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13/03/2020 | FRANCE | N°19NT02240

France | France, Cour administrative d'appel de Nantes, 3ème chambre, 13 mars 2020, 19NT02240


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B... A... a demandé au tribunal administratif de Rennes d'annuler l'arrêté du 28 novembre 2017 par lequel le préfet des Côtes d'Armor a refusé de renouveler son titre de séjour.

Par un jugement n° 1803284 du 6 mai 2019, le tribunal administratif de Rennes a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête et un mémoire enregistrés les 12 juin 2019 et 28 janvier 2020 M. A..., représenté par Me D..., demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal

administratif de Rennes du 6 mai 2019 ;

2°) d'annuler l'arrêté du préfet des Côtes d'Armor du 28 nove...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B... A... a demandé au tribunal administratif de Rennes d'annuler l'arrêté du 28 novembre 2017 par lequel le préfet des Côtes d'Armor a refusé de renouveler son titre de séjour.

Par un jugement n° 1803284 du 6 mai 2019, le tribunal administratif de Rennes a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête et un mémoire enregistrés les 12 juin 2019 et 28 janvier 2020 M. A..., représenté par Me D..., demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Rennes du 6 mai 2019 ;

2°) d'annuler l'arrêté du préfet des Côtes d'Armor du 28 novembre 2017 ;

3°) d'enjoindre au préfet des Côtes d'Armor de lui délivrer un titre de séjour portant la mention " vie privée et familiale " dans un délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat, au titre de l'article L.761-1 du code de justice administrative, la somme de 1 800 euros à verser à son conseil dans les conditions fixées à l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 et à l'article 108 du décret du 19 décembre 1991.

Il soutient que :

- le préfet des Côtes d'Armor n'établit pas que le médecin qui a rédigé le rapport sur son état de santé n'a pas siégé au sein du collège de médecins du service médical de l'Office français de l'immigration et de l'intégration (OFII) qui a émis l'avis sur lequel il s'est fondé et que cet avis a été rendu dans le délai de trois mois prévu par l'article R. 313-23 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- c'est à tort que le préfet des Côtes d'Armor s'est cru lié par l'avis du collège de médecins du service médical de l'OFII ;

- l'arrêté litigieux a méconnu les dispositions du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dès lors que son état de santé nécessite des soins qui ne peuvent lui être dispensés en Irak.

La requête a été communiquée au préfet des Côtes d'Armor qui n'a pas produit de mémoire en défense.

M. A... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 6 août 2019.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le décret n°91-1266 du 19 décembre 1991 ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de M. C... a été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. M. A..., ressortissant irakien né le 1er janvier 1993, est entré en France le

16 novembre 2010. Sa demande d'asile a été rejetée par une décision du directeur de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides du 29 décembre 2011, confirmée le 13 juillet 2012 par la Cour nationale du droit d'asile. Il a été autorisé à séjourner en France entre le

31 mars 2014 et le 7 septembre 2017 en raison de son état de santé. Par une décision du

28 novembre 2017, le préfet des Côtes d'Armor a refusé de renouveler son titre de séjour. M. A... relève appel du jugement du 6 mai 2019 par lequel le tribunal administratif de Rennes a rejeté son recours tendant à l'annulation de cette décision.

2. Aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dans sa rédaction applicable : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention "vie privée et familiale" est délivrée de plein droit : (...) 11° A l'étranger résidant habituellement en France, si son état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait avoir pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité et si, eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé dans le pays dont il est originaire, il ne pourrait pas y bénéficier effectivement d'un traitement approprié. (...) La décision de délivrer la carte de séjour est prise par l'autorité administrative après avis d'un collège de médecins du service médical de l'Office français de l'immigration et de l'intégration, dans des conditions définies par décret en Conseil d'Etat. ". Aux termes de l'article R. 313-22 du même code : " Pour l'application du 11° de l'article L. 313-11, le préfet délivre la carte de séjour au vu d'un avis émis par un collège de médecins à compétence nationale de l'Office français de l'immigration et de l'intégration. / L'avis est émis dans les conditions fixées par arrêté du ministre chargé de l'immigration et du ministre chargé de la santé au vu, d'une part, d'un rapport médical établi par un médecin de l'Office français de l'immigration et de l'intégration et, d'autre part, des informations disponibles sur les possibilités de bénéficier effectivement d'un traitement approprié dans le pays d'origine de l'intéressé. (...) ". Aux termes de l'article R. 313-23 du même code : " Le rapport médical visé à l'article R. 313-22 est établi par un médecin de l'Office français de l'immigration et de l'intégration à partir d'un certificat médical établi par le médecin qui le suit habituellement ou par un médecin praticien hospitalier inscrits au tableau de l'ordre, dans les conditions prévues par l'arrêté mentionné au deuxième alinéa de l'article R. 313-22. (...) / Le collège à compétence nationale, composé de trois médecins, émet un avis dans les conditions de l'arrêté mentionné au premier alinéa du présent article. La composition du collège et, le cas échéant, de ses formations est fixée par décision du directeur général de l'office. Le médecin ayant établi le rapport médical ne siège pas au sein du collège (...) / L'avis est rendu par le collège dans un délai de trois mois à compter de la transmission par le demandeur des éléments médicaux conformément à la première phrase du premier alinéa. ".

3. Il appartient au préfet, lorsqu'il statue sur une demande de carte de séjour présentée sur le fondement des dispositions précitées, de s'assurer que l'avis a été rendu par le collège de médecins conformément aux règles procédurales fixées par ces textes. Il doit notamment vérifier qu'il a été rendu par un collège de médecins tel que prévu par l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et que le médecin qui a établi le rapport au vu duquel le collège de médecins a émis son avis n'a pas siégé en son sein. En cas de contestation devant le juge administratif portant sur ce point, il appartient à l'autorité administrative d'apporter les éléments qui permettent l'identification du médecin auteur du rapport et, par suite, le contrôle de la régularité de la composition du collège de médecins.

4. Le préfet des Côtes d'Armor a pris l'arrêté contesté en se fondant sur un avis du collège de médecins du service médical de l'Office français de l'immigration et de l'intégration (OFII) du 2 août 2017 selon lequel l'état de santé de M. A... nécessite une prise en charge médicale dont le défaut ne devrait pas avoir des conséquences d'une exceptionnelle gravité et qu'il est en état de voyager vers son pays d'origine. En dépit de la demande qui lui a été adressée par le rapporteur chargé de l'instruction du dossier, le préfet n'a produit aucun élément permettant d'identifier le médecin qui a rédigé le rapport médical au vu duquel le collège de médecins de l'OFII a émis cet avis. Dès lors, il n'est pas établi que le collège se serait réuni dans des conditions régulières. M. A... est par suite fondé à soutenir que la décision contestée a été prise à la suite d'une procédure irrégulière.

5. Il résulte de ce qui précède, sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens de sa requête, que M. A... est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Rennes a rejeté sa demande.

Sur les conclusions à fin d'injonction :

6. Eu égard au motif d'annulation retenu, et après avoir vérifié qu'aucun autre moyen opérant et fondé n'était susceptible d'être accueilli et d'avoir une influence sur la portée de l'injonction à prononcer, le présent arrêt implique seulement que le préfet des Côtes d'Armor réexamine la demande de titre de séjour présentée par M. A... et lui délivre un récépissé de demande de carte de séjour. Il y a lieu d'adresser au préfet des Côtes d'Armor une injonction en ce sens et de fixer à deux mois le délai imparti pour son exécution.

Sur les frais de l'instance :

7. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 000 euros à verser au conseil de M. A... dans les conditions fixées à l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 et à l'article 108 du décret du 19 décembre 1991.

DÉCIDE :

Article 1er : Le jugement n° 1803284 du tribunal administratif de Rennes du 6 mai 2019 et l'arrêté du préfet des Côtes d'Armor du 28 novembre 2017 sont annulés.

Article 2 : Il est enjoint au préfet des Côtes d'Armor de réexaminer la demande de titre de séjour présentée par M. A... dans le délai de deux mois à compter de la notification du présent arrêt et de lui délivrer dans l'attente un récépissé de demande de carte de séjour.

Article 3 : L'Etat versera au conseil de M. A... la somme de 1 000 euros dans les conditions fixées à l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 et à l'article 108 du décret du 19 décembre 1991.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... A... et au ministre de l'intérieur.

Copie sera adressée au préfet des Côtes d'Armor.

Délibéré après l'audience du 20 février 2020, à laquelle siégeaient :

- Mme Perrot, président de chambre

- Mme E..., présidente-assesseure,

- M. C..., premier conseiller.

Lu en audience publique, le 13 mars 2020.

Le rapporteur

E. C...Le président

I. PerrotLe greffier

R. Mageau

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

4

N° 19NT02240


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nantes
Formation : 3ème chambre
Numéro d'arrêt : 19NT02240
Date de la décision : 13/03/2020
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : Mme PERROT
Rapporteur ?: M. Eric BERTHON
Rapporteur public ?: M. GAUTHIER
Avocat(s) : LE BIHAN

Origine de la décision
Date de l'import : 18/04/2020
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nantes;arret;2020-03-13;19nt02240 ?
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