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21/05/2021 | FRANCE | N°20NT02296

France | France, Cour administrative d'appel de Nantes, 3ème chambre, 21 mai 2021, 20NT02296


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme C... D... a demandé au tribunal administratif de Rennes d'annuler l'arrêté du 8 octobre 2019 du préfet des Côtes-d'Armor lui refusant la délivrance d'un titre de séjour, l'obligeant à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et fixant le pays de destination.

Par un jugement n° 1905257 du 12 février 2020, le tribunal administratif de Rennes a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 24 juillet 2020 Mme D..., représenté

e par

Me B..., demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Renne...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme C... D... a demandé au tribunal administratif de Rennes d'annuler l'arrêté du 8 octobre 2019 du préfet des Côtes-d'Armor lui refusant la délivrance d'un titre de séjour, l'obligeant à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et fixant le pays de destination.

Par un jugement n° 1905257 du 12 février 2020, le tribunal administratif de Rennes a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 24 juillet 2020 Mme D..., représentée par

Me B..., demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Rennes du 12 février 2020 ;

2°) d'annuler cet arrêté du 8 octobre 2019 ;

3°) d'enjoindre au préfet des Côtes-d'Armor, à titre principal, de lui délivrer une carte de séjour temporaire mention " vie privée et familiale " ou, à titre subsidiaire, de réexaminer sa situation, le tout dans un délai d'un mois à compter de l'arrêt à intervenir ;

4°) de mettre à la charge de l'État, au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, la somme de 1 800 euros à verser à son conseil dans les conditions fixées à l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.

Elle soutient que :

- la décision portant refus de titre de séjour est entachée d'une insuffisance de motivation et d'un défaut d'examen de sa situation ;

- le préfet doit justifier de ce que cette décision a été prise sur un avis émis par le collège de médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration (OFII) dans le respect des règles procédurales prévues par les dispositions des articles R. 313-22 et

R. 313-23 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et de l'article 6 de l'arrêté du 27 décembre 2016 ;

- cette décision a été prise en méconnaissance des dispositions du 11° de l'article L.313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dès lors que son état de santé nécessite une prise en charge dont le défaut serait susceptible d'entraîner des conséquences d'une exceptionnelle gravité et qu'elle ne peut bénéficier des soins appropriés à son état de santé dans son pays d'origine ;

- pour les mêmes motifs, la décision portant obligation de quitter le territoire français a été prise en méconnaissance des dispositions du 10° de l'article 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la décision fixant le pays de renvoi a été prise en méconnaissance des stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.

La requête a été communiquée le 24 septembre 2020 au préfet des Côtes-d'Armor qui n'a pas produit de mémoire en défense.

Mme D... a été admise au bénéfice de l'aide juridictionnelle partielle par une décision du 23 juin 2020.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code des relations entre le public et l'administration ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de Mme A... a été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. Mme D..., ressortissante de la République du Congo née en 1980, est entrée irrégulièrement en France le 15 novembre 2013, selon ses déclarations. Après le rejet de sa demande d'asile par une décision du 31 mars 2014 du directeur de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides, confirmée une décision du 17 mars 2015 de la Cour nationale du droit d'asile, l'intéressée a sollicité la délivrance d'un titre de séjour pour raisons médicales et s'est vu délivrer une carte de séjour temporaire valable du 8 août 2018 au 7 mai 2019. Par un arrêté du 8 octobre 2019, le préfet des Côtes-d'Armor a rejeté sa demande de renouvellement de ce titre, l'a obligée à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination. Mme D... relève appel du jugement du

12 février 2020 du tribunal administratif de Rennes qui a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté.

2. En premier lieu, la décision contestée portant refus de titre de séjour vise les dispositions applicables du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et fait notamment état de l'absence d'éléments permettant de contredire l'avis émis le 1er juillet 2019 par le collège de médecins de l'OFII, aux termes duquel l'état de santé de Mme D... nécessite une prise en charge dont le défaut ne devrait pas entraîner de conséquences d'une exceptionnelle gravité. Dès lors, compte tenu du sens de cet avis, la requérante n'est pas fondée à soutenir que la décision contestée serait entachée d'une insuffisance de motivation et d'un défaut d'examen de sa situation en raison de la seule absence de mention relative à la question de la possibilité d'une prise en charge médicale adaptée dans son pays d'origine.

3. En deuxième lieu, aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " est délivrée de plein droit : (...) 11° A l'étranger résidant habituellement en France, si son état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait avoir pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité et si, eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé dans le pays dont il est originaire, il ne pourrait pas y bénéficier effectivement d'un traitement approprié. La condition prévue à l'article L. 313-2 n'est pas exigée. La décision de délivrer la carte de séjour est prise par l'autorité administrative après avis d'un collège de médecins du service médical de l'Office français de l'immigration et de l'intégration, dans des conditions définies par décret en Conseil d'Etat (...) ".

4. Aux termes de l'article R. 313-22 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Pour l'application du 11° de l'article L. 313-11, le préfet délivre la carte de séjour au vu d'un avis émis par un collège de médecins à compétence nationale de l'Office français de l'immigration et de l'intégration. / L'avis est émis dans les conditions fixées par arrêté du ministre chargé de l'immigration et du ministre chargé de la santé au vu, d'une part, d'un rapport médical établi par un médecin de l'Office français de l'immigration et de l'intégration et, d'autre part, des informations disponibles sur les possibilités de bénéficier effectivement d'un traitement approprié dans le pays d'origine de l'intéressé (...) ". Aux termes de l'article R. 313-23 du même code : " Le rapport médical visé à l'article R. 313-22 est établi par un médecin de l'Office français de l'immigration et de l'intégration à partir d'un certificat médical établi par le médecin qui suit habituellement le demandeur ou par un médecin praticien hospitalier inscrits au tableau de l'ordre (...). / Le collège à compétence nationale, composé de trois médecins, émet un avis dans les conditions de l'arrêté mentionné au premier alinéa du présent article (...). Le médecin ayant établi le rapport médical ne siège pas au sein du collège (...). / L'avis est rendu par le collège dans un délai de trois mois à compter de la transmission du certificat médical (...) ".

5. Il ressort des pièces du dossier que le rapport médical au vu duquel le collège de médecins à compétence nationale de l'OFII a émis son avis du 1er juillet 2019, sur lequel s'est fondé le préfet des Côtes-d'Armor pour rejeter la demande de titre de séjour de Mme D..., a été établi le 24 mai 2019 par un médecin qui n'a pas siégé au sein de ce collège, composé de trois autres médecins.

6. Il est constant que le certificat médical adressé au médecin de l'OFII et produit par Mme D... devant les premiers juges a été établi le 24 avril 2019. Par suite, l'avis émis le 1er juillet 2019 par le collège de médecins de l'office a nécessairement été rendu moins de trois mois après la transmission de ce certificat.

7. Il résulte de ce qui a été dit aux points 5 et 6 que la requérante n'est pas fondée à soutenir que la décision portant refus de titre de séjour aurait été prise au terme d'une procédure irrégulière au regard des dispositions des articles R. 313-22 et R. 313-23 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.

8. Le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions de l'arrêté du 27 décembre 2016 relatif aux conditions d'établissement et de transmission des certificats médicaux, rapports médicaux et avis mentionnés aux articles R. 313-22, R. 313-23 et R. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, n'est pas assorti des précisions permettant d'en apprécier le bien-fondé.

9. Si Mme D... soutient que son état de santé nécessite une prise en charge dont le défaut serait susceptible d'entraîner des conséquences d'une exceptionnelle gravité, les documents médicaux produits par l'intéressée devant les premiers juges ne permettent pas de contredire la teneur de l'avis du collège de médecins de l'OFII mentionné au point 2, au vu duquel le préfet des Côtes-d'Armor a rejeté sa demande de titre de séjour. Compte tenu du sens de cet avis, l'intéressée se saurait utilement se prévaloir d'une supposée impossibilité d'accéder à un traitement approprié dans son pays d'origine. Par suite, les moyens tirés de ce que les décisions portant refus de titre de séjour et obligation de quitter le territoire français auraient été prises en méconnaissance des dispositions respectivement du 11° de l'article L. 313-11 et du 10° de l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile doivent être écartés.

10. En troisième lieu, Mme D... se prévaut d'une présence de six années sur le territoire français, d'une insertion professionnelle, de sa prise en charge thérapeutique et médicamenteuse en France et du risque de décompensation en cas de retour dans son pays d'origine. Il ressort toutefois des pièces du dossier que l'intéressée, qui ne justifie pas d'attaches particulières en France, n'est pas dépourvue de toute attache familiale en République démocratique du Congo, où résident notamment ses trois enfants et où elle a

elle-même vécu jusqu'à l'âge de trente-trois ans. En dépit de l'emploi qu'elle exerce depuis quelques mois en intérim, la requérante, qui ne dispose pas de logement autonome, ne justifie pas d'une particulière intégration. Elle ne justifie pas davantage, ainsi qu'il a été dit au point 9, de la nécessité de son maintien en France pour motifs médicaux. Compte tenu de l'ensemble des circonstances de l'espèce et notamment des conditions d'entrée et de séjour en France de la requérante, le préfet des Côtes-d'Armor, en l'obligeant à quitter le territoire français, n'a pas entaché sa décision d'une erreur manifeste dans l'appréciation de ses conséquences sur sa situation personnelle.

11. Enfin, le moyen tiré de ce que la décision fixant le pays de destination aurait été prise en méconnaissance des stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales doit être écarté par adoption des motifs retenus à bon droit par les premiers juges.

12. Il résulte de ce qui précède que Mme D... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Rennes a rejeté sa demande. Par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction et celles tendant à l'application des dispositions des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 doivent également être rejetées.

D E C I D E

Article 1er : La requête de Mme D... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme C... D... et au ministre de l'intérieur.

Copie en sera adressée au préfet des Côtes-d'Armor.

Délibéré après l'audience du 22 avril 2021, à laquelle siégeaient :

- Mme Perrot, président,

- Mme A..., président-assesseur,

- M. Berthon premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 21 mai 2021.

Le rapporteur

C. A...

Le président

I. Perrot

Le greffier,

R. Mageau

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

N° 20NT022962


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nantes
Formation : 3ème chambre
Numéro d'arrêt : 20NT02296
Date de la décision : 21/05/2021
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : Mme la Pdte. PERROT
Rapporteur ?: Mme Christiane BRISSON
Rapporteur public ?: M. GAUTHIER
Avocat(s) : LE BIHAN

Origine de la décision
Date de l'import : 29/05/2021
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nantes;arret;2021-05-21;20nt02296 ?
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