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05/11/2020 | FRANCE | N°19NT01554

France | France, Cour administrative d'appel de Nantes, 1ère chambre, 05 novembre 2020, 19NT01554


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société anonyme (SA) Acofi Gestion, représentant le fonds commun de titrisation Prédirect Innovation 2020, a demandé au tribunal administratif de Caen de condamner l'Etat au paiement des intérêts moratoires dus, sur le fondement de l'article L. 208 du livre des procédures fiscales, à compter du versement de la somme de 246 615 euros dont la société par actions simplifiée (SAS) Bodycap a bénéficié au titre du crédit d'impôt recherche de l'année 2015.

Par un jugement n° 1702218 du 31 déc

embre 2018, le tribunal administratif de Caen a condamné l'Etat à verser au fonds commun...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société anonyme (SA) Acofi Gestion, représentant le fonds commun de titrisation Prédirect Innovation 2020, a demandé au tribunal administratif de Caen de condamner l'Etat au paiement des intérêts moratoires dus, sur le fondement de l'article L. 208 du livre des procédures fiscales, à compter du versement de la somme de 246 615 euros dont la société par actions simplifiée (SAS) Bodycap a bénéficié au titre du crédit d'impôt recherche de l'année 2015.

Par un jugement n° 1702218 du 31 décembre 2018, le tribunal administratif de Caen a condamné l'Etat à verser au fonds commun de titrisation Predirec Innovation 2020 les intérêts moratoires dus pour la période du 9 mai 2016 au 11 août 2017 sur la somme de 246 615 euros (article 1er) et mis à sa charge une somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative (article 2).

Procédure devant la cour :

Par une requête et des mémoire, enregistrés les 24 avril 2019, 9 janvier 2020 et 16 octobre 2020, le ministre de l'action et des comptes publics demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement ;

2°) de condamner le fonds commun de titrisation Predirec Innovation 2020 au remboursement de la somme de 13 560,54 euros versée en exécution du jugement attaqué ;

3°) de réformer le jugement attaqué en ce sens.

Il soutient que :

- le remboursement d'un crédit impôt recherche à l'extinction du délai de six mois après le dépôt d'une réclamation contentieuse qui tend à l'obtenir doit être regardé comme un dégrèvement d'impôt au sens et pour l'application des dispositions de l'article L. 208 du livre des procédures fiscales ;

- le calcul des intérêts moratoires doit s'opérer à compter de la date de la réclamation.

Par des mémoires en défense, enregistrés le 5 juillet 2019 et le 23 janvier 2020, la société Acofi Gestion, représentée par Me B... conclut au rejet de la requête et ce que soit mis à la charge de l'Etat le versement d'une somme de 5 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que les moyens soulevés par le ministre de l'action et des comptes publics ne sont pas fondés.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. A...,

- et les conclusions de Mme Chollet, rapporteur public.

Considérant ce qui suit :

1. La société par actions simplifiée (SAS) Bodycap a bénéficié d'un crédit d'impôt recherche au titre de 2015 d'un montant de 246 615 euros. Le 2 mai 2016, elle a cédé cette créance au fonds commun de titrisation Prédirect Innovation 2020, représentée par la société anonyme (SA) Acofi Gestion, et le 9 mai 2016 elle a demandé à l'administration le remboursement de ce crédit d'impôt en souscrivant un formulaire. Le 12 juin 2017, l'administration a accepté la restitution qui a été effectuée le 11 août 2017 sur le compte du fonds commun de titrisation Prédirect Innovation 2020. Le 28 septembre 2017, la SA Acofi Gestion, représentant le fonds commun de titrisation Prédirect Innovation 2020 en tant que société de gestion, a demandé à l'administration le versement des intérêts moratoires sur le fondement de l'article L. 208 du livre des procédures fiscales. Le 11 octobre 2017, l'administration a refusé de faire droit à cette demande et a procédé seulement au versement de l'intérêt légal. La SA Acofi Gestion a saisi le tribunal administratif de Caen tendant à la condamnation de l'Etat au versement des intérêts moratoires. Par un jugement du 31 décembre 2018, le tribunal a condamné l'Etat à verser au fonds commun de titrisation Prédirect Innovation 2020 les intérêts moratoires dus pour la période du 9 mai 2016 au 11 août 2017 sur la somme de 246 615 euros (article 1er) et mis à sa charge une somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative (article 2). Le ministre de l'action et des comptes publics relève appel de ce jugement.

2. Aux termes de l'article L. 208 du livre des procédures fiscales : " Quand l'Etat est condamné à un dégrèvement d'impôt par un tribunal ou quand un dégrèvement est prononcé par l'administration à la suite d'une réclamation tendant à la réparation d'une erreur commise dans l'assiette ou le calcul des impositions, les sommes déjà perçues sont remboursées au contribuable et donnent lieu au paiement d'intérêts moratoires dont le taux est celui de l'intérêt de retard prévu à l'article 1727 du code général des impôts. Les intérêts courent du jour du paiement. Ils ne sont pas capitalisés. (...). ". Il résulte de ces dispositions que la restitution d'un crédit d'impôt recherche obtenue par une société après le rejet par l'administration d'une réclamation a le caractère de dégrèvement contentieux de la même nature que celui prononcé par un tribunal au sens des dispositions de l'article L. 208 du livre des procédures fiscales. La circonstance que le droit à restitution ne procéderait pas, à l'origine, d'une erreur commise par l'administration dans l'assiette ou le calcul d'une imposition est sans incidence à cet égard. Ce crédit d'impôt doit, dès lors, donner lieu au paiement d'intérêts moratoires qui courent, s'agissant de la procédure de restitution d'un crédit d'impôt recherche, pour laquelle il n'y a pas de paiement antérieur d'impôt sur les sociétés de la part du redevable, à compter de la date de la réclamation qui fait apparaître le crédit remboursable.

3. Il résulte de l'instruction que la restitution de crédit d'impôt recherche au titre de l'année 2015 a été obtenue le 12 juin 2017 par la SAS Bodycap, qui en a fait la demande le 9 mai 2016, après avoir cédé le 2 mai 2016 la créance au fonds commun de titrisation Predirec Innovation 2020, représentée par la SA Acogi Gestion, cette dernière étant une société de gestion. Ainsi, il n'a pas été fait droit à la réclamation dans le délai de six mois prévu à l'article R. 198-10 du livre des procédures fiscales et la restitution versée au fonds commun de titrisation Predirec Innovation 2020 le 11 août 2017 avait le caractère d'un dégrèvement contentieux au sens de l'article L. 208 du même livre. Dès lors, la SA Acofi Gestion a droit au versement d'intérêts moratoires sur la somme de 246 615 euros à compter du 9 mai 2016 jusqu'au 11 août 2017.

4. Il résulte de ce qui précède que le ministre de l'action et des comptes publics n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Caen a mis à la charge de l'Etat des intérêts moratoires sur la somme de 246 615 euros et une somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Une somme de 1 000 euros sera mise à la charge de l'Etat, partie perdante, au titre des frais liés au litige.

D E C I D E :

Article 1er : La requête du ministre de l'action et des comptes publics est rejetée.

Article 2 : L'Etat versera à la SA Acofi Gestion une somme de 1 000 euros au titre des frais liés au litige.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié au ministre des comptes publics et à la société anonyme Acofi Gestion.

Délibéré après l'audience du 22 octobre 2020, à laquelle siégeaient :

- M. Bataille, président de chambre,

- M. A..., président assesseur,

- M. Brasnu, premier conseiller.

Lu en audience publique le 5 novembre 2020.

Le rapporteur,

J.-E. A...Le président,

F. Bataille

Le greffier,

A .Rivoal La République mande et ordonne au ministre des comptes publics, en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

2

N° 19NT01554


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nantes
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 19NT01554
Date de la décision : 05/11/2020
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : M. BATAILLE
Rapporteur ?: M. Jean-Eric GEFFRAY
Rapporteur public ?: Mme CHOLLET
Avocat(s) : CABINET JEAUSSERAND AUDOUARD

Origine de la décision
Date de l'import : 21/11/2020
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nantes;arret;2020-11-05;19nt01554 ?
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