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08/02/2019 | FRANCE | N°17NT01064

France | France, Cour administrative d'appel de Nantes, 3ème chambre, 08 février 2019, 17NT01064


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

L'Earl de Fossé Raffray a demandé au tribunal administratif de Rennes de condamner l'Etat à lui verser la sommes de 104 383,50 euros en réparation du préjudice qu'elle a subi du fait de l'illégalité de la décision du 14 juin 2006 du préfet des Côtes d'Armor refusant de lui transférer les quantités de références laitières précédemment allouées à M. A...à hauteur d'un volume de 97 646 litres par an.

Par un jugement n° 1501155 du 3 février 2017, le tribunal administratif de Rennes a conda

mné l'Etat à verser à l'Earl de Fossé Raffray la somme de 18 000 euros.

Procédure devant ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

L'Earl de Fossé Raffray a demandé au tribunal administratif de Rennes de condamner l'Etat à lui verser la sommes de 104 383,50 euros en réparation du préjudice qu'elle a subi du fait de l'illégalité de la décision du 14 juin 2006 du préfet des Côtes d'Armor refusant de lui transférer les quantités de références laitières précédemment allouées à M. A...à hauteur d'un volume de 97 646 litres par an.

Par un jugement n° 1501155 du 3 février 2017, le tribunal administratif de Rennes a condamné l'Etat à verser à l'Earl de Fossé Raffray la somme de 18 000 euros.

Procédure devant la cour :

Par une requête et des mémoires enregistrés les 31 mars 2017, 5 juin et 25 juin 2018, l'Earl de Fossé Raffray, représentée par MeD..., demande à la cour :

1°) de réformer ce jugement du tribunal administratif de Rennes du 3 février 2017 en tant qu'il n'a fait que partiellement droit à sa demande ;

2°) de condamner l'Etat à lui verser, en réparation de son préjudice, la somme de 69 231 euros, assortie des intérêts au taux légal à compter de la réception de sa réclamation préalable ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 500 euros au titre de l'article L.761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- le tribunal administratif a tenu compte à tort, pour évaluer son préjudice, de ce qu'elle ne possédait que 4 vaches au 14 juin 2006 car elle attendait l'accord de transfert des quantités de références laitières de l'administration pour acquérir de nouveaux bovins en état de produire du lait, ce qu'elle aurait pu faire très rapidement ; elle aurait donc été en mesure de produire l'intégralité des 97 647 litres de lait auxquels elle pouvait prétendre ;

- elle produit son bulletin d'apport de lait de janvier 2006, dont il ressort qu'elle aurait été en mesure de produire, a minima, 56 856 litres de lait sur une année ;

- elle a acquis l'exploitation de M. A...qui, à la cessation de son activité le 31 décembre 2005, produisait 135 580 litres ; les installations en place sur cette exploitation lui auraient donc permis à l'évidence de produire une quantité de 97 646 litres de lait.

Par des mémoires enregistrés les 29 mai et 12 juin 2018 le ministre de l'agriculture et de l'alimentation conclut au rejet de la requête de l'Earl de Fossé Raffray.

Il soutient que les moyens présentés par la requérante ne sont pas fondés.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Le Bris,

- les conclusions de M. Gauthier, rapporteur public ;

- et les observations de MeC..., substituant MeD..., représentant l'Earl de Fossé Raffray.

Considérant ce qui suit :

1. L'Earl de Fossé Raffray, producteur de viande bovine et de volaille, a souhaité reprendre l'exploitation laitière de M. A...qui a cessé son activité à compter du 31 décembre 2005. Elle a donc demandé le 20 décembre 2005 au préfet des Côtes d'Armor d'autoriser le transfert des quantités de références laitières détenues par ce dernier à hauteur de 97 646 litres annuels. Le préfet lui a opposé un refus par une décision du 14 juin 2006, qui a finalement été annulée par un arrêt n°13NT00139 de la cour administrative d'appel de Nantes du 15 novembre 2013 enjoignant en outre au préfet d'autoriser le transfert à l'Earl de Fossé Raffray d'un quota de 97 646 litres, sous réserve qu'elle soit en mesure de justifier de sa capacité à produire et commercialiser ce volume à très bref délai. Par une lettre du 24 décembre 2014 reçue le 29 décembre suivant, l'Earl de Fossé Raffray a demandé au préfet des Côtes d'Armor de l'indemniser du préjudice qu'elle a subi du fait de la décision illégale du 14 juin 2006. Par un jugement du 3 février 2017, le tribunal administratif de Rennes a condamné l'Etat à lui verser à ce titre une somme totale de 18 000 euros. L'Earl du Fossé Raffray relève appel de ce jugement et demande à la cour de porter la somme qui lui est due à 69 231 euros.

Sur les conclusions indemnitaires présentées par l'Earl de Fossé Raffray :

2. Il n'est pas contesté devant la cour que l'illégalité de la décision du 14 juin 2006 refusant le transfert d'un quota laitier de 97 646 litres annuels à l'Earl de Fossé Raffray constitue une faute engageant la responsabilité de l'Etat et est à l'origine pour cette société d'un préjudice courant sur la période du 14 juin 2006 au 15 novembre 2013, date de lecture de l'arrêt enjoignant à l'administration d'autoriser ce transfert sous réserve d'une condition à laquelle la requérante n'a finalement pas satisfait.

3. Le tribunal administratif de Rennes a évalué la perte de bénéfice de l'Earl de Fossé Raffray sur la base de la production annuelle moyenne de quatre vaches laitières au motif qu'à la date du 14 juin 2006, quatre vaches seulement était présentes sur l'exploitation. Il ressort cependant des pièces du dossier, d'une part, que la société requérante a commencé à exploiter les installations de M. A...dès le 1er janvier 2006 avec 7 vaches, qu'elle était déjà en mesure à cette date de produire environ 60% du quota dont elle demandait à bénéficier, et qu'elle a cessé de livrer du lait après le 19 janvier 2006 afin de ne pas s'exposer à des pénalités pour production non autorisée. Le ministre de l'agriculture et de l'alimentation ne conteste pas que cette société, ainsi qu'elle le soutient, aurait, si elle avait obtenu l'autorisation de transfert demandée pu facilement acquérir sur le marché des vaches en période de lactation en nombre suffisant pour produire du lait à hauteur de 97 646 litres annuels. Aucun élément du dossier ne permet non plus de remettre en cause la réussite de cette démarche. La requérante produit, d'autre part, une attestation de M.A..., qui bénéficiait quant à lui d'un quota laitier de 135 580 litres annuels, indiquant que les installations cédées comportaient une salle de traite en parfait état et un tank à lait réfrigéré mis à disposition par la société Eolys. Enfin, il est constant que, par son arrêt précédemment évoqué du 15 novembre 2013, la cour a annulé la décision du 14 juin 2006 au motif que l'Earl de Fossé Raffray devait être regardée, au vu des dispositions qu'elle avait prises, comme se préparant à produire du lait et à le commercialiser dans de très brefs délais.

4. Dans ces conditions, compte tenu du volume de quantité de référence laitière qui aurait dû être accordé à la requérante suite à sa demande de transfert, du bénéfice moyen résultant de la vente de 1 000 litres de lait sur la période fournis par la société de gestion Cogedis et dont la pertinence est admise par les deux parties, mais aussi du délai nécessaire à la mise en oeuvre d'une production de lait de 97 646 litres annuels et des aléas qui peuvent affecter toute exploitation agricole, il sera fait une plus juste appréciation du préjudice direct et certain subi par l'Earl de Fossé Raffray du fait de l'illégalité de la décision du 14 juin 2006 en lui accordant à ce titre une somme totale de 60 000 euros. Par suite, la requérante est fondée à soutenir que c'est à tort que le tribunal administratif de Rennes a limité à 18 000 euros le montant de son préjudice.

5. Il résulte de tout ce qui précède qu'il y a lieu de porter la somme de 18 000 euros que l'Etat a été condamné à verser à l'Earl de Fossé Raffray à la somme de 60 000 euros.

Sur les intérêts :

6. L'Earl de Fossé Raffray a droit, ainsi qu'elle le demande, aux intérêts au taux légal sur la somme de 60 000 euros à compter du 29 décembre 2014, date de réception de sa réclamation préalable.

Sur les frais de l'instance :

7. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat le versement à l'Earl de Fossé Raffray de la somme de 1 500 euros au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens.

DÉCIDE :

Article 1er : La somme de 18 000 euros que l'Etat a été condamné à verser à l'Earl de Fossé Raffray est portée à 60 000 euros. Cette somme sera majorée des intérêts au taux légal à compter du 29 décembre 2014.

Article 2 : Le jugement n° 1501155 du tribunal administratif de Rennes du 3 février 2017 est réformé en ce qu'il a de contraire au présent arrêt.

Article 3 : Le surplus des conclusions de la requête est rejeté.

Article 4 : L'Etat versera à l'Earl de Fossé Raffray une somme de 1 500 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à l'Earl de Fossé Raffray et au ministre de l'agriculture et de l'alimentation.

Délibéré après l'audience du 24 janvier 2019, à laquelle siégeaient :

- M. Coiffet, président assesseur,

- M. Berthon, premier conseiller,

- Mme Le Bris, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 8 février 2019.

Le rapporteur,

I. Le BrisLe président,

O. Coiffet

Le greffier,

M. B...

La République mande et ordonne au ministre de l'agriculture et de l'alimentation en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

2

N°17NT01064


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nantes
Formation : 3ème chambre
Numéro d'arrêt : 17NT01064
Date de la décision : 08/02/2019
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : M. COIFFET
Rapporteur ?: Mme Isabelle LE BRIS
Rapporteur public ?: M. GAUTHIER
Avocat(s) : CABINET LAHALLE - ROUHAUD et ASSOCIES

Origine de la décision
Date de l'import : 19/02/2019
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nantes;arret;2019-02-08;17nt01064 ?
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