Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
Le GAEC des Quatre Saisons a demandé au tribunal administratif de Nantes de liquider pour la troisième fois l'astreinte prononcée par le tribunal administratif de Nantes dans son jugement n°1502672 du 22 mars 2016 en exécution du jugement n° 1009749 du 27 juin 2014 qui enjoignait au préfet de la Loire Atlantique de prendre une nouvelle décision fixant le montant de référence de ses droits à paiement unique.
Par un jugement n° 1808972 du 2 mai 2019, le tribunal administratif de Nantes a condamné l'Etat à verser la somme de 25 000 euros au GAEC des Quatre Saisons.
Procédure devant la cour :
Par une requête et un mémoire enregistré les 2 juillet 2019 et 9 janvier 2020 le ministre de l'agriculture et de l'alimentation demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Nantes du 2 mai 2019 ;
2°) de liquider à titre définitif l'astreinte prononcée par le jugement n°1502672 du
22 mars 2016 à hauteur de 13 000 euros.
Il soutient que :
- alors qu'il n'est désormais plus possible, pour des raisons informatiques et règlementaires, de modifier pour le passé la valeur des anciens droits à paiement unique (DPU), la somme de 180 000 euros que le préfet de la Loire-Atlantique a versé au GAEC des Quatre Saisons, par une décision du 28 mai 2018, en exécution du jugement n°1504535 du tribunal administratif de Nantes du 1er février 2018, intègre la revalorisation de ses DPU pour la période 2006-2014 ; le jugement n° 1009749 du tribunal administratif de Nantes du 27 juin 2014 a donc été pleinement exécuté ; par suite, l'astreinte devait être définitivement liquidée pour la période courant du 28 juin 2017 au 28 mai 2018 pour un montant maximal de 33 400 euros, qu'il y a lieu en l'espèce de réduire à la somme de 13 000 euros ;
- les droits à paiement de base (DPB) du GAEC des Quatre Saisons pour les années 2015 et suivantes ont été revalorisés ; les premiers juges ont donc commis une erreur de fait sur ce point ;
- les moyens soulevés par le GAEC des Quatre Saisons au soutien de ses conclusions incidentes ne sont pas fondés.
Par des mémoires enregistrés les 18 octobre 2019 et 27 janvier 2020 le GAEC des Quatre Saisons, représenté par Me B..., conclut :
1°) au rejet de la requête
2°) par la voie de l'appel incident, à ce que la somme de 25 000 euros que l'Etat a été condamné à lui verser par le jugement attaqué soit portée à 64 600 euros ;
3°) à ce que soit mise à la charge de l'Etat la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
- les moyens soulevés par le ministre de l'agriculture et de l'alimentation ne sont pas fondés ;
- c'est à tort que les premiers juges ont modéré l'astreinte ; il y a donc lieu de la liquider à la somme de 64 600 euros.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. C...,
- les conclusions de M. Gauthier, rapporteur public,
- les observations de M. D..., représentant le ministre de l'agriculture et de l'alimentation, et de Me B..., représentant le GAEC des Quatre Saisons.
Une note en délibéré, présentée pour le GAEC des Quatre Saisons, a été enregistrée le 22 septembre 2020.
Considérant ce qui suit :
1. Le GAEC des Quatre Saisons, producteur de lait en Loire-Atlantique, a souscrit entre 2000 et 2002 des engagements agroenvironnementaux qui n'ont pas été pris en compte dans le calcul du montant de référence de ses droits à paiement unique (DPU). La décision du 1er juillet 2010 par laquelle le préfet de la Loire-Atlantique a refusé de réévaluer ce montant de référence a, pour ce motif, été annulée par un jugements n° 1009749 du tribunal administratif de Nantes du 27 juin 2014, lequel a également enjoint au préfet de " prendre une nouvelle décision établissant le montant de référence des droits à paiement unique du GAEC des Quatre Saisons dans un délai de deux mois à compter de la notification du présent jugement. ". Saisi par le GAEC des Quatre Saisons d'un recours en exécution du jugement n° 1009749 du 27 juin 2014, le tribunal administratif de Nantes, par un jugement n° 1502672 du 22 mars 2016, a assorti l'injonction faite au préfet de la Loire-Atlantique d'une astreinte de 100 euros par jour de retard. Par des jugements du 29 septembre 2016 puis du 4 juillet 2017 le tribunal administratif de Nantes, après avoir constaté que l'injonction ainsi prononcée n'avait pas été exécutée, a liquidé l'astreinte provisoire dont elle était assortie en condamnant l'Etat à verser à M. A... des sommes respectives de 10 000 euros et de 20 000 euros. Par un jugement n° 1504535 du 1er février 2018, le tribunal administratif de Nantes a également condamné l'Etat à verser au GAEC des Quatre Saisons la somme de 180 000 euros au titre du préjudice subi par lui entre 2006 et 2014 du fait de la minoration de ses DPU. Par un jugement n° 1808972 du 2 mai 2019, le tribunal administratif de Nantes, saisi à nouveau par le GAEC des Quatre Saisons, a liquidé une troisième fois l'astreinte prononcée par le jugement n°1502672 du 22 mars 2016 en condamnant l'Etat à lui verser la somme de 25 000 euros. Le ministre de l'agriculture et de l'alimentation relève appel de ce dernier jugement. Le GAEC des Quatre Saisons, par la voie de l'appel incident, demande que la somme qui lui a été accordée soit portée à 64 600 euros.
2. Aux termes de l'article L. 911-3 du code de justice administrative : " La juridiction peut assortir, dans la même décision, l'injonction prescrite en application des articles L. 911-1 et L. 911-2 d'une astreinte qu'elle prononce dans les conditions prévues au présent livre et dont elle fixe la date d'effet. ". Selon l'article L. 911-6 du même code : " L'astreinte est provisoire ou définitive. Elle doit être considérée comme provisoire à moins que la juridiction n'ait précisé son caractère définitif (...) ". Enfin, l'article L. 911-7 du même code dispose : " En cas d'inexécution totale ou partielle ou d'exécution tardive, la juridiction procède à la liquidation de l'astreinte qu'elle avait prononcée. / Sauf s'il est établi que l'inexécution de la décision provient d'un cas fortuit ou de force majeure, la juridiction ne peut modifier le taux de l'astreinte définitive lors de sa liquidation. / Elle peut modérer ou supprimer l'astreinte provisoire, même en cas d'inexécution constatée. ".
3. Le juge de l'exécution saisi, sur le fondement des dispositions de l'article L. 911-7 du code de justice administrative, aux fins de liquidation d'une astreinte précédemment prononcée peut la modérer ou la supprimer, même en cas d'inexécution constatée, compte tenu notamment des diligences accomplies par l'administration en vue de procéder à l'exécution de la chose jugée. Cependant il n'a pas le pouvoir de remettre en cause les mesures décidées par le dispositif de la décision juridictionnelle dont l'exécution est demandée.
4. En premier lieu, le ministre ne saurait utilement soulever le moyen tiré de l'erreur de fait dont serait entaché le jugement attaqué s'agissant de l'impact du calcul des DPU du GAEC des Quatre Saisons sur les sommes qui lui ont été versées depuis 2015 au titre des DPB.
5. En second lieu, le ministre de l'agriculture et de l'alimentation soutient que le préfet de la Loire-Atlantique a exécuté le jugement n° 1009749 du tribunal administratif de Nantes du 27 juin 2014 par une décision du 28 mai 2018 portant versement au GAEC des Quatre Saisons de la somme de 180 000 euros que l'Etat a été condamné à lui verser par le jugement n° 1504535 du 1er février 2018. Il fait valoir que cette somme de 180 000 euros doit être regardée comme couvrant la revalorisation des DPU du GAEC des Quatre Saisons pour la période concernée ou comme produisant un effet équivalent à cette revalorisation. Il en déduit que les premiers juges devaient liquider définitivement l'astreinte pour la période courant du 28 juin 2017 au
28 mai 2018. Toutefois, l'exécution d'un jugement indemnitaire ne saurait être regardé comme valant exécution d'un autre jugement ayant prononcé une injonction, et il ne résulte pas de l'instruction et n'est d'ailleurs pas allégué par le ministre qu'une nouvelle décision permettant au GAEC des Quatre Saisons de connaître le montant de référence de ses DPU lui aurait été notifiée. Par suite, c'est à bon droit que les premiers juges ont estimé que l'Etat n'avait pas exécuté le jugement n° 1502672 du 22 mars 2016.
6. Toutefois, dans les circonstances de l'espèce, compte tenu des diligences accomplies par l'administration en vue de procéder à l'exécution de la chose jugée dans les conditions rappelées au point 5, ainsi que des obstacles réglementaires et informatiques à l'établissement de nouvelles règles, conformes au cadre communautaire, permettant de calculer le montant de référence des DPU des agriculteurs ayant souscrit des engagements agroenvironnementaux entre 2000 et 2002, qui rendent impossible l'exécution du jugement du 22 mars 2016, il y a lieu de dire que l'astreinte due au GAEC des Quatre Saisons pour la période allant du 28 juin 2017 au 28 mai 2018 sera liquidée de manière définitive, et d'en fixer le montant à la somme de 13 000 euros.
7. Il résulte de ce qui précède que le ministre de l'agriculture et de l'alimentation est fondé à demander la réformation du jugement attaqué dans la mesure indiquée au point précédent et que les conclusions incidentes présentées par le GAEC des Quatre Saisons doivent être rejetées.
Sur les frais liés au litige :
8. Il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat la somme demandée par le GAEC des Quatre Saisons au titre des frais exposés et non compris dans les dépens.
DÉCIDE :
Article 1er : La somme de 25 000 euros que le tribunal administratif de Nantes a condamné l'Etat à verser au GAEC des Quatre Saisons est ramenée à 13 000 euros.
Article 2 : Le jugement n°1803394 du tribunal administratif de Nantes du 2 mai 2019 est réformé en ce qu'il a de contraire au présent arrêt.
Article 3 : Les conclusions présentées par la voie de l'appel incident par le GAEC des Quatre Saisons sont rejetées.
Article 4 : Le présent arrêt sera notifié au ministre de l'agriculture et de l'alimentation et au GAEC des Quatre Saisons.
Délibéré après l'audience du 17 septembre 2020, à laquelle siégeaient :
- Mme Perrot, président de chambre,
- Mme Brisson, président assesseur,
- M. C..., premier conseiller.
Lu en audience publique, le 2 octobre 2020.
Le rapporteur
E. C...Le président
I. PerrotLe greffier
R. Mageau
La République mande et ordonne au ministre de l'agriculture et de l'alimentation en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
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N° 19NT02563