Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. D... C... a demandé au tribunal administratif de Caen d'annuler l'arrêté du 8 juin 2017 par lequel le maire de Douvres-la-Délivrande a prononcé à son encontre une sanction d'exclusion temporaire de fonctions pour une durée de deux mois à compter du 10 juin 2017.
Par un jugement n° 1701146 du 30 novembre 2018, le tribunal administratif de Caen a rejeté sa demande.
Procédure devant la cour :
Par une requête et un mémoire enregistrés le 29 janvier et le 30 aout 2018, M. C..., représenté par Me E..., demande à la cour :
1°) d'annuler le jugement du 30 novembre 2018 du tribunal administratif de Caen ;
2°) d'annuler l'arrêté du 8 juin 2017 par lequel le maire de Douvres-la-Délivrande a prononcé à son encontre une sanction d'exclusion temporaire de fonctions pour une durée de deux mois à compter du 10 juin 2017 ;
3°) de mettre à la charge de la commune de Douvres-la-Délivrande le versement d'une somme de 3 000 euros sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
- la procédure disciplinaire est entachée d'irrégularité au regard des dispositions des articles 4 et 5 du décret n° 89-677 du 18 septembre 1989 dès lors qu'un des faits motivant la sanction, à savoir la récupération dans une déchetterie pendant ses heures de service d'une tour d'ordinateur, n'a pas été soumis au conseil de discipline et ne figurait pas dans son dossier individuel ;
- l'arrêté attaqué a été pris en méconnaissance de la règle non bis in idem ;
- les faits qui lui sont reprochés ne sont pas établis et la sanction est disproportionnée ;
- il fait l'objet d'un harcèlement de la part de l'administration communale.
Par un mémoire en défense, enregistré le 23 avril 2019, la commune de Douvres-la-Délivrande conclut au rejet de la requête et à la condamnation de M. C... à lui verser la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que les moyens soulevés par M. C... ne sont pas fondés.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 ;
- le décret n° 89-677 du 18 septembre 1989 ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. A...,
- les conclusions de M. Lemoine, rapporteur public,
- les observations de Me B..., substituant Me E..., représentant M. C....
Considérant ce qui suit :
1. M. C..., employé en qualité d'agent de police municipale par la commune de Douvres-la-Délivrande depuis le 15 septembre 2003, a fait l'objet, par un arrêté du 25 juillet 2016 du maire de la commune, d'une mesure de révocation prenant effet au 23 août 2016. Par un jugement du 2 mars 2017, le tribunal administratif de Caen a annulé cet arrêté et a ordonné au maire de le réintégrer dans ses fonctions. Par un nouvel arrêté du 8 juin 2017, le maire de Douvres-la-Délivrande a prononcé à l'encontre de l'intéressé une sanction d'exclusion temporaire de fonctions pour une durée de deux mois à compter du 10 juin 2017. Par sa requête, M. C... relève appel du jugement du tribunal administratif de Caen du 30 novembre 2018 ayant rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 8 juin 2017.
Sur le bien-fondé du jugement attaqué :
2. En premier lieu, aux termes de l'article 89 de la loi du 26 janvier 1984 susvisée : " (...) Le pouvoir disciplinaire appartient à l'autorité territoriale après avis de la commission administrative paritaire siégeant en conseil de discipline. Ce pouvoir est exercé dans les conditions prévues à l'article 19 du titre Ier du statut général (...) ". Aux termes de l'article 90 de la même loi : " (...) Le conseil de discipline est saisi par un rapport de l'autorité territoriale. Ce rapport précise les faits reprochés et les circonstances dans lesquelles ils ont été commis. / L'autorité territoriale et le fonctionnaire poursuivi peuvent faire entendre des témoins ". Aux termes de l'article 19 de la loi du 13 juillet 1983 susvisée : " Le pouvoir disciplinaire appartient à l'autorité investie du pouvoir de nomination. / Le fonctionnaire à l'encontre duquel une procédure disciplinaire est engagée a droit à la communication de l'intégralité de son dossier individuel et de tous les documents annexes et à l'assistance de défenseurs de son choix. L'administration doit informer le fonctionnaire de son droit à communication du dossier. Aucune sanction disciplinaire autre que celles classées dans le premier groupe par les dispositions statutaires relatives aux fonctions publiques de l'Etat, territoriale et hospitalière ne peut être prononcée sans consultation préalable d'un organisme siégeant en conseil de discipline dans lequel le personnel est représenté (...) ". Aux termes de l'article 4 du décret du 18 septembre 1989 susvisé relatif à la procédure disciplinaire applicable aux fonctionnaires territoriaux : " L'autorité investie du pouvoir disciplinaire informe par écrit l'intéressé de la procédure disciplinaire engagée contre lui, lui précise les faits qui lui sont reprochés et lui indique qu'il a le droit d'obtenir la communication intégrale de son dossier individuel au siège de l'autorité territoriale et la possibilité de se faire assister par un ou plusieurs conseils de son choix. / L'intéressé doit disposer d'un délai suffisant pour prendre connaissance de ce dossier et organiser sa défense. Les pièces du dossier et les documents annexés doivent être numérotés ". Enfin, aux termes de l'article 5 de ce décret : " Lorsqu'il y a lieu de saisir le conseil de discipline, le fonctionnaire poursuivi est invité à prendre connaissance, dans les mêmes conditions, du rapport mentionné au septième alinéa de l'article 90 de la loi du 26 janvier 1984 précitée et des pièces annexées à ce rapport ".
3. D'une part, dès lors que le tribunal administratif de Caen, dans son jugement du 2 mars 2017, n'a censuré aucune irrégularité dans la procédure préalable à l'intervention de la sanction de révocation et que l'exclusion temporaire de fonctions, décidée après cette annulation, est fondée sur les mêmes faits que ceux ayant servi de base à la révocation, la deuxième sanction infligée n'avait pas à être précédée d'une nouvelle procédure conforme aux dispositions précitées.
4. D'autre part, il ressort des pièces du dossier et, notamment, du rapport de saisine du conseil de discipline en date du 23 mai 2016, dont le requérant a pu prendre connaissance à la suite de la communication de son dossier disciplinaire le 30 mai 2016, que ce rapport fait état de ce que l'intéressé avait " également gravement manqué à son devoir de probité, lequel lui impose notamment de ne pas utiliser les moyens du service à des fins personnelles " et qu'" en février 2016, le maire de Douvres-la-Délivrande a été informé de ce qu'il avait utilisé son véhicule de service, pendant ses heures de service et en tenue de service, pour effectuer un déplacement à des fins personnelles à la déchetterie de Luc-sur-Mer ". Il était rappelé à l'intéressé " que ses missions s'exercent uniquement sur le territoire de la commune de Douvres-la-Délivrande, qu'aucune activité personnelle ne peut être exercée en tenue de service et que l'utilisation du véhicule de service est strictement réservée aux missions d'agent de police municipale ". En son annexe n° 7, le rapport de saisine du conseil de discipline comporte un courrier remis à M. C..., dont il a accusé réception contre signature le 18 février 2016, faisant suite à un entretien du 10 février 2016, rappelant les remarques " concernant un déplacement à la déchetterie de Luc sur Mer le samedi 6 février ". Il n'est pas contesté que c'est à l'occasion de ce déplacement qu'il est reproché à l'intéressé de s'être rendu à la déchetterie de la communauté de communes Coeur de Nacre pour y récupérer une tour d'ordinateur pour son usage personnel durant ses heures de service. En outre, le jugement du tribunal administratif de Caen sur lequel s'est appuyée l'autorité territoriale pour prononcer la sanction en cause fait expressément référence à ces faits. Dans ces conditions, M. C... ne pouvait ignorer les faits reprochés, qui étaient d'ailleurs également à l'origine de la sanction de révocation annulée, et le requérant a été mis en mesure de discuter utilement les faits ainsi retenus à son encontre. Par ailleurs, la circonstance que l'avis rendu par le conseil de discipline le 1er juillet 2016 ne fasse pas expressément référence à la tour d'ordinateur récupérée par M. C... mais évoque plus généralement une récupération de déchets n'est pas de nature à entacher d'irrégularité la procédure disciplinaire au regard des dispositions précitées.
5. Il ne ressort pas des pièces versées au dossier que les faits reprochés à M. C... et qui ont justifié la sanction disciplinaire en litige auraient déjà donné lieu à une sanction. Le courrier du 18 février 2016 adressé par la directrice générale des services à M. C..., s'il comporte des remarques sur sa manière de servir et sur ses obligations professionnelles, ne peut être regardé comme un avertissement au sens de l'article 89 de la loi du 26 janvier 1984 susvisée. Par suite, le moyen tiré de ce que l'arrêté attaqué aurait méconnu la règle du " non bis in idem " ne peut qu'être écarté.
6. Aux termes de l'article 89 de la loi du 26 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique territoriale : " Les sanctions disciplinaires sont réparties en quatre groupes : / Troisième groupe : la rétrogradation ; l'exclusion temporaire de fonctions pour une durée de seize jours à deux ans ; (...) ".
7. Il appartient au juge de l'excès de pouvoir, saisi de moyens en ce sens, de rechercher si les faits reprochés à un agent public ayant fait l'objet d'une sanction disciplinaire constituent des fautes de nature à justifier une sanction et si la sanction retenue est proportionnée à la gravité de ces fautes.
8. La mesure d'exclusion temporaire de fonctions pour une durée de deux mois en cause est fondée sur la circonstance que le requérant, " durant ses heures de service, s'est rendu à la déchetterie de la communauté de communes Coeur de Nacre pour y récupérer une tour d'ordinateur pour son usage personnel ", que " ces faits constituent un manquement de l'intéressé à ses devoirs de probité et d'intégrité " et que : " dans son jugement du 2 mars 2017, le tribunal administratif de Caen a reconnu la matérialité de ces faits et a considéré qu'ils étaient bien constitutifs d'une faute disciplinaire ".
9. En premier lieu, il ressort des pièces du dossier, notamment du courrier du 19 juillet 2016 du maire de Luc-sur-Mer ainsi que des attestations émanant de la directrice générale des services de la commune de Douvres-la-Délivrande et du maire-adjoint de Luc-sur-Mer en date des 26 et 30 août 2016, et il n'est pas sérieusement contesté que M. C... s'est rendu à la déchetterie le 6 février 2016 en uniforme de policier municipal, avec la voiture du service et durant ses heures de service afin d'y récupérer une tour d'ordinateur pour son usage personnel, ce que le règlement intérieur de la déchetterie interdit. Si le requérant fait valoir qu'il était amené à se rendre à la déchetterie dans le cadre de ses fonctions, il n'apporte aucun élément de nature à établir qu'il aurait effectué, le 6 février 2016, un déplacement dans cette déchetterie pour des raisons professionnelles. Ainsi, les faits reprochés, dont la matérialité est suffisamment établie par les pièces versées au dossier, sont constitutifs d'une faute disciplinaire de nature à justifier une sanction. Par suite, les moyens tirés de ce que les faits reprochés ne seraient pas établis ou seraient entachés d'une erreur de qualification juridique ne peuvent qu'être écartés.
10. En deuxième lieu, il ressort également des pièces du dossier que M. C... a déjà fait l'objet, le 18 septembre 2014, d'une sanction disciplinaire du deuxième groupe, à savoir une exclusion temporaire de fonctions de quinze jours, pour avoir, notamment, refusé d'obéir à des consignes données par sa hiérarchie, donné une image négative du service public et utilisé de façon abusive sa fonction en dehors du territoire communal. Eu égard à la nature des faits reprochés en l'espèce à M. C... et à la méconnaissance qu'ils traduisent, de sa part, de ses devoirs d'intégrité et de probité et des exigences particulières pesant sur les agents de la police municipale, l'autorité disciplinaire n'a pas, en l'espèce, pris une sanction disproportionnée en prononçant à son encontre une exclusion temporaire de fonctions pour une durée de deux mois.
11. En dernier lieu, les allégations de C... selon lesquelles il ferait l'objet d'un harcèlement depuis l'arrivée du nouveau maire en 2008 qui souhaite " s'en débarrasser ", ne reposent sur aucun élément susceptible de faire présumer l'existence, de la part de l'autorité territoriale, d'agissements constitutifs d'un harcèlement moral. Par suite, le moyen tiré par le requérant de ce qu'il aurait fait l'objet de tels agissements doit être écarté.
12. Il résulte de ce qui précède que M. C... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Caen a rejeté sa demande.
Sur les frais liés au litige :
13. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce qu'il soit mis à la charge de la commune de Douvres-la-Délivrande, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, la somme réclamée par M. C... au titre des frais liés au litige. Il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de M. C... la somme réclamée par la commune de Douvres-la-Délivrande au titre des mêmes frais.
DECIDE :
Article 1er : La requête de M. C... est rejetée.
Article 2 : Les conclusions de la commune de Douvres-la-Délivrande sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. D... C... et à la commune de Douvres-la-Délivrande.
Délibéré après l'audience du 11 septembre 2020, à laquelle siégeaient :
- M. Lenoir, président de chambre,
- M. Coiffet, président-assesseur,
- M. A..., premier conseiller.
Lu en audience publique, le 29 septembre 2020.
Le rapporteur,
F. A...Le président,
H. LENOIR
La greffière,
E. HAUBOIS
La République mande et ordonne au ministre de la cohésion des territoires et des relations avec les collectivités territoriales en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
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N° 19NT00465