Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. G... E..., M. H... E... et M. I... E... ont demandé au tribunal administratif de Rennes de prononcer la réduction des cotisations d'impôt sur le revenu et de contributions sociales auxquelles M. et Mme A... E..., leurs parents, avaient été assujettis au titre de l'année 2008.
Par un jugement n° 1802562 du 1er juillet 2020, le tribunal administratif de Rennes a rejeté leur demande.
Procédure devant la cour :
Par une requête enregistrée le 1er septembre 2020 M. G... E...,
M. H... E... et M. I... E..., représentés par Me du Teilleul, demandent à la cour :
1°) d'annuler ce jugement ;
2°) de prononcer la décharge sollicitée ;
3°) de mettre à la charge de l'Etat le versement de la somme de 5 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Ils soutiennent que :
- le tribunal administratif a commis une erreur de date, la date de la cession définitive étant le 3 juillet 2008 et non le 3 juillet 2009 ; cela entache le jugement d'irrégularité ;
- ils sont fondés à se prévaloir des dispositions de l'article 150-0-D-14 du code général des impôts et de l'article 74-0-H de l'annexe II à ce code ; la société C... a procédé à deux demandes de règlement en application de la garantie de passif du 1er avril 2008 telle que modifiée par l'avenant n°1 du 3 juillet 2008 ; il a été fait droit à ces deux demandes par des versements successifs ;
- tant la jurisprudence que la doctrine administrative, et notamment l'instruction administrative référencée BOI-CTX-DG-20-20-40 n°110, autorisent le contribuable à se prévaloir d'un acte sous seing privé ; ainsi, rien n'obligeait MM. E... à publier ou à enregistrer auprès du service des impôts la convention de garantie de passif et son avenant ;
- la convention de garantie de passif du 1er avril 2008 est indissociable du protocole d'accord du 1er avril 2008 qui fait expressément référence à cette convention.
Par un mémoire en défense enregistré le 4 mars 2021 le ministre de l'économie, des finances et de la relance conclut au rejet de la requête.
Il fait valoir que les moyens soulevés par les consorts E... ne sont pas fondés.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. D...,
- les conclusions de Mme Chollet, rapporteure publique,
- et les observations de Me du Teilleul, représentant les consorts E....
Considérant ce qui suit :
1. M. et Mme A... E... ont conclu le 1er avril 2008 un protocole d'accord avec la société anonyme K... en vue de la cession de la pleine propriété ou l'usufruit des actions de la société J... qu'ils détenaient. La cession de ces titres a été effectuée le 3 juillet 2008. Le solde des titres de la société J... a été cédé au même acquéreur en exécution du même protocole d'accord par leurs trois fils ainsi que par la société civile F..., détenue par les mêmes membres de la famille. M. et Mme E... ont déclaré au titre de cette opération une plus-value de 18 269 112 euros qui a été soumise à l'impôt sur le revenu et aux contributions sociales. Par une réclamation du
23 décembre 2015, M. G... E..., M. H... E... et M. I... E..., fils de M. et Mme A... E..., ont demandé, au nom de l'indivision successorale de M. A... et Mme B... E... depuis décédés, à l'administration fiscale de prononcer la restitution, sur le fondement du 14 de l'article 150-0 D du code général des impôts, d'une partie des impositions acquittées par leurs parents en 2009. Après le rejet de leur réclamation, ils ont demandé au tribunal administratif de Rennes de prononcer cette restitution. Ils relèvent appel du jugement du 1er juillet 2020 par lequel le tribunal a rejeté leur demande.
2. Aux termes de l'article 150-0 D du code général des impôts, dans sa rédaction applicable en 2007 : " 1. Les gains nets mentionnés au I de l'article 150-0 A sont constitués par la différence entre le prix effectif de cession des titres ou droits, nets des frais et taxes acquittés par le cédant, et leur prix effectif d'acquisition par celui-ci ou, en cas d'acquisition à titre gratuit, leur valeur retenue pour la détermination des droits de mutation (...) 14. Par voie de réclamation présentée dans le délai prévu au livre des procédures fiscales en matière d'impôt sur le revenu, le prix de cession des titres ou des droits retenu pour la détermination des gains nets mentionnés au 1 du I de l'article 150-0 A est diminué du montant du versement effectué par le cédant en exécution de la clause du contrat de cession par laquelle le cédant s'engage à reverser au cessionnaire tout ou partie du prix de cession en cas de révélation, dans les comptes de la société dont les titres sont l'objet du contrat, d'une dette ayant son origine antérieurement à la cession ou d'une surestimation de valeurs d'actif figurant au bilan de cette même société à la date de la cession. / Le montant des sommes reçues en exécution d'une telle clause de garantie de passif ou d'actif net diminue le prix d'acquisition des valeurs mobilières ou des droits sociaux à retenir par le cessionnaire pour la détermination du gain net de cession des titres concernés (...) ".
3. L'article 74-0 H de l'annexe II au même code prévoit que : " Pour l'application des dispositions du 14 de l'article 150-0 D du code général des impôts, les contribuables qui demandent la décharge ou la réduction de l'imposition initiale, résultant de l'imputation sur le prix de cession du reversement de tout ou partie de son montant effectué en exécution d'une clause de garantie de passif ou d'actif net, doivent notamment fournir à l'appui de leur réclamation les pièces justificatives suivantes : a) Copie de la convention figurant dans l'acte de cession ou annexée à ce dernier mentionnant les termes de la clause de garantie de passif ou d'actif net ; b) Copie de tout document de nature à établir la réalité, la date et le montant du versement effectué en exécution de la convention ainsi que son caractère définitif. ".
4. Concomitamment au protocole de cession du 1er avril 2008, une convention de garantie d'actif et de passif a été conclue entre M. et Mme A... E... et la société C.... Toutefois le 17 juin 2008, soit avant la date de la cession proprement dite, le juge de la liberté et de la détention du tribunal de grande instance de Paris a ordonné des visites et des saisies ont été pratiquées, notamment dans les locaux de la SA J..., dans le cadre d'une enquête sur l'existence de pratiques anticoncurrentielles. Le 13 mars 2012, l'autorité de la concurrence a prononcé à l'encontre de la société C... une amende de 63,959 millions d'euros. Par la suite, la société C... a réclamé à M. A... E..., par courriers des 9 octobre 2013 et 28 août 2014, la somme de 2,5 millions d'euros. Ce montant a été partiellement réglé en plusieurs versements réalisés au cours des années 2013 et 2014.
5. Les requérants font valoir qu'en raison des enquêtes et procédures ainsi menées avant le 3 juillet 2008, un avenant n°1 à la convention de garantie d'actif et de passif a été conclu entre les parties le 3 juillet 2008, date d'effet de la cession, afin de prémunir l'acquéreur du risque spécifique induit par ces procédures. Or, s'il ressort des deux courriers de demandes de règlement adressées par la société C... les 9 octobre 2013 et 28 août 2014 que ces demandes avaient pour fondement la convention de garantie d'actif et de passif du
1er avril 2008 telle que modifiée par cet avenant, la version de ce document produite au dossier ne comporte par la signature des parties, et aucun élément ne permet d'établir qu'elle aurait été annexée à l'acte de cession lui-même, ainsi que le prescrivent les dispositions précitées de l'article 74-0 H de l'annexe II au code général des impôts. Au surplus, même l'acte réitératif de déclarations et garanties, signé par les parties le 3 juillet 2008, ne fait pas mention de cet avenant. Ce dernier ne peut dès lors être invoqué comme fondement de la mise en œuvre des dispositions de l'article 150-0 D du code général des impôts. A cet égard, la circonstance que les premiers juges ont, par une erreur de plume, mentionné dans un des paragraphes du jugement attaqué la date du 3 juillet 2009 comme date de cession est sans incidence. Dans ces conditions, c'est à bon droit que le service a refusé de faire application des dispositions de l'article 150-0 D du code général des impôts.
6. Il résulte de ce qui précède que les consorts E... ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Rennes a rejeté leur demande. Par conséquent, leur requête, y compris ses conclusions relatives aux frais liés au litige, doit être rejetée.
DECIDE :
Article 1er : La requête des consorts E... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié aux consorts E... et au ministre de l'économie, des finances et de la relance.
Délibéré après l'audience du 12 mai 2022, à laquelle siégeaient :
- Mme Perrot, présidente de chambre,
- M. Giraud, premier conseiller,
- M. Brasnu, premier conseiller.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 3 juin 2022.
Le rapporteur
H. D...La présidente
I. Perrot
La greffière
A. Marchais
La République mande et ordonne au ministre de l'économie, des finances et de la relance, en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
No 20NT027262