Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
le code de l'urbanisme ;
le code de justice administrative ;
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
le rapport de M. A...'hirondel,
et les conclusions de M. Derlange, rapporteur public.
1. La SARL Hervé Promotion et la SARL SOFISAL ont déposé le 23 mars 2017, en mairie de Courseulles-sur-Mer, une demande de certificat d'urbanisme afin de savoir, sur le fondement du b) de l'article L. 410-1 du code de l'urbanisme, si une opération consistant en la construction de deux immeubles à usage d'habitation comportant, au total, vingt-six logements était réalisable sur la parcelle cadastrée section AD n° 398, située rue du 8 mai à Courseulles-sur-Mer. Le maire de Courseulles-sur-Mer leur a délivré, le 12 mai 2017, un certificat d'urbanisme opérationnel négatif. La SARL Hervé Promotion et la SARL SOFISAL relèvent appel du jugement du tribunal administratif de Caen du 17 mai 2018 rejetant leur demande tendant à l'annulation de cette décision.
Sur la régularité du jugement attaqué :
2. Aux termes de l'article L. 9 du code de justice administrative : " Les jugements sont motivés ".
3. Les premiers juges, au point 3 de leur jugement, ont précisé les considérations de droit et de fait sur lesquelles le maire de Courseulles-sur-Mer s'est fondé pour prendre sa décision, à savoir, d'une part, l'article R. 111-2 du code de l'urbanisme et, d'autre part, le motif tiré de ce que le terrain d'assiette du projet était soumis à des risques de submersion marine d'aléas moyen à très fort et qu'il pouvait être submersible lors d'une marée de référence ou en cas d'épisode de crues, de sorte qu'il existait un risque pour les biens et les personnes. Dans ces conditions, si le tribunal administratif a écarté le moyen tiré de l'insuffisante motivation de la décision contestée en énonçant au point 5 qu'il " est suffisamment motivé en droit et en fait ", il a entendu, par cette incise, tirer les conséquences de ce qu'il avait préalablement énoncé au point 3. En retenant une telle motivation pour écarter le moyen tiré de l'insuffisante motivation de la décision contestée, le tribunal n'a pas méconnu les dispositions précitées de l'article L. 9 du code de justice administrative.
Sur les conclusions à fin d'annulation :
En ce qui concerne la légalité externe :
4. Aux termes de l'article R. 410-14 du code de l'urbanisme : " Dans les cas prévus au b de l'article L. 410-1, lorsque la décision indique que le terrain ne peut être utilisé pour la réalisation de l'opération mentionnée dans la demande, ou lorsqu'elle est assortie de prescriptions, elle doit être motivée. "
5. Il ressort de la décision contestée que pour déclarer le projet de construction non réalisable, le maire de Courseulles-sur-Mer s'est fondé, en droit, sur les dispositions de l'article R. 111-2 du code de l'urbanisme et a pris en compte, pour l'application de ces dispositions afin de lui permettre d'apprécier l'atteinte à la sécurité publique, l'arrêté préfectoral du 4 avril 2016 prescrivant l'élaboration d'un plan de prévention des risques littoraux du Bessin et portant à la connaissance des maires des cartes d'aléa de submersion marine qu'il vise dans sa décision. Par ailleurs, il s'est fondé, en fait, sur le motif tiré de ce que le terrain d'assiette du projet était soumis à des risques de submersion marine d'aléas moyen à très fort et pouvait être submersible lors d'une marée de référence ou en cas d'épisode de crues présentant ainsi un risque pour les biens et les personnes et que le projet, en prévoyant la construction de 26 logements dans une zone non urbanisée, augmente fortement les enjeux liés aux submersions marines dans ce secteur et par conséquent génère un risque incompatible avec le maintien de la sécurité de ses occupants. Par suite, et alors que la motivation de la décision ne dépend pas du bien-fondé de ses motifs, la décision contestée est suffisamment motivée au regard des dispositions de l'article R. 410-14 du code de l'urbanisme.
En ce qui concerne la légalité interne :
6. Aux termes de l'article R. 111-2 du code de l'urbanisme : " Le projet peut être refusé ou n'être accepté que sous réserve de l'observation de prescriptions spéciales s'il est de nature à porter atteinte à la salubrité ou à la sécurité publique du fait de sa situation, de ses caractéristiques, de son importance ou de son implantation à proximité d'autres installations ". Il appartient à l'autorité d'urbanisme compétente et au juge de l'excès de pouvoir, pour apprécier si les risques d'atteinte à la salubrité ou à la sécurité publique justifient un refus de permis de construire sur le fondement de ces dispositions, de tenir compte tant de la probabilité de réalisation de ces risques que de la gravité de leurs conséquences, s'ils se réalisent. Pour l'application de cet article en matière de risque de submersion marine, il appartient à l'autorité administrative d'apprécier, en l'état des données scientifiques disponibles, ce risque de submersion en prenant en compte notamment la situation de la zone du projet au regard du niveau de la mer, sa situation à l'arrière d'un ouvrage de défense contre la mer, le cas échéant, le risque de rupture ou de submersion de cet ouvrage en tenant compte notamment de son état, de sa solidité et des précédents connus de rupture ou de submersion.
7. D'une part, il ressort des pièces du dossier, et ainsi qu'il a été dit au point 5, que pour apprécier les risques de submersion marine auxquelles pourrait être exposé le projet de construction présenté par les sociétés requérantes, le maire a entendu prendre en compte les éléments d'information que le préfet du Calvados lui avait transmis dans le cadre de l'élaboration d'un plan de prévention des risques littoraux du Bessin. Selon la carte des enjeux contenue dans les documents qui lui ont été transmis, le terrain d'assiette du projet est classé en zone naturelle et agricole et non pas en zone urbanisée. Par suite, c'est sans erreur de fait que le maire a pu retenir, dans la décision contestée, que le terrain était situé dans une " zone non urbanisée soumise à des risques de submersion marine d'aléas moyen à très fort ". En tout état de cause, si la parcelle est classée en zone constructible dans le plan local d'urbanisme de la commune de Courseulles-sur-Mer, ce classement ne prive pas le maire de la possibilité de s'opposer au projet sollicité sur le fondement des dispositions de l'article R. 111-2 du code de l'urbanisme, de sorte que l'erreur de fait invoquée par les requérantes n'aurait eu aucune incidence sur le sens de la décision en litige.
8. D'autre part, il ressort de ces mêmes pièces que la parcelle d'assiette du projet a été répertoriée dans l'atlas régional des zones sous le niveau marin du 26 juin 2013, comme étant comprise dans une zone située à plus d'un mètre au-dessous du niveau marin de référence. Selon la note de la DREAL du 11 juillet 2013 sur la révision de l'atlas des zones sous le niveau marin de Basse-Normandie, cette zone est submersible par plus d'un mètre d'eau en cas de survenance de l'évènement de référence, à savoir un évènement de période de retour de 100 ans, ce qui correspond à un évènement qui, en moyenne, a une chance sur cent de se produire chaque année, et que dans les zones littorales, comme c'est le cas en l'espèce, les vies humaines sont soumises à un danger. Il ressort en outre du projet de plan de prévention des risques littoraux (PPRL) du Bessin en cours d'élaboration, en particulier de la cartographie des aléas littoraux, portée à la connaissance du maire de Courseulles-sur-Mer, et qui est suffisamment précise, que la parcelle d'assiette du projet est exposée à un aléa moyen à fort dans le scénario de référence, voire à très fort partiellement dans le scénario de référence à échéance 100 ans. Compte tenu de ces dangers, le projet a classé la parcelle en zone rouge qui interdit toute construction d'habitation nouvelle afin de ne pas aggraver la vulnérabilité de la population. Si le maire de Courseulles-sur-Mer ne pouvait opposer aux intéressées le projet de PPRL en cours d'élaboration, il pouvait, en revanche, prendre en compte les informations qui lui ont été communiquées dans le cadre de cette procédure. Par suite, ces éléments, qui ne sont pas sérieusement contestés par les requérantes, sont de nature à établir tant la probabilité du risque que les atteintes susceptibles d'être portées à la sécurité publique. Il suit de là que le maire de Courseulles-sur-Mer n'a pas fait une inexacte application des dispositions de l'article R. 111-2 du code de l'urbanisme en déclarant l'opération non réalisable.
9. Il résulte de tout ce qui précède que la SARL Hervé Promotion et la SARL SOFISAL ne sont pas fondées à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Caen a rejeté leur demande.
Sur les conclusions à fin d'injonction :
10. Le présent arrêt n'appelant aucune mesure d'exécution, les conclusions à fin d'injonction présentées par les sociétés requérantes doivent être rejetées.
Sur les frais liés au litige :
11. Les dispositions de l'article L.761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de la commune de Courseulles-sur-Mer, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, la somme que demandent, sur ce fondement, la SARL Hervé Promotion et la SARL SOFISAL. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de la SARL Hervé Promotion et de la SARL SOFISAL le versement à la commune de Courseulles-sur-Mer d'une somme de 1 500 euros au même titre.
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de la SARL Hervé Promotion et de la SARL SOFISAL est rejetée.
Article 2 : La SARL Hervé Promotion et la SARL SOFISAL verseront, ensemble, à la commune de Courseulles-sur-Mer une somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à la SARL Hervé Promotion, à la SARL SOFISAL et à la commune de Courseulles-sur-Mer.
Délibéré après l'audience du 17 décembre 2019, à laquelle siégeaient :
- Mme Brisson, président,
- M. A...'hirondel, premier conseiller,
- Mme Bougrine, premier conseiller.
Lu en audience publique, le 10 janvier 2020.
Le rapporteur,
M. C...Le président,
C. BRISSON
Le greffier,
A. BRISSET
La République mande et ordonne au ministre de la cohésion des territoires en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
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N° 18NT02682