Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. E... B... a demandé au tribunal administratif de Nantes d'annuler la décision née le 28 mars 2019 par laquelle la commission de recours contre les décisions de refus de visa d'entrée en France a rejeté son recours formé contre une décision des autorités consulaires françaises à Yaoundé (Cameroun) refusant de lui délivrer un visa de long séjour en France au titre du regroupement familial.
Par un jugement n° 1905532 du 7 novembre 2019, le tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande.
Procédure devant la cour :
Par une requête enregistrée le 27 décembre 2019, M. B..., représenté par Me F... , demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Nantes du 7 novembre 2019 ;
2°) d'annuler la décision de la commission de recours contre les refus de visa d'entrée en France née le 28 mars 2019 ;
3°) d'enjoindre à l'administration de lui délivrer le visa sollicité dans un délai d'un mois à compter de la notification du présent jugement, sous astreinte de 100 euros par jour de retard, ou à titre subsidiaire de réexaminer sa demande dans les mêmes conditions de délai et d'astreinte ;
4°) de condamner l'Etat à tous les dépens de l'instance.
Il soutient que :
- la décision des autorités consulaires est insuffisamment motivée ;
- en considérant que le lien de filiation n'était pas établi, l'administration a commis une erreur d'appréciation ;
- la décision attaquée méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et les articles 3 et 9 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant ;
- elle est contraire au principe d'unité de la famille, corollaire du droit constitutionnel et conventionnel d'asile et principe général du droit des réfugiés.
Par un mémoire en défense, enregistré le 19 février 2020, le ministre de l'intérieur conclut au rejet de la requête.
Il soutient que les moyens soulevés par M. B... ne sont pas fondés.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention internationale des droits de l'enfant ;
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- le code civil ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le rapport de M. A... a été entendu au cours de l'audience publique.
Considérant ce qui suit :
1. M. E... B..., ressortissant camerounais, relève appel du jugement du 7 novembre 2019 par lequel le tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision née le 28 mars 2019 par laquelle la commission de recours contre les décisions de refus de visa d'entrée en France a rejeté son recours formé contre une décision des autorités consulaires françaises à Yaoundé refusant de lui délivrer un visa de long séjour en France au titre du regroupement familial.
Sur les conclusions à fin d'annulation :
2. En premier lieu, aux termes de l'article D. 211-5 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Une commission placée auprès du ministre des affaires étrangères et du ministre chargé de l'immigration est chargée d'examiner les recours contre les décisions de refus de visa d'entrée en France prises par les autorités diplomatiques ou consulaires. La saisine de cette commission est un préalable obligatoire à l'exercice d'un recours contentieux, à peine d'irrecevabilité de ce dernier ". Il résulte de ces dispositions que la décision de la commission de recours contre les décisions de refus de visa d'entrée en France se substitue à celle qui a été prise par les autorités diplomatiques ou consulaires. Par suite, la décision implicite de la commission s'est substituée à celle des autorités consulaires françaises à Yaoundé du 26 novembre 2018. Dès lors, le moyen tiré du défaut de motivation de la décision consulaire doit être écarté.
3. En deuxième lieu, aux termes de l'article L. 411-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Le ressortissant étranger qui séjourne régulièrement en France depuis au moins dix-huit mois, (...), peut demander à bénéficier de son droit à être rejoint, au titre du regroupement familial, par (...) les enfants du couple mineurs de dix-huit ans ". Aux termes de l'article L. 111-6 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " (...) La vérification de tout acte d'état civil étranger est effectuée dans les conditions définies par l 'article 47 du code civil ". Aux termes de l'article 47 du code civil : " Tout acte de l'état civil des Français et des étrangers fait en pays étranger et rédigé dans les formes usitées dans ce pays fait foi, sauf si d'autres actes ou pièces détenus, des données extérieures ou des éléments tirés de l'acte lui-même établissent, le cas échéant après toutes vérifications utiles, que cet acte est irrégulier, falsifié ou que les faits qui y sont déclarés ne correspondent pas à la réalité ". Ce dernier article pose une présomption de validité des actes d'état civil établis par une autorité étrangère.
4. Lorsque la venue d'une personne en France a été autorisée au titre du regroupement familial, l'autorité consulaire n'est en droit de rejeter la demande de visa dont elle est saisie à cette fin que pour un motif d'ordre public. Figure notamment au nombre de ces motifs l'absence de caractère authentique des actes de filiation produits. La force probante des actes d'état-civil établis à l'étranger peut être combattue par tout moyen susceptible d'établir que celui-ci est irrégulier, falsifié ou inexact. En cas de contestation par l'administration de la valeur probante d'un acte d'état civil établi à l'étranger, il appartient au juge administratif de former sa conviction au vu de l'ensemble des éléments produits par les parties en se fondant sur tous les éléments versés au dossier dans le cadre de l'instruction du litige qui lui est soumis.
5. M. B... a produit en première instance, d'une part, une copie d'acte de naissance n° 211/2000 aux termes duquel sa naissance le 1er août 2000 aurait été déclarée le 3 août 2000 au centre d'état-civil de Sa'a, et d'autre part une attestation d'existence de souche du bureau d'état-civil de Sa'a, datée du 6 décembre 2018. Il ressort toutefois des pièces produites par le ministre de l'intérieur que les autorités consulaires françaises à Yaoundé ont procédé à une levée d'acte qui a révélé que l'acte de naissance n°211 de l'année 2000 figurant dans le registre des naissances du centre d'état-civil de Sa'a a été dressé le 8 novembre 2000 et correspond à une tierce personne née le 20 septembre 2000. Si M. B... soutient que cette incohérence découle d'une erreur du centre d'état-civil de Sa'a, la production du courrier du maire de Sa'a daté du 3 septembre 2014, adressé au consul général, qui se borne à affirmer que la souche de l'acte de naissance n° 211 de l'année 2000 correspond à M. B..., ne suffit pas à remettre en cause les constatations faites lors de la levée d'acte dont les résultats ont été versés au débat par le ministre. Par ailleurs, les 5 photographies non datées et non circonstanciées, les mandats de transferts d'argent datant de 2018 et 2019 des époux C... à Mme D..., soeur alléguée du requérant, leurs déclarations de revenus faisant apparaître, en déduction de charges, des pensions alimentaires versées à M. B..., ainsi qu'une réservation de billet d'avion entre Paris et Yaoundé postérieure à la date de la décision attaquée, ne sont pas, en l'absence de tout autre document ayant une valeur probante, de nature à démontrer la possession d'état. Par suite, la commission de recours contre les refus de visa d'entrée en France, en considérant que le lien de filiation entre le requérant et sa mère alléguée n'est pas établi, n'a pas fait une inexacte application des dispositions précitées.
6. En dernier lieu, le lien de filiation entre M. B... et Marie Thérèse Madeleine Nga épouse C... n'étant pas établi, les moyens tirés de ce que la décision contestée méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et des articles 3 et 9 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant ainsi que le principe d'unité de la famille ne peuvent qu'être écartés.
7. Il résulte de ce qui précède que M. B... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande.
Sur les conclusions à fin d'injonction, sous astreinte :
8. Le présent arrêt, qui rejette la requête de M. B..., n'appelle aucune mesure d'exécution. Par suite, les conclusions de l'intéressé tendant à ce qu'il soit enjoint, sous astreinte, au ministre de l'intérieur de de lui délivrer le visa sollicité ou de réexaminer sa demande, doivent être rejetées.
Sur les frais liés au litige :
9. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mis à la charge de l'Etat, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, le versement à M. B... de la somme qu'il demande au titre des frais exposés et non compris dans les dépens.
DECIDE
Article 1er : La requête de M. B... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. E... B... et au ministre de l'intérieur.
Délibéré après l'audience du 16 juin 2020 à laquelle siégeaient :
- M. Pérez, président de chambre,
- Mme Brisson, président-assesseur,
- M. A..., premier conseiller.
Lu en audience publique, le 3 juillet 2020.
Le rapporteur,
T. A...
Le président,
A. PEREZ
Le greffier,
K. BOURON
La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
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N° 19NT05016