidente rapporteure
I. A...L'assesseur
J-E GeffrayLa greffière
S. Pierodé
La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
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N° 22NT00738