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10/12/2020 | FRANCE | N°18NT04213

France | France, Cour administrative d'appel de Nantes, 1ère chambre, 10 décembre 2020, 18NT04213


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A... D... a demandé au tribunal administratif de Rennes de prononcer la décharge, en droits et pénalités, de la cotisation à l'impôt sur le revenu mise à sa charge au titre de l'année 2011.

Par un jugement n° 1600877 du 3 octobre 2018, le tribunal administratif de Rennes a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 30 novembre 2018, M. A... D..., représenté par Me B..., demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement ;

2°) de p

rononcer la décharge, en droits et pénalités, de la cotisation à l'impôt sur le revenu mise à sa charge au tit...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A... D... a demandé au tribunal administratif de Rennes de prononcer la décharge, en droits et pénalités, de la cotisation à l'impôt sur le revenu mise à sa charge au titre de l'année 2011.

Par un jugement n° 1600877 du 3 octobre 2018, le tribunal administratif de Rennes a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 30 novembre 2018, M. A... D..., représenté par Me B..., demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement ;

2°) de prononcer la décharge, en droits et pénalités, de la cotisation à l'impôt sur le revenu mise à sa charge au titre de l'année 2011 ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- il existait une relation de dépendance et un lien de subordination entre son employeur la société française Stapem Offshore SA et lui ;

- il est employé par une société française ;

- les conditions d'exonération posées par l'article 81 A du code général des impôts étaient donc remplies ;

- il peut se prévaloir de la documentation référencée au BOI-RSA-CHAMP-10-10-10 publiée le 12 septembre 2012.

Par un mémoire en défense, enregistré le 29 mai 2019, le ministre de l'action et des comptes publics demande à la cour de rejeter la requête.

Il fait valoir que les moyens soulevés par le requérant ne sont pas fondés.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme C...,

- et les conclusions de Mme Chollet, rapporteur public.

Considérant ce qui suit :

1. M. A... D... a exercé en 2011 une activité de plongeur au Congo pour des sociétés intervenant dans le domaine de la prospection pétrolière. Il a déclaré les sommes qui lui ont été versées en rémunération de ses prestations comme des traitements et salaires exonérés d'impôt sur le revenu en application du I de l'article 81 A du code général des impôts. En 2014, l'administration fiscale a remis en cause l'exonération des revenus perçus en exécution d'un contrat signé avec la société Stapem Offshore-Techno Oil, pour la période du 9 février au

31 mai 2011, aux motifs, d'une part, que ces revenus ne relevaient pas de la catégorie des traitements et salaires et, d'autre part, qu'ils ne lui avaient pas été versés par une société établie en France, dans un autre Etat membre de l'Union européenne, ou dans un Etat partie à l'accord sur l'Espace économique européen ayant conclu avec la France une convention fiscale qui contient une clause d'assistance administrative en vue de lutter contre la fraude ou l'évasion fiscale. Il a contesté cette imposition par une réclamation préalable du 30 novembre 2015, qui a été rejetée le 17 décembre 2015. M. D... a demandé au tribunal administratif de Rennes la décharge, en droits et pénalités, des cotisations à l'impôt sur le revenu mises à sa charge au titre de l'année 2011, procédant de l'imposition de ces revenus dans la catégorie des bénéfices non commerciaux. Par un jugement du 3 octobre 2018, le tribunal a rejeté sa demande. Il fait appel de ce jugement.

Sur l'application de la loi fiscale :

2. Aux termes du I de l'article 81 A du code général des impôts dans sa rédaction applicable à l'année en litige : " Les personnes domiciliées en France au sens de l'article 4 B qui exercent une activité salariée et sont envoyées par un employeur dans un Etat autre que la France et que celui du lieu d'établissement de cet employeur peuvent bénéficier d'une exonération d'impôt sur le revenu à raison des salaires perçus en rémunération de l'activité exercée dans l'Etat où elles sont envoyées. L'employeur doit être établi en France ou dans un autre Etat membre de l'Union européenne, ou dans un autre Etat partie à l'accord sur l'Espace économique européen ayant conclu avec la France une convention d'assistance administrative en vue de lutter contre la fraude et l'évasion fiscales. L'exonération d'impôt sur le revenu mentionnée au premier alinéa est accordée si les personnes justifient remplir l'une des conditions suivantes : (...) 2° Avoir exercé l'activité salariée dans les conditions mentionnées aux premier et deuxième alinéas : / - soit pendant une durée supérieure à cent quatre-vingt-trois jours au cours d'une période de douze mois consécutifs lorsqu'elle se rapporte aux domaines suivants : / a) Chantiers de construction ou de montage, installation d'ensembles industriels, leur mise en route, leur exploitation et l'ingénierie y afférente ; / b) Recherche ou extraction de ressources naturelles ; / c) Navigation à bord de navires immatriculés au registre international français, / - soit pendant une durée supérieure à cent vingt jours au cours d'une période de douze mois consécutifs lorsqu'elle se rapporte à des activités de prospection commerciale. / (...).".

3. Pour l'application du I de l'article 81 A du code général des impôts, l'existence d'une activité salariée implique l'existence d'un lien de subordination caractérisé par l'exécution d'un travail sous l'autorité de l'employeur qui a le pouvoir de donner des ordres et des directives, d'en contrôler l'exécution et de sanctionner les manquements de son subordonné.

4. M. D... a conclu, du 9 février au 31 mai 2011, un contrat avec la société Stapem Offshore Techno Oil. Ce contrat, qui était intitulé " contract of independant contractor for diving services ", stipulait dans son article 1 que les parties n'avaient ni l'intention ni le projet de mettre en place une relation d'employeur à employé, ce que confirme l'attestation établie le 14 mai 2012 par la société Stapem Offshore mentionnant que M. D... avait travaillé en qualité de " free lance ". A l'appui de ses allégations, selon lesquelles il exerçait en réalité une activité salariée, M. D... se prévaut, d'une part, des termes de ses contrats de travail concernant l'obligation de respecter les règles et procédures édictées par la société Stapem Offshore Techno Oil ainsi que les directives relatives à sa disponibilité et à la justification de son temps de travail, et, d'autre part, de ce que cette société prenait en charge son transport, son assurance, son hébergement et ses repas et lui fournissait également le matériel de plongée et de sécurité, et sans qu'y fît obstacle le caractère forfaitaire de sa rémunération. Toutefois, il résulte de ses propres déclarations que M. D... travaillait depuis un remorqueur affrété par le groupe Total, sans qu'il apporte d'élément probant sur les conditions dans lesquelles il exerçait concrètement et effectivement son activité. Les différentes clauses de ses contrats, dont il se prévaut, prévoyant certaines interdictions, le respect des règlements applicables sur le lieu de travail, l'obligation de se rendre disponible chaque jour, en suivant les indications données par la société Stapem Offshore Techno Oil ou son client, ne traduisent pas l'exercice d'une activité sous l'autorité d'un employeur, caractérisée notamment par le pouvoir de ce dernier de donner des ordres et des directives ou d'en contrôler l'exécution, mais sont inhérentes aux contraintes liées à l'organisation générale du travail à bord d'un navire. Il en va de même de la clause tenant à la justification et l'approbation de son temps de travail ou de celle relative à la fourniture du matériel de plongée et de sécurité ou encore de celle prévoyant la résiliation du contrat en cas de défaillance de M. D... pour une cause autre que la maladie, cette dernière clause ne révélant pas l'existence d'un pouvoir de sanction au regard des missions confiées. Enfin, la prise en charge matérielle dont l'intéressé bénéficiait en vertu des articles 7 et 8 de son contrat constitue un élément de l'équilibre financier du contrat et ne permet pas, par elle-même, de caractériser un lien de subordination, lequel ne résulte d'aucune autre stipulation. Par ailleurs, si, ainsi que l'indique le requérant, son mode de rémunération forfaitaire ne faisait pas obstacle à une relation de salariat, il n'en constitue pas pour autant un indice suffisant au regard de la loi fiscale. La seule circonstance que M. D... ait ensuite conclu avec la société Stapem Offshore un contrat de travail, au demeurant au contenu non similaire, notamment s'agissant de la justification des absences, ne suffit pas à établir qu'il exerçait précédemment une activité salariée. Dès lors et sans qu'il soit besoin d'examiner le lieu d'établissement de la société, M. D... n'établit pas qu'il pouvait bénéficier du I de l'article 81 A du code général des impôts.

Sur l'interprétation administrative de la loi fiscale :

5. Si M. D... invoque la documentation de base référencée au BOI-RSA-CHAMP-10-10-10 publiée le 12 septembre 2012, qui reprend la documentation de base 5 F-1111 à jour au 10 février 1999, indiquant que : " (...) Sans constituer un critère exclusif, le mode de rémunération est un élément d'appréciation important pour déterminer l'existence d'un contrat de travail. D'une manière générale, la rémunération au temps passé permet d'établir l'existence d'un lien de subordination. Mais un salarié peut également être rémunéré à la tâche, à la commission ou au pourcentage. Il peut également bénéficier d'une participation aux bénéfices. (...) ", celle-ci énonce toutefois, de manière générale, en préalable, que " pour établir l'existence d'un contrat de travail, la jurisprudence a dégagé la notion de subordination juridique qui repose, en fait, sur l'autorité de l'employeur qui nomme et révoque le salarié, donne les directives concernant l'exécution du travail, en contrôle l'accomplissement, en vérifie les résultats " et se borne à décrire l'état de la jurisprudence sans comporter une interprétation de la loi fiscale différente de celle dont il est fait application par le présent arrêt.

6. Il résulte de tout ce qui précède que M. D... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que le tribunal administratif de Rennes a, par le jugement attaqué, rejeté sa demande. Par voie de conséquence, ses conclusions fondées sur l'article L. 761-1 du code de justice administrative ne peuvent qu'être rejetées.

DECIDE :

Article 1er : La requête de M. D... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... D... et au ministre de l'économie, des finances et de la relance.

Délibéré après l'audience du 26 novembre 2020, à laquelle siégeaient :

- M. Bataille, président de chambre,

- M. Brasnu, premier conseiller,

- Mme C..., premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 10 décembre 2020.

Le rapporteur,

P. C...Le président,

F. Bataille

Le greffier,

P. Chaveroux

La République mande et ordonne au ministre de l'économie, des finances et de la relance en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

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N° 18NT04213

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Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nantes
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 18NT04213
Date de la décision : 10/12/2020
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : M. BATAILLE
Rapporteur ?: Mme Pénélope PICQUET
Rapporteur public ?: Mme CHOLLET
Avocat(s) : CABINET FRENKEL et ASSOCIES

Origine de la décision
Date de l'import : 26/12/2020
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nantes;arret;2020-12-10;18nt04213 ?
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