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18/02/2019 | FRANCE | N°18NT03814

France | France, Cour administrative d'appel de Nantes, 1ère chambre, 18 février 2019, 18NT03814


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme C...H...épouse F...et son mari M. L...F...ont demandé au tribunal administratif de Nantes l'annulation des arrêtés du 17 novembre 2015 par lesquels le préfet de la Loire-Atlantique a refusé de leur délivrer un titre de séjour.

Par un jugement n° 1510715, 1510716 du 14 mars 2018, le tribunal administratif de Nantes a rejeté ces demandes.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 19 octobre 2018, M. et MmeF..., représentés par Me K..., demandent à la cour :>
1°) d'annuler ce jugement ;

2°) d'annuler ces arrêtés ;

3°) d'enjoindre au préfet de la Loire-A...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme C...H...épouse F...et son mari M. L...F...ont demandé au tribunal administratif de Nantes l'annulation des arrêtés du 17 novembre 2015 par lesquels le préfet de la Loire-Atlantique a refusé de leur délivrer un titre de séjour.

Par un jugement n° 1510715, 1510716 du 14 mars 2018, le tribunal administratif de Nantes a rejeté ces demandes.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 19 octobre 2018, M. et MmeF..., représentés par Me K..., demandent à la cour :

1°) d'annuler ce jugement ;

2°) d'annuler ces arrêtés ;

3°) d'enjoindre au préfet de la Loire-Atlantique, sous astreinte de 100 euros par jour de retard, de leur délivrer un certificat de résident portant la mention " vie privée et familiale " dans un délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir et, dans cette attente, de leur délivrer un récépissé valant autorisation provisoire de séjour dans un délai de 15 jours ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat le versement à leur conseil, MeK..., d'une somme de 1 500 euros au titre des dispositions combinées des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991.

Ils soutiennent que :

- les arrêtés sont insuffisamment motivés ;

- les arrêtés méconnaissent le 5 de l'article 6 de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 et l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.

Par un mémoire en défense, enregistré le 19 novembre 2018, le préfet de la Loire-Atlantique conclut au rejet de la requête.

Il soutient que les moyens soulevés par les requérants ne sont pas fondés.

Mme F...a été admise au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 20 août 2018.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- l'accord du 27 décembre 1968 relatif à la circulation, à l'emploi et au séjour en France des ressortissants algériens et de leurs familles ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le décret n° 91-1266 du 19 décembre 1991 ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

A été entendu au cours de l'audience publique le rapport de M. Bataille.

Considérant ce qui suit :

1. M. et MmeF..., ressortissants algériens nés le 24 octobre 1962 et le 10 octobre 1964, ont demandé la délivrance d'un certificat de résidence d'un an sur le fondement du 5° de l'article 6 de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968. Par arrêtés du 17 novembre 2015, le préfet de la Loire-Atlantique a refusé de leur délivrer ce titre de séjour. M. et Mme F...relèvent appel du jugement du 14 mars 2018 par lequel le tribunal administratif de Nantes a rejeté leurs demandes tendant à l'annulation de ces arrêtés.

2. En vertu de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale. Par ailleurs aux termes de l'article 6 de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 : " Les dispositions du présent article (...) fixent les conditions de délivrance et de renouvellement du certificat de résidence aux ressortissants algériens établis en France ainsi qu'à ceux qui s'y établissent, sous réserve que leur situation matrimoniale soit conforme à la législation française. / Le certificat de résidence d'un an portant la mention "vie privée et familiale" est délivré de plein droit : / (...) 5. au ressortissant algérien, qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, dont les liens personnels et familiaux en France sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus (...) ".

3. M. et Mme F...sont entrés en France le 7 septembre 2012 sous couvert d'un visa de court séjour avec trois de leurs quatre enfants, Siham née le 19 septembre 1995, Linda née le 25 avril 1998 et L...né le 16 septembre 2003. S'y étant maintenus irrégulièrement, ils ont fait l'objet le 9 septembre 2013 d'un refus de délivrance de titre de séjour assortis d'une obligation de quitter le territoire français à laquelle ils n'ont pas déféré. Ils ont présenté une nouvelle demande le 2 juillet 2015. Par arrêtés du 17 novembre 2015, le préfet de la Loire-Atlantique a de nouveau refusé de leur délivrer ce titre de séjour, sans assortir cette fois ce refus d'une obligation de quitter le territoire français, aux motifs qu'ils résidaient en France depuis seulement deux ans et que si leur fille aînée majeure - Affaf, épouse M...- était bénéficiaire d'un titre de séjour - mention " salarié " -, leur fille majeure - Siham - avait fait l'objet d'un refus de titre de séjour et d'une obligation de quitter le territoire français le 1er septembre 2014, décision validée par le tribunal administratif de Nantes - jugement n° 1408537 du 12 décembre 2014 - et que les arrêtés ne méconnaissaient ainsi pas l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales faute de liens personnels et familiaux en France suffisamment intenses, anciens et stables.

4. Toutefois, et d'une part, par arrêt du 17 décembre 2015, certes postérieur aux arrêtés contestés mais dont les motifs prennent en compte sa situation personnelle et familiale antérieure à ceux-ci, la présente cour a annulé le jugement du tribunal administratif de Nantes du 12 décembre 2014 concernant Siham F...et a enjoint au préfet de la Loire Atlantique de lui délivrer un certificat de résidence d'un an portant la mention " vie privée et familiale ", dont la délivrance, en exécution de cet arrêt, a été renouvelée depuis. Par ailleurs, il ressort des pièces du dossier que Linda F...dispose également désormais d'un titre de séjour mention " vie privée et familiale ".

5. D'autre part, concernant les liens de Mme C...F...avec la France, il n'est pas contesté que ceux-ci sont très anciens puisqu'elle a, avant de retourner en Algérie, bénéficié d'un certificat de résident algérien entre 1985 et 1995.

6. Enfin, M. L...F...et Mme C...F...ont de nombreux membres de leurs famille et belle famille respectives en France qui sont soit de nationalité française, à savoir deux frères de MmeF..., MM. L...et I...H..., soit en situation régulière, à savoir, d'une part, la mère de Mme C...F..., Mme G...N..., veuveH..., et MMI..., D..., Q..., B..., A...H...et P...H..., d'autre part, MME..., J...et O...F....

7. Il résulte de l'ensemble des éléments de fait rappelés aux points 4 à 6 du présent arrêt que les refus de titre de séjour contestés portent à M. et Mme F...une atteinte disproportionnée à leur droit au respect de leur vie privée et familiale au regard des objectifs pour lesquels ils ont été pris. Dès lors, le préfet de la Loire-Atlantique n'a pu, sans méconnaître les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et du 5° de l'article 6 de l'accord franco-algérien, refuser à M. et Mme F...la délivrance du certificat de résidence d'un an mention " vie privée et familiale ". Par suite, sans qu'il soit besoin d'examiner l'autre moyen de la requête, M. et Mme F...sont fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nantes a rejeté leur demande tendant à l'annulation des arrêtés portant refus de séjour.

8. Eu égard au motif des annulations prononcées, l'exécution du présent arrêt implique nécessairement, sous réserve d'un changement dans les circonstances de droit ou de fait, que le préfet de la Loire-Atlantique délivre à M. et MmeF..., dans un délai de deux mois suivant la notification du présent arrêt, un certificat de résidence d'un an portant la mention " vie privée et familiale ". Il n'y a pas lieu d'assortir cette injonction d'une astreinte.

9. Il résulte de ce qui précède qu'il y a lieu de mettre à la charge de l'Etat, en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, le versement à Me K...de la somme de 1 500 euros dans les conditions fixées à l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 et à l'article 108 du décret du 19 décembre 1991.

DECIDE :

Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Nantes n° 1510715, 1510716 du 14 mars 2018 et les arrêtés du 17 novembre 2015 du préfet de la Loire-Atlantique sont annulés.

Article 2 : Il est enjoint au préfet de la Loire-Atlantique, sous réserve d'un changement dans les circonstances de droit ou de fait, de délivrer à M. et MmeF..., dans un délai de deux mois suivant la notification du présent arrêt, un certificat de résidence d'un an portant la mention " vie privée et familiale ".

Article 3 : L'Etat versera à Me K...une somme de 1 500 euros dans les conditions fixées à l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 et à l'article 108 du décret du 19 décembre 1991.

Article 4 : Le surplus des conclusions de la requête est rejeté.

Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à Mme C...H...épouse F...et M. L...F..., à Me K...et au ministre de l'intérieur.

Copie en sera transmise au préfet de la Loire-Atlantique.

Délibéré après l'audience du 31 janvier 2018, à laquelle siégeaient :

- M. Bataille, président de chambre,

- M. Geffray, président-assesseur,

- Mme Malingue, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 18 février 2019.

Le président rapporteur,

F. Bataille

L'assesseur le plus ancien,

J-E. GeffrayLe greffier,

A. Rivoal La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

2

N° 18NT03814


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nantes
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 18NT03814
Date de la décision : 18/02/2019
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. BATAILLE
Rapporteur ?: M. Frédérik BATAILLE
Rapporteur public ?: M. JOUNO
Avocat(s) : SELARL DESMARS BELONCLE BARZ CABIOCH

Origine de la décision
Date de l'import : 26/02/2019
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nantes;arret;2019-02-18;18nt03814 ?
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