Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
Mme B...A...a demandé au tribunal administratif de Nantes d'annuler la décision implicite par laquelle la maire de la commune de Nantes a rejeté sa demande de prise en compte de la journée du 1er mai au titre d'une journée de repos ou du paiement des heures de travail y correspondant.
Par un jugement n°1608693 du 20 décembre 2017, le tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande.
Procédure devant la cour :
Par une requête et un mémoire, enregistrés le 20 février et le 18 septembre 2018, Mme A..., représentée par Me Diversay, demande à la cour :
1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Nantes du 20 décembre 2017 ;
2°) d'annuler la décision implicite par laquelle la maire de la commune de Nantes a rejeté sa demande de prise en compte de la journée du 1er mai au titre d'une journée de repos ou du paiement des heures de travail correspondant, ainsi que la décision du 16 septembre 2016 indiquant les motifs de la décision de refus ;
3°) d'enjoindre à la commune de Nantes de lui octroyer un repos compensateur ou de lui payer les heures décomptées en congé ordinaire pour le 1er mai des années antérieures, dans le délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 100 euros par jour de retard ;
4°) de mettre à la charge de la commune de Nantes la somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- le jugement est irrégulier :
* il se fonde sur des pièces qui n'ont pas été fournies aux débats, en l'occurrence la délibération des 16 et 17 mars 2000 de la commune de Nantes ;
* il est entaché d'une contradiction de motifs, la journée du 1er mai n'est pas nécessairement forfaitisée et incluse dans les durées annuelles de travail réduites des agents territoriaux spécialisés des écoles maternelles (ATSEM) et des agents d'entretien et de restauration (AER) par rapport au temps légal ;
- le jugement est infondé :
* c'est à tort que les premiers juges ont estimé que la journée du 1er mai ne bénéficiait pas d'un régime spécifique par rapport au régime applicable aux autres jours fériés, dans la mesure où la loi du 30 avril 1947 et la loi du 29 avril 1948 sont applicables à la fonction publique ;
* le 1er mai est obligatoirement férié et chômé pour toutes les personnes salariées ou employées, selon un principe général du droit ;
* le 1er mai ne peut être considéré comme une journée de congé ou de récupération du temps de travail ;
* le 1er mai n'est pas compris dans les 1607 heures de durée annuelle de travail effectif prévu par l'article 1er du décret n° 2000-815 du 25 août 2000 ;
* la forfaitisation de 8 jours fériés par an est inexacte matériellement ;
- la requête et les conclusions indemnitaires sont recevables ;
- la décision implicite de rejet est entachée d'un défaut de motivation ;
- la commune de Nantes n'apporte aucun élément permettant d'établir la valeur juridique de sa décision sur l'absence de prise en compte de la journée du 1er mai ;
- la décision en cause induit une rupture d'égalité entre les agents annualisés et les autres qui bénéficient de la prise en compte de la journée du 1er mai décomptée en surplus, ou indemnisée au double du temps d'activité.
Par des mémoires en défense, enregistrés le 25 juin et le 24 octobre 2018, la commune de Nantes conclut au rejet de la requête et de mettre à la charge de Mme A...une somme de 3 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient, à titre principal, que la requête et les conclusions indemnitaires sont irrecevables et, à titre subsidiaire, que les moyens soulevés par Mme A...sont infondés.
L'instruction a été close au 16 novembre 2018, date d'émission d'une ordonnance prise en application des dispositions combinées des articles R. 611-11-1 et R. 613-1 du code de justice administrative.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code du travail ;
- le code des relations entre le public et l'administration ;
- la loi n° 47-778 du 30 avril 1947 ;
- la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 ;
- la loi n° 86-33 du 9 janvier 1986 ;
- la loi n° 2001-2 du 3 janvier 2001 ;
- le décret n° 91-298 du 20 mars 1991 ;
- le décret n° 2000-815 du 25 août 2000 ;
- le décret n° 2001-623 du 12 juillet 2001;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Pons ;
- les conclusions de M. Lemoine, rapporteur public ;
- les observations de Me Diversay, avocate de MmeA..., et de Me C...pour la commune de Nantes.
Une note en délibéré, présentée pour la commune de Nantes a été enregistrée le 11 avril 2019.
Considérant ce qui suit :
1. MmeA..., agent titulaire, est employée par la commune de Nantes à la direction de l'éducation. Le 24 février 2016, elle a saisi la maire de la commune de Nantes d'une demande tendant à l'application des dispositions du code du travail relatives à la journée du 1er mai afin que cette journée ne soit pas décomptée au titre d'une journée de repos ou que le paiement des heures décomptées en congé ordinaire soit compensé. Cette demande a été rejetée par une décision implicite. Par une lettre du 24 juin 2016, la requérante a demandé que lui soient communiqués les motifs de cette décision. Par un courrier du 16 septembre 2016, la commune a communiqué à l'intéressée les motifs de la décision implicite en question. Par sa présente requête, Mme A...relève appel du jugement du 20 décembre 2017 par lequel le tribunal a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision implicite par laquelle la maire de la commune de Nantes a rejeté sa demande formulée le 24 février 2016.
Sur les conclusions à fin d'annulation :
2. D'une part, aux termes de l'article 7-1 de la loi du 26 janvier 1984 modifiée portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique territoriale, ajouté par l'article 21 de la loi du 3 janvier 2001 relative à la résorption de l'emploi précaire et à la modernisation du recrutement dans la fonction publique ainsi qu'au temps de travail dans la fonction publique territoriale : " Les règles relatives à la définition, à la durée et à l'aménagement du temps de travail des agents des collectivités territoriales et des établissements publics mentionnés au premier alinéa de l'article 2 sont fixées par la collectivité ou l'établissement, dans les limites applicables aux agents de l'Etat, en tenant compte de la spécificité des missions exercées par ces collectivités ou établissements. (...) ". Aux termes de l'article 1er du décret n° 2000-815 du 25 août 2000 relatif à l'aménagement et à la réduction du temps de travail dans la fonction publique de l'Etat, dans sa version applicable : " La durée du travail effectif est fixée à trente-cinq heures par semaine dans les services et établissements publics administratifs de l'Etat ainsi que dans les établissements publics locaux d'enseignement. Le décompte du temps de travail est réalisé sur la base d'une durée annuelle de travail effectif de 1 607 heures maximum, sans préjudice des heures supplémentaires susceptibles d'être effectuées. Cette durée annuelle peut être réduite, par arrêté du ministre intéressé, du ministre chargé de la fonction publique et du ministre chargé du budget, pris après avis du comité technique paritaire ministériel, et le cas échéant du comité d'hygiène et de sécurité, pour tenir compte des sujétions liées à la nature des missions et à la définition des cycles de travail qui en résultent, et notamment en cas de travail de nuit, de travail le dimanche, de travail en horaires décalés, de travail en équipes, de modulation importante du cycle de travail, ou de travaux pénibles ou dangereux ".
3. D'autre part, aux termes de l'article 1er du décret n° 2001-623 du 12 juillet 2001 pris pour l'application de l'article 7-1 de la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 et relatif à l'aménagement et à la réduction du temps de travail dans la fonction publique territoriale : " Les règles relatives à la définition, à la durée et à l'aménagement du temps de travail applicables aux agents des collectivités territoriales et des établissements publics en relevant sont déterminées dans les conditions prévues par le décret du 25 août 2000 susvisé sous réserve des dispositions suivantes ". Aux termes de l'article 2 du même décret : " L'organe délibérant de la collectivité ou de l'établissement peut, après avis du comité technique paritaire compétent, réduire la durée annuelle de travail servant de base au décompte du temps de travail défini au deuxième alinéa de l'article 1er du décret du 25 août 2000 susvisé pour tenir compte de sujétions liées à la nature des missions et à la définition des cycles de travail qui en résultent, et notamment en cas de travail de nuit, de travail le dimanche, de travail en horaire décalés, de travail en équipes, de modulation importante du cycle de travail ou de travaux pénibles ou dangereux ".
4. Il résulte de la combinaison de ces dispositions que la fixation de la durée et de l'aménagement du temps de travail dans la fonction publique territoriale doit s'effectuer sur la base d'une durée annuelle de travail effectif de 1 607 heures, laquelle constitue à la fois un plancher et un plafond pour 35 heures de travail par semaine compte tenu des 104 jours de repos hebdomadaire, des 25 jours de congés annuels prévus par le décret n° 85-1250 du 26 novembre 1985 et d'une moyenne annuelle de 8 jours fériés correspondant à des jours ouvrés. Cette durée annuelle de travail peut toutefois être réduite par décision expresse de l'organe délibérant de la collectivité et après avis du comité technique paritaire compétent pour tenir compte des sujétions liées à la nature des missions et à la définition des cycles de travail qui en résultent.
5. En premier lieu, si, ainsi que le prévoit la loi n° 47-778 du 30 avril 1947 modifiée, le 1er mai fait partie des jours fériés qui, en tant que tels, ne doivent pas être pris en compte pour la détermination de la durée de travail effectif, il ne bénéficie pas d'un régime spécifique différent de celui applicable aux autres jours fériés, tel que défini par les dispositions citées. Contrairement à ce qui est allégué, aucun principe général du droit applicable à l'une des trois fonctions publiques ne prévoit l'application à la journée du 1er mai d'un régime juridique différent de celui prévu par ces mêmes dispositions.
6. En second lieu, la durée du travail dans la fonction publique, fixée en prenant en compte une moyenne annuelle de 8 jours fériés correspondant à des jours ouvrés, est issue d'une détermination réglementaire qui ne saurait être remise en cause par le biais d'un calcul statistique. Il est également constant que la commune de Nantes a fixé par une délibération des 16 et 17 mars 2000, prise après l'avis favorable du comité technique paritaire du 14 mars 2000, la durée annuelle de travail pour les ATSEM et AER respectivement à 1502 et 1547 heures. Ces durées de travail étant inférieures à la durée légale du travail prévues à l'article 1er du décret du 25 août 2000, elles doivent être regardées comme prenant en compte les sujétions particulières liées à la nature des missions et à la définition des cycles de travail des ATSEM et des AER, ainsi que la totalité des jours fériés dont ils peuvent bénéficier, incluant la journée du 1er mai.
7. En troisième lieu, aux termes de l'article L. 211-2 du code des relations entre le public et l'administration : " Les personnes physiques ou morales ont le droit d'être informées sans délai des motifs des décisions administratives individuelles défavorables qui les concernent. / A cet effet, doivent être motivées les décisions qui : (...) / 6°- Refusent un avantage dont l'attribution constitue un droit pour les personnes qui remplissent les conditions légales pour l'obtenir ; (...) ". Aux termes de l'article L. 232-4 du même code : " Une décision implicite intervenue dans les cas où la décision explicite aurait dû être motivée n'est pas illégale du seul fait qu'elle est assortie de cette motivation. / Toutefois, à la demande de l'intéressé, formulée dans les délais de recours contentieux, les motifs de toute décision implicite de rejet devront lui être communiqués dans le mois suivant cette demande. Dans ce cas, le délai du recours contentieux contre ladite décision est prorogé jusqu'à l'expiration de deux mois suivant le jour où les motifs lui auront été communiqués ". Il résulte de ces dispositions qu'en l'absence de communication des motifs dans le délai d'un mois, la décision implicite se trouve entachée d'illégalité.
8. Il résulte de ce qui vient d'être dit que les jours fériés, au titre desquels figure le 1er mai, ne doivent pas être pris en compte pour la détermination de la durée de travail effectif. Il suit de là qu'en refusant de faire droit à la demande de la requérante, la commune ne lui a refusé aucun avantage dont l'attribution constituerait un droit pour les personnes qui remplissent les conditions légales pour l'obtenir. La décision implicite contestée n'est donc pas au nombre des décisions qui devaient être motivées en application des dispositions de l'article L. 211-2 du code des relations entre le public et l'administration. Par suite, et alors même que l'intéressée a présenté, dans les délais du recours contentieux, une demande de communication des motifs de cette décision, et que ces motifs ne lui ont pas été communiqués dans le délai d'un mois prévu par les dispositions de l'article L. 232-4 du code des relations entre le public et l'administration, le moyen tiré du défaut de motivation de la décision implicite attaquée ne peut qu'être écarté.
9. En quatrième et dernier lieu, le moyen tiré d'une méconnaissance du principe d'égalité entre les agents annualisés et les autres qui bénéficieraient de la prise en compte de la journée du 1er mai décomptée en surplus, ou indemnisée au double du temps d'activité, est sans incidence sur la légalité de la décision en cause dès lors que ces agents ne sont pas placés dans une situation comparable.
10. Il résulte de ce qui précède que Mme A...n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, qui n'est pas entaché d'irrégularités ou de contradictions de motifs, le tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande.
Sur les conclusions à fin d'injonction :
11. Le présent arrêt, qui rejette les conclusions à fin d'annulation présentées par MmeA..., n'implique aucune mesure d'exécution. Par suite, les conclusions à fin d'injonction présentées par la requérante ne peuvent être accueillies.
Sur les frais liés au litige :
12. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce qu'il soit mis à la charge de la commune de Nantes, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, la somme réclamée par Mme A...au titre des frais liés au litige. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de Mme A...la somme de 1 000 euros au titre des mêmes dispositions.
DECIDE :
Article 1er : La requête de Mme A...est rejetée.
Article 2 : Mme A...versera à la commune de Nantes la somme de 1 000 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 3 : Le surplus des conclusions de la commune de Nantes est rejeté.
Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à Mme B...A...et à la commune de Nantes.
Délibéré après l'audience du 29 mars 2019, à laquelle siégeaient :
- M. Lenoir, président de chambre,
- M. Francfort, président-assesseur,
- M. Pons, premier conseiller.
Lu en audience publique, le 23 avril 2019.
Le rapporteur,
F. PONSLe président,
H. LENOIR
La greffière,
E. HAUBOIS
La République mande et ordonne au ministre de la cohésion des territoires et des relations avec les collectivités territoriales en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
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N° 18NT00782