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09/09/2021 | FRANCE | N°18NT01792

France | France, Cour administrative d'appel de Nantes, 1ère chambre, 09 septembre 2021, 18NT01792


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B... C... a demandé au tribunal administratif de Nantes de lui accorder la restitution de la somme de 18 euros correspondant aux cotisations primitives de contributions sociales mises à sa charge au titre de la vente immobilière du 23 juillet 2013.

Par un jugement n° 1406637 du 12 janvier 2018, le tribunal administratif de Nantes a prononcé la décharge de la contribution sociale généralisée, de la contribution au remboursement de la dette sociale, du prélèvement social et de la contribution add

itionnelle au prélèvement social auxquels M. C... a été assujetti, au prorata d...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B... C... a demandé au tribunal administratif de Nantes de lui accorder la restitution de la somme de 18 euros correspondant aux cotisations primitives de contributions sociales mises à sa charge au titre de la vente immobilière du 23 juillet 2013.

Par un jugement n° 1406637 du 12 janvier 2018, le tribunal administratif de Nantes a prononcé la décharge de la contribution sociale généralisée, de la contribution au remboursement de la dette sociale, du prélèvement social et de la contribution additionnelle au prélèvement social auxquels M. C... a été assujetti, au prorata de sa quote-part dans la société civile immobilière (SCI) 44 avenue de la République, au titre de la plus-value réalisée au titre de la vente immobilière du 18 septembre 2013 (article 1er) et a rejeté le surplus des conclusions de la requête (article 2).

Procédure devant la cour :

Par une requête et un mémoire, enregistrés les 2 mai 2018 et 5 septembre 2018, le ministre de l'économie, des finances et de la relance demande à la cour :

1°) d'annuler l'article 1er de ce jugement ;

2°) de remettre à la charge de M. B... C... la somme de 16 euros représentant sa quote-part dans la SCI 44 avenue de la République de la contribution sociale généralisée, de la contribution au remboursement de la dette sociale, du prélèvement social et de la contribution additionnelle au prélèvement social.

Il soutient que c'est à tort que le tribunal administratif de Nantes s'est fondé sur l'article 11 du règlement du 29 avril 2004 pour prononcer la décharge des impositions en litige ; le certificat de la caisse nationale de santé au Luxembourg ne permet pas de justifier d'une affiliation au régime de sécurité sociale luxembourgeois.

Par un mémoire en défense enregistré le 23 juillet 2018, M. B... C..., représenté par Me Peignelin, conclut au rejet de la requête et à ce que soit mis à la charge de l'Etat le versement de la somme de 1 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il fait valoir que les moyens soulevés par le ministre de l'économie, des finances et de la relance ne sont pas fondés.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le règlement (CE) n° 1408/71 du Conseil du 14 juin 1971 ;

- le règlement (CE) n° 883/2004 du Parlement européen et du Conseil du 29 avril 2004 ;

- le code de l'action sociale et des familles ;

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- le code de la sécurité sociale ;

- l'ordonnance n° 96-50 du 24 janvier 1996 ;

- l'arrêt n° C-623/13 du 26 février 2015 de la Cour de justice de l'Union européenne ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. A...,

- et les conclusions de Mme Chollet, rapporteure publique.

Considérant ce qui suit :

1. M. C..., résidant au Luxembourg et associé à 50% au sein de la société civile immobilière (SCI) 44 avenue de la République dont le siège se trouve à Metz, a réalisé au titre de l'année 2013 une plus-value immobilière résultant de la vente d'un immeuble situé à Saint-Nazaire dont cette SCI était propriétaire. A raison de cette plus-value, M. C... a été assujetti au titre de l'année 2013, à due proportion de ses parts, à la contribution sociale généralisée, à la contribution pour le remboursement de la dette sociale, au prélèvement social de 4,5 %, à la contribution additionnelle à ce prélèvement au taux de 0,3 % et au prélèvement de solidarité de 2 % pour un montant global de 18 euros. Après rejet de sa réclamation, M. C... a demandé au tribunal administratif de Nantes de prononcer la décharge de ces impositions. Par un jugement n° 1406637 du 12 janvier 2018, le tribunal administratif de Nantes a prononcé la décharge de la contribution sociale généralisée, de la contribution au remboursement de la dette sociale, du prélèvement social et de la contribution additionnelle au prélèvement social auxquels M. C... a été assujetti, au prorata de sa quote-part dans la société civile immobilière (SCI) 44 avenue de la République, au titre de la plus-value réalisée lors de la vente immobilière du 18 septembre 2013 (article 1er) et a rejeté le surplus des conclusions de la requête (article 2). Le ministre de l'économie, des finances et de la relance relève appel de l'article 1er de ce jugement.

Sur le bien-fondé des impositions :

2. Aux termes de l'article 11 du règlement du Parlement européen et du Conseil du 29 avril 2004 : " (...) 2. Pour l'application du présent titre, les personnes auxquelles est servie une prestation en espèces du fait ou à la suite de l'exercice de son activité salariée ou non salariée sont considérées comme exerçant cette activité. Cela ne s'applique pas aux pensions d'invalidité, de vieillesse ou de survivant, ni aux rentes pour accident du travail ou maladie professionnelle, ni aux prestations de maladie en espèces couvrant des soins à durée illimitée. / 3. Sous réserve des articles 12 à 16: / a) la personne qui exerce une activité salariée ou non salariée dans un Etat membre est soumise à la législation de cet Etat membre (...) / e) les personnes autres que celles visées aux points a) à d) sont soumises à la législation de l'Etat de résidence, sans préjudice d'autres dispositions du présent règlement qui leur garantissent des prestations en vertu de la législation d'un ou de plusieurs autres Etats membres (...) ". Toutes les pensions de retraite sont au nombre des " pensions de vieillesse " visées par le paragraphe 2 précité. Leurs bénéficiaires, lorsqu'ils n'entrent pas, par ailleurs, dans les cas visés aux points a) à d) du paragraphe 3 sont, dès lors, en application du e) de ce paragraphe, soumis à la législation de leur Etat de résidence sans préjudice, toutefois, des prestations que le règlement leur garantit en vertu de la législation d'un ou de plusieurs autres Etats membres.

3. Aux termes du 1er paragraphe de l'article 24 du même règlement : " La personne qui perçoit une pension ou des pensions en vertu de la législation d'un ou plusieurs Etats membres, et qui ne bénéficie pas des prestations en nature selon la législation de l'Etat membre de résidence, a toutefois droit, pour elle-même et pour les membres de sa famille, à de telles prestations, pour autant qu'elle y aurait droit selon la législation de l'Etat membre ou d'au moins un des Etats membres auxquels il incombe de servir une pension, si elle résidait dans l'Etat membre concerné. Les prestations en nature sont servies pour le compte de l'institution visée au paragraphe 2 par l'institution du lieu de résidence, comme si l'intéressé bénéficiait de la pension et des prestations en nature selon la législation de cet Etat membre ". Aux termes, par ailleurs, du paragraphe 1 de l'article 30 du même règlement : " L'institution d'un État membre qui applique une législation prévoyant des retenues de cotisations pour la couverture des prestations de maladie, de maternité et de paternité assimilées, ne peut procéder à l'appel et au recouvrement de ces cotisations, calculées selon la législation qu'elle applique, que dans la mesure où les dépenses liées aux prestations servies en vertu des articles 23 à 26 sont à la charge d'une institution dudit État membre ". Il en résulte que les personnes qui perçoivent une pension de retraite en vertu de la législation française et résident dans un autre Etat membre selon la législation duquel elles ne bénéficient pas de prestations en nature, peuvent bénéficier des prestations en nature auxquelles elles auraient droit si elles résidaient en France, ces prestations étant servies par l'institution de l'Etat membre où elles résident, selon la législation qui y est applicable, pour le compte et à la charge des caisses de sécurité sociale françaises. Ces personnes peuvent, par ailleurs, être soumises en France aux retenues de cotisations instituées pour la couverture des prestations de maladie, de maternité et de paternité assimilées en cause. Les personnes qui perçoivent une pension de retraite en vertu de la législation française et résident dans un autre Etat membre doivent, lorsqu'elles contestent le principe de leur assujettissement à de tels prélèvements, justifier non seulement de ce qu'elles sont affiliées au régime de sécurité sociale de leur Etat de résidence mais aussi que c'est en vertu de la législation de cet Etat qu'elles bénéficient de leurs prestations et non pour le compte des caisses de sécurité sociale françaises.

4. La contribution sociale généralisée sur les revenus du patrimoine, qui est en partie affectée aux régimes obligatoires d'assurance-maladie, et le prélèvement social sur les revenus du patrimoine, qui est partiellement affecté à la caisse nationale de l'assurance maladie des travailleurs salariés, doivent être regardées comme ayant pour objet d'assurer le financement des prestations de maladie, de maternité et paternité assimilées pour lesquelles l'article 30 du règlement du 29 avril 2004 prévoit une dérogation au principe d'unicité de la législation en matière de sécurité sociale. Il en va de même s'agissant de la contribution pour le remboursement de la dette sociale, ce versement ayant pour finalité d'apurer la dette accumulée par les quatre branches du régime de la sécurité sociale mentionnées à l'article L. 200-2 du code de la sécurité sociale. Enfin, s'agissant de la contribution additionnelle au prélèvement social, le versement est affecté à la caisse nationale de la solidarité pour l'autonomie. Cette contribution sert donc à financer des prestations qui visent ainsi à améliorer l'état de santé et la vie des personnes dépendantes, prestations qui doivent être assimilées à des " prestations de maladie ". Dès lors, cette contribution doit également être regardée comme ayant pour objet d'assurer le financement des prestations de maladie, de maternité et paternité assimilées pour lesquelles l'article 30 du règlement du 29 avril 2004 prévoit une dérogation au principe d'unicité de la législation en matière de sécurité sociale.

5. Ainsi qu'il a été exposé au point 3, M. C... pouvait ainsi être assujetti à ces contributions, sauf à ce qu'il démontre non seulement qu'il était affilié au régime de sécurité sociale du Luxembourg mais aussi que c'est en vertu de la législation de cet Etat qu'il bénéficie de ces prestations et non pour le compte des caisses de sécurité sociale françaises.

6. En l'espèce, M. C... produit un certificat de la caisse nationale de santé luxembourgeoise qui précise qu'il est en droit de prétendre aux prestations de l'assurance-maladie suivant les dispositions de la législation luxembourgeoise en particulier en ce qui concerne l'étendue et les modalités du service des prestations en nature. Ni ce document ni la feuille de remboursement émanant de la même caisse ne permettent de démontrer que les prestations dont M. C... bénéficie au Luxembourg ne sont pas à la charge finale des caisses de sécurité sociale françaises. Il suit de là que, s'agissant de la cotisation sociale généralisée et du prélèvement social, M. C... ne peut se prévaloir du principe d'unicité de la législation sociale. Par suite, le ministre de l'économie, des finances et de la relance est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nantes a prononcé la décharge de la cotisation sociale généralisée et du prélèvement social auxquels M. C... a été assujetti au titre de la plus-value réalisée lors de la vente immobilière du 18 septembre 2013.

7. Il résulte de tout ce qui précède que le ministre de l'économie, des finances et de la relance est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nantes a prononcé la décharge de la contribution sociale généralisée, de la contribution au remboursement de la dette sociale, du prélèvement social et de la contribution additionnelle au prélèvement social auxquels M. C... a été assujetti au titre de la plus-value réalisée au titre de la vente immobilière du 18 septembre 2013.

Sur les frais liés au litige :

8. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mis à la charge de l'Etat, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, le versement de la somme que le conseil de M. C... demande au titre des frais exposés et non compris dans les dépens.

DECIDE :

Article 1er : L'article 1er du jugement n° 1406637 du 12 janvier 2018 du tribunal administratif de Nantes est annulé.

Article 2 : La contribution sociale généralisée, la contribution au remboursement de la dette sociale, le prélèvement social et la contribution additionnelle au prélèvement social auxquels M. C... a été assujetti au titre de la plus-value réalisée au titre de la vente immobilière du 18 septembre 2013 sont remis à la charge de M. C....

Article 3 : Les conclusions d'appel de M. C... tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à M. C... et au ministre de l'économie, des finances et de la relance.

Délibéré après l'audience du 30 août 2021, à laquelle siégeaient :

- M. Bataille, président de chambre,

- M. Geffray, président assesseur,

- M. A..., premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 9 septembre 2021.

Le rapporteur,

H. A...Le président,

F. Bataille

Le greffier,

R. Mageau

La République mande et ordonne au ministre de l'économie, des finances et de la relance, en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

No 18NT017925


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nantes
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 18NT01792
Date de la décision : 09/09/2021
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : M. BATAILLE
Rapporteur ?: M. Harold BRASNU
Rapporteur public ?: Mme CHOLLET
Avocat(s) : SOCIETE D'AVOCATS FIDAL VILLERS-LES-NANCY

Origine de la décision
Date de l'import : 21/09/2021
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nantes;arret;2021-09-09;18nt01792 ?
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