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05/11/2020 | FRANCE | N°18NT04137

France | France, Cour administrative d'appel de Nantes, 1ère chambre, 05 novembre 2020, 18NT04137


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. et Mme A... D... ont demandé au tribunal administratif d'Orléans de prononcer la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contributions sociales auxquelles ils ont été assujettis au titre de l'année 2012.

Par un jugement n° 1701743 du 2 octobre 2018, le tribunal administratif d'Orléans a constaté qu'il n'y avait pas lieu de statuer sur les conclusions de la demande à hauteur du dégrèvement de 10 997 euros prononcé le 16 octobre 2017 et a rejeté le surplus des co

nclusions de la demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée l...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. et Mme A... D... ont demandé au tribunal administratif d'Orléans de prononcer la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contributions sociales auxquelles ils ont été assujettis au titre de l'année 2012.

Par un jugement n° 1701743 du 2 octobre 2018, le tribunal administratif d'Orléans a constaté qu'il n'y avait pas lieu de statuer sur les conclusions de la demande à hauteur du dégrèvement de 10 997 euros prononcé le 16 octobre 2017 et a rejeté le surplus des conclusions de la demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 27 novembre 2018, M. et Mme A... D..., représentés par Me C..., demandent à la cour :

1°) d'annuler ce jugement ;

2°) de prononcer la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contributions sociales auxquelles ils ont été assujettis au titre de l'année 2012 ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 5 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Ils soutiennent que les travaux en cause doivent être regardés comme des travaux de reconstruction ou d'agrandissement ou d'amélioration au sens de l'article 150 VB du code général des impôts.

Par un mémoire en défense, enregistré le 15 mai 2019, le ministre de l'action et des comptes publics demande à la cour de rejeter la requête.

Il fait valoir que :

- les requérants n'ont justifié, à la suite de la demande de renseignement adressée le 20 octobre 2015, que d'un montant de dépenses de 73 222 euros ;

- le montant des dépenses supplémentaires concernant des travaux d'amélioration pouvant être retenu s'élève à 889 euros seulement mais les dégrèvements à prononcer sont compensés par les dégrèvements déjà prononcés et en partie indus.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme B...,

- et les conclusions de Mme Chollet, rapporteur public.

Considérant ce qui suit :

1. M. et Mme D... ont acquis, par acte en date du 14 septembre 2011, une maison à usage d'habitation située au 25 rue des Angevins à Cellettes, comprenant au rez-de-chaussée une cuisine, une salle à manger, un salon avec un four à pain, une chambre avec cheminée et une salle d'eau, des toilettes ainsi qu'un bâtiment dans le jardin, pour un prix de 85 000 euros. Ils ont majoré le prix d'acquisition de ce bien d'un montant de travaux de 78 879 euros et ont revendu cet immeuble au prix de 241 000 euros. A l'issue d'un contrôle sur pièces de la déclaration de revenu souscrite par les requérants au titre de l'année 2012, l'administration fiscale n'a admis les dépenses de travaux qu'à concurrence de la somme de 14 746 euros et a assujetti M. et Mme D... à des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contributions sociales au titre de l'année 2012. M. et Mme D... ont demandé au tribunal administratif d'Orléans de prononcer la décharge de ces impositions. Par un jugement du 2 octobre 2018, le tribunal a constaté qu'il n'y avait pas lieu de statuer sur les conclusions de la demande à hauteur du dégrèvement de 10 997 euros prononcé le 16 octobre 2017 et a rejeté le surplus des conclusions de la demande. Ils font appel de ce jugement.

Sur l'étendue du litige :

2. Par une décision du 13 mars 2019, postérieure à l'enregistrement de la requête, l'administration fiscale a prononcé le dégrèvement, à concurrence de la somme de 210 euros, en droits et en pénalités, de la cotisation supplémentaire à l'impôt sur le revenu à laquelle les époux D... ont été assujettis au titre de l'année 2012. Cette somme correspond à la prise en compte, dans la majoration du prix de vente, de la réfection des sols et des faïences pour une surface de 14 m2, travaux indissociables de la création d'un système d'assainissement autonome, correspondant à des dépenses d'amélioration. Les conclusions de la requête de M. et Mme D... sont, dans cette mesure, devenues sans objet.

Sur le bien-fondé de l'imposition :

3. Aux termes de l'article 150 U du code général des impôts : " I. - Sous réserve des dispositions propres aux bénéfices industriels et commerciaux, aux bénéfices agricoles et aux bénéfices non commerciaux, les plus-values réalisées par les personnes physiques ou les sociétés ou groupements qui relèvent des articles 8 à 8 ter, lors de la cession à titre onéreux de biens immobiliers bâtis ou non bâtis ou de droits relatifs à ces biens, sont passibles de l'impôt sur le revenu dans les conditions prévues aux articles 150 V à 150 VH (...) ". Aux termes de l'article 150 V du même code : " La plus ou moins-value brute réalisée lors de la cession de biens ou droits mentionnés aux articles 150 U à 150 UC est égale à la différence entre le prix de cession et le prix d'acquisition par le cédant. ". Aux termes de l'article 150 VB de ce code : " (...) II. - Le prix d'acquisition est, sur justificatifs, majoré : (...) / 4° Des dépenses de construction, de reconstruction, d'agrandissement ou d'amélioration, supportées par le vendeur et réalisées par une entreprise depuis l'achèvement de l'immeuble ou son acquisition si elle est postérieure, lorsqu'elles n'ont pas été déjà prises en compte pour la détermination de l'impôt sur le revenu et qu'elles ne présentent pas le caractère de dépenses locatives (...) ".

4. Il résulte de ces dispositions que, lorsqu'un contribuable a réalisé, postérieurement à l'acquisition d'un bien immobilier, des travaux de construction, de reconstruction, d'agrandissement, de rénovation ou d'amélioration de ce bien, les dépenses relatives à ces travaux peuvent, sous réserve qu'elles n'aient pas été déjà déduites du revenu imposable et qu'elles ne présentent pas le caractère de dépenses locatives, venir en majoration du prix d'acquisition de ce bien immobilier pour le calcul de la plus-value réalisée à l'occasion de sa cession. Doivent être regardés comme des travaux de construction ou de reconstruction les travaux comportant la création de nouveaux locaux d'habitation, notamment dans des locaux auparavant affectés à un autre usage, ainsi que les travaux ayant pour effet d'apporter une modification importante au gros oeuvre de locaux d'habitation existants ou les travaux d'aménagement interne qui, par leur importance, équivalent à une reconstruction. Doivent être regardés comme des travaux d'agrandissement, les travaux ayant pour effet d'accroître le volume ou la surface habitable de locaux existants. Les travaux d'amélioration ont pour objet d'apporter à un immeuble un équipement ou un élément de confort nouveau ou mieux adapté aux conditions modernes de vie, sans modifier cependant la structure de cet immeuble. Les travaux d'entretien et de réparation sont ceux qui ont pour objet de maintenir ou de remettre un immeuble en bon état et d'en permettre un usage normal sans en modifier la consistance, l'agencement ou l'équipement initial. Lorsqu'un immeuble est ancien ou vétuste et qu'il nécessite une remise en état, la circonstance que des travaux sont entrepris pour le réhabiliter ne fait pas obstacle à ce que l'administration fiscale distingue, au sein des dépenses engagées dans le cadre de cette rénovation, les dépenses d'amélioration du bien des dépenses d'entretien, lorsque ces dernières dépenses sont dissociables des premières.

5. Les dépenses acquittées par les requérants en 2012 d'un montant de 3 721 euros correspondant à des travaux de pose de plaques de plâtre résultant de la création d'une chambre et du déplacement correspondant de la salle d'eau, n'affectant pas le gros oeuvre mais modifiant en partie l'agencement de la maison et ajoutant, avec cette seconde chambre, un élément de confort nouveau, doivent être regardées comme des dépenses d'amélioration. Les frais de fourniture et pose d'une douche d'un montant de 6 757,40 euros et de deux vasques pour un montant de 314,85 euros, sont indissociables des travaux précédents. Cela correspond à un montant total de 10 793,25 euros réduisant le montant de la plus-value imposable.

6. En revanche, les dépenses correspondant à des travaux de fourniture et pose d'une cuisine aménagée et du remplacement du ballon d'eau chaude, ne correspondent pas à des travaux d'amélioration et il ne résulte pas de l'instruction que ces travaux sont indissociables des autres travaux d'amélioration entrepris au cours de la même année dans l'immeuble cédé dès lors que la maison acquise par les époux D... disposait d'ores et déjà d'une cuisine aménagée et d'un chauffe-eau. Les dépenses correspondant à des travaux de remise en état d'une cheminée, la pose d'une toile de fibre de verre sur les plafonds puis l'application de peinture et à la réalisation de diagnostics immobiliers ne sauraient davantage, par leur nature, être regardés comme des travaux d'amélioration au sens des dispositions précitées et sont dissociables des autres travaux réalisés. S'agissant des travaux de ponçage et de peinture des murs périphériques et des cloisons intérieures, il ne ressort pas de la facture produite de la société Sobral peinture en date du 22 novembre 2012 qu'ils seraient indissociables des travaux liés à la création de la seconde chambre et au déplacement de la salle d'eau.

Sur la compensation demandée par le ministre de l'action et des comptes publics :

7. Aux termes de l'article L. 203 du livre des procédures fiscales : " Lorsqu'un contribuable demande la décharge ou la réduction d'une imposition quelconque, l'administration peut, à tout moment de la procédure et malgré l'expiration des délais de prescription, effectuer ou demander la compensation dans la limite de l'imposition contestée, entre les dégrèvements reconnus justifiés et les insuffisances ou omissions de toute nature constatées dans l'assiette ou le calcul de l'imposition au cours de l'instruction de la demande ". Il résulte de ces dispositions que l'administration est fondée à invoquer des insuffisances ou omissions de toute nature pendant l'instruction de la demande, laquelle doit s'entendre comme prenant effet au plus tôt à compter de l'examen de la réclamation du contribuable par l'administration et se poursuivant pendant toute la durée du contentieux devant le juge administratif statuant au fond sur le litige. L'administration peut prendre en compte l'ensemble des éléments à sa disposition au cours de cette période qui révèleraient une omission ou une insuffisance dans l'assiette ou le calcul de l'imposition, y compris ceux qu'elle aurait recueillis à l'occasion d'une procédure de contrôle diligentée après la réception de la réclamation.

8. Le ministre admet qu'un dégrèvement de 367 euros serait à prononcer en matière de contributions sociales. Toutefois, il fait valoir, sans être contredit, qu'une erreur de calcul est intervenue lors du dégrèvement prononcé le 16 octobre 2017 en matière de contribution au remboursement de la dette sociale du fait de l'application d'un taux de 5% au lieu du taux de 0,5%, ce qui a eu pour conséquence un trop versé de 1 217 euros. Il y a donc lieu d'accorder au ministre le bénéfice de la compensation sur le fondement de l'article L. 203 du livre des procédures fiscales.

9. Il résulte de tout ce qui précède que M. et Mme D... sont seulement fondés à demander la majoration du prix d'acquisition de la maison à usage d'habitation située au 25 rue des Angevins à Cellettes d'un montant de 10 793,25 euros et à revendiquer dès lors, une réduction de même montant des bases imposées, et par voie de conséquence, la décharge de la différence entre le montant de l'imposition à laquelle ils ont été assujettis et le montant de l'imposition qui aurait été établie sur la base ainsi réduite, ainsi que des pénalités y afférentes.

Sur les frais liés au litige :

10. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat le versement à M. et Mme D... de la somme de 1 500 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

DECIDE :

Article 1er : Il n'y a pas lieu de statuer sur les conclusions de la requête de M. et Mme D... en ce qui concerne la cotisation d'impôt sur le revenu à laquelle ils ont été assujettis au titre de l'année 2012, à concurrence de la somme 210 euros.

Article 2 : Les bases d'imposition à l'impôt sur le revenu de l'année 2012 sont réduites en tenant compte d'une somme de 10 793,25 euros relative à des travaux d'amélioration majorant le prix d'acquisition de l'immeuble par M. et Mme D....

Article 3 : Il est accordé à M. et Mme D... la décharge, en droits et pénalités, de la différence entre le montant de la cotisation d'impôt sur le revenu et des contributions sociales à laquelle ils sont restés assujettis et le montant de celle qui résulte de l'article 2.

Article 4 : Le jugement n° 1701743 du 2 octobre 2018 du tribunal administratif d'Orléans est réformé en ce qu'il a de contraire au présent arrêt.

Article 5 : L'Etat versera à M. et Mme D... une somme de 1 500 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 6 : Le surplus des conclusions de la requête de M. et Mme D... est rejeté.

Article 7 : Le présent arrêt sera notifié à M. et Mme A... D... et au ministre des comptes publics.

Délibéré après l'audience du 22 octobre 2020, à laquelle siégeaient :

- M. Bataille, président de chambre,

- M. Geffray, président assesseur,

- Mme B..., premier conseiller.

Lu en audience publique, le 5 novembre 2020.

Le rapporteur,

P. B...Le président,

F. Bataille

Le greffier,

A. Rivoal

La République mande et ordonne au ministre des comptes publics en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

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N° 18NT04137

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Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nantes
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 18NT04137
Date de la décision : 05/11/2020
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : M. BATAILLE
Rapporteur ?: Mme Pénélope PICQUET
Rapporteur public ?: Mme CHOLLET
Avocat(s) : SELARL ABRS et ASSOCIES

Origine de la décision
Date de l'import : 21/11/2020
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nantes;arret;2020-11-05;18nt04137 ?
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