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25/01/2022 | FRANCE | N°20NT03310

France | France, Cour administrative d'appel de Nantes, 6ème chambre, 25 janvier 2022, 20NT03310


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme B... A... a demandé au tribunal administratif de Caen d'annuler la décision du 30 octobre 2018 par laquelle le directeur de l'office public de l'habitat (OPH) Orne Habitat l'a affectée sur un poste de chargée de clientèle à l'agence d'Argentan.

Par un jugement n° 1900007 du 18 août 2020, le tribunal administratif de Caen a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête et un mémoire enregistrés les 19 octobre 2020 et 11 mars 2021, Mme A..., représentée par Me

Désert, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Caen du 18 ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme B... A... a demandé au tribunal administratif de Caen d'annuler la décision du 30 octobre 2018 par laquelle le directeur de l'office public de l'habitat (OPH) Orne Habitat l'a affectée sur un poste de chargée de clientèle à l'agence d'Argentan.

Par un jugement n° 1900007 du 18 août 2020, le tribunal administratif de Caen a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête et un mémoire enregistrés les 19 octobre 2020 et 11 mars 2021, Mme A..., représentée par Me Désert, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Caen du 18 août 2020 ;

2°) d'annuler la décision contestée ;

3°) de mettre à la charge de l'OPH Orne Habitat le versement de la somme de 800 euros au titre de l'article L.761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- l'auteur de la décision contestée s'est estimé lié par l'avis du comité médical ;

- elle n'a pas été mise à même de consulter son dossier en méconnaissance des dispositions de l'article 65 de la loi du 22 avril 1905 ;

- cette décision n'a pas été prise dans l'intérêt du service ;

- le poste de chargée de clientèle à Argentan n'est pas adapté à sa situation médicale et est contraire aux dispositions de l'article 2-1 du décret 85-603 du 10 juin 1985.

Par des mémoires, enregistrés les 29 janvier et 8 avril 2021, l'office public de l'habitat Orne Habitat, représenté par Me Apéry-Chauvin, conclut au rejet de la requête et à ce que la somme de 1 000 euros soit mise à la charge de Mme A... au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que les moyens soulevés par Mme A... ne sont pas fondés.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

-la loi du 22 avril 1905 ;

-la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 ;

-le décret n°85-603 du 10 juin 1985 ;

-le décret n°85-1054 du 30 septembre 1985 ;

-le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Gélard,

- les conclusions de Mme Malingue, rapporteure publique,

- et les observations de Me Désert, représentant Mme A....

Considérant ce qui suit :

1. Après avoir repris ses fonctions dans le cadre d'un mi-temps thérapeutique à la suite de complications liées à une intervention chirurgicale, Mme A..., adjointe administrative à l'office public de l'habitat (OPH) Orne Habitat, a appris, par une lettre en date du 21 décembre 2017, la suppression à compter du 1er février 2018 du poste de responsable du point d'accueil de Vimoutiers qu'elle occupait. Elle a été placée en arrêt de maladie du 8 janvier au 1er novembre 2018 pour un syndrome anxio-dépressif réactionnel, reconnu imputable au service. Par une décision du 30 octobre 2018, le directeur de l'OPH l'a affectée à compter du 2 novembre suivant sur un poste de chargée de clientèle à l'agence d'Argentan. Mme A... relève appel du jugement du 18 août 2020 par lequel le tribunal administratif de Caen a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cette décision.

Sur les conclusions à fin d'annulation de la décision du 30 octobre 2018 :

2. En premier lieu, aux termes de l'article 18 de la loi du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires : " (...) Tout fonctionnaire a accès à son dossier individuel dans les conditions définies par la loi (...) ". Par ailleurs, aux termes de l'article 65 de la loi du 22 avril 1905 portant fixation du budget des dépenses et des recettes de l'exercice 1905 : " Tous les fonctionnaires civils et militaires, tous les employés et ouvriers de toutes administrations publiques ont droit à la communication personnelle et confidentielle de toutes les notes, feuilles signalétiques et tous autres documents composant leur dossier, soit avant d'être l'objet d'une mesure disciplinaire ou d'un déplacement d'office, soit avant d'être retardé dans leur avancement à l'ancienneté ". En vertu de ces dispositions, un agent public faisant l'objet d'une mesure prise en considération de sa personne, qu'elle soit ou non justifiée par l'intérêt du service, doit être mis à même de demander la communication de son dossier, en étant averti en temps utile de l'intention de l'autorité administrative de prendre la mesure en cause. Dans le cas où l'agent public fait l'objet d'un déplacement d'office, il doit être regardé comme ayant été mis à même de solliciter la communication de son dossier s'il a été préalablement informé de l'intention de l'administration de le muter dans l'intérêt du service, quand bien même le lieu de sa nouvelle affectation ne lui aurait pas alors été indiqué.

3. Il ressort du courrier du 21 décembre 2017 faisant suite à l'entretien qu'elle a eu le 19 décembre précédant avec la directrice des ressources humaines de l'OPH, son adjointe référente handicap et le directeur de l'agence d'Argentan, que Mme A... a été informée dès cette date de la suppression de son poste de responsable du point relais de Vimoutiers à compter du 1er février 2018. Deux propositions d'affectation lui ont alors été soumises : l'une sur un poste d'accueil à l'agence de l'Aigle, qu'elle avait déjà refusé, et l'autre sur un poste de chargée de clientèle à Argentan, qu'elle a accepté dans un premier temps avant de se rétracter. Compte tenu de ces éléments, Mme A... doit être regardée comme ayant été mise à même de demander la communication de son dossier préalablement à la décision contestée. Par suite, le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions précitées ne peut dès lors qu'être écarté.

4. En deuxième lieu, ainsi que le souligne en défense l'OPH, dans son avis du 24 mai 2018 le comité médical départemental ne s'est pas prononcé sur l'affectation de Mme A... sur un poste de chargée de clientèle à Argentan mais sur son aptitude à exercer de telles fonctions compte tenu de ses restrictions médicales. Par suite, la requérante n'est pas fondée à soutenir qu'en prenant la décision contestée l'affectant à l'agence d'Argentan, le directeur de l'OPH se serait estimé lié par l'avis rendu par ce comité et aurait méconnu l'étendu de sa compétence. Ce moyen ne peut dès lors qu'être écarté.

5. En troisième lieu, aux termes de l'article 1er du décret du 30 décembre 1985 relatif au reclassement des fonctionnaires territoriaux reconnus inaptes à l'exercice de leurs fonctions, dans sa rédaction en vigueur à la date de la décision contestée : " Lorsque l'état de santé d'un fonctionnaire territorial ne lui permet plus d'exercer normalement ses fonctions et que les nécessités du service ne permettent pas d'aménager ses conditions de travail, le fonctionnaire peut être affecté dans un autre emploi de son grade après avis de la commission administrative paritaire (...)".

6. Il est constant qu'en raison de son état de santé, Mme A... ne pouvait plus assurer les visites en étage des logements du parc de l'OPH Orne Habitat et que pendant un an, à compter de sa reprise en octobre 2016, ses collègues de l'agence d'Argentan se déplaçaient spécialement pour assurer ses visites. Si l'intéressée met en avant le fait que la remise des clés aux futurs locataires pouvait être effectuée en échange d'une pièce d'identité afin de leur permettre de visiter seuls les appartements, l'OPH souligne les risques liés à cette pratique qu'il n'avait pas autorisée. De plus, une bonne connaissance du parc immobilier ne pouvait pallier l'absence de visite des logements en présence d'un agent de l'OPH. Ainsi, Orne Habitat a pu estimer que la présence d'un responsable du point d'accueil de Vimoutiers, en dehors des horaires d'accueil du public et des visites programmées, ne s'avérait plus nécessaire. De plus, il fait valoir que cette nouvelle organisation permettait de regrouper les tâches administratives sur un même site et d'optimiser la gestion de l'agence d'Argentan. Dans ces conditions, la requérante n'établit que la décision contestée n'aurait pas été prise dans l'intérêt du service[GO1].

7. En dernier lieu, aux termes de l'article 2[GO2] du décret du 10 juin 1985 relatif à l'hygiène et à la sécurité du travail ainsi qu'à la médecine professionnelle et préventive dans la fonction publique territoriale : " Dans les collectivités et établissements mentionnés à l'article 1er, les locaux et installations de service doivent être aménagés, les équipements doivent être réalisés et maintenus de manière à garantir la sécurité des agents et des usagers. Les locaux doivent être tenus dans un état constant de propreté et présenter les conditions d'hygiène et de sécurité nécessaires à la santé des personnes ".

8. Mme A... soutient que le poste de chargée de clientèle situé à Argentan ne respectait pas les restrictions qui avaient été définies par le médecin de prévention. Dans son avis du 3 octobre 2017, celui-ci a en effet indiqué que l'état de santé de l'intéressée n'autorisait ni la " montée d'escalier ", ni la " conduite de véhicule non équipé de boîte de vitesse automatisée sur un trajet de plus de 15 kms ", sans toutefois indiquer dans son avis les raisons de cette restriction très précise sur ce dernier point. Pour sa part, le médecin du service de santé au travail a considéré, le 16 novembre 2018, que l'installation d'une seconde rampe d'escalier facilitant l'accès à son poste de travail répondait à ces exigences dès lors que l'intéressée était dispensée de faire visiter les logements dont elle avait la charge afin de limiter ses déplacements. L'OPH fait valoir en outre, sans être contredit, que lorsqu'une réunion était organisée à un étage non accessible aux personnes à mobilité réduite, Mme A... y participait en visioconférence, ou était informée des décisions prises, ainsi que cela lui avait été précisé dans un courriel du 16 novembre 2018. Enfin, il n'est pas contesté que l'intéressée disposait d'une place de stationnement qui lui était réservée à proximité immédiate de l'agence d'Argentan. Le médecin du service de santé au travail n'ayant émis aucune réserve sur l'affectation de l'intéressée à Argentan ainsi que sur le fait que ce poste était situé à 30 km de son domicile, l'OPH Orne Habitat doit ainsi être regardé comme ayant aménagé le poste de travail de Mme A... de façon à respecter les restrictions médicales dont elle faisait l'objet. Par suite, la requérante, qui ne justifie pas de l'obligation de son employeur de lui fournir un véhicule muni d'une boîte de vitesse automatique pour se rendre sur son lieu de travail, n'est pas fondée à soutenir que la décision contestée serait contraire aux dispositions précitées de l'article 2-1 du décret du 10 juin 1985.

9. Il résulte de tout ce qui précède, que Mme A... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Caen a rejeté sa demande.

Sur les frais liés au litige :

10. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mis à la charge de l'OPH Orne Habitat, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, le versement à Mme A... C... la somme qu'elle demande au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Dans les circonstances de l'espèce, il n'y a pas lieu de mettre à la charge de Mme A... le versement à Orne Habitat de la somme qu'il demande au titre des mêmes frais.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de Mme A... est rejetée.

Article 2 : Les conclusions de l'OPH Orne Habitat tendant au bénéfice des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à Mme B... A... et à l'office public de l'habitat Orne Habitat.

Délibéré après l'audience du 7 janvier 2022, à laquelle siégeaient :

- M. Gaspon, président de chambre,

- M. Coiffet, président-assesseur,

- Mme Gélard, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe, le 25 janvier 2022.

La rapporteure,

V. GELARDLe président,

O. GASPON

La greffière,

I. PETTON

La République mande et ordonne au ministre de la cohésion des territoires et des relations avec les collectivités territoriales en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

[GO1]Plus exactement, l'intérêt du service n'était pas absent de la décision...

[GO2]Bien vérifier l'état du texte au 30/10/18

Cet article n'a pas changé

2

N° 20NT03310


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nantes
Formation : 6ème chambre
Numéro d'arrêt : 20NT03310
Date de la décision : 25/01/2022
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. GASPON
Rapporteur ?: Mme Valérie GELARD
Rapporteur public ?: Mme MALINGUE
Avocat(s) : DESERT PAULINE

Origine de la décision
Date de l'import : 01/02/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nantes;arret;2022-01-25;20nt03310 ?
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