Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
Mme D... A... a demandé au tribunal administratif de Caen d'annuler les décisions des 15 juillet et 15 novembre 2019 par lesquelles le directeur du centre hospitalier universitaire de Caen a prononcé à son encontre une décision de licenciement pour inaptitude physique et a rejeté son recours gracieux et de condamner cet établissement public à lui verser une somme de 50 000 euros en réparation du préjudice qu'elle estime avoir subi.
Par un jugement n°2000141 du 25 mai 2021, le tribunal administratif de Caen a rejeté sa demande.
Procédure devant la cour :
Par une requête enregistrée le 13 juillet 2021, Mme D... A..., représentée par Me Fautrat, demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du 25 mai 2021 du tribunal administratif de Caen ;
2°) d'annuler les décisions des 15 juillet et 15 novembre 2019 du directeur du centre hospitalier universitaire de Caen et de condamner cet établissement public à lui verser une somme de 50 000 euros en réparation du préjudice qu'elle estime avoir subi ;
3°) de mettre à la charge du centre hospitalier universitaire de Caen la somme de 4 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- la décision de licenciement en litige a été prise par une autorité incompétente ;
- cette décision est insuffisamment motivée ;
- elle est entachée d'une erreur de fait et d'un détournement de pouvoir, dès lors qu'elle a effectivement demandé et obtenu son reclassement fonctionnel dans la filière administrative dès 2010 ;
- elle méconnaît le principe de l'égalité entre les agents publics, dès lors que de nombreux agents n'exercent pas les fonctions de leur grade sans qu'on leur demande de solliciter un reclassement administratif.
Par un mémoire en défense enregistré le 27 octobre 2021, le centre hospitalier universitaire de Caen, représenté par Me Lacroix, conclut au rejet de la requête et à ce que la somme de 1 500 euros soit mise à la charge de Mme A... en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il fait valoir que :
- la requête est irrecevable, dès lors qu'elle se borne à reproduire intégralement et exclusivement le contenu de ses écritures de première instance et n'est donc pas motivée ;
- les conclusions à fin d'indemnisation sont irrecevables, dès lors que la requérante n'a pas présenté de réclamation indemnitaire préalable ;
- les moyens soulevés par Mme A... ne sont pas fondés.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code des relations entre le public et l'administration ;
- la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 ;
- la loi n° 86-33 du 9 janvier 1986 ;
- le décret n° 88-386 du 19 avril 1988 ;
- le décret n° 88-976 du 13 octobre 1988 ;
- le décret n° 89-376 du 8 juin 1989 ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Catroux,
- les conclusions de M. Berthon, rapporteur public,
- et les observations de Me Lacroix, représentant le centre hospitalier universitaire de Caen.
Considérant ce qui suit :
1. Mme A..., née le 30 août 1964, a été recrutée le 25 juillet 1983 par le centre hospitalier universitaire de Caen en qualité d'agent des services hospitaliers. Elle a été nommée en qualité d'aide-soignante le 3 mars 1986. Le comité médical départemental a rendu le 31 août 2010, la concernant, un avis d'inaptitude définitive à la fonction d'aide-soignante mais non à toutes fonctions. En mai 2012, la direction du centre hospitalier a proposé à Mme A... un détachement d'un an, puis une intégration dans le grade d'adjoint administratif de 1ère classe de la filière administrative, qui a été refusée par l'intéressée. Celle-ci est restée affectée par la suite dans différents services administratifs. Par un avis du 5 juillet 2017, le comité médical départemental a, à nouveau, regardé Mme A... comme définitivement inapte à ses fonctions d'aide-soignante, mais non à toute fonction. Par un courrier du 11 juillet 2017, le centre hospitalier universitaire de Caen a invité Mme A... à formuler une demande de reclassement dans le délai d'un mois. Le 21 mars 2018, à l'épuisement de ses droits à congés, Mme A... a été placée en disponibilité d'office. Par décision du 15 juillet 2019, Mme A... a été licenciée pour inaptitude physique à compter du 31 juillet 2019. Elle a demandé au tribunal administratif de Caen l'annulation de cette décision et de la décision du 15 novembre 2019 rejetant son recours gracieux ainsi que la réparation du préjudice qu'elle estime avoir subi. Par un jugement du 25 mai 2021, dont Mme A... relève appel, le tribunal administratif de Caen a rejeté sa demande.
2. Aux termes de l'article 71 de la loi du 9 janvier 1986, dans sa rédaction alors en vigueur, d'une part : " Lorsque les fonctionnaires sont reconnus, par suite d'altération de leur état physique, inaptes à l'exercice de leurs fonctions, le poste de travail auquel ils sont affectés est adapté à leur état physique. Lorsque l'adaptation du poste de travail n'est pas possible, ces fonctionnaires peuvent être reclassés dans des emplois d'un autre corps, s'ils ont été déclarés en mesure de remplir les fonctions correspondantes. / Le reclassement est subordonné à la présentation d'une demande par l'intéressé ". Aux termes de l'article 2 du décret du 8 juin 1989 visé ci-dessus, dans sa rédaction alors en vigueur : " Dans le cas où l'état physique d'un fonctionnaire, sans lui interdire d'exercer toute activité, ne lui permet pas de remplir les fonctions correspondant aux emplois de son grade, l'intéressé peut présenter une demande de reclassement dans un emploi relevant d'un autre grade de son corps ou dans un emploi relevant d'un autre corps. / L'autorité investie du pouvoir de nomination recueille l'avis du comité médical départemental ". L'article 3 de ce même décret précisait, dans cette même rédaction, que : " Le fonctionnaire qui a présenté une demande de reclassement dans un emploi d'un corps différent de celui auquel il appartient peut être détaché dans ce nouveau corps si ce dernier est de niveau équivalent ou inférieur à son corps d'origine (...) ". L'article 4 de ce même décret prévoyait que : " La situation du fonctionnaire détaché dans les conditions prévues à l'article 3 est réexaminée, à l'issue de chaque période de détachement. /Toute décision prononçant le maintien en détachement ou l'intégration du fonctionnaire, sur sa demande, dans le corps dans lequel il était détaché est précédée de l'avis du comité médical compétent ".
3. Aux termes de l'article 29 du décret du 13 octobre 1988, d'autre part : " La mise en disponibilité d'office prévue à l'expiration des droits statutaires à congés de maladie prévus au premier alinéa du 2°, au premier alinéa du 3° et au 4° de l'article 41 de la loi du 9 janvier 1986 susvisée ne peut être prononcée que s'il ne peut, dans l'immédiat, être procédé au reclassement du fonctionnaire dans les conditions prévues par la section 3 du chapitre V de cette loi. /La durée de la disponibilité prononcée d'office ne peut excéder une année. Elle peut être renouvelée deux fois pour une durée égale. Si le fonctionnaire n'a pu, durant cette période, bénéficier d'un reclassement, il est, à l'expiration de cette durée, soit réintégré s'il est physiquement apte à reprendre ses fonctions, soit, en cas d'inaptitude définitive à l'exercice des fonctions admis à la retraite ou, s'il n'a pas droit à pension, licencié. (...) ".
4. En premier lieu, le directeur du centre hospitalier universitaire de Caen a, par décision du 15 mai 2019, régulièrement publiée au recueil des actes administratifs du 17 mai suivant et affichée sur les panneaux aménagés à cet effet, consenti une délégation à Mme B... C..., directrice adjointe au titre des ressources humaines, à effet notamment de signer les actes relatifs à la situation des personnels de tout grade et statuts. Par suite, le moyen tiré de l'incompétence de l'auteur de la décision de licenciement en litige doit être écarté.
5. En deuxième lieu, la décision de licenciement pour inaptitude physique contestée comporte l'énoncé des considérations de fait et de droit qui en constituent le fondement. Elle vise, en particulier, la loi du 9 janvier 1986 et le décret du 8 juin 1989 qui la fondent et fait état de ce que l'intéressée, qui n'était pas inapte à toute fonction, n'avait pas formé, malgré une invitation de l'administration en ce sens, de demande de reclassement. Dès lors, le moyen tiré de l'insuffisance de motivation doit être écarté.
6. En troisième lieu, il ne ressort pas des pièces du dossier que Mme A... ait fait l'objet, depuis 2010, d'un reclassement en application des dispositions précitées de la loi du
9 janvier 1986 et du décret du 8 juin 1989, bien qu'elle ait été affectée sur des emplois administratifs, dont il n'est ni établi, ni même allégué qu'ils correspondaient à son grade
d'aide-soignante et alors qu'elle a refusé son détachement dans le corps correspondant à ces emplois. En outre, à la suite de l'avis du comité médical départemental compétent la déclarant inapte définitivement aux fonctions de son grade mais non à toute fonction, elle a été invitée par l'administration, par un courrier daté du 11 juillet 2017, à solliciter son reclassement. Il est constant qu'elle n'a pas formé auprès de l'administration une demande de reclassement à la suite de ce courrier. Par suite et à le supposer soulevé, le moyen tiré de ce que le directeur du centre hospitalier universitaire aurait commis une erreur de fait en considérant que Mme A... n'avait pas demandé son reclassement doit être écarté.
7. En quatrième lieu, si Mme A... soutient que de nombreux agents du centre hospitalier n'exercent plus, en raison d'une inaptitude physique, les fonctions correspondant à leur grade, mais d'autres fonctions, sans que l'administration leur demande de solliciter leur reclassement administratif, cela ne ressort pas des pièces du dossier. Il ressort au contraire des documents " Maintien et retour dans l'emploi " des 16 mai 2018 et 1er juillet 2019 que les procédures de reclassement interviennent, dans l'établissement, après une demande des agents concernés en ce sens. La méconnaissance alléguée du principe d'égalité entre agents publics doit dès lors, et en tout état de cause, être écarté.
8. En cinquième lieu, compte tenu de ce qui a été dit précédemment, et alors même que le reclassement de Mme A... dans un grade de la filière administrative aurait pu avoir des conséquences défavorables sur ses régimes indemnitaires et de retraite, le détournement de pouvoir allégué n'est pas établi.
9. En dernier lieu, eu égard à ce qui précède, il ne résulte pas de l'instruction que le directeur du centre hospitalier universitaire aurait commis une illégalité fautive en prenant les décisions contestées.
10. Il résulte de tout ce qui précède, et sans qu'il soit besoin d'examiner les fins de non-recevoir opposées par le centre hospitalier universitaire de Caen, que Mme A... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Caen a rejeté sa demande. Ses conclusions présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative doivent, par voie de conséquence, être rejetées.
11. Il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de
Mme A... la somme que demande le centre hospitalier universitaire de Caen au titre des frais exposés et non compris dans les dépens.
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de Mme A... est rejetée.
Article 2 : Les conclusions présentées par le centre hospitalier universitaire de Caen au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à Mme D... A... et au centre hospitalier universitaire de Caen.
Délibéré après l'audience du 7 avril 2022, à laquelle siégeaient :
- M. Salvi, président,
- Mme Brisson, présidente-assesseure,
- M. Catroux, premier conseiller.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 29 avril 2022.
Le rapporteur
X. CATROUXLe président
D. SALVI
Le greffier
R. MAGEAU
La République mande et ordonne au ministre des solidarités et de la santé en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
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N° 21NT01899