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04/10/2019 | FRANCE | N°17NT01967

France | France, Cour administrative d'appel de Nantes, 2ème chambre, 04 octobre 2019, 17NT01967


Vu la procédure suivante :

Procédures contentieuses antérieures :

I. Par une demande enregistrée le 23 mars 2015, l'association France Nature Environnement Pays de la Loire, l'association Entre Taude et Bellebranche et l'association Fédération pour l'Environnement en Mayenne ont demandé au tribunal administratif de Nantes d'annuler l'arrêté du 27 novembre 2014 par lequel le préfet de la Mayenne a fixé des prescriptions complémentaires à l'arrêté préfectoral du 30 juin 2006 modifié autorisant la SA Aprochim à exploiter un centre de tri, transit, regroupement et t

raitement de matières souillées aux polychlorobiphényles et polychloroterphén...

Vu la procédure suivante :

Procédures contentieuses antérieures :

I. Par une demande enregistrée le 23 mars 2015, l'association France Nature Environnement Pays de la Loire, l'association Entre Taude et Bellebranche et l'association Fédération pour l'Environnement en Mayenne ont demandé au tribunal administratif de Nantes d'annuler l'arrêté du 27 novembre 2014 par lequel le préfet de la Mayenne a fixé des prescriptions complémentaires à l'arrêté préfectoral du 30 juin 2006 modifié autorisant la SA Aprochim à exploiter un centre de tri, transit, regroupement et traitement de matières souillées aux polychlorobiphényles et polychloroterphényles sur le territoire de la commune de Grez-en-Bouère.

II. Par une demande enregistrée le 23 février 2016, la SA Aprochim a demandé au tribunal administratif de Nantes d'annuler l'arrêté du 11 février 2016 par lequel le préfet de la Mayenne a fixé des prescriptions complémentaires à l'arrêté du 30 juin 2006 modifié, l'autorisant à exploiter un centre de tri, transit, regroupement et traitement de matières souillées aux polychlorobiphényles et polychloroterphényles sur le territoire de la commune de Grez-en-Bouère.

Par un jugement n°s 1502463 et 1601539 du 27 avril 2017, le tribunal administratif de Nantes :

1°) a annulé l'article 1er de l'arrêté du préfet de la Mayenne du 11 février 2016 ;

2°) a annulé l'arrêté du préfet de la Mayenne du 27 novembre 2014 en tant qu'il ne comporte B... de dispositif contraignant permettant de sanctionner l'exploitant de l'installation du fait des émissions diffuses liées à son exploitation ;

3°) a renvoyé la SA Aprochim devant le préfet de la Mayenne afin que celui-ci fixe des prescriptions complémentaires à son arrêté du 30 juin 2006 modifié en vue de réglementer, selon un dispositif plus contraignant, les émissions diffuses engendrées par l'exploitation de l'installation ;

4°) a rejeté le surplus des demandes.

Procédure devant la cour :

Par une requête et un mémoire enregistrés le 29 juin 2017 et le 24 avril 2019, le ministre de la Transition écologique et solidaire demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Nantes du 27 avril 2017 ;

2°) de rejeter les demandes formées par la SA Aprochim et l'association France Nature Environnement Pays de la Loire et autres devant le tribunal administratif de Nantes.

Il soutient que :

­ contrairement à ce qu'a jugé le tribunal administratif, la directive 2002/32/CE du Parlement européen et du Conseil du 7 mai 2002 modifiée ne peut servir de fondement aux prescriptions imposées à la SA Aprochim en sa qualité d'exploitante d'une installation classée pour la protection de l'environnement afin de pouvoir assurer efficacement la protection des intérêts mentionnés à l'article L. 511-1 du code de l'environnement.

­ le seuil de concentration retenu dans l'arrêté du préfet de la Mayenne du 11 février 2016, qui tend à réglementer une situation d'exposition chronique, n'est B... dérogatoire à celui fixé par cette directive qui concerne les produits destinés aux aliments pour animaux dans le cadre d'une consommation ponctuelle ;

­ la directive du 7 mai 2002 ne peut également servir de fondement aux prescriptions imposées à la SA Aprochim dès lors qu'elle a, en tout état de cause, été transposée par un arrêté du 12 janvier 2001 modifiant les teneurs maximales pour les substances et produits indésirables dans l'alimentation des animaux et qu'il n'est B... établi, ni même allégué, que ces dispositions n'assureraient B... une exacte transposition des dispositions de la directive ;

­ le tribunal ne pouvait comparer la valeur fixée par l'arrêté du préfet de la Mayenne à 0,3 pg TEQ/g en PCDD/F + PCBdl à 12 % d'humidité à la valeur de 0,75 ng TEQ/g fixée par le règlement du 28 mars 2012, dès lors que les deux seuils ne portent B... sur les mêmes substances ;

­ l'arrêté du préfet de la Mayenne du 11 février 2016, qui vise à réglementer les émissions diffuses liées aux activités de la société Aprochim et à compléter ainsi le dispositif mis en place par l'arrêté du 27 novembre 2014, n'étant B... illégal, c'est à tort que le tribunal administratif a annulé ce dernier arrêté en tant qu'il ne comportait B... de dispositif contraignant, notamment par la fixation d'un ou plusieurs seuils, permettant à l'administration de sanctionner les émissions diffuses de l'installation, et qu'il a enjoint au préfet de fixer des prescriptions complémentaires en vue de réglementer cette pollution diffuse selon un dispositif plus contraignant ;

­ depuis l'édiction de l'arrêté du 27 octobre 2017, des dépassements significatifs de la valeur de 1,25 pg TEQ/g à 12% d'humidité ont été observés en deux points, ce qui a été signalé au procureur de la République par procès-verbal du 29 août 2018, ce qui établit le caractère contraignant de l'arrêté de mise en demeure.

Par un mémoire en défense, enregistré le 22 mars 2019, la SA Aprochim, représentée par Me C..., conclut au rejet de la requête et à ce qu'il soit mis à la charge de l'Etat la somme de 2 500 euros au titre de l'article L.761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient qu'aucun des moyens de la requête du ministre n'est fondé alors qu'en tout état de cause, l'article 1er de l'arrêté préfectoral du 11 février 2016 est bien illégal dès lors qu'il est entaché d'un vice de procédure, d'une erreur de droit, et d'une erreur manifeste d'appréciation.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

­ la directive 2002/32/CE du Parlement et du Conseil du 7 mai 2002 ;

­ le règlement (UE) n° 277/2012 de la Commission du 28 mars 2012 ;

­ le code de l'environnement ;

­ l'arrêté du 12 janvier 2001 fixant les teneurs maximales pour les substances et produits indésirables dans l'alimentation des animaux ;

­ le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

­ le rapport de M. A...'hirondel,

­ les conclusions de M. Derlange, rapporteur public,

­ et les observations de M. B... et de M. D... représentant le ministre de la Transition écologique et solidaire, et de Me C..., représentant la SAS Aprochim .

Une note en délibéré, présentée pour le ministre de la Transition écologique et solidaire, a été enregistrée le 18 septembre 2019.

Considérant ce qui suit :

1. La SA Aprochim exploite, depuis 1990 sur le territoire de la commune de Grez-en-Bouère (Mayenne), une installation classée pour la protection de l'environnement (ICPE) dont l'activité consiste dans le traitement de déchets industriels, et notamment des matières souillées par les polychlorobiphényles (PCB) et les polychloroterphényles (PCT). Par un arrêté du 30 juin 2006, le préfet de la Mayenne a autorisé cette société à augmenter la capacité du centre de tri, transit, regroupement et traitement de matières souillées. Le volume autorisé de déchets pouvant être traités par l'exploitant a été ramené, par un arrêté du 12 avril 2012, de 30 000 à 8 000 tonnes par an et de nouvelles normes de rejets dans l'atmosphère ont été fixées à un niveau plus contraignant que celui fixé dans l'arrêté de 2006. Ce même arrêté prescrivait à la SA Aprochim de faire réaliser une interprétation de l'état des milieux (IEM) visant à vérifier la compatibilité du milieu avec les usages, notamment agricoles, de l'espace environnant l'installation. Entre juin et octobre 2012, des pollutions par dépassement des normes autorisées ont été constatées conduisant le préfet à prendre, le 10 octobre 2012, un arrêté imposant à l'exploitant de mettre en place des mesures en semi-continu des émissions et à augmenter la fréquence des prélèvements de végétaux. Après avoir recueilli, le 16 juin 2014, l'avis de l'inspection des installations classées, le préfet de la Mayenne a, aux termes d'un arrêté du 28 juillet 2014, fixé de nouvelles prescriptions complémentaires à l'arrêté préfectoral du 30 juin 2006 modifié autorisant les activités de la SA Aprochim. Cet arrêté, dont l'exécution a été suspendue par une ordonnance du juge des référés du tribunal administratif de Nantes du 29 septembre 2014, a été abrogé et remplacé par un nouvel arrêté du 27 novembre 2014 fixant également des prescriptions complémentaires à l'arrêté précité du 30 juin 2006, et notamment une surveillance de la concentration en PCDD/F et PCB dl dans les herbages environnant le site au cours de la période hivernale. Le préfet de la Mayenne, par un courrier du 6 mai 2015, a demandé à l'exploitant de soumettre cet IEM à une tierce-expertise confiée à l'Institut national de l'environnement industriel et des risques (INERIS). L'INERIS a rendu son rapport d'expertise le 16 novembre 2015. Au regard des conclusions de cette étude, les services de l'inspection des installations classées ont proposé, le 3 décembre 2015, de soumettre l'autorisation d'exploiter l'installation que détenait la SA Aprochim à de nouvelles prescriptions complémentaires. Un projet d'arrêté préfectoral imposant de telles prescriptions a donné lieu à un avis favorable du Conseil départemental de l'environnement, des risques sanitaires et technologiques (CODERST) lors de sa séance du 17 décembre 2015. Ce projet d'arrêté a été ensuite transmis à la SA Aprochim le 21 décembre 2015. Par un arrêté du 11 février 2016, le préfet de la Mayenne a prescrit à la SA Aprochim de veiller au respect de la concentration précitée de PCDD/F et PCBdl en prévoyant que ce seuil serait évalué au regard des mesures réalisées sur cinq mois glissants, à partir de l'expiration d'un délai de trois mois à compter de la notification de l'arrêté en cause. Par une requête enregistrée au greffe du tribunal administratif de Nantes sous le n° 1502463, l'association France Nature Environnement Pays de la Loire, l'association Entre Taude et Bellebranche et l'association Fédération pour l'Environnement ont demandé à ce tribunal d'annuler l'arrêté du préfet de la Mayenne du 27 novembre 2014. Par une requête enregistrée par le même greffe sous le n° 1601539, la SA Aprochim a demandé au tribunal d'annuler l'arrêté du préfet de la Mayenne du 11 février 2016. Après avoir procédé à une jonction de ces deux instances, le tribunal administratif de Nantes, par un jugement du 27 avril 2017, a annulé l'arrêté du préfet de la Mayenne du 27 novembre 2014 en tant qu'il ne comporte B... de dispositif contraignant permettant de sanctionner l'exploitant de l'installation du fait des émissions diffuses liées à son exploitation, a annulé l'article 1er de l'arrêté du même préfet du 11 février 2016, a renvoyé la SA Aprochim devant le préfet afin que celui-ci fixe des prescriptions complémentaires à son arrêté du 30 juin 2006 modifié en vue de réglementer, selon un dispositif plus contraignant, les émissions diffuses engendrées par l'exploitation de l'installation et a rejeté le surplus des demandes. Le ministre de la transition écologique et solidaire relève appel de ce jugement.

2. Aux termes, d'une part, de l'article L. 511-1 du code de l'environnement : " Sont soumis aux dispositions du présent titre les usines, ateliers, dépôts, chantiers et, d'une manière générale, les installations exploitées ou détenues par toute personne physique ou morale, publique ou privée, qui peuvent présenter des dangers ou des inconvénients soit pour la commodité du voisinage, soit pour la santé, la sécurité, la salubrité publiques, soit pour l'agriculture, soit pour la protection de la nature, de l'environnement et des paysages, soit pour l'utilisation rationnelle de l'énergie, soit pour la conservation des sites et des monuments ainsi que des éléments du patrimoine archéologique (...) ". Aux termes de l'article L. 512-3 de ce code dans sa rédaction alors en vigueur : " Les conditions d'installation et d'exploitation jugées indispensables pour la protection des intérêts mentionnés à l'article L. 511-1, les moyens de suivi, de surveillance, d'analyse et de mesure et les moyens d'intervention en cas de sinistre sont fixés par l'arrêté d'autorisation et, éventuellement, par des arrêtés complémentaires pris postérieurement à cette autorisation. ". Selon le premier alinéa de l'article L. 514-6 du même code dans sa rédaction applicable au présent litige : " I. - Les décisions prises en application des articles L. 171-7, L. 171-8 et L. 171-10, L. 512-1, L. 512-3, L. 512-7-3 à L. 512-7-5, L. 512-8, L. 512-12, L. 512-13, L. 512-20, L. 513-1, L. 514-4, du I de l'article L. 515-13 et de l'article L. 516-1 sont soumises à un contentieux de pleine juridiction ".

3. Aux termes, d'autre part, de l'article 2 de l'arrêté du 12 janvier 2001, transposant les objectifs de la directive 2002/32/ CE du Parlement européen du 7 mai 2002, fixant les teneurs maximales pour les substances et produits indésirables dans l'alimentation des animaux, modifié en dernier lieu, par un arrêté du 29 août 2014 : " Les produits destinés aux aliments pour animaux ne doivent B... présenter de teneurs en substances indésirables supérieures aux maxima fixés à l'annexe I de la directive 2002/32/ CE du Parlement européen et du Conseil du 7 mai 2011 sur les substances indésirables dans les aliments pour animaux. "

4. Il appartient au juge du plein contentieux d'apprécier le respect des règles de procédure régissant la demande d'autorisation au regard des circonstances de fait et de droit en vigueur à la date de délivrance de l'autorisation et celui des règles de fond régissant l'installation au regard des circonstances de fait et de droit en vigueur à la date à laquelle il se prononce.

5. Selon l'article 1er de l'arrêté du préfet de la Mayenne du 11 février 2016, le seuil de concentration admissible concernant les émissions en PCDD/F + PCBdl à 12 % d'humidité dans les herbes au niveau de l'ensemble des stations de surveillance situées dans l'environnement du site exploité par la SA Aprochim est fixé à 0,3 pg TEQ/g (soit 0,3 ng TEQ/kg). Ce seuil est en-deçà de celui fixé à l'annexe 1 de la directive 2002/32/CE du Parlement et du Conseil du 7 mai 2002, modifiée notamment par le règlement européen n° 277/2012 de la Commission du 28 mars 2012, qui fixe à 1,25 ng OMS-PCDD/F-PCB-TEQ/kg dans les aliments pour animaux d'une teneur en humidité de 12 %, la somme des dioxines et des PCB de type dioxine (somme des dibenzo-para- dioxines polychlorées (PCDD), des dibenzofuranes polychlorés (PCDF) et des polychlorobiphényles (PCB)).

6. En premier lieu, selon la directive 2002/32/CE du 7 mai 2002, transcrite par l'arrêté modifié du 12 janvier 2001, constituent notamment des matières premières des aliments pour animaux, " les produits d'origine végétale (...) à l'état naturel (...) qui sont destinés à être utilisés pour l'alimentation des animaux par voie orale (...) directement tels quels (...) ". Conformément à cette définition, les matières premières des aliments pour animaux doivent être regardées, selon l'article 1er de l'arrêté du 12 janvier 2001, comme constituant des produits destinés aux aliments pour animaux. Par suite, les herbes servant à l'alimentation du bétail telles que celles situées aux alentours de l'installation classée exploitée par la SA Aprochim constituent un aliment au sens de la directive et de l'arrêté du 12 janvier 2001 qu'il convient de préserver de la contamination par des substances indésirables.

7. En deuxième lieu, selon l'article 4 de la directive, " I. Les États membres prescrivent que les substances indésirables énumérées à l'annexe I de la présente directive ne peuvent être tolérées dans les produits destinés aux aliments pour animaux que sous réserve des conditions fixées à ladite annexe ". Cet article impose aux Etats membres de ne prescrire les seuils des substances indésirables qu'en retenant les seules conditions fixées à l'annexe 1. Le considérant 10 de cette directive, qui prévoit qu'elle s'applique aux produits dès leur introduction dans l'espace communautaire, n'a B... pour effet de limiter l'application de la directive à ces seuls produits dès lors que ce même considérant ajoute que les teneurs maximales pour les substances indésirables concernent, non seulement les produits mis en circulation, mais aussi ceux " utilisés, à tous les stades ". En outre, selon le règlement (UE) n° 277/2012 de la Commission du 28 mars 2012, modifiant les annexes I et II de la directive 2002/32/CE relatif aux teneurs maximales et aux seuils d'intervention concernant les dioxines et les polychlorobiphényles, ces teneurs maximales ont été fixées suite à un rapport scientifique produit par l'Autorité européenne de sécurité des aliments (EFSA) intitulé " Results of the monitoring of dioxin levels in food and feed " qui tient compte des nouvelles valeurs proposées par l'Organisation Mondiale de la Santé et des informations récentes recueillies par la Commission. Si ce règlement, en son considérant 10, précise que, selon des études sur le transfert, une teneur supérieure au seuil maximal fixé par le règlement communautaire n°1881/2006 peut être retrouvée dans les denrées alimentaires d'origine animale alors même que les aliments présentaient une teneur en dioxine et PCB égale aux teneurs maximales prescrites à l'annexe 1, il précise qu'il n'est toutefois B... possible de fixer des teneurs maximales inférieures " compte tenu de la sensibilité des méthodes d'analyse actuelles et du fait que les teneurs maximales sont établies en tant qu'estimations supérieures ". La circonstance que ce même considérant ajoute ensuite que " dans la plupart des cas, il est peu probable qu'un animal soit exposé longtemps à un aliment pour animaux qui est conforme mais présente une teneur en dioxine et/ou en PCB proche de la teneur maximale ou égale à celle-ci ", n'a B... pour objet de limiter l'application de l'annexe aux seuls aliments consommés ponctuellement. Par suite, et contrairement à ce que soutient le ministre, ni cette directive, notamment son annexe I, ni l'arrêté du 12 janvier 2001 modifié transposant ses objectifs, ne limitent leur application aux produits mis sur le marché ou devant être introduits dans l'espace communautaire, ni à ceux ne devant faire l'objet que d'une consommation ponctuelle.

8. En troisième lieu, il est constant que les prescriptions en litige ont pour objet, ainsi qu'il résulte des motifs de l'arrêté du 27 novembre 2014, qui a été notamment complété par l'arrêté du 11 février 2016, de fixer la valeur limite de PCCDD /F et PCB-DL admissible mesurée dans les herbes autour du site Aprochim afin de pouvoir se prémunir, dans le cas d'une exposition chronique, de la contamination de la viande et du lait des animaux d'élevage. Ce motif, qui porte sur la préservation de la santé publique et de l'agriculture, a ainsi pour but de protéger certains des intérêts visés à l'article L. 511-1 du code de l'environnement pour lesquels le préfet peut assortir, en cours d'exploitation, l'autorisation d'exploiter de prescriptions complémentaires. Le seuil de concentration en PCDD/F + PCBdl mentionné à l'annexe I de la directive 2002/32/CE du 7 mai 2002 a, par ailleurs, été fixé ainsi qu'il a été dit au point 7 au vu notamment d'un rapport scientifique remis par l'EFSA. Ce seuil doit être ainsi regardé, compte tenu de l'état des connaissances scientifiques, comme la limite à ne B... dépasser pour permettre de regarder les aliments dont il s'agit comme ne présentant B... de danger pour un des intérêts visés à l'article L. 511-1 du code de l'environnement, notamment pour la santé de l'animal, la santé humaine ou l'environnement. Dans ces conditions, l'arrêté du préfet de la Mayenne, qui fixe des teneurs en concentration de PCB et dioxines/furannes plus contraignantes que celles fixées à l'annexe I de la directive 2002/32/CE du 7 mai 2002, a été pris en méconnaissance de l'arrêté du 12 janvier 2001 modifié qui renvoie, pour son application, à cette annexe. Si le ministre allègue que, dans les circonstances de l'espèce, il convient néanmoins de fixer un seuil de concentration en deçà de celui fixé à l'annexe I de la directive, il lui appartient, s'il l'estime nécessaire, de prévoir, conformément aux stipulations du paragraphe 2 de l'article 4, la possibilité de procéder à des enquêtes, en coopération avec l'exploitant, afin de réduire ou d'éliminer les sources de substances indésirables dans les produits destinés aux aliments pour animaux, lorsque le seuil d'intervention fixé à l'annexe II de cette même directive est atteint.

9. Enfin, compte tenu de l'illégalité des prescriptions imposées à l'exploitant dans l'arrêté du 11 février 2016, et de l'insuffisance des mesures contenues dans les autres arrêtés pris par le préfet de la Mayenne pour les mêmes motifs que ceux relevés par les premiers juges au point 17 de leur jugement pour prévenir la pollution récurrente constatée du fait de l'exploitation de l'installation, c'est à bon droit que le tribunal a annulé ce dernier arrêté en tant qu'il ne comporte B... de dispositif contraignant permettant de sanctionner l'exploitant du fait des émissions diffuses liées à l'exploitation de l'installation et a enjoint à l'administration, en sa qualité de juge de plein contentieux, de réglementer les conditions d'exploitation de l'installation selon un dispositif plus contraignant.

10. Il résulte de tout ce qui précède, que le ministre de la Transition écologique et solidaire n'est B... fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nantes a annulé l'article 1er de l'arrêté du préfet de la Mayenne du 11 février 2016 et l'arrêté du même préfet du 27 novembre 2014 en tant qu'il ne comporte B... de dispositif contraignant permettant de sanctionner l'exploitant de l'installation du fait des émissions diffuses liées à son exploitation.

Sur les frais liés au litige :

11. Pour l'application des dispositions de l'article L.761-1 du code de justice administrative, il n'y a B... lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire droit aux conclusions susmentionnées de la SA Aprochim.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête du ministre de la Transition écologique et solidaire est rejetée.

Article 2 : Les conclusions de la SA Aprochim tendant au bénéfice des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié au ministre de la Transition écologique et solidaire, à la SA Aprochim, à l'association France Nature Environnement Pays de la Loire, à l'association Entre Taude et Bellebranche et à l'association Fédération pour l'Environnement.

Copie sera adressée au préfet de la Mayenne.

Délibéré après l'audience du 17 septembre 2019, à laquelle siégeaient :

- M. Pérez, président de chambre,

- M. A...'hirondel, premier conseiller,

- M. Giraud, premier conseiller

Lu en audience publique, le 4 octobre 2019.

Le rapporteur,

M. E...Le président,

A. PEREZ

Le greffier,

K. BOURON

La République mande et ordonne au ministre de la Transition écologique et solidaire en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

2

N°17NT01967


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nantes
Formation : 2ème chambre
Numéro d'arrêt : 17NT01967
Date de la décision : 04/10/2019
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. PEREZ
Rapporteur ?: M. Michel LHIRONDEL
Rapporteur public ?: M. DERLANGE
Avocat(s) : BLAZY

Origine de la décision
Date de l'import : 15/10/2019
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nantes;arret;2019-10-04;17nt01967 ?
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