Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
La société Chez Aline a demandé au tribunal administratif de Nantes de condamner la commune de Château-du-Loir à lui verser la somme de 23 032,25 euros en réparation du préjudice qu'elle estime avoir subi du fait des travaux de réaménagement de la Place Lemonnier entre mai 2013 et mai 2014.
Par un jugement n° 1510504 du 25 septembre 2018, le tribunal administratif de Nantes a condamné la commune de Château-du-Loir à verser à la société Chez Aline la somme de
737,85 euros.
Procédure devant la cour :
Par une requête enregistrée le 21 novembre 2018 la société Chez Aline, représentée par Me A..., demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Nantes du 25 septembre 2018 ;
2°) de condamner la commune de Montval-sur-Loir (ex-Château-du-Loir) à lui verser la somme de 23 032,25 euros ;
3°) de mettre à la charge de la commune de Montval-sur-Loir la somme de 2 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- contrairement à ce qu'a jugé le tribunal, elle a subi un dommage anormal et spécial en raison des travaux publics litigieux, qui ont considérablement réduit les possibilités d'accès à son commerce ;
- son préjudice s'établit de la manière suivante : 737,85 euros au titre de la perte de stock, 2 147,40 euros au titre du remplacement de son matériel informatique détruit par une surtension électrique et 20 147 euros au titre de sa perte de marge.
Par un mémoire en défense enregistré le 19 février 2019 la commune de
Château-du-Loir, représentée par Me C..., conclut au rejet de la requête et demande à la cour de mettre à la charge de la société Chez Aline la somme de 2 500 euros au titre de l'article
L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que les moyens soulevés par la société Chez Aline ne sont pas fondés.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. B...,
- les conclusions de M. Gauthier, rapporteur public.
Considérant ce qui suit :
1. La société Chez Aline a exploité jusqu'en 2016 un fonds de commerce de vente de bijoux, d'articles de maroquinerie et d'objets de décoration situé place Lemonnier à Montval-sur-Loir (ex Château-du-Loir). La commune a fait exécuter des travaux de réaménagement de cette place qui ont duré de mai 2013 à avril 2014. La société Chez Aline, après avoir lié le contentieux par des demandes indemnitaires des 13 novembre 2013 et 17 mars 2015, a demandé au tribunal administratif de Nantes la condamnation de la commune à l'indemniser, à hauteur de 23 032,25 euros, des préjudices qu'elle estime avoir subis du fait de ces travaux. Le tribunal a condamné la commune de Montval-sur-Loir à lui verser 737,85 euros et a rejeté le surplus de sa demande. La société Chez Aline relève appel de ce jugement.
2. Le riverain d'une voie publique qui entend obtenir réparation des dommages qu'il estime avoir subis à l'occasion d'une opération de travaux publics, à l'égard de laquelle il a la qualité de tiers, doit établir, d'une part, le lien de causalité entre cette opération et les dommages allégués et, d'autre part, le caractère anormal et spécial de son préjudice, les riverains des voies publiques étant tenus de supporter, sans contrepartie, les sujétions normales qui leur sont imposées dans un but d'intérêt général. Ce riverain doit également, pour obtenir réparation, apporter au juge les éléments permettant d'établir le caractère direct et certain du préjudice qu'il invoque. A cet égard, le manque à gagner subi par une entreprise commerciale du fait de la réalisation de travaux publics ne saurait être calculé en fonction de la marge commerciale de cette entreprise, mais doit l'être en fonction de sa marge nette, le manque à gagner indemnisable étant égal à la perte de bénéfice net subie du fait des travaux.
3. En l'espèce, il résulte de l'instruction, et en particulier d'un constat établi par un huissier à la demande de la société Chez Aline et des pièces comptables produites par celle-ci, que les travaux de réfection de la place Lemonnier sont à l'origine de difficultés d'accès et de diverses autres nuisances (bruits, poussières, présence d'engins de chantier, vibrations) qui ont entraîné pendant la période concernée une diminution supérieure à 30% du chiffre d'affaire du commerce exploité par la société requérante. Eu égard à l'ampleur de cette diminution du chiffre d'affaire, ces travaux ont excédé les sujétions que les riverains d'une voie publique sont normalement tenus de supporter. La responsabilité de la commune de Montval-sur-Loir est donc engagée.
4. En premier lieu, il ne résulte pas de l'instruction, et n'est d'ailleurs pas allégué, que la baisse d'activité consécutive aux travaux publics litigieux aurait fait perdre à la société Chez Aline, qui n'a dégagé aucun bénéfice au titre des exercices 2011 (- 15 693 euros), 2012 (- 2 133 euros) et 2014 (- 10 609 euros) et a connu un exercice à l'équilibre en 2013 (+ 36 euros), la possibilité de dégager un bénéfice net. Elle ne peut donc être indemnisée à ce titre.
5. En deuxième lieu, comme l'a jugé le tribunal administratif de Nantes, si la société requérante demande à être indemnisée de la destruction de son matériel informatique, entraînée selon elle par une surtension électrique générée par les travaux, elle ne produit aucun élément de nature à établir la réalité de son préjudice et le lien direct de celui-ci avec les travaux publics litigieux.
6. En dernier lieu, il est admis par les parties que, le 19 mai 2014, des vibrations dues à la pose d'enrobés ont occasionné la chute d'un présentoir entraînant la casse d'articles de décoration présentés dans la vitrine du commerce exploité par la société requérante. Il y a donc lieu de confirmer les premiers juges qui ont condamné la commune de Montval-sur-Loir à verser à ce titre à la société Chez Aline la somme non contestée de 737,85 euros.
7. Il résulte de ce qui précède que la société chez Aline n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nantes a limité à la somme de 737,85 euros la réparation de son préjudice.
Sur les frais liés au litige :
8. Dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu de rejeter les demandes présentées par la société Chez Aline et par la commune de Montval-sur-Loir sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de la société chez Aline est rejetée.
Article 2 : Les conclusions présentées par la commune de Montval-sur-Loir au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à la société chez Aline et à la commune de
Montval-sur-Loir.
Délibéré après l'audience du 1er octobre 2020, à laquelle siégeaient :
- Mme Brisson, président,
- M. B..., premier conseiller,
- Mme Le Barbier, premier conseiller.
Lu en audience publique, le 16 octobre 2020.
Le rapporteur
E. B...Le président
C. Brisson
Le greffier
A. Martin
La République mande et ordonne au préfet de la Sarthe en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
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N° 18NT04087