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17/07/2020 | FRANCE | N°19NT02715

France | France, Cour administrative d'appel de Nantes, 6ème chambre, 17 juillet 2020, 19NT02715


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme D... B... a demandé au tribunal administratif de Nantes, d'une part, d'annuler l'arrêté du 13 juin 2019 par lequel la préfète d'Ille-et-Vilaine a décidé son transfert vers l'Espagne ainsi que son arrêté du même jour l'assignant à résidence, d'autre part, d'enjoindre à la préfète d'enregistrer sa demande d'asile et de lui remettre une attestation de demande d'asile dans un délai de quinze jours à compter de la notification du jugement, sous astreinte de 50 euros par jour de retard, et de lui res

tituer son passeport et tout document en possession de l'administration, enfin ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme D... B... a demandé au tribunal administratif de Nantes, d'une part, d'annuler l'arrêté du 13 juin 2019 par lequel la préfète d'Ille-et-Vilaine a décidé son transfert vers l'Espagne ainsi que son arrêté du même jour l'assignant à résidence, d'autre part, d'enjoindre à la préfète d'enregistrer sa demande d'asile et de lui remettre une attestation de demande d'asile dans un délai de quinze jours à compter de la notification du jugement, sous astreinte de 50 euros par jour de retard, et de lui restituer son passeport et tout document en possession de l'administration, enfin de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros en application des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 sur l'aide juridique.

Par un jugement n° 1903064 du 19 juin 2019, le magistrat désigné du tribunal administratif de Rennes a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête et un mémoire enregistrés les 10 juillet et 27 décembre 2019, Mme D... B... représentée par Me A..., demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du 19 juin 2019 ;

2°) d'annuler les arrêtés du 13 juin 2019 ;

3°) d'enjoindre à la préfète d'enregistrer sa demande d'asile et de lui remettre une attestation de demande d'asile dans un délai de quinze jours à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 50 euros par jour de retard, et de lui restituer son passeport et tout document en possession de l'administration ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat le versement à son conseil, qui renonce à percevoir la part contributive de l'Etat au titre de l'aide juridictionnelle, d'une somme de 1 500 euros sur le fondement des dispositions combinées des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991.

Elle soutient que :

- la décision de transfert aux autorités espagnoles est entachée d'une insuffisante motivation et d'un défaut d'examen de sa situation ;

- la décision est également entachée d'erreur manifeste d'appréciation au regard de l'article 17 du règlement n° 604/2013 du 26 juin 2013.

Par un mémoire en défense et un mémoire complémentaire, enregistrés les 20 novembre 2019 et 7 janvier 2020, le préfet de Maine-et-Loire conclut au rejet de la requête.

Il soutient qu'aucun des moyens soulevés par l'intéressée n'est fondé et informe la cour que Mme B... a, le 17 octobre 2019, été déclarée en fuite et que cette information a été portée à la connaissance des autorités espagnoles.

Mme B... a été admise au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 5 août 2019.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- la charte des droits fondamentaux de l'Union européenne ;

- le règlement (UE) n° 604/2013 du Parlement européen et du Conseil du 26 juin 2013 ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991, modifiée, relative à l'aide juridique ;

- le décret n° 91-1266 du 19 décembre 1991 modifié ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de M. C... a été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. Mme D... B..., ressortissante guinéenne née le 1er janvier 2000, est entrée irrégulièrement en France le 26 février 2019. Sa demande d'asile a été enregistrée le 21 mars 2019 auprès de la préfecture d'Ille-et-Vilaine. La consultation du fichier Eurodac a révélé que ses empreintes digitales avaient été relevées en Espagne. Consécutivement à leur saisine le 15 mai 2019 sur le fondement du 4 de l'article 12 du règlement (UE) n° 604/2013 du Parlement européen et du Conseil du 26 juin 2013, les autorités espagnoles ont le 21 mai 2019 accepté de reprendre en charge Mme B.... Par deux arrêtés du 13 juin 2019, la préfète d'Ille-et-Vilaine a décidé de la transférer à ces autorités et l'a assignée à résidence. Mme B... relève appel du jugement du 19 juin 2019 par lequel le magistrat désigné du tribunal administratif de Rennes a rejeté sa demande tendant à l'annulation des deux arrêtés du 13 juin 2019. Par un mémoire du 7 janvier 2020, la préfète d'Ille-et-Vilaine a informé la cour que Mme B... avait été déclarée en fuite.

Sur les conclusions dirigées contre l'arrêté de transfert :

2. En premier lieu, en vertu de l'article 17 du règlement du 26 juin 2013 : " 1. Par dérogation à l'article 3, paragraphe 1, chaque Etat membre peut décider d'examiner une demande de protection internationale qui lui est présentée par un ressortissant de pays tiers ou un apatride, même si cet examen ne lui incombe pas en vertu des critères fixés dans le présent règlement (...) 2. L'Etat membre dans lequel une demande de protection internationale est présentée et qui procède à la détermination de l'Etat membre responsable, ou l'Etat membre responsable, peut à tout moment, avant qu'une première décision soit prise sur le fond, demander à un autre Etat membre de prendre un demandeur en charge pour rapprocher tout parent pour des raisons humanitaires fondées, notamment, sur des motifs familiaux ou culturels, même si cet autre Etat membre n'est pas responsable au titre des critères définis aux articles 8 à 11 et 16. (...) ".

3. Pour soutenir que la décision ordonnant son transfert aux autorités espagnoles serait intervenue en violation de ces dispositions, Mme B... soutient qu'elle est atteinte du virus de l'immunodéficience humaine (VIH) et qu'elle a besoin d'un suivi régulier. Toutefois, il ne ressort pas davantage en appel qu'en première instance des pièces du dossier qu'elle ne pourrait pas être suivie médicalement en Espagne et y bénéficier des soins adéquats. Il ne ressort pas non plus de l'examen de ces pièces que l'état de santé de Mme B... serait incompatible avec son transfert en Espagne. Dans ces conditions, la requérante n'établit pas que son transfert aux autorités espagnoles l'exposerait, à raison de l'absence de continuation de soins appropriés, à un risque réel et avéré d'une détérioration significative et irrémédiable de son état de santé. Par suite, la préfète n'a pas entaché sa décision portant transfert d'une erreur manifeste d'appréciation de la situation personnelle de l'intéressée au regard des dispositions de l'article 17 du règlement (UE) n° 604/2013 du 26 juin 2013.

4. En second lieu, pour le surplus, Mme B... se borne à reprendre devant le juge d'appel les mêmes moyens que ceux invoqués en première instance sans plus de précisions ou de justifications et sans l'assortir d'éléments nouveaux. Il y a lieu d'écarter ces moyens par adoption des motifs retenus par le premier juge et tirés de ce que l'arrêté du 13 juin 2019 décidant son transfert n'est entaché ni d'une insuffisante motivation, ni d'un défaut d'examen de sa situation.

Sur les conclusions dirigées contre l'arrêté portant assignation à résidence :

5. Mme B... n'invoque aucun moyen dirigé contre la décision l'assignant à résidence. Par suite, ses conclusions tendant à l'annulation de cette décision ne peuvent qu'être rejetées.

6. Il résulte de ce qui précède que Mme B... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le magistrat désigné du tribunal administratif de Rennes a rejeté sa demande tendant à l'annulation des arrêtés du 13 juin 2019 décidant de son transfert aux autorités espagnoles et l'assignant à résidence. Par voie de conséquence doivent être rejetées les conclusions de la requérante aux fin d'injonction et celles tendant au bénéfice des dispositions des articles 37 de la loi du 10 juillet 1991 et L.761-1 du code de justice administrative.

DECIDE :

Article 1er : La requête de Mme B... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme D... B... et au ministre de l'intérieur. Une copie sera transmise à la préfète d'Ille-et-Vilaine.

Délibéré après l'audience du 6 juillet 2020 à laquelle siégeaient :

- M. Lenoir, président de chambre,

- M. C..., président-assesseur,

- Mme Gélard, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 17 juillet 2020.

Le rapporteur,

O. C...Le président,

H. LENOIR

La greffière

E. HAUBOIS

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

N° 19NT02715 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nantes
Formation : 6ème chambre
Numéro d'arrêt : 19NT02715
Date de la décision : 17/07/2020
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. LENOIR
Rapporteur ?: M. Olivier COIFFET
Rapporteur public ?: M. LEMOINE
Avocat(s) : MARAL

Origine de la décision
Date de l'import : 28/07/2020
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nantes;arret;2020-07-17;19nt02715 ?
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