La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

12/03/2020 | FRANCE | N°20NT00547

France | France, Cour administrative d'appel de Nantes, Juge unique, 12 mars 2020, 20NT00547


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme F... A... épouse B... a demandé au tribunal administratif de Nantes d'annuler la décision du 30 juin 2017 par laquelle le ministre de l'intérieur a ajourné à deux ans sa demande de naturalisation.

Par un jugement n° 1708840 du 3 avril 2019, le tribunal administratif de Nantes a annulé la décision du ministre de l'intérieur du 30 juin 2017, a enjoint au ministre de l'intérieur de réexaminer la demande de naturalisation de Mme A... épouse B... dans un délai de deux mois à compter de la noti

fication du jugement et a mis à la charge de l'Etat une somme de 800 euros au bénéf...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme F... A... épouse B... a demandé au tribunal administratif de Nantes d'annuler la décision du 30 juin 2017 par laquelle le ministre de l'intérieur a ajourné à deux ans sa demande de naturalisation.

Par un jugement n° 1708840 du 3 avril 2019, le tribunal administratif de Nantes a annulé la décision du ministre de l'intérieur du 30 juin 2017, a enjoint au ministre de l'intérieur de réexaminer la demande de naturalisation de Mme A... épouse B... dans un délai de deux mois à compter de la notification du jugement et a mis à la charge de l'Etat une somme de 800 euros au bénéfice de Mme A... épouse B... en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Procédure devant la cour :

Par une requête et un mémoire, enregistrés les 17 février et 6 mars 2020, le ministre de l'intérieur demande à la cour de prononcer le sursis à exécution du jugement du tribunal administratif de Nantes du 3 avril 2019.

Il soutient que :

- le moyen tiré de la matérialité des faits retenus par le ministre de l'intérieur pour ajourner à 2 ans la demande de naturalisation est sérieux et que les moyens soulevés par la requérante ne sont pas fondés.

Par un mémoire en défense, enregistré le 1er mars 2020, Mme F... A... épouse B..., représentée par Me E..., conclut au rejet de la requête et ce que soit mis à la charge de l'Etat la somme de 1 200 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.

Elle soutient que :

- le moyen soulevé par le ministre de l'intérieur n'est pas fondé ;

- la décision du ministre est insuffisamment motivée ;

- elle est entachée d'un défaut d'examen particulier de sa situation ;

- en estimant que son comportement est sujet à critiques, le ministre de l'intérieur a commis une erreur de droit et une erreur manifeste d'appréciation.

Vu :

- les autres pièces du dossier ;

- la requête n° 19NT01942, enregistrée au greffe de la cour le 22 mai 2019, par laquelle le ministre de l'intérieur a demandé l'annulation du même jugement.

Vu :

- le code civil ;

- le décret n° 93-1362 du 30 décembre 1993.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. D...,

- et les observations de Mme C..., représentant le ministre de l'intérieur.

Considérant ce qui suit :

1.Mme A... épouse B... a déposé le 10 mars 2020 une demande d'aide juridictionnelle. Compte tenu de la nature du recours, il y a lieu de se prononcer sur cette demande à titre provisoire en application des dispositions de l'article 20 de la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique aux termes desquelles : " Dans les cas d'urgence, sous réserve de l'application des règles relatives aux commissions ou désignations d'office, l'admission provisoire à l'aide juridictionnelle peut être prononcée soit par le président du bureau ou de la section compétente du bureau d'aide juridictionnelle, soit par la juridiction compétente ou son président. ", de l'article 62 du décret n° 91-1266 du 19 décembre 1991 qui dispose " L'admission provisoire peut être prononcée d'office si l'intéressé a formé une demande d'aide juridictionnelle sur laquelle il n'a pas encore été définitivement statué. " et de l'article 63 du même décret aux termes desquels " La décision statuant sur la demande d'admission provisoire est sans recours. ". En l'espèce, il y a lieu de faire application des dispositions précitées et d'admettre provisoirement Mme A... épouse B... au bénéfice de l'aide juridictionnelle.

2. Aux termes de l'article R. 811-15 du code de justice administrative : " Lorsqu'il est fait appel d'un jugement de tribunal administratif prononçant l'annulation d'une décision administrative, la juridiction d'appel peut, à la demande de l'appelant, ordonner qu'il soit sursis à l'exécution de ce jugement si les moyens invoqués par l'appelant paraissent, en l'état de l'instruction, sérieux et de nature à justifier, outre l'annulation ou la réformation du jugement attaqué, le rejet des conclusions à fin d'annulation accueillies par ce jugement ". Aux termes de l'article R. 222-25 du même code : " Les affaires sont jugées soit par une chambre siégeant en formation de jugement, soit par une formation de chambres réunies, soit par la cour administrative d'appel en formation plénière, qui délibèrent en nombre impair. / Par dérogation à l'alinéa précédent, le président de la cour ou le président de chambre statue en audience publique sur les demandes de sursis à exécution mentionnées aux articles R. 811-15 à R. 811-17. ".

3. Aux termes de l'article 21-15 du code civil : " L'acquisition de la nationalité française par décision de l'autorité publique résulte d'une naturalisation accordée par décret à la demande de l'étranger. ". Aux termes de l'article 48 du décret susvisé du 30 décembre 1993 : " Si le ministre chargé des naturalisations estime qu'il n'y a pas lieu d'accorder la naturalisation ou la réintégration sollicitée, il prononce le rejet de la demande. Il peut également en prononcer l'ajournement en imposant un délai ou des conditions. (...) ". En vertu de ces dispositions, il appartient au ministre, chargé des naturalisations, de porter une appréciation sur l'intérêt d'accorder la naturalisation à l'étranger qui la sollicite. Dans le cadre de cet examen d'opportunité, il peut légalement prendre en compte les renseignements défavorables recueillis sur le comportement du postulant.

4. Il ressort des énonciations mêmes de la décision attaquée, en date du 30 juin 2017, que le ministre de l'intérieur a ajourné à deux ans, à compter du 9 janvier 2017, la demande de naturalisation de Mme A... épouse B... au motif qu'elle avait fait l'objet d'une procédure pour délit de fuite après un accident par conducteur de véhicule terrestre à moteur, le 11 juillet 2014, à Lyon. La plainte déposée contre la requérante pour délit de fuite a fait l'objet d'un avis de classement par le procureur de la République, le 29 mai 2015, selon les termes suivants : " L'examen de cette procédure ne justifie pas de poursuite pénale au motif que la régularisation de la situation est intervenue à la demande du parquet ".

5. Le moyen énoncé dans la requête, tiré de ce que c'est à tort que le tribunal administratif a estimé que la matérialité des faits retenus par le ministre de l'intérieur pour ajourner à deux ans la demande de naturalisation de l'intéressée n'est pas établie, paraît, en l'état de l'instruction, sérieux et de nature à justifier, outre l'annulation du jugement attaqué, le rejet des conclusions à fin d'annulation accueillies par ce jugement.

6. En conséquence, il y a lieu de faire droit à la requête du ministre de l'intérieur tendant à ce qu'il soit sursis à l'exécution du jugement du tribunal administratif de Nantes du 3 avril 2019. Par suite, les conclusions présentées par Mme A... épouse B... au titre des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 ne peuvent qu'être rejetées.

DÉCIDE :

Article 1er : Mme A... épouse B... est admise, à titre provisoire, au bénéfice de l'aide juridictionnelle.

Article 2 : Jusqu'à ce qu'il ait été statué sur le fond de l'instance n° 19NT01942, il sera sursis à l'exécution du jugement du 3 avril 2019 du tribunal administratif de Nantes.

Article 3 : Les conclusions de Mme A... épouse B... tendant à l'application des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 sont rejetées.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié au ministre de l'intérieur et à Mme F... A... épouse B....

Lu en audience publique, le 12 mars 2020.

Le président-rapporteur,

T. D...Le greffier,

C. GOY

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

2

N° 20NT00547


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nantes
Formation : Juge unique
Numéro d'arrêt : 20NT00547
Date de la décision : 12/03/2020
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Suspension sursis

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: M. Thibaut CELERIER
Avocat(s) : VIBOUREL

Origine de la décision
Date de l'import : 18/04/2020
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nantes;arret;2020-03-12;20nt00547 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award