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21/12/2021 | FRANCE | N°20NT00107

France | France, Cour administrative d'appel de Nantes, 6ème chambre, 21 décembre 2021, 20NT00107


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme A... B... a demandé au tribunal administratif de Nantes d'annuler la décision du 18 novembre 2016 par laquelle le directeur régional des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l'emploi de la région Pays de la Loire lui a attribué, au titre du complément indemnitaire pour l'année 2016, un montant de 265,10 euros, ainsi que la décision implicite par laquelle le ministre du travail, de l'emploi, de la formation professionnelle et du dialogue social a rejeté son recours hiéra

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Par un jugement n° 1704309 du 12 novembre 2019, le tribunal ad...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme A... B... a demandé au tribunal administratif de Nantes d'annuler la décision du 18 novembre 2016 par laquelle le directeur régional des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l'emploi de la région Pays de la Loire lui a attribué, au titre du complément indemnitaire pour l'année 2016, un montant de 265,10 euros, ainsi que la décision implicite par laquelle le ministre du travail, de l'emploi, de la formation professionnelle et du dialogue social a rejeté son recours hiérarchique.

Par un jugement n° 1704309 du 12 novembre 2019, le tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 10 janvier 2020, Mme B..., représentée par Me Hautefaye, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du 12 novembre 2019 ;

2°) d'annuler la décision du 18 novembre 2016 et celle rejetant implicitement son recours administratif ;

3°) d'enjoindre au ministre chargé du travail de prendre une nouvelle décision lui accordant, au titre de l'année 2016, un complément indemnitaire annuel au taux majoré (niveau 3) ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 800 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

-le tribunal administratif de Nantes, qui avait adressé une mise en demeure de conclure à laquelle il n'avait pas été répondu de sorte que la partie défenderesse devait être réputée avoir acquiescé aux faits exposés dans son mémoire, a commis une erreur de droit et méconnu le droit à un procès équitable prévu à l'alinéa 1 de l'article 6 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales en faisant porter sur elle la charge de la preuve de ce qu'elle avançait ;

-en lui attribuant un complément indemnitaire de niveau 2 sans tenir compte de ses qualités professionnelles, de son investissement professionnel et de son sens du service, le directeur des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l'emploi a commis une erreur manifeste d'appréciation ;

- l'attribution d'un complément indemnitaire annuel identique aux trois inspecteurs du travail de l'unité de contrôle sans tenir compte ni du différentiel de charge de travail entre eux ni de leur ancienneté ni de leur investissement professionnel constitue une inégalité de traitement, en méconnaissance du principe constitutionnel d'égalité de traitement des fonctionnaires dans le déroulement de carrière des agents du même corps ;

- c'est à tort que le tribunal administratif a dénié tout caractère opposable et règlementaire à l'instruction ministérielle du 13 juin 2017.

Par un mémoire, enregistré le 8 mars 2021, le ministre du travail conclut au rejet de la requête.

Il soutient que les moyens soulevés ne sont pas fondés.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

-la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 ;

- la loi n°84-16 du 11 janvier 1984 ;

- le décret n°2014-513 du 20 mai 2014 ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Malingue,

- et les conclusions de M. Lemoine, rapporteur public.

Considérant ce qui suit :

1. Mme B..., inspectrice du travail titularisée par un arrêté du 3 mars 2009 est affectée depuis cette date à l'unité départementale de contrôle de la Mayenne de la direction des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l'emploi de la région Pays de la Loire. Elle a reçu, par une décision du 18 novembre 2016, la notification du montant qui lui était alloué pour l'année 2016 au titre du complément indemnitaire annuel, fixé à la somme de 265,10 euros, correspondant à un complément de niveau 2, proratisé en raison de son temps partiel (80%). Par courrier du 17 janvier 2017, elle a formé un recours hiérarchique auprès du ministre chargé du travail contre la décision du 18 novembre 2016, qui a été implicitement rejeté. Mme B... a demandé au tribunal administratif de Nantes d'annuler la décision du 18 novembre 2016 ainsi que la décision implicite de rejet de son recours hiérarchique. Elle relève appel du jugement du 12 novembre 2019 par lequel ce tribunal a rejeté sa demande.

Sur le bien-fondé du jugement attaqué :

2. Aux termes de l'article 3 du décret du 20 mai 2014 portant création d'un régime indemnitaire tenant compte des fonctions, des sujétions, de l'expertise et de l'engagement professionnel dans la fonction publique de l'Etat : " Les fonctionnaires mentionnés à l'article 1er peuvent bénéficier d'un complément indemnitaire annuel qui tient compte de l'engagement professionnel et de la manière de servir, appréciée dans les conditions fixées en application de l'article 55 de la loi du 11 janvier 1984 susvisée.(...) ". Aux termes de l'article 55 de la loi du 11 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique de l'Etat dans sa rédaction applicable : " Par dérogation à l'article 17 du titre Ier du statut général, l'appréciation de la valeur professionnelle des fonctionnaires se fonde sur un entretien professionnel annuel conduit par le supérieur hiérarchique direct. ".

3. Mme B... soutient qu'en lui attribuant par la décision contestée du 18 novembre 2016 un complément indemnitaire annuel de 265,10 euros, correspondant au montant forfaitaire de base de niveau 2 de 300 euros proratisé au regard de son temps de travail de 80%, le directeur des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l'emploi des Pays de la Loire a fait une appréciation manifestement erronée de sa manière de servir de l'année 2016 dès lors que son engagement professionnel et sa manière de servir justifiaient que lui soit attribué le niveau majoré de 500 euros prévu pour 20% des agents de catégorie A dont la manière de servir devait être distinguée au titre de cette année. Elle produit, à l'appui de ses dires, le compte rendu de son entretien professionnel, duquel il ressort que l'ensemble des objectifs qui lui ont été fixés en 2016 ont été atteints, qu'elle a donné pleine satisfaction dans l'ensemble des missions qu'elle a eu à mener en 2016 dans un contexte où elle a dû assurer trois suppléances jusqu'en juin 2016 puis deux suppléances jusqu'en décembre 2015 et où elle a activement participé à la montée en compétences des inspectrices du travail nouvellement affectées, et " qu'elle est un inspecteur du travail confirmé, qui a à cœur de remplir ses missions, qui a toute la confiance de la hiérarchie et dont les qualités professionnelles et intrinsèques sont unanimement reconnues ". Le tableau d'appréciation de la valeur professionnelle figurant dans ce compte rendu fait état d'une cotation de ses compétences techniques et de ses capacités à exercer des responsabilités de niveau supérieur à " très bon " tandis que l'ensemble des autres critères sont évalués à " excellent ", y compris les critères de " capacités d'initiative " et de " résultats obtenus par rapport aux objectifs assignés " qui étaient côtés l'année précédente au niveau " très bon ". L'intéressée soutient également que son investissement professionnel en 2016 a été d'autant plus conséquent qu'alors qu'elle travaille à temps partiel à 80%, sa charge de travail a été particulièrement lourde durant cette année en raison du cumul de ses fonctions de formatrice nationale et régionale sur la thématique amiante, de ses fonctions propres en tant qu'inspectrice en charge de la section 7 puis 6 et des suppléances des sections 1, 2 et 3 jusqu'en juin 2016 puis des sections 1 et 2, ce qui n'est pas contesté. Tous ces éléments convergents attestent ainsi de manière convaincante que l'engagement professionnel de Mme B... sur les missions multiples qui lui ont été confiées et sa manière de servir ont été particulièrement appréciées au titre de l'année 2016 par sa hiérarchie. Dès lors que l'administration s'est constamment abstenue, y compris dans son mémoire produit devant la cour, d'exposer les raisons pour lesquelles elle a estimé que l'intéressée ne figurait pas au nombre des agents dont la manière de servir s'était particulièrement distinguée en 2016 et qui justifiait de l'attribution d'un complément indemnitaire au taux majoré et que Mme B... revendique le bénéfice d'un niveau de complément indemnitaire qui n'est pas sérieusement combattu au regard de son engagement professionnel et de sa manière de servir, l'intéressée pouvait prétendre, sur le fondement de l'article 3 du décret du 20 mai 2014, à ce complément. Dès lors, et sans qu'il soit besoin de se prononcer sur les autres moyens de la requête, elle est fondée à soutenir que la décision du 18 novembre 2016, ainsi que celle de rejet de son recours hiérarchique, sont entachées d'une erreur manifeste d'appréciation et doivent être annulées.

4. Il résulte de tout ce qui précède, et sans qu'il soit besoin de se prononcer sur les moyens relatifs à la régularité du jugement, que Mme B... est fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande.

Sur les conclusions aux fins d'injonction :

5. Eu égard au motif d'annulation mentionné au point 3, le présent arrêt implique nécessairement qu'il soit enjoint au directeur régional des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l'emploi de la région Pays de la Loire d'attribuer à Mme B..., au titre de l'année 2016, un complément indemnitaire annuel calculé sur la base du taux majoré de 500 euros, éventuellement proratisé au regard du temps de travail de l'intéressée dès lors que la requérante ne peut utilement se prévaloir du cinquième paragraphe du point 1 du I de l'instruction ministérielle n°DRH/SD1G/SD2H/2017/197 du 13 juin 2017 dépourvu de caractère impératif.

Sur les frais liés au litige :

6. L'Etat, partie perdante, versera à Mme B... sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, la somme de 800 euros que celle-ci sollicite au titre des frais liés au litige.

DECIDE :

Article 1er : Le jugement n° 1704309 du 12 novembre 2019 du tribunal administratif de Nantes, la décision du 18 novembre 2016 par laquelle le directeur régional des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l'emploi de la région Pays de la Loire a attribué, au titre du complément indemnitaire pour l'année 2016, à Mme B... un montant de 265,10 euros, ainsi que la décision implicite par laquelle le ministre du travail, de l'emploi, de la formation professionnelle et du dialogue social a rejeté son recours hiérarchique sont annulés.

Article 2 : Il est enjoint au directeur régional des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l'emploi de la région Pays de la Loire de prendre une nouvelle décision attribuant à Mme B..., au titre de l'année 2016, un complément indemnitaire annuel calculé sur la base du taux majoré de 500 euros.

Article 3 : L'Etat versera, sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, une somme de 800 euros à Mme B....

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à Mme A... B... et au ministre du travail.

Délibéré après l'audience du 3 décembre 2021, à laquelle siégeaient :

- M. Coiffet, président,

- Mme Gélard, première conseillère,

- Mme Malingue, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 21 décembre 2021.

La rapporteure,

F. MALINGUELe président,

O. COIFFET

La greffière,

I.PETTON

La République mande et ordonne à la ministre du travail, de l'emploi et de l'insertion en ce qui la concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

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N°20NT00107

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Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nantes
Formation : 6ème chambre
Numéro d'arrêt : 20NT00107
Date de la décision : 21/12/2021
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. COIFFET
Rapporteur ?: Mme Fanny MALINGUE
Rapporteur public ?: M. LEMOINE
Avocat(s) : HAUTEFAYE

Origine de la décision
Date de l'import : 28/12/2021
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nantes;arret;2021-12-21;20nt00107 ?
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