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11/01/2022 | FRANCE | N°20NT03382

France | France, Cour administrative d'appel de Nantes, 6ème chambre, 11 janvier 2022, 20NT03382


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme B... A... a demandé au tribunal administratif de Nantes de condamner l'Etat à lui verser une somme globale de 30 000 euros, assortie des intérêts et de leur capitalisation, en réparation de son préjudice moral et des troubles dans ses conditions d'existence résultant de son exposition, au cours de sa carrière professionnelle entre le 1er août 1991 et le 31 août 1992, à l'inhalation de poussières d'amiante.

Par un jugement n° 1609042 du 15 juillet 2020, le tribunal administratif de Nantes a

rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 2...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme B... A... a demandé au tribunal administratif de Nantes de condamner l'Etat à lui verser une somme globale de 30 000 euros, assortie des intérêts et de leur capitalisation, en réparation de son préjudice moral et des troubles dans ses conditions d'existence résultant de son exposition, au cours de sa carrière professionnelle entre le 1er août 1991 et le 31 août 1992, à l'inhalation de poussières d'amiante.

Par un jugement n° 1609042 du 15 juillet 2020, le tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 28 octobre 2020, Mme A..., représentée par Mes Laforgue et Macouillard, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Nantes du 15 juillet 2020 ;

2°) de condamner l'Etat (INSEE) à lui verser la somme de 30 000 euros, assortie des intérêts et de leur capitalisation ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat le versement de la somme de 2 000 euros au titre de l'article L.761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- même une faible exposition à l'inhalation de poussières d'amiante est suffisante pour déclencher un cancer broncho pulmonaire ; elle doit bénéficier de la présomption d'imputabilité de toutes les maladies inscrites au tableau 30 des maladies professionnelles ;

- l'Etat, en sa qualité de régulateur, a commis une faute en ne prenant pas les dispositions nécessaires pour empêcher l'exposition des agents du Tripode ; l'Etat n'a pas mené de recherche pour évaluer les risques des travailleurs exposés passivement aux poussières d'amiante ;

- l'Etat, en sa qualité d'employeur a également commis une faute en ne prenant aucune mesure préventive adaptée pour lutter contre l'exposition à l'amiante des agents du Tripode ; les organisations syndicales ont dénoncé la présence d'amiante dans le bâtiment Tripode depuis 1979 ; les études ont confirmé le dépassement des seuils autorisés ;

- depuis la décision du 14 novembre 2014, ils bénéficient tous d'une classification d'exposition à l'amiante de niveau intermédiaire ;

- son préjudice d'anxiété est réel dans la mesure où depuis cette date, elle a conscience du risque auquel elle a été exposée de développer une maladie mortelle ;

- elle est contrainte de prendre en compte le risque auquel elle a été exposée pour les années à venir.

Par un courrier du 27 novembre 2020, une médiation a été proposée aux parties sur le fondement de l'article L. 213-7 du code de justice administrative.

Par un mémoire, enregistré le 21 décembre 2020, le ministre de l'économie, des finances et de la relance, a informé la cour qu'il n'était pas opposé à une médiation.

Par un mémoire, enregistré le 21 décembre 2020, Mme A..., a fait savoir, par l'intermédiaire de son conseil, qu'elle n'était pas opposée à une médiation si l'Etat prenait en charge la rémunération du médiateur.

Par un courrier reçu le 8 janvier 2021, Mme A... a informé la cour qu'un accord avait été trouvé pour la prise en charge des frais de médiation sur la base de 75 % pour l'Etat et 25 % pour elle.

Par un courrier enregistré le 13 janvier 2021, le ministre de l'économie, des finances et de la relance a fait connaître à la cour qu'il donnait son accord pour une co-médiation avec le centre atlantique de médiation et qu'il acceptait de prendre en charge l'intégralité des frais de la médiation.

Par un courrier reçu le 5 juillet 2021, le ministre de l'économie, des finances et de la relance a informé la cour que, le 25 juin 2021, un protocole d'accord avait été conclu avec Mme A.... Il sollicite l'homologation de cet accord par lequel, en contrepartie du versement d'une somme de 1 300 euros " sans adjonctions ni restrictions ", Mme A... se désiste du présent litige.

Par un courrier enregistré le 2 septembre 2021, Mme A... a fait savoir qu'elle acceptait la somme de 1 300 euros et sollicitait l'homologation de cet accord transactionnel. Elle a demandé à la cour, en cas de réponse positive, de prendre acte de son désistement.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code civil ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Gélard,

- et les conclusions de M. Lemoine, rapporteur public.

Considérant ce qui suit :

1. Mme A... a travaillé du 1er août 1991 au 31 août 1992 en qualité d'agent technique de bureau à l'Institut national de la statistique et des études économiques (INSEE), relevant du ministère chargé de l'économie, dans le bâtiment " Tripode " situé sur l'Ile de Nantes. Cet immeuble de grande hauteur, construit à la fin des années 1960, a été évacué à partir de l'année 1993 pour être désamianté puis démoli en 2005. Le 14 novembre 2014, le ministre des finances et des comptes publics ainsi que le ministre de l'économie, de l'industrie et du numérique ont reconnu que les agents en fonction dans ce bâtiment avaient été exposés aux poussières d'amiante, qui se dégageaient notamment des plafonds des bureaux et couloirs, à un " niveau intermédiaire ". Le 29 décembre 2015, Mme A... a présenté une réclamation préalable tendant à l'indemnisation de son préjudice moral d'anxiété résultant de la crainte de développer une pathologie grave et des troubles dans ses conditions d'existence qui en ont résulté. Elle relève appel du jugement du 15 juillet 2020 par lequel le tribunal administratif de Nantes a reconnu la responsabilité de l'Etat mais a écarté le préjudice de la requérante en estimant que compte tenu de la courte durée durant laquelle elle avait été exposée aux poussières d'amiante, elle ne justifiait pas d'un préjudice direct et certain. Le 5 juillet 2021, le ministre de l'économie, des finances et de la relance a informé la cour que, le 25 juin 2021, un protocole d'accord avait été conclu avec Mme A.... Les parties sollicitent l'homologation de cet accord.

Sur l'homologation de l'accord transactionnel :

2. Selon l'article 2044 du code civil, la transaction est un contrat par lequel les parties, par des concessions réciproques, terminent une contestation née ou préviennent une contestation à naître. En vertu de l'article 2052 du même code, un tel contrat a entre les parties l'autorité de la chose jugée en dernier ressort. L'article 6 du code civil interdit de déroger par convention aux lois qui intéressent l'ordre public. Il résulte de ces dispositions que l'administration peut, ainsi que le rappelle désormais l'article L. 423-1 du code des relations entre le public et l'administration, afin de prévenir ou d'éteindre un litige, légalement conclure avec un particulier un protocole transactionnel, sous réserve de la licéité de l'objet de ce dernier, de l'existence de concessions réciproques et équilibrées entre les parties et du respect de l'ordre public. En cas d'homologation de la transaction, le juge administratif doit constater le non-lieu à statuer sur la requête ou, dans le cas où la partie requérante aurait subordonné son désistement à l'homologation de la transaction, donner acte de ce désistement. En revanche, le refus d'homologation entraînant la nullité de la transaction, il appartient dans cette hypothèse au juge de statuer sur la requête.

3. Il résulte de l'instruction que le protocole d'accord conclu le 25 juin 2021 entre l'Etat et le conseil de Mme A... n'a pas d'autre objet que de mettre fin, par des concessions réciproques, au litige porté par les deux parties devant la juridiction administrative. Le protocole a été régulièrement signé par les deux parties. Son objet, qui tend à l'indemnisation de préjudices résultant des fautes commises par l'Etat, est licite. Eu égard à la somme allouée qui tient notamment compte de la durée d'exposition aux poussières d'amiante subie par l'intéressée, il n'est pas constitutif d'une libéralité de la part de l'Etat et ne méconnaît aucune autre règle d'ordre public. Ainsi, rien ne s'oppose à son homologation.

Sur les conclusions de Mme A... tendant à ce qu'il lui soit donné acte de son désistement :

4. Dès lors que le protocole d'accord conclu le 25 juin 2021 est homologué par le présent arrêt, rien ne s'oppose à ce qu'il soit donné acte du désistement de Mme A..., y compris en ce qui concerne les frais exposés et non compris dans les dépens.

DÉCIDE :

Article 1er : Le protocole d'accord conclu le 25 juin 2021 entre Mme A... et l'Etat est homologué.

Article 2 : Il est donné acte du désistement de la requête de Mme A....

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à Mme B... A... et au ministre de l'économie, des finances et de la relance.

Délibéré après l'audience du 17 décembre 2021, à laquelle siégeaient :

- M. Gaspon, président de chambre,

- M. Coiffet, président-assesseur,

- Mme Gélard, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe, le 11 janvier 2022.

La rapporteure,

V. GELARDLe président,

O. GASPON

La greffière,

P. CHAVEROUX

La République mande et ordonne au ministre de l'économie, des finances et de la relance en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

3

N° 20NT03382


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nantes
Formation : 6ème chambre
Numéro d'arrêt : 20NT03382
Date de la décision : 11/01/2022
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : M. GASPON
Rapporteur ?: Mme Valérie GELARD
Rapporteur public ?: M. LEMOINE
Avocat(s) : CABINET D'AVOCATS TEISSONNIERE TOPALOFF LAFFORGUE ANDREU ET ASSOCIES

Origine de la décision
Date de l'import : 25/01/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nantes;arret;2022-01-11;20nt03382 ?
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