La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

21/10/2021 | FRANCE | N°20NT00372

France | France, Cour administrative d'appel de Nantes, 1ère chambre, 21 octobre 2021, 20NT00372


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme B... A... a demandé au tribunal administratif de Rennes de prononcer la décharge, en droits et pénalités, des cotisations supplémentaires à l'impôt sur le revenu et

aux contributions sociales mises à sa charge au titre des années 2011 et 2012.

Par un jugement n° 1703778 du 4 décembre 2019, le tribunal administratif de Rennes, d'une part, a prononcé un non-lieu à statuer sur les conclusions de Mme A... à concurrence du dégrèvement afférent aux contributions sociales, accordé par

décision du 20 décembre 2017, pour un montant, en droits et pénalités, de 2 764 euros (artic...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme B... A... a demandé au tribunal administratif de Rennes de prononcer la décharge, en droits et pénalités, des cotisations supplémentaires à l'impôt sur le revenu et

aux contributions sociales mises à sa charge au titre des années 2011 et 2012.

Par un jugement n° 1703778 du 4 décembre 2019, le tribunal administratif de Rennes, d'une part, a prononcé un non-lieu à statuer sur les conclusions de Mme A... à concurrence du dégrèvement afférent aux contributions sociales, accordé par décision du 20 décembre 2017, pour un montant, en droits et pénalités, de 2 764 euros (article 1er) et, d'autre part, a rejeté le surplus de sa demande (article 2).

Procédure devant la cour :

Par une requête et des mémoires, enregistrés les 3 février 2020, 4 janvier, 22 mars et 7 avril 2021, Mme A..., représentée par Me Mallet, demande à la cour :

1°) d'annuler l'article 2 de ce jugement ;

2°) de prononcer la décharge demandée ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- la proposition de rectification n'était pas suffisamment motivée ;

- les cotisations supplémentaires ont été mises en recouvrement avant que ne lui soient adressés les avis de dégrèvement ;

- la réponse aux observations du contribuable n'est pas suffisamment motivée ;

- l'administration n'établit pas que les revenus en cause ont été appréhendés par Mme A... ;

- le tribunal n'a pas répondu au moyen tiré de ce que, s'agissant des pénalités, le manquement délibéré du contribuable s'apprécie au moment de la déclaration alors que le revenu fictif en cause ne correspond pas à une insuffisance déclarative ;

- elle n'a commis aucun manquement délibéré.

Par des mémoires en défense, enregistrés les 27 juillet 2020, 16 mars, 30 mars et

18 juin 2021, et un mémoire enregistré le 23 avril 2021 qui n'a pas été communiqué, le ministre de l'économie, des finances et de la relance demande à la cour de rejeter la requête.

Il fait valoir que les moyens soulevés par la requérante ne sont pas fondés.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de la consommation ;

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Picquet,

- et les conclusions de Mme Chollet, rapporteure publique.

Considérant ce qui suit :

1. Mme A..., gérante de la société à responsabilité limitée (SARL) à associé unique, A..., qui exerce une activité de discothèque sous l'enseigne " Le Ten Club ", s'est vu notifier, à la suite de la vérification de comptabilité de cette société, par proposition de rectification du 26 mars 2014, selon la procédure de rectification contradictoire prévue à l'article L. 55 du livre des procédures fiscales, des rectifications de son revenu imposable dans les catégories de revenus de capitaux mobiliers et de prélèvements sociaux au titre des années 2011 et 2012. Il en est résulté des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contributions sociales dont Mme A... demande la décharge en droits et pénalités. Par un jugement du 4 décembre 2019, le tribunal administratif de Rennes, d'une part, a prononcé un non-lieu à statuer sur les conclusions de Mme A... à concurrence du dégrèvement afférent aux contributions sociales, accordé par décision du 20 décembre 2017, pour un montant, en droits et pénalités, de 2 764 euros (article 1er) et, d'autre part, a rejeté le surplus de sa demande (article 2). Mme A... demande à la cour l'annulation de l'article 2 de ce jugement et la décharge des impositions restant en litige.

2. Aux termes de l'article L. 57 du livre des procédures fiscales : " L'administration adresse au contribuable une proposition de rectification qui doit être motivée de manière à lui permettre de formuler ses observations ou de faire connaître son acceptation. / (...) Lorsque l'administration rejette les observations du contribuable sa réponse doit également être motivée. ".

3. Il résulte des dispositions du livre des procédures fiscales relatives tant à la procédure de redressement contradictoire qu'aux procédures d'imposition d'office, notamment de celles des articles L. 57 et suivants et de l'article L. 69 de ce livre, qu'après avoir prononcé le dégrèvement d'une imposition, l'administration ne peut établir, sur les mêmes bases, une nouvelle imposition sans avoir préalablement informé le contribuable de la persistance de son intention de l'imposer. De plus, si aucune disposition du code général des impôts ne fait obstacle à ce que l'administration, après avoir reconnu, à la suite notamment d'une réclamation contentieuse du contribuable, l'irrégularité de la procédure de redressement suivie, reprenne cette procédure dans la seule mesure nécessaire à sa régularisation et dans le délai imparti par l'article L. 169 du livre des procédures fiscales, afin de parvenir à la fixation de l'imposition dans des conditions régulières, cette faculté ne lui est cependant ouverte qu'autant qu'elle a expressément constaté l'irrégularité de la première procédure en notifiant le dégrèvement de l'imposition précédente.

4. Il résulte de l'instruction que l'administration n'a d'abord pas répondu aux observations de Mme A... et a mis les cotisations supplémentaires en litige en recouvrement le 30 novembre 2014. Dans un second temps, après le dépôt d'une réclamation contentieuse, son rejet et une première saisine du tribunal administratif de Rennes, l'administration fiscale a adressé à Mme A... une réponse aux observations du contribuable datée du 20 janvier 2016. Les avis de dégrèvement du 25 novembre 2015 ont été notifiés à la requérante dans le cadre d'un mémoire en défense enregistré au tribunal administratif à cette même date, qui lui a été communiqué, dans le cadre de l'instance enregistrée sous le numéro 1502305. Ainsi, la " notification " du dégrèvement a bien eu lieu antérieurement à la reprise de la procédure caractérisée par l'envoi de l'imprimé n° 3926 du 20 janvier 2016, même si la notification a été faite par le tribunal et non par l'administration. Le ministre soutient que, dans la requête enregistrée au greffe du tribunal administratif de Rennes, sous le numéro 1502305, Mme A... faisait notamment valoir que le service n'avait pas répondu à ses observations formulées dans sa lettre du 16 avril 2014 et que c'est pour ce motif, caractérisant une irrégularité de procédure, que l'administration a procédé au dégrèvement des impositions dans le cadre de son mémoire en défense du 25 novembre 2015. Toutefois, contrairement à ce que soutient le ministre, cette seule circonstance ne peut suffire à faire regarder Mme A... comme ne pouvant pas ignorer le motif de ce dégrèvement, dès lors notamment que le moyen tiré de l'absence de réponse aux observations du contribuable n'était pas le seul moyen soulevé devant le tribunal par Mme A... et que l'avis de dégrèvement et le mémoire en défense comportant l'avis de dégrèvement n'étaient pas motivés concernant les raisons de ce dégrèvement. Par conséquent, la requérante est fondée à soutenir qu'il n'y a pas eu d'information préalable quant à la persistance de l'intention de l'administration de l'imposer avant l'envoi de la réponse aux observations du contribuable, ce qui a entaché d'irrégularité la procédure d'imposition et a privé Mme A... d'une garantie.

5. Il résulte de tout ce qui précède, sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens soulevés par la requérante, que Mme A... est fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Rennes a rejeté le surplus de sa demande de décharge des cotisations supplémentaires, en droits et pénalités, à l'impôt sur le revenu et aux contributions sociales au titre des années 2011 et 2012.

Sur les frais liés au litige :

6. Dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 000 euros sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

DECIDE :

Article 1er : L'article 2 du jugement n° 1703778 du 4 décembre 2019 du tribunal administratif de Rennes est annulé.

Article 2 : Mme A... est déchargée des cotisations supplémentaires, en droits et pénalités, à l'impôt sur le revenu et aux contributions sociales au titre des années 2011 et 2012.

Article 3 : L'Etat versera à Mme A... la somme de 1 000 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à Mme B... A... et au ministre de l'économie, des finances et de la relance.

Délibéré après l'audience du 7 octobre 2021, à laquelle siégeaient :

- M. Bataille, président de chambre,

- M. Geffray, président assesseur,

- Mme Picquet, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 21 octobre 2021.

La rapporteure,

P. PicquetLe président,

F. Bataille

La greffière,

A. Marchais

La République mande et ordonne au ministre de l'économie, des finances et de la relance en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

1

3

N° 20NT00372

1


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nantes
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 20NT00372
Date de la décision : 21/10/2021
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : M. BATAILLE
Rapporteur ?: Mme Pénélope PICQUET
Rapporteur public ?: Mme CHOLLET
Avocat(s) : MALLET

Origine de la décision
Date de l'import : 02/11/2021
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nantes;arret;2021-10-21;20nt00372 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award