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08/01/2021 | FRANCE | N°20NT02550

France | France, Cour administrative d'appel de Nantes, 2ème chambre, 08 janvier 2021, 20NT02550


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. H... E... a demandé au tribunal administratif de Nantes d'annuler la décision du 19 juin 2019 par laquelle la commission de recours contre les décisions de refus de visa d'entrée en France a rejeté son recours contre la décision du 10 mars 2019 par laquelle l'autorité consulaire à Alger (Algérie) a refusé de lui délivrer un visa de court séjour pour visite privée.

Par un jugement n° 1909325 du 11 mars 2020, le tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande.

Procédure devant la

cour :

Par une requête enregistrée le 18 août 2020, M. H... E..., représenté par la SELA...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. H... E... a demandé au tribunal administratif de Nantes d'annuler la décision du 19 juin 2019 par laquelle la commission de recours contre les décisions de refus de visa d'entrée en France a rejeté son recours contre la décision du 10 mars 2019 par laquelle l'autorité consulaire à Alger (Algérie) a refusé de lui délivrer un visa de court séjour pour visite privée.

Par un jugement n° 1909325 du 11 mars 2020, le tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 18 août 2020, M. H... E..., représenté par la SELARL D...-Caron-Bouche Avocats, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du 11 mars 2020 ;

2°) d'annuler la décision de la commission de recours contre les décisions de refus de visa d'entrée en France du 19 juin 2019 ;

3°) d'enjoindre au ministre de l'intérieur de lui faire délivrer un visa de court séjour dans un délai de quinze jours à compter de la notification de l'arrêt à intervenir ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 000 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

­ la décision est entachée d'un défaut d'examen sérieux alors qu'il avait clairement exposé l'objet et la durée de son séjour en France dans sa demande de visa ;

­ c'est à tort que le tribunal administratif a retenu la substitution de motifs demandée par le ministre et tirée du risque de détournement de l'objet du visa.

Par un mémoire en défense, enregistré le 17 septembre 2020, le ministre de l'intérieur conclut au rejet de la requête.

Il soutient qu'aucun des moyens de la requête n'est fondé en s'en remettant principalement à ses écritures de première instance.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu

­ le règlement (CE) n° 810/2009 du Parlement européen et du Conseil du 13 juillet 2009 établissant un code communautaire des visas (code des visas) ;

­ le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

­ le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. A...'hirondel,

- et les observations de Me B..., substituant Me D... représentant M. E....

Considérant ce qui suit :

1. M. H... E..., ressortissant algérien né le 7 décembre 1964, a sollicité auprès des autorités consulaires françaises à Alger (Algérie) la délivrance d'un visa de court séjour pour visite touristique, ce qui lui a été refusé par une décision du 10 mars 2019. Le recours formé devant la commission de recours contre les décisions de refus de visa d'entrée en France a été rejeté par une décision du 19 juin 2019. M. E... relève appel du jugement du tribunal administratif de Nantes du 11 mars 2020 qui a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cette dernière décision.

2. L'administration peut, en première instance comme en appel, faire valoir devant le juge de l'excès de pouvoir que la décision dont l'annulation est demandée est légalement justifiée par un motif, de droit ou de fait, autre que celui initialement indiqué, mais également fondé sur la situation existant à la date de cette décision. Il appartient alors au juge, après avoir mis à même l'auteur du recours de présenter ses observations sur la substitution ainsi sollicitée, de rechercher si un tel motif est de nature à fonder légalement la décision, puis d'apprécier s'il résulte de l'instruction que l'administration aurait pris la même décision si elle s'était fondée initialement sur ce motif. Dans l'affirmative, il peut procéder à la substitution demandée, sous réserve toutefois qu'elle ne prive pas le requérant d'une garantie procédurale liée au motif substitué.

3. Le ministre de l'intérieur a indiqué, dans son mémoire en défense de première instance communiqué par le tribunal administratif à M. E..., abandonner, d'une part, le motif tiré de l'insuffisance de l'attestation d'accueil validée par la mairie et qui vaut engagement de M. F... à financer les frais de séjour de M. E... et solliciter, d'autre part, une substitution de motifs tirée d'un risque élevé de détournement de l'objet réel de la demande de visa touristique et des incohérences quant à la situation professionnelle de l'intéressé.

4. Aux termes de l'article 32 du code communautaire des visas : " Sans préjudice de l'article 25, paragraphe 1, le visa est refusé: / (...) s'il existe des doutes raisonnables sur l'authenticité des documents justificatifs présentés par le demandeur ou sur la véracité de leur contenu, sur la fiabilité des déclarations effectuées par le demandeur ou sur sa volonté de quitter le territoire des États membres avant l'expiration du visa demandé ". Selon l'annexe II de ce code : " Liste non exhaustive de documents justificatifs / Les justificatifs visés à l'article 14, que les demandeurs de visa doivent produire, sont notamment les suivants : (...) / Documents permettant d'apprécier la volonté du demandeur de quitter le territoire des états membres : / 1) un billet de retour ou un billet circulaire, ou encore une réservation de tels billets; 2) une pièce attestant que le demandeur dispose de moyens financiers dans le pays de résidence; 3) une attestation d'emploi: relevés bancaires; 4) toute preuve de la possession de biens immobiliers; 5) toute preuve de l'intégration dans le pays de résidence: liens de parenté, situation professionnelle. ".

5. Il ressort des pièces du dossier, que M. E... a déclaré devant les autorités consulaires françaises à Alger vouloir effectuer un voyage touristique en France de 90 jours entre le 1er avril 2019 et le 30 juin 2019 puis, devant la commission de recours contre les décisions de refus de visa d'entrée en France, vouloir venir en France, en tant que chercheur, pour rencontrer d'autres universitaires et visiter le pays. A l'appui de sa demande, il a présenté, notamment comme justificatifs, une attestation de son employeur et des bulletins de paie. Il résulte de ces documents que M. E... a été recruté en qualité d'administrateur depuis le 13 mars 2016 à l'école Normale Supérieure de Bouzaréah pour un salaire net du 30 545,22 dinars algériens (soit 229, 78 euros) et que son compte bancaire présente un solde de 8 929 dinars (soit 67,15 euros).

6. Toutefois, le requérant n'établit pas avoir repris des études supérieures, ce qui ne saurait résulter de simples convocations à un concours de formation du 3ème cycle 2018/2019 puis 2019/2020 en l'absence de tout justificatif d'inscription à un cycle universitaire. Il n'apporte, par ailleurs, aucun élément sur les rencontres universitaires auxquelles il serait convié en France. En outre, si l'intéressé, qui est célibataire, indique avoir un projet de mariage en Algérie, il n'apporte à la cour aucun élément de nature à permettre à la cour d'apprécier le bien-fondé de son allégation. De plus, hormis la présence de son père en Algérie, l'intéressé n'apporte aucune précision sur la composition de sa famille restée en Algérie et les liens qui l'unissent à elle, le courrier qu'il a adressé à l'attention de la juridiction de première instance étant dépourvu de tout élément probant. Par ailleurs, l'acte de prêt à usage de logement consenti par son père le 13 février 2020, qui est au demeurant postérieur à la décision contestée, ne saurait, en tout état de cause, être regardé comme une preuve de possession de biens immobiliers en Algérie. Dans ces conditions, eu égard au changement d'objet de la visite en France de M. E... entre la demande effectuée devant les services consulaires français en poste en Algérie et celle adressée devant la commission de recours, à l'absence de tout élément permettant d'apprécier tant le statut de chercheur ou de doctorant de l'intéressé ainsi que la réalité des rencontres universitaires auxquelles l'intéressé indique vouloir assister en France et compte tenu, également, de sa situation familiale, de ses ressources et de l'absence de toute preuve de possession de biens immobiliers en Algérie, la commission, en refusant le visa de court séjour demandé en raison d'un risque de détournement de son objet, n'a pas entaché sa décision d'une erreur manifeste d'appréciation. Un tel motif est de nature à fonder légalement la décision. Il résulte de l'instruction que l'administration aurait pris la même décision si elle s'était fondée initialement sur ce motif. Par suite, il y a lieu pour la cour de procéder à la substitution de motifs demandée.

7. Il résulte de tout ce qui précède que M. E... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande. Doivent être rejetées par voie de conséquence les conclusions à fin d'injonction présentées par le requérant ainsi que celles tendant au bénéfice des dispositions de l'article L.761-1 du code de justice administrative.

D É C I D E :

Article 1er : La requête de M. E... est rejetée.

Article 2 : Le présent jugement sera notifié à M. H... E... et au ministre de l'intérieur.

Délibéré après l'audience du 8 décembre 2020, à laquelle siégeaient :

- M. Pérez, président de chambre,

- Mme C..., présidente-assesseur ;

- M. A...'hirondel, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 8 janvier 2021.

Le rapporteur,

M. G...Le président,

A. PEREZ

Le greffier,

K. BOURON

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

2

N° 20NT02550


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nantes
Formation : 2ème chambre
Numéro d'arrêt : 20NT02550
Date de la décision : 08/01/2021
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. PEREZ
Rapporteur ?: M. Michel LHIRONDEL
Rapporteur public ?: M. GIRAUD
Avocat(s) : SELARL BOEZEC CARON BOUCHE AVOCATS

Origine de la décision
Date de l'import : 27/01/2021
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nantes;arret;2021-01-08;20nt02550 ?
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