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17/05/2021 | FRANCE | N°19NT03116

France | France, Cour administrative d'appel de Nantes, 1ère chambre, 17 mai 2021, 19NT03116


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société par actions simplifiée (SAS) Sofaque a demandé au tribunal administratif de Rennes de prononcer la décharge, en droits et pénalités, des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés et de contributions sociales auxquelles elle a été assujettie au titre des exercices clos en 2011, 2012 et 2013.

Par un jugement n° 1605247 du 12 juin 2019, le tribunal administratif de Rennes a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête et un mémoire, enregist

rés les 30 juillet 2019 et 27 février 2020, la SAS Sofaque, représentée par Me F..., demande à la ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société par actions simplifiée (SAS) Sofaque a demandé au tribunal administratif de Rennes de prononcer la décharge, en droits et pénalités, des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés et de contributions sociales auxquelles elle a été assujettie au titre des exercices clos en 2011, 2012 et 2013.

Par un jugement n° 1605247 du 12 juin 2019, le tribunal administratif de Rennes a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête et un mémoire, enregistrés les 30 juillet 2019 et 27 février 2020, la SAS Sofaque, représentée par Me F..., demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement ;

2°) de prononcer cette décharge ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat le versement de la somme de 5 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- c'est à tort que l'administration a fait application de l'alinéa 7 de l'article 223 B du code général des impôts ;

- à la date d'acquisition des titres de la société Etablissements Yves D..., il n'était pas possible d'établir l'existence d'un contrôle conjoint résultant d'une action de concert ; il n'existait pas de contrôle conjoint lors de la période antérieure à la donation ni au cours de la période postérieure ; il n'existait pas d'accord entre les époux D... en ce qui concerne la cession des titres de la société Sofaque au profit de leurs enfants ; M. D..., à la date d'acquisition des titres de la société Etablissements Yves D..., ne disposait que de 26% des droits de vote aux assemblées générales ordinaires ; il avait ainsi accepté de ne pas contrôler la société Sofaque ; il pouvait être révoqué de sa fonction de président par les membres de sa propre famille ; aucun accord n'est intervenu entre M. D..., son épouse et leurs deux enfants sur la politique de gestion de la société Sofaque ;

Par un mémoire en défense et un mémoire, enregistrés les 30 janvier 2020 et 25 novembre 2020, le ministre de l'économie, des finances et de la relance conclut au rejet de la requête.

Il fait valoir que les moyens soulevés par la SAS Sofaque ne sont pas fondés.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. A...,

- et les conclusions de Mme Chollet, rapporteur public.

Considérant ce qui suit :

1. La société par actions simplifiée (SAS) Sofaque, qui a pour objet social notamment la gestion d'un portefeuille de titres de participation, a été créée le 14 octobre 2010 par M. B... D... et son épouse Mme E... D.... A cette date, ils détenaient chacun 50 % de son capital social, soit 20 000 des 40 000 parts le composant. M. B... D... en a été désigné président pour une durée indéterminée. Le 7 décembre 2010, M. et Mme D... ont fait donation à chacun de leurs deux fils, C... et Bertrand D..., de 9 600 parts de la société Sofaque en pleine propriété et de 10 400 parts en nue-propriété et n'ont donc conservé chacun que l'usufruit de 10 400 parts de cette société. Le 21 décembre 2010, la société Sofaque a acquis la totalité des actions de la société Etablissements Yves D..., dont 98,79 % auprès de la société Sofique et 1,21 % auprès de la société Sofid. M. B... D... détenait alors 100 % du capital de la société Sofique. Le paiement du prix d'acquisition des actions a été financé à hauteur de 12 millions d'euros par des emprunts souscrits auprès d'organismes bancaires, à hauteur de 60 millions d'euros par une distribution de dividendes de la société Yves D... et pour 25 552 364 euros par un crédit-vendeur consenti par la société Sofique. La SAS Sofaque a opté le 14 février 2011 pour le régime de l'intégration fiscale à compter de l'exercice 2011. A l'issue d'une vérification de comptabilité de la SAS Sofaque, l'administration lui a adressé, le 15 décembre 2014, une proposition de rectification remettant en cause, au titre des exercices clos de 2011 à 2013, la déduction d'une partie des frais financiers générés par l'acquisition des actions de la société Etablissements Yves D..., sur le fondement des dispositions du septième alinéa de l'article 223 B du code général des impôts. Après mise en recouvrement et rejet de sa réclamation, la société Sofaque a demandé au tribunal administratif de Rennes de prononcer la décharge, en droits et pénalités, des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés et de contributions sociales auxquelles elle a été assujettie au titre des exercices 2011, 2012 et 2013. Par un jugement n° 1605247 du 12 juin 2019, le tribunal administratif de Rennes a rejeté sa demande. La société relève appel de ce jugement.

2. Aux termes de l'article 223 B du code général des impôts : " Le résultat d'ensemble est déterminé par la société mère en faisant la somme algébrique des résultats de chacune des sociétés du groupe, déterminés dans les conditions de droit commun ou selon les modalités prévues à l'article 214. (...) / Lorsqu'une société a acheté les titres d'une autre société qui est ou qui devient membre du même groupe ou les titres d'une société intermédiaire aux personnes qui la contrôlent, directement ou indirectement, ou à des sociétés que ces personnes contrôlent, directement ou indirectement, au sens de l'article L. 233-3 du code de commerce, les charges financières déduites pour la détermination du résultat d'ensemble sont rapportées à ce résultat pour une fraction égale au rapport du prix d'acquisition de ces titres, limité, le cas échéant, à la valeur vénale des titres des sociétés du groupe directement ou indirectement détenues par la société intermédiaire acquise, à la somme du montant moyen des dettes, de chaque exercice, des entreprises membres du groupe. Le prix d'acquisition à retenir est réduit du montant des fonds apportés à la société cessionnaire lors d'une augmentation du capital réalisée simultanément à l'acquisition des titres à condition que ces fonds soient apportés à la société cessionnaire par une personne autre qu'une société membre du groupe ou, s'ils sont apportés par une société du groupe, qu'ils ne proviennent pas de crédits consentis par une personne non membre de ce groupe. La réintégration s'applique pendant l'exercice d'acquisition des titres et les huit exercices suivants. Le septième alinéa s'applique même si la société directement ou indirectement rachetée n'est pas ou ne devient pas membre du même groupe que la société cessionnaire, dès lors que la première est absorbée par la seconde ou par une société membre ou devenant membre du même groupe que la société cessionnaire (...). "

3. Il résulte de ces dispositions que l'administration est fondée à réintégrer dans les résultats de la société mère d'un groupe fiscalement intégré une fraction des charges financières du groupe, lorsqu'une société est acquise en vue d'être intégrée par une société du groupe auprès d'une ou de plusieurs personnes qui contrôlent la société cessionnaire. Cette disposition est applicable, compte tenu de ce que l'existence d'un tel contrôle s'apprécie par référence aux critères définis par l'article L. 233-3 du code de commerce, non seulement dans l'hypothèse d'une identité entre le ou les actionnaires de la société cédée et le ou les actionnaires exerçant le contrôle de la société cessionnaire mais également dans le cas où l'actionnaire qui contrôlait la société cédée exerce, de concert avec d'autres actionnaires, le contrôle de la société cessionnaire.

4. En l'espèce, d'une part, il est constant que M. D... contrôlait, par l'intermédiaire de la société Sofique dont il était l'unique associé, la société cédée, à savoir la société Etablissements Yves D....

5. D'autre part, il résulte de l'instruction, et en particulier de la chronologie des différentes opérations rappelées au point 1, que la société Sofaque a été créée dans le but d'assurer le transfert de propriété de la société Etablissement Yves D..., détenue indirectement par M. B... D..., aux deux fils de M. et Mme D.... Ce transfert s'est opéré d'abord par la création de la société Sofaque par M. et Mme D... le 14 octobre 2010, puis le 7 décembre 2010 par la donation à leurs deux fils de la pleine-propriété de 48% des titres de la société Sofaque et de la nue-propriété de 52% des titres restants et enfin par l'acquisition le 21 décembre 2010 de la société Etablissements Yves D... par la société Sofaque. La décision d'acquérir la société Etablissement Yves D... a par ailleurs été prise par M. B... D..., en sa qualité de président de la société Sofaque, sans vote préalable en assemblée générale. M. B... D... a également pris seul la décision d'opter pour le régime de l'intégration fiscale et de contracter des emprunts pour un montant de 12 millions d'euros afin de financer partiellement l'acquisition de 100% du capital de la société Etablissements Yves D.... Au regard de l'ensemble de ces éléments, et notamment de la finalité de cette succession d'opérations, de la chronologie qui a été rappelée ainsi que des liens familiaux et d'intérêts qui unissent les quatre associés de la société Sofaque, le service a pu à bon droit considérer que M. D..., son épouse et leurs deux fils avaient conclu un accord en vue d'exercer les droits de vote pour mettre en oeuvre une politique commune vis-à-vis de la société Sofaque et agissaient ainsi de concert.

6. En outre, à la date de l'acquisition des titres de la société Etablissements Yves D..., M. D... et son épouse détenaient 52% des droits de vote en assemblée générale ordinaire, tandis que leurs deux fils détenaient 48% des droits de vote en assemblée générale ordinaire, et 100 % des droits de vote en assemblée générale extraordinaire. M. D..., son épouse et leurs deux fils, qui agissaient de concert, déterminaient donc en fait les décisions prises en assemblée générale. Par conséquent, si, à la date d'acquisition de la société Etablissements Yves D..., M. B... D... ne disposait que de 26% des droits de vote en assemblée générale ordinaire, il résulte de l'instruction qu'il exerçait, de concert avec les autres actionnaires, le contrôle de la société Sofaque. Il suit de là que c'est à bon droit que l'administration fiscale a remis en cause, au titre des exercices clos de 2011 à 2013, la déduction d'une partie des frais financiers générés par l'acquisition des actions de la société Etablissements Yves D..., sur le fondement des dispositions du septième aliéna de l'article 223 B du code général des impôts.

7. Il résulte de tout ce qui précède que la SAS Sofaque n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Rennes a rejeté sa demande. Par conséquent, sa requête, y compris ses conclusions relatives aux frais liés au litige, doit être rejetée.

DECIDE :

Article 1er : La requête de la SAS Sofaque est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à la société par actions simplifiée (SAS) Sofaque et au ministre de l'économie, des finances et de la relance.

Délibéré après l'audience du 15 avril 2021, à laquelle siégeaient :

- M. Bataille, président de chambre,

- M. Geffray, président assesseur,

- M. A..., premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 17 mai 2021.

Le rapporteur,

H. A...Le président,

F. Bataille

La greffière,

E. Haubois

La République mande et ordonne au ministre de l'économie, des finances et de la relance, en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

No 19NT031162


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nantes
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 19NT03116
Date de la décision : 17/05/2021
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : M. BATAILLE
Rapporteur ?: M. Harold BRASNU
Rapporteur public ?: Mme CHOLLET
Avocat(s) : ERNSTetYOUNG SAINT JACQUES DE LA LANDE

Origine de la décision
Date de l'import : 27/05/2021
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nantes;arret;2021-05-17;19nt03116 ?
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