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03/07/2020 | FRANCE | N°18NT03496

France | France, Cour administrative d'appel de Nantes, 3ème chambre, 03 juillet 2020, 18NT03496


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A... a demandé au tribunal administratif de Rennes de condamner l'Office national d'indemnisation des accidents médicaux, des affections iatrogènes et des infections nosocomiales (ONIAM) à lui verser la somme de 193 382 euros en réparation des préjudices subis du fait de sa prise en charge médicale par le centre hospitalier de Bretagne Atlantique, subsidiairement de mettre la moitié de cette somme à la charge de ce centre hospitalier.

Mme I... A..., son épouse, et ses quatre filles, P..., M...,

Sandra A... et Laura A..., ont parallèlement demandé au tribunal de condamner ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A... a demandé au tribunal administratif de Rennes de condamner l'Office national d'indemnisation des accidents médicaux, des affections iatrogènes et des infections nosocomiales (ONIAM) à lui verser la somme de 193 382 euros en réparation des préjudices subis du fait de sa prise en charge médicale par le centre hospitalier de Bretagne Atlantique, subsidiairement de mettre la moitié de cette somme à la charge de ce centre hospitalier.

Mme I... A..., son épouse, et ses quatre filles, P..., M..., Sandra A... et Laura A..., ont parallèlement demandé au tribunal de condamner l'ONIAM, ou à titre subsidiaire le centre hospitalier de Bretagne Atlantique, à les indemniser à hauteur de 10 000 euros pour Mme I... A..., et à hauteur de 2 250 euros chacune des filles, des préjudices nés des dommages subis par M. A..., leur époux ou père.

Par un jugement n°1505828, 1704548 du 10 juillet 2018, le tribunal administratif de Rennes, après avoir joint ces demandes, y a partiellement fait droit en condamnant l'ONIAM à verser à M. A... la somme de 148 825,04 euros, à Mme I... A... la somme de 6 000 euros et à chacune des filles de M. A... la somme de 2 000 euros.

Procédure devant la cour :

Par une requête sommaire et un mémoire complémentaire enregistrés les

17 septembre et 19 octobre 2018 l'Office national d'indemnisation des accidents médicaux des affections iatrogènes, représenté par Me K..., demande à la cour de réformer le jugement attaqué en ce qu'il a mis à sa charge l'indemnisation de Mme A... et des quatre filles de M. A....

Il soutient que :

- le jugement attaqué est irrégulier car sa motivation est insuffisante ;

- le fait générateur du dommage est l'accident médical consistant dans l'apparition d'une fistule après l'intervention, de sorte que l'indemnisation de la victime relève du II de l'article L. 1142-1 du code la santé publique ; le tribunal administratif a jugé à tort qu'il s'agissait d'une infection nosocomiale, alors qu'il s'agissait d'un aléa thérapeutique ;

- l'infection dont a été victime M. A... ne trouve pas son origine dans sa prise en charge médicale mais dans l'accident médical non fautif qui s'en est suivi ;

- s'agissant d'un accident médical non fautif, les demandes indemnitaires des victimes indirectes ne pouvaient être accueillies, la solidarité nationale ne prenant pas en charge l'indemnisation des préjudices des victimes indirectes en cas de survie de la victime principale.

Par un mémoire enregistré le 30 novembre 2018 la caisse locale déléguée pour la sécurité sociale des travailleurs indépendants, venant aux droits de la caisse du régime social des indépendants Auvergne, agissant pour le compte du RSI Bretagne, représentée par

Me E..., conclut à ce qu'en cas de succès de l'appel incident des consorts A... visant à obtenir la condamnation du centre hospitalier de Bretagne Atlantique, ce dernier soit condamné à lui rembourser, au titre des débours engagés pour le compte de M. A..., la somme totale de 81 482,23 euros ainsi qu'une indemnité forfaitaire de gestion de 1 066 euros, et que soit mise à sa charge la somme de 2 000 euros au titre de l'article L.761-1 du code de justice administrative.

Par un mémoire enregistré le 28 décembre 2018 M. L... A..., Mme I... A..., Mme O..., Mme M..., Mme H... A... et Mme F... A..., représentés par Me D..., concluent :

1°) au rejet de la requête ;

2°) par la voie de l'appel incident, à la réformation du jugement en ce qu'il n'a pas fait droit à la totalité de leurs conclusions indemnitaires ;

3°) à la condamnation de l'ONIAM à leur verser la somme totale de

167 145,04 euros ou, à titre subsidiaire, à ce que la réparation des préjudices subis soit prise en charge par moitié par l'office et par le centre hospitalier de Bretagne Atlantique en raison de la prise en charge tardive de la récidive de fistule ;

4°) à ce qu'une somme de 4 000 euros soit mise à la charge de tout succombant au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, de même que les entiers dépens, y compris les frais d'expertise.

Ils font valoir que :

- l'appel de l'ONIAM est irrecevable faute de comporter une critique du jugement attaqué ;

- le fondement de l'obligation de l'ONIAM retenu par le tribunal administratif pour les indemniser est correct ; la jurisprudence du Conseil d'Etat citée par l'ONIAM ne peut être appliquée en l'espèce, car l'infection subie par M. A... trouve son origine dans la prise en charge médicale dont il a fait l'objet et non pas son propre état de santé ;

- l'indemnisation du préjudice né des souffrances endurées doit être portée à 25 000 euros, compte tenu de son évaluation à 5/7 par l'expert, tenant compte du syndrome dépressif sévère nécessitant un suivi psychologique dont souffre M. A... ;

- l'indemnisation du préjudice lié à un déficit fonctionnel permanent doit être portée à 68 320 euros compte tenu de l'âge de M. A... et du taux d'IPP de 28% retenu par l'expert ;

- la prise en charge de la récidive de fistule par le centre hospitalier de Bretagne Atlantique a été tardive et est à l'origine d'une perte de chance d'éviter les complication en ayant résulté ; cette perte de chance doit être estimée à 50% ; la responsabilité fautive du centre hospitalier peut être engagée ; le centre hospitalier pourrait être condamné à prendre en charge à hauteur de 50% l'indemnisation qui a été accordée à M. A....

Par un mémoire enregistré le 23 janvier 2019 le centre hospitalier Bretagne Atlantique Vannes-Auray, représenté par Me G..., conclut au rejet des conclusions des consorts A... et de la caisse locale déléguée pour la sécurité sociale des travailleurs indépendants dirigées contre lui, et à ce qu'une somme de 2 000 euros soit mise à la charge des consorts A... au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il fait valoir qu'aucun des moyens invoqués à son encontre par les consorts A... et la caisse locale déléguée pour la sécurité sociale des travailleurs indépendants n'est fondé.

Par une ordonnance du 16 janvier 2020, la clôture d'instruction a été fixée à ce même jour.

Un mémoire présenté pour l'ONIAM a été enregistré le 16 janvier 2020, postérieurement à la clôture d'instruction.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de la santé publique ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. C...,

- les conclusions de M. Gauthier, rapporteur public,

- et les observations de Me N..., représentant le centre hospitalier de Bretagne Atlantique.

Considérant ce qui suit :

1. M. A..., qui souffrait d'obésité morbide, a subi le 16 décembre 2011 au centre hospitalier Bretagne Atlantique une opération de chirurgie bariatrique, sous la forme d'une sleeve gastrectomie (réduction de l'estomac), à l'issue de laquelle il a pu regagner son domicile le 19 décembre. Il a cependant été admis aux urgences de l'établissement le

21 décembre suivant pour un syndrome péritonéal avec état de choc. Les examens alors pratiqués ont révélé l'existence d'une fistule sur la ligne de suture haute du sleeve, nécessitant la pose de prothèses, qui furent progressivement retirées fin janvier et fin février 2012.

M. A... a ensuite fait l'objet d'un suivi ordinaire durant deux années. Le 7 novembre 2014 il a été contraint de s'adresser à nouveau aux urgences du centre hospitalier, où ont été diagnostiqués un abcès pulmonaire et une perforation cardiale avec fistule médiastinale.

M. A... a alors été orienté vers le CHU de Lille, centre référent pour la chirurgie bariatrique, où furent réalisés les soins et interventions rendus nécessaires par son état et, notamment, une gastrectomie totale.

2. M. A... a transmis au centre hospitalier Bretagne Atlantique le 11 mai 2015 une demande préalable d'indemnisation qui a fait l'objet d'une décision de refus le

3 novembre 2015. Un expert désigné à sa demande a remis son rapport le 24 novembre 2016. Par un jugement du 10 juillet 2018, le tribunal administratif de Rennes, saisi de conclusions indemnitaires par l'intéressé d'une part et par son épouse et ses enfants d'autre part, a mis à la charge de l'Office national d'indemnisation des accidents médicaux, des affections iatrogènes et des infections nosocomiales (ONIAM), sur le fondement de l'article L. 1142-1-1 du code de la santé publique, le versement à M. A... de la somme de 148 825,04 euros, à Mme A... de la somme de 6 000 euros et à chacune de leurs filles la somme de 2 000 euros. L'ONIAM relève appel de ce jugement. La caisse déléguée pour la sécurité sociale des travailleurs indépendants demande la réformation du jugement en ce qu'il n'a pas fait droit à sa demande de remboursement des débours engagés pour le compte de M. A.... Les consorts A... relèvent appel incident du jugement attaqué en ce que celui-ci a insuffisamment indemnisé certains de leurs préjudices.

Sur la régularité du jugement attaqué :

3. Les premiers juges ont expliqué de manière suffisamment précise, développée au point 6 de leur décision, en quoi l'infection dont a été victime M. A... présentait le caractère d'une infection nosocomiale, ce qui justifiait selon eux, en application de l'article L. 1142-1-1 du code de la santé publique, la prise en charge par l'ONIAM de la réparation des différents dommages en ayant résulté. Le jugement attaqué n'est pas, dans cette mesure, entaché d'une insuffisance de motivation.

Sur la recevabilité de la requête de l'ONIAM :

4. Contrairement à ce que soutiennent M. A... et autres, l'appel formé par l'ONIAM le 17 septembre 2018 n'est pas tardif, le jugement attaqué lui ayant été notifié le

17 juillet précédent. Contrairement à ce qui est également soutenu, la requête de l'ONIAM, qui critique expressément tant le fondement juridique de l'indemnisation réclamée que les indemnisations ensuite accordées par le tribunal à l'épouse ainsi qu'aux enfants de M. A..., n'est pas dépourvue d'un exposé des moyens. La fin de non-recevoir opposée par les consorts A... ne peut, par suite, qu'être rejetée.

Sur l'obligation de l'ONIAM :

5. Aux termes de l'article L. 1142-1 du code de la santé publique, issu de la loi du 4 mars 2002 : " I. - Hors le cas où leur responsabilité est encourue en raison d'un défaut d'un produit de santé, les professionnels de santé mentionnés à la quatrième partie du présent code, ainsi que tout établissement, service ou organisme dans lesquels sont réalisés des actes individuels de prévention, de diagnostic ou de soins ne sont responsables des conséquences dommageables d'actes de prévention, de diagnostic ou de soins qu'en cas de faute. II. Lorsque la responsabilité d'un professionnel, établissement, service ou organisme mentionné au I ou d'un producteur de produits n'est pas engagée, un accident médical, une affection iatrogène ou une infection nosocomiale ouvre droit à la réparation des préjudices du patient, et, en cas de décès, de ses ayants droit au titre de la solidarité nationale, lorsqu'ils sont directement imputables à des actes de prévention, de diagnostic ou de soins et qu'ils ont eu pour le patient des conséquences anormales au regard de son état de santé comme de l'évolution prévisible de celui-ci et présentent un caractère de gravité, fixé par décret, apprécié au regard de la perte de capacités fonctionnelles et des conséquences sur la vie privée et professionnelle mesurées en tenant notamment compte du taux d'atteinte permanente à l'intégrité physique ou psychique, de la durée de l'arrêt temporaire des activités professionnelles ou de celle du déficit fonctionnel temporaire. Ouvre droit à réparation au titre de la solidarité nationale un taux d'atteinte permanente à l'intégrité physique ou psychique supérieur à un pourcentage d'un barème spécifique fixé par décret ; ce pourcentage, au plus égal à 25%, est déterminé par ledit décret. ". Aux termes de l'article L. 1142-1-1 issu de la loi du 30 décembre 2002 : " Sans préjudice des dispositions du septième alinéa de l'article L. 1142-17, ouvrent droit à réparation au titre de la solidarité nationale : / 1° Les dommages résultant d'infections nosocomiales dans les établissements, services ou organismes mentionnés au premier alinéa du I de l'article L. 1142-1 correspondant à un taux d' atteinte permanente à l'intégrité physique ou psychique supérieur à 25 % déterminé par référence au barème mentionné au II du même article, ainsi que les décès provoqués par ces infections nosocomiales (...) "

6. La condition d'anormalité du dommage doit toujours être regardée comme remplie lorsque l'acte médical a entraîné des conséquences notablement plus graves que celles auxquelles le patient était exposé de manière suffisamment probable en l'absence de traitement. Lorsque les conséquences de l'acte médical ne sont pas notablement plus graves que celles auxquelles le patient était exposé par sa pathologie en l'absence de traitement, elles ne peuvent être regardées comme anormales sauf si, dans les conditions où l'acte a été accompli, la survenance du dommage présentait une probabilité faible.

7. Il résulte de l'instruction et il n'est d'ailleurs pas contesté que l'infection dont a été victime M. A... a pour origine l'apparition d'une fistule résultant d'un lâchage au niveau des sutures réalisées lors de l'opération de sleeve gastrectomie subie par l'intéressé. Il s'agit d'une complication connue de ce type d'opération, qui survient dans 3% des cas. Cette infection est sans lien avec les conditions d'asepsie dans lesquelles l'intervention chirurgicale et les soins post-opératoires ont été réalisés dans l'établissement hospitalier. Elle ne constitue donc pas une infection nosocomiale au sens des dispositions du 1° de l'article L. 1142-1-1 du code de la santé publique précédemment rappelées. C'est, par suite, à tort que le tribunal administratif a, sur le fondement de ces dispositions, indemnisé M. A... à raison des préjudices subis du fait de cette infection.

8. M. A... pouvait certes, du fait de l'anormalité des conséquences résultant pour lui de l'acte médical pratiqué sur lui, bénéficier d'une réparation de ses préjudices au titre de la solidarité nationale sur le fondement des dispositions rappelées ci-dessus du II de l'article L. 1142-1, mais ces dispositions font obstacle à l'indemnisation des ayants-droits en l'absence de décès de l'intéressé. C'est donc également à tort que le tribunal administratif a indemnisé l'épouse et les filles de M. A... des préjudices qu'elles avaient subis.

9. Il résulte de ce qui précède que l'ONIAM est fondé à demander la réformation du jugement attaqué en tant qu'il a accordé une indemnisation à l'épouse et aux enfants de M. A....

Sur l'appel incident des consorts A... :

En ce qui concerne la responsabilité du centre hospitalier Bretagne Atlantique :

10. Si les dispositions du II de l'article L. 1142-1 du code de la santé publique font obstacle à ce que l'ONIAM supporte au titre de la solidarité nationale la charge de réparations incombant aux personnes responsables d'un dommage en vertu du I du même article, elles n'excluent toute indemnisation par l'office que si le dommage est entièrement la conséquence directe d'un fait engageant leur responsabilité. Dans l'hypothèse où un accident médical non fautif est à l'origine de conséquences dommageables mais où une faute commise par une personne mentionnée au I de l'article L. 1142-1 a fait perdre à la victime une chance d'échapper à l'accident ou de se soustraire à ses conséquences, le préjudice en lien direct avec cette faute est la perte de chance d'éviter le dommage corporel advenu et non le dommage corporel lui-même, lequel demeure tout entier en lien direct avec l'accident non fautif. Par suite, un tel accident ouvre droit à réparation au titre de la solidarité nationale si ses conséquences remplissent les conditions posées au II de l'article L. 1142-1 et présentent notamment le caractère de gravité requis, l'indemnité due par l'ONIAM étant seulement réduite du montant de celle mise, le cas échéant, à la charge du responsable de la perte de chance, égale à une fraction du dommage corporel correspondant à l'ampleur de la chance perdue.

11. Si M. A... fait valoir que la prise en charge dont il a fait l'objet par le centre hospitalier de Bretagne Atlantique a été défaillante en ce qu'elle l'a conduit à subir plusieurs autres interventions chirurgicales, il ne résulte pas de l'instruction que la récidive du trajet fistuleux non symptomatique mise en évidence en novembre 2014 aurait dû être mise en évidence plus tôt, les examens fibroscopiques et radiologiques pratiqués en février 2012 ayant conclu à une évolution favorable de la fistule et à sa cicatrisation. Aucun élément du dossier ne permet d'établir que le centre hospitalier disposait, avant le mois de novembre 2014, d'éléments suffisamment probants lui permettant d'identifier la récidive de la fistule. Si M. A... s'est plaint de douleurs rétrosternales lors d'une consultation de suivi le

22 mai 2014, ces douleurs ont été efficacement combattues par le traitement anti-reflux gastroesophagien alors administré à l'intéressé. Si le compte rendu de sa prise en charge lors de son admission aux urgences le 20 novembre 2014 indique que l'intéressé se plaignait depuis deux mois de cervicalgies, d'une odeur nauséabonde dans la bouche et d'un état

sub-fébrile avec toux, il ne résulte pas de l'instruction et il n'est pas soutenu que M. A... en aurait informé plus tôt le centre hospitalier ou aurait cherché à consulter. La perte de chance de se soustraire à des complications ultérieures alléguée par M. A... ne peut ainsi, eu égard à ce qui précède, être regardée comme établie.

12. Il résulte de ce qui précède que les consorts A... ne sont pas fondés à demander la réformation du jugement attaqué en ce qu'il n'aurait pas retenu, outre l'obligation de l'ONIAM au titre de la solidarité nationale, la responsabilité du centre hospitalier Bretagne Atlantique en vue de leur assurer, le cas échéant, une indemnisation complémentaire.

En ce qui concerne les préjudices de M. A... :

13. Il résulte de l'instruction, en particulier du rapport de l'expert judiciaire, que les souffrances endurées par M. A... ont été classées à 5 sur une échelle de 1 à 7, ce qui correspond à des souffrances assez importantes. En fixant à 15 000 euros l'indemnisation de ce chef de préjudice, le tribunal administratif en a fait une exacte estimation, qu'il y a par suite lieu de confirmer.

14. Le déficit fonctionnel permanent de M. A... a été fixé par l'expert à 28%. Compte tenu de l'âge de M. A..., 43 ans, à la date de consolidation retenue, fixée au

8 septembre 2015, le tribunal administratif, en indemnisant à hauteur de 60 000 euros ce chef particulier de préjudice, en a fait une exacte estimation, qu'il y a également lieu de confirmer.

Sur les conclusions de la caisse déléguée pour la sécurité sociale des travailleurs indépendants :

15. Aux termes des deux premiers alinéas de l'article L. 376-1 du code de la sécurité sociale : " Lorsque, sans entrer dans les cas régis par les dispositions législatives applicables aux accidents du travail, la lésion dont l'assuré social ou son ayant droit est atteint est imputable à un tiers, l'assuré ou ses ayants droit conserve contre l'auteur de l'accident le droit de demander la réparation du préjudice causé, conformément aux règles du droit commun, dans la mesure où ce préjudice n'est pas réparé par application du présent livre. / Les caisses de sécurité sociale sont tenues de servir à l'assuré ou à ses ayants droit les prestations prévues par le présent livre, sauf recours de leur part contre l'auteur responsable de l'accident dans les conditions ci-après " ;

16. Il résulte des dispositions précitées de l'article L. 376-1 du code de la sécurité sociale que le recours de la caisse de sécurité sociale, subrogée dans les droits de la victime d'un dommage corporel, s'exerce contre les auteurs responsables de l'accident. Si, en l'espèce, l'ONIAM est tenu d'indemniser au titre de la solidarité nationale M. A..., il ne peut être regardé comme le responsable des dommages dont il assure la réparation. Il suit de là que la caisse qui a versé des prestations à la victime d'un accident médical ne peut exercer un recours subrogatoire contre l'ONIAM. Par ailleurs, dès lors qu'en l'espèce la responsabilité du centre hospitalier Bretagne Atlantique n'est pas retenue, les conclusions présentées par elle à titre subsidiaire dans l'hypothèse où il aurait été fait droit aux conclusions des consorts A... dirigées contre l'établissement hospitalier ne peuvent qu'être rejetées.

Sur les frais liés au litige :

17. Il y a lieu de mettre définitivement à la charge de l'ONIAM les frais d'expertise taxés et liquidés à la somme de 2 091,76 euros.

18. Dans les circonstances de l'espèce, il n'y a pas lieu de faire application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

D E C I D E :

Article 1er : Le jugement n°1505828 du tribunal administratif de Rennes du 10 juillet 2018 est annulé en tant qu'il a condamné l'ONIAM à indemniser Mme I... A... et Mmes J... O..., B... M..., H... A... et F... A....

Article 2 : Le surplus des conclusions de la requête de l'ONIAM ainsi que les conclusions présentées devant la cour par les consorts A... et par la caisse déléguée pour la sécurité sociale des travailleurs indépendants sont rejetés.

Article 3 : Les frais d'expertise taxés et liquidés par l'ordonnance du 9 décembre 2016 du président de la cour administrative d'appel de Nantes à la somme de 2 091,76 euros sont mis à la charge définitive de l'ONIAM.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à l'Office national d'indemnisation des accidents médicaux des affections iatrogènes, à M. L... A..., à Mme I... A..., à Mme J... O..., à Mme B... M..., à Mme H... A..., à Mme F... A..., à la caisse locale déléguée pour la sécurité sociale des travailleurs indépendants, à la société Les Mutuelles du Mans Assurances et au centre hospitalier Bretagne Atlantique Vannes-Auray.

Délibéré après l'audience du 18 juin 2020, à laquelle siégeaient :

- Mme Perrot, président,

- M. C..., premier conseiller,

- M. Berthon, premier conseiller.

Lu en audience publique le 3 juillet 2020.

Le rapporteur

A. C...

Le président

I. Perrot Le greffier

R. Mageau

La République mande et ordonne au ministre des solidarités et de la santé en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

N°18NT03496 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nantes
Formation : 3ème chambre
Numéro d'arrêt : 18NT03496
Date de la décision : 03/07/2020
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : Mme PERROT
Rapporteur ?: M. Arnaud MONY
Rapporteur public ?: M. GAUTHIER
Avocat(s) : BJMR AVOCATS

Origine de la décision
Date de l'import : 28/07/2020
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nantes;arret;2020-07-03;18nt03496 ?
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