Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
Mme B... A... a demandé au tribunal administratif d'Orléans la condamnation de l'Etat à lui verser la somme de 90 635,83 euros, correspondant au versement de ses traitements au cours de la période du 1er septembre 2008 au 1er septembre 2011 durant laquelle elle était sans affectation en dépit de son statut de professeur certifiée.
Par une ordonnance n° 1503086 du 8 février 2018, le vice-président du tribunal administratif d'Orléans a rejeté sa demande.
Procédure devant la cour :
Par une requête et un mémoire enregistrés le 6 avril 2018 et le 27 mai 2019,
Mme A..., représentée par la SCP Prieto-Desnoix, demande à la cour :
1°) d'annuler cette ordonnance du vice-président du tribunal administratif d'Orléans du 8 février 2018 ;
2°) de condamner l'Etat à lui verser la somme totale de 153 217,68 euros correspondant, d'une part, pour un montant de 90 635,83 euros au versement de ses traitements sur la période du 1er septembre 2008 au 1er septembre 2011, d'autre part, pour un montant de 62 581,85 euros à l'ensemble des intérêts cumulés suite à la déchéance du prêt qu'elle avait souscrit.
Elle soutient que :
- sa demande indemnitaire présentée devant le tribunal était bien recevable ;
- elle a engagé depuis plusieurs années plusieurs démarches auprès du ministère de l'éducation nationale pour que sa situation soit clarifiée et afin d'être affectée sur un poste de professeur certifié en métropole ; elle justifie avoir bien informé son administration de ce qu'elle avait démissionné de la fonction publique territoriale ; il est inexact de considérer que son absence d'affectation ne saurait être imputée qu'à sa négligence.
Par un mémoire en défense, enregistré le 2 mai 2019, le ministre de l'éducation nationale et de la jeunesse conclut au rejet de la requête.
Il fait valoir que :
- les conclusions qui sont nouvelles en appel qui tendent à la condamnation de l'Etat à lui verser la somme de 62 581,85 euros correspondant à l'ensemble des intérêts cumulés suite à la déchéance du prêt qu'elle avait souscrit sont irrecevables ;
- les moyens présentées par Mme A... ne sont pas fondés.
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Coiffet, président-assesseur,
- et les conclusions de M. Lemoine, rapporteur public.
Considérant ce qui suit
1. Mme A..., qui a été titularisée le 1er septembre 1992 dans le corps des professeurs certifiés, a, à compter de la rentrée scolaire de l'année 1994, exercé les fonctions de professeur d'anglais relevant du cadre territorial de l'enseignement de la Nouvelle-Calédonie. Le 1er novembre 2007, elle a été placée, au titre de ce statut d'enseignant de Nouvelle-Calédonie, en position de disponibilité pour convenances personnelles pour une durée de trois ans, puis a ensuite présenté sa démission, laquelle a été acceptée par le gouvernement de
Nouvelle-Calédonie avec effet à compter du 1er mars 2010. Mme A... qui fait valoir qu'elle avait déjà, en juillet et septembre 2008, entrepris des démarches demeurées vaines en vue d'être réintégrer dans le corps des professeurs certifiés appartenant à la fonction publique de l'Etat justifie avoir transmis au ministre de l'éducation nationale un courrier en date du 11 mai 2015 relatif à sa situation personnelle. L'administration n'ayant donné aucune suite à ce courrier,
Mme A... a alors saisi, le 17 septembre 2015, le tribunal administratif d'Orléans d'une demande tendant à la condamnation de l'Etat à lui verser la somme totale de 90 635,83 euros, correspondant au versement de ses traitements au cours de la période du 1er septembre 2008 au 1er septembre 2011, qu'elle estimait lui être due compte tenu du fait qu'elle est restée sans affectation en dépit de son statut de professeur certifiée.
2. Par une ordonnance du 8 février 2018, le vice-président du tribunal administratif d'Orléans, qui a accueilli la fin de non-recevoir opposée à titre principal le 4 avril 2016 par le ministre de l'éducation nationale, a rejeté, comme manifestement irrecevable, la requête faute pour cet agent d'avoir saisi l'administration d'une demande indemnitaire préalable. Mme A... relève appel de cette ordonnance et demande que l'Etat soit condamné à lui verser désormais la somme totale de 153 217,68 euros, correspondant, d'une part, pour un montant de 90 635,83 euros au versement de ses traitements sur la période du 1er septembre 2008 au
1er septembre 2011, d'autre part, pour un montant de 62 581,85 euros correspondant à l'ensemble des intérêts cumulés suite à la déchéance du prêt qu'elle avait souscrit.
Sur les conclusions présentées en appel tendant au versement d'une somme de 62581,85 euros :
3. Il résulte de l'instruction que la demande indemnitaire relative au versement de la somme susvisée de 62 581,85 euros, correspondant selon Mme A... au montant des intérêts cumulés dus à la suite à la déchéance de l'emprunt immobilier qu'elle aurait souscrit à son retour en métropole, est présentée pour la première fois en appel. Elle constitue ainsi, outre le fait qu'elle n'est pas justifiée et n'a pas fait l'objet d'une réclamation préalable, une demande nouvelle comme telle, et en tout état de cause, irrecevable ainsi que le fait valoir expressément le ministre devant la cour. La requête est ainsi irrecevable en tant qu'elle porte sur cette somme.
Sur la régularité de l'ordonnance attaquée et la recevabilité de la demande de première instance :
4. Aux termes de l'article R.412-1 du code de justice administrative, dans sa rédaction applicable à la date d'introduction de la requête : " La requête doit à peine d'irrecevabilité, être accompagnée, sauf impossibilité justifiée, de la décision attaquée ou, dans le cas mentionné à l'article R.421-2, de la pièce justifiant de la date de dépôt de la réclamation. " ;
5. Il résulte de l'instruction que le courrier que la requérante a adressé au ministre de l'éducation nationale le 11 mai 2015, alors qu'elle était affectée au collège François Rabelais de Tours depuis la rentrée de septembre 2011, se référait tout d'abord aux demandes du 16 juillet et 1er septembre 2008 qu'elle aurait transmises à son administration portant sur " sa réintégration dans le cadre métropolitain ". Cet agent évoquait ensuite, en l'absence de tout traitement pendant une période de deux ans, sa situation de surendettement et la dette due à l'établissement bancaire (211 555,60 euros) à l'origine d'une saisie sur sa rémunération d'un montant mensuel de
1350 euros. Enfin, Mme A... après avoir rappelé " qu'il lui semblait que sa situation d'endettement excessif trouvait sa source dans une certaine responsabilité du ministère de l'éducation nationale qui aurait pu lui trouver une affectation sur un poste d'anglais entre 2008 et 2011 dans l'une des académies du territoire français " non pourvu indiquait qu'elle souhaitait " connaitre la réponse sur sa situation ". Cette lettre adressée au ministre de l'éducation nationale par Mme A... avant d'introduire son recours devant le tribunal administratif, eu égard aux termes utilisés et à l'absence de toute demande chiffrée, ne pouvait être regardée comme valant demande faite à l'administration tendant au versement de la somme de 90 635,83 euros réclamée au contentieux. Si l'intéressée soutient en appel que ce courrier du 11 mai 2015 était également accompagné de sa demande en date du 1er septembre 2008, mentionnée dans ce courrier, qu'elle avait alors adressée à l'administration, il ressort toutefois des termes mêmes cette lettre du
1er septembre versée aux débats en première instance, que cette demande portait exclusivement sur la question de " sa réintégration dans le cadre métropolitain " et ne comportait aucune prétention indemnitaire. Le contentieux introduit par Mme A... tendant à la condamnation de l'Etat à lui verser la somme de 90 635,83 euros, correspondant au versement de ses traitements au cours de la période du 1er septembre 2008 au 1er septembre 2011, ne peut dès lors être considéré comme lié vis-à-vis de l'administration. La demande ayant le même objet présentée devant le tribunal administratif ne pouvait ainsi qu'être rejetée comme manifestement irrecevable.
6. Il résulte de ce qui précède, d'une part, que Mme A... n'est pas fondée à demander l'annulation de l'ordonnance attaquée.
Sur les frais liés au litige :
7. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'Etat, qui n'a pas dans la présente instance la qualité de partie perdante, la somme que demande Mme A... au titre des frais exposés et non compris dans les dépens.
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de Marie-Sophie A... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Marie-Sophie A... et au ministre de l'éducation nationale et de la jeunesse.
Délibéré après l'audience du 29 novembre 2019, à laquelle siégeaient :
- M. Lenoir, président de chambre,
- M. Coiffet, président-assesseur,
- Mme Gélard, premier conseiller.
Lu en audience publique, le 17 décembre 2019.
Le rapporteur
O. CoiffetLe président
H. Lenoir
Le greffier
R. Mageau
La République mande et ordonne au ministre de l'éducation nationale et de la jeunesse en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
18NT01433 2