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11/03/2022 | FRANCE | N°21NT03301

France | France, Cour administrative d'appel de Nantes, 3ème chambre, 11 mars 2022, 21NT03301


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme A... C..., née B..., a demandé au tribunal administratif de Rennes d'annuler l'arrêté du 12 juillet 2021 du préfet du Morbihan lui refusant la délivrance d'un titre de séjour, l'obligeant à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et fixant le pays de destination.

Par un jugement n° 2104300 du 28 octobre 2021, le tribunal administratif de Rennes a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 25 novembre 2021, Mme C..., repr

sentée par Me Langagne, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administrati...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme A... C..., née B..., a demandé au tribunal administratif de Rennes d'annuler l'arrêté du 12 juillet 2021 du préfet du Morbihan lui refusant la délivrance d'un titre de séjour, l'obligeant à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et fixant le pays de destination.

Par un jugement n° 2104300 du 28 octobre 2021, le tribunal administratif de Rennes a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 25 novembre 2021, Mme C..., représentée par Me Langagne, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Rennes du 28 octobre 2021 ;

2°) d'annuler cet arrêté du 12 juillet 2021 ;

3°) d'enjoindre au préfet du Morbihan, à titre principal, de lui délivrer un titre de séjour portant la mention "vie privée et familiale" ou, à titre subsidiaire, de réexaminer sa situation et de lui délivrer dans l'attente une autorisation provisoire de séjour, dans un délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir et sous astreinte de 80 euros par jour de retard ;

4°) de mettre à la charge de l'État la somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- la décision portant refus de titre de séjour a été prise en méconnaissance des dispositions de l'article L. 423-23 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- cette décision a été prise en méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et est entachée d'une erreur manifeste dans l'appréciation de ses conséquences sur sa situation personnelle ;

- elle a été prise en méconnaissance des stipulations de l'article 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant ;

- la décision portant obligation de quitter le territoire français est illégale en raison de l'illégalité de la décision de refus de titre de séjour ;

- cette décision a été prise en méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- elle est entachée d'une erreur manifeste dans l'appréciation de ses conséquences sur sa situation personnelle ;

- la décision fixant le pays de renvoi est entachée d'une insuffisance de motivation ;

- elle est illégale en raison de l'illégalité de la décision portant obligation de quitter le territoire français.

Par un mémoire en défense enregistré le 16 décembre 2021, le préfet du Morbihan conclut au rejet de la requête.

Il fait valoir que les moyens invoqués par la requérante ne sont pas fondés.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- la convention internationale relative aux droits de l'enfant ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code des relations entre le public et l'administration ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de Mme Brisson a été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. Mme C..., ressortissante turque née le 20 février 1992, serait entrée en France le 19 janvier 2018 selon ses déclarations, sous couvert d'un visa Schengen délivré par les autorités néerlandaises et valable du 17 janvier 2018 au 3 mars suivant pour une durée de trente jours. L'intéressée a sollicité la délivrance d'un titre de séjour le 28 janvier 2021. Par un arrêté du 12 juillet 2021, le préfet du Morbihan a rejeté sa demande, l'a obligée à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel elle serait reconduite à l'issue de ce délai. Mme C... relève appel du jugement du 28 octobre 2021 du tribunal administratif de Rennes rejetant sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté.

Sur les conclusions à fin d'annulation :

En ce qui concerne la décision portant refus de titre de séjour :

2. Aux termes de l'article L. 423-23 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'étranger qui n'entre pas dans les catégories prévues aux articles L. 423-1, L. 423-7, L. 423-14, L. 423-15, L. 423-21 et L. 423-22 ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, et qui dispose de liens personnels et familiaux en France tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus, se voit délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " d'une durée d'un an, sans que soit opposable la condition prévue à l'article L. 412-1 (...) ". Aux termes de l'article L. 434-2 du même code : " L'étranger qui séjourne régulièrement en France depuis au moins dix-huit mois, sous couvert d'un des titres d'une durée de validité d'au moins un an prévus par le présent code ou par des conventions internationales, peut demander à bénéficier de son droit à être rejoint, au titre du regroupement familial : / 1° Par son conjoint, si ce dernier est âgé d'au moins dix-huit ans (...) ".

3. Il ressort des pièces du dossier que Mme C... a épousé en 2015 un compatriote séjournant en France et qui est titulaire d'une carte de séjour pluriannuelle valable du 24 juin 2018 au 23 juin 2022. En vertu de l'article L. 434-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, elle entrait, en qualité de conjoint d'un ressortissant étranger séjournant régulièrement en France depuis au moins dix-huit mois sous couvert d'un titre de séjour d'une durée de validité de plus d'un an, dans la catégorie qui ouvre droit au regroupement familial. Dans ces conditions, Mme C... ne peut pas utilement se prévaloir des dispositions du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.

4. Aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. / 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui ".

5. Mme C... se prévaut d'une présence de plus de trois ans en France où réside également son époux qui est titulaire d'une carte de séjour pluriannuelle, ainsi qu'il a été dit au point 3, et d'un contrat à durée indéterminée dans un emploi de maçon et où sont nés leurs deux enfants, les 30 novembre 2019 et 1er janvier 2021. Il ressort toutefois des pièces du dossier que l'intéressée, qui a épousé en Turquie en 2015 un compatriote résidant en France et qui n'a pas respecté la procédure qui lui était applicable du regroupement familial, ne justifie pas de la régularité de son entrée sur le territoire français, où elle s'est ensuite maintenue sans entreprendre de démarche en vue de sa régularisation avant le mois de janvier 2021. La requérante, ne justifie ni d'une particulière intégration ni être dépourvue de toute attache dans son pays d'origine où elle a vécu jusqu'à près de vingt-six ans, y compris après son mariage, et où rien ne s'oppose à la reconstitution de sa cellule familiale, alors que la présence alléguée de son époux en France depuis 2010 n'est pas établie. Compte tenu de l'ensemble des circonstances de l'espèce et notamment de la durée et des conditions de séjour en France de Mme C..., la décision lui refusant la délivrance d'un titre de séjour n'a pas porté à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels elle a été prise. Dès lors, en prenant cette décision, le préfet du Morbihan n'a pas méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales. Pour les mêmes motifs, cette décision n'est pas davantage entachée d'erreur manifeste dans l'appréciation de ses conséquences sur la situation personnelle de la requérante.

6. En vertu des stipulations de l'article 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant, l'autorité administrative doit accorder une attention primordiale à l'intérêt supérieur des enfants dans toutes les décisions les concernant. Pour les mêmes motifs que ceux exposés au point 5 en ce qui concerne l'absence d'obstacle à la reconstitution dans son pays d'origine de la cellule familiale de Mme C... et alors que la décision lui refusant la délivrance d'un titre de séjour n'a, par elle-même, ni pour objet ni pour effet de séparer ses enfants de leurs parents, le moyen tiré de ce que cette même décision aurait été prise en méconnaissance des stipulations précitées doit être écarté.

En ce qui concerne la décision portant obligation de quitter le territoire français :

7. Compte tenu de l'absence d'illégalité de la décision portant refus de titre de séjour, Mme C... ne saurait exciper de l'illégalité de cette décision à l'appui de ses conclusions dirigées contre la décision l'obligeant à quitter le territoire français.

8. Pour les mêmes motifs que ceux exposés au point 5, les moyens tirés de ce que la décision portant obligation de quitter le territoire français aurait été prise en méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et serait entachée d'une erreur manifeste dans l'appréciation de ses conséquences sur sa situation personnelle ne peuvent qu'être écartés.

En ce qui concerne la décision fixant le pays de renvoi :

9. Il y a lieu d'écarter, par adoption des motifs retenus à bon droit par les premiers juges, les moyens tirés de ce que la décision fixant le pays de renvoi serait entachée d'une insuffisance de motivation et serait illégale en raison de l'illégalité de la décision portant obligation de quitter le territoire français.

10. Il résulte de ce qui précède que Mme C... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Rennes a rejeté sa demande. Par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction sous astreinte et celles tendant à l'application des dispositions des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 doivent également être rejetées.

D E C I D E

Article 1er : La requête de Mme C... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme A... C..., née B... et au ministre de l'intérieur.

Copie en sera adressée au préfet du Morbihan.

Délibéré après l'audience du 24 février 2022, à laquelle siégeaient :

- M. Salvi, président,

- Mme Brisson, présidente-assesseure,

- M. Catroux, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition du greffe le 11 mars 2022.

La rapporteure,

C. Brisson Le président,

D. Salvi

La greffière,

A. Martin

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

N° 21NT033012


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nantes
Formation : 3ème chambre
Numéro d'arrêt : 21NT03301
Date de la décision : 11/03/2022
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. SALVI
Rapporteur ?: Mme Christiane BRISSON
Rapporteur public ?: M. BERTHON
Avocat(s) : SELARL JOVE - LANGAGNE - BOISSAVY

Origine de la décision
Date de l'import : 22/03/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nantes;arret;2022-03-11;21nt03301 ?
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