Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. A... C... a demandé au tribunal administratif de Nantes d'annuler la décision du 16 mars 2017 par laquelle le directeur du centre hospitalier de Château-du-Loir l'a maintenu en position de disponibilité d'office pour raison de santé à compter du 2 mars 2017 et d'enjoindre à l'établissement hospitalier de le réintégrer sur un poste adapté à son état de santé.
Par un jugement n°1705915 du 9 décembre 2020, le tribunal administratif de Nantes a annulé la décision du directeur du centre hospitalier de Château-du-Loir du 16 mars 2017 et a enjoint à l'établissement hospitalier de procéder au réexamen de la situation de M. C... dans un délai de deux mois à compter de la notification de ce jugement.
Procédure devant la cour :
Par une requête enregistrée le 8 février 2021, le centre hospitalier de Château-du-Loir, représenté par la SELARL Cabinet Benoît et associés, demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du 9 décembre 2020 du tribunal administratif de Nantes ;
2°) de rejeter la demande de M. C... présentée devant le tribunal administratif de Nantes ;
3°) de mettre à la charge de M. C... la somme de 2 000 euros sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
- la compétence de l'auteur de la décision en litige est justifiée par les pièces versées à l'instance ; dans ces conditions, c'est à tort que le tribunal administratif a annulé cette décision en raison de l'incompétence de son auteur ;
- les moyens soulevés en première instance par M. C... ne sont pas fondés.
Par un mémoire en défense enregistré le 10 août 2021, M. A... C..., représenté par Me Meunier, conclut au rejet de la requête et à ce que la somme de 2 500 euros soit mise à la charge du centre hospitalier de Château-du-Loir sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
- la compétence de l'auteur de la décision contestée n'est pas établie dès lors que l'attestation d'affichage produite par le centre hospitalier ne présente pas de caractère probant ;
- pour les mêmes motifs que ceux invoqués en première instance, la décision contestée est entachée d'une erreur de droit et d'une erreur manifeste d'appréciation ;
- elle est également entachée d'un vice de procédure dès lors que le centre hospitalier ne l'a pas invité à formuler une demande de reclassement.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la loi n° 86-33 du 9 janvier 1986 ;
- le décret n°88-386 du 19 avril 1988 ;
- le décret n° 89-376 du 8 juin 1989 ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. L'hirondel,
- les conclusions de M. Pons, rapporteur public,
- et les observations de Me Benoît représentant le centre hospitalier de Château-du-Loir et de Me Meunier représentant M. C....
Considérant ce qui suit :
1. M. C..., employé en qualité d'aide-soignant par le centre hospitalier de Château-du-Loir (Sarthe), a été placé en congé de maladie ordinaire du 31 octobre 2014 au 1er janvier 2015 puis à compter du 8 janvier 2015 en raison de lombalgies. Le 23 octobre 2015, le médecin désigné par le comité médical départemental a conclu à l'inaptitude de l'intéressé pour exercer ses fonctions. Par une décision du 14 janvier 2016, M. C... a été placé en position de disponibilité d'office pour raisons de santé. Le 19 janvier 2017, le même médecin, désigné dans les mêmes conditions, a rendu un nouveau rapport dans lequel il concluait à l'inaptitude définitive de M. C... à ses fonctions mais pas à toutes fonctions. Par une décision du 16 mars 2017, le centre hospitalier de Château-du-Loir a maintenu M. C... en position de disponibilité d'office pour raisons de santé, à compter du 2 mars 2017 et dans l'attente de la décision d'admission à la retraite pour invalidité de la caisse nationale de retraite des agents des collectivités locales. A la demande de M. C..., le tribunal administratif de Nantes, par un jugement du 9 décembre 2020, a annulé la décision du 16 mars 2017 et a enjoint à l'établissement hospitalier de procéder au réexamen de la situation de l'intéressé. Le centre hospitalier de Château-du-Loir relève appel de ce jugement.
Sur le moyen d'annulation retenu par le tribunal :
2. Aux termes de l'article D. 6143-33 du code de la santé publique : " Dans le cadre de ses compétences définies à l'article L. 6143-7, le directeur d'un établissement public de santé peut, sous sa responsabilité, déléguer sa signature. ". Aux termes de l'article D. 6143-35 du même code : " Les délégations mentionnées à la présente sous-section, de même que leurs éventuelles modifications sont notifiées aux intéressés et publiées par tout moyen les rendant consultables. Elles sont communiquées au conseil de surveillance et transmises sans délai au comptable de l'établissement lorsqu'elles concernent des actes liés à la fonction d'ordonnateur des dépenses. ". Enfin, l'article R. 6143-38 de ce code, dans sa rédaction alors applicable issue du décret n°2010-344 du 31 mars 2010, dispose que : " Sans préjudice des obligations de publication prévues par d'autres dispositions du présent code, les décisions des directeurs des établissements publics de santé et les délibérations non réglementaires de leurs conseils de surveillance sont notifiées aux personnes physiques et morales qu'elles concernent. Leurs décisions et délibérations réglementaires sont affichées sur des panneaux spécialement aménagés à cet effet et aisément consultables par les personnels et les usagers (...) ".
3. Il ressort des pièces du dossier que, par une décision du 23 septembre 2014,
le directeur du centre hospitalier de Château-du-Loir a donné à M. B... D..., responsable des ressources humaines et des affaires médicales et auteur de la décision contestée, délégation à l'effet de signer les décisions nominatives relatives aux agents de l'établissement dont ne sont pas exclues les décisions relatives aux placements en disponibilité d'office. La décision de délégation de signature du 23 septembre 2014 prévoit expressément, parmi les copies à réaliser, quatre exemplaires destinés au tableau d'affichage. Le centre hospitalier de Château-du-Loir produit également un certificat du directeur général des centres hospitaliers de Château-du-Loir, du Lude, du Mans, de Saint-Calais et de l'EHPAD de Bessé-sur-Braye du
4 février 2021 attestant que la décision de délégation de signature " a été affichée à compter du 26 janvier 2017 et pendant toute la durée de la délégation, sur les 4 panneaux d'affichage prévus à cet effet (...) ". La circonstance que cette attestation a été rédigée quatre ans après les faits qu'elle constate n'est pas, à elle seule, de nature à lui ôter son caractère probant. Eu égard aux énonciations contenues dans la décision de délégation de signature qui sont confirmées par le certificat d'affichage, M. C... n'apporte aucun élément permettant de contredire utilement les déclarations contenues dans ce certificat.
4. Dans ces conditions, le centre hospitalier de Château-du-Loir est fondé à soutenir que c'est à tort que le tribunal administratif a annulé la décision en litige du 16 mars 2017 comme entachée d'incompétence en l'absence d'affichage régulier de la décision de délégation de signature.
5. Il appartient à la cour, saisie de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens soulevés par M. C... devant le tribunal administratif de Nantes et en appel.
Sur les autres moyens de M. C... :
6. Aux termes de l'article 71 de la loi du 9 janvier 1986, dans sa rédaction alors applicable : " Lorsque les fonctionnaires sont reconnus, par suite d'altération de leur état physique, inaptes à l'exercice de leurs fonctions, le poste de travail auquel ils sont affectés est adapté à leur état physique. Lorsque l'adaptation du poste de travail n'est pas possible, ces fonctionnaires peuvent être reclassés dans des emplois d'un autre corps, s'ils ont été déclarés en mesure de remplir les fonctions correspondantes. / Le reclassement est subordonné à la présentation d'une demande par l'intéressé. ". Aux termes de l'article 17 du décret du
19 avril 1988 visé ci-dessus, dans sa rédaction alors applicable : " Lorsque le fonctionnaire est dans l'incapacité de reprendre son service à l'expiration de la première période de six mois consécutifs de congé de maladie, le comité médical est saisi pour avis de toute demande de prolongation de ce congé dans la limite des six mois restant à courir. Lorsqu'un fonctionnaire a obtenu pendant une période de douze mois consécutifs des congés de maladie d'une durée totale de douze mois, il ne peut, à l'expiration de sa dernière période de congé, reprendre son service qu'après l'avis favorable du comité médical. Si l'avis du comité médical est défavorable, le fonctionnaire est soit mis en disponibilité, soit, s'il le demande, reclassé dans un autre emploi, soit, s'il est reconnu définitivement inapte à l'exercice de tout emploi, admis à la retraite après avis de la commission de réforme des agents des collectivités locales. Le paiement du demi-traitement est maintenu, le cas échéant, jusqu'à la date de la décision de reprise de service, de reclassement, de mise en disponibilité ou d'admission à la retraite. ". Aux termes de l'article
2 du décret du 8 juin 1989 pris pour l'application de la loi n° 86-33 du 9 janvier 1986 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique hospitalière et relatif au reclassement des fonctionnaires pour raisons de santé : " Dans le cas où l'état physique d'un fonctionnaire, sans lui interdire d'exercer toute activité, ne lui permet pas de remplir les fonctions correspondant aux emplois de son grade, l'intéressé peut présenter une demande de reclassement dans un emploi relevant d'un autre grade de son corps ou dans un emploi relevant d'un autre corps. L'autorité investie du pouvoir de nomination recueille l'avis du comité médical départemental. ". Ces dispositions, en subordonnant le reclassement à la présentation d'une demande par l'intéressé, ont pour objet d'interdire à l'employeur d'imposer un tel reclassement, mais ne le dispensent pas d'inviter l'intéressé à formuler une telle demande.
7. Il ressort des pièces du dossier, et ainsi qu'il a été dit au point 1, que le médecin désigné par le comité médical départemental a conclu, dans son dernier rapport du 19 janvier 2017, à l'inaptitude définitive de M. C... à ses fonctions mais pas à toutes fonctions. Dans ces conditions, le centre hospitalier de Château-du-Loir ne pouvait placer M. C... en position de disponibilité d'office sans l'avoir invité au préalable à présenter une demande de reclassement. Si le centre hospitalier soutient qu'il n'avait, en l'espèce, aucune obligation de procéder à des recherches en vue du reclassement de l'intimé dès lors qu'il n'avait formulé aucune demande en ce sens, ce dernier soutient, cependant, sans être utilement contesté, n'avoir jamais reçu de courrier de l'établissement hospitalier l'invitant à présenter une telle demande. Par suite, faute d'avoir invité M. C... à formuler une demande de reclassement, le centre hospitalier a méconnu les dispositions législatives et réglementaires sus-rappelées.
La circonstance que l'établissement soit sous " contrat de retour à l'équilibre financier " (CREF) ne le dispensait pas de cette formalité. Au surplus, le centre hospitalier de Château-du-Loir ne justifie pas avoir effectivement procédé à des recherches de reclassement au sein de son établissement. Ni le courrier adressé le 18 novembre 2015 à M. C..., ni l'attestation de l'auteur de la décision contestée du 4 octobre 2017 ne sont de nature à établir, en l'absence de tout justificatif, qu'il n'existait aucun poste vacant compatible avec l'état de santé de M. C... et qui aurait pu lui être proposé. De même, les courriers du 6 février 2017 adressés au centre hospitalier du Mans, à la commune de Chambray-les-Tours et au centre intercommunal d'action sociale (CIAS) ainsi que l'attestation de la directrice des ressources humaines de l'établissement public de santé mentale (ESPM) de la Sarthe ne sauraient suppléer l'absence de justificatif ci-avant relevée quant aux recherches effectuées au sein du centre hospitalier de Château-du-Loir. Par suite, et sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens soulevés par M. C..., ce dernier est fondé à soutenir que la décision en litige a méconnu les dispositions citées au point 6 et à en demander son annulation.
8. Il résulte de tout ce qui précède que le centre hospitalier de Château-du-Loir n'est pas fondé à se plaindre de ce que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nantes, a annulé sa décision du 16 mars 2017.
Sur les frais liés au litige :
9. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de M. C... la somme que demande le centre hospitalier de Château-du-Loir au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge du centre hospitalier de Château-du-Loir une somme de 1 500 euros en application de ces dispositions.
DÉCIDE :
Article 1er : La requête du centre hospitalier de Château-du-Loir est rejetée.
Article 2 : Le centre hospitalier de Château-du-Loir versera à M. C... la somme de 1 500 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié au centre hospitalier de Château-du-Loir et à M. A... C....
Délibéré après l'audience du 20 janvier 2022, à laquelle siégeaient :
- M. Salvi, président de chambre,
- Mme Brisson, présidente-assesseure,
- M. L'hirondel, premier conseiller.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 4 février 2022.
Le rapporteur
M. L'HIRONDELLe président
D. SALVI
La greffière
A. MARTIN
La République mande et ordonne au ministre des solidarités et de la santé en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
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N° 21NT00342