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18/01/2019 | FRANCE | N°18NT01212

France | France, Cour administrative d'appel de Nantes, 2ème chambre, 18 janvier 2019, 18NT01212


Vu la procédure suivante :



Procédure contentieuse antérieure :



M. E...B...a demandé au tribunal administratif d'Orléans d'annuler l'arrêté du 5 avril 2017 par lequel le préfet du Loiret a refusé de lui délivré un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire et a fixé le pays de destination.



Par un jugement n° 1702595 du 10 novembre 2017, le tribunal administratif d'Orléans a rejeté sa demande.



Procédure devant la cour :



Par une requête, enregistrée le 19 ma

rs 2018, M.B..., représenté par MeC..., demande à la cour :



1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif d'Orlé...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. E...B...a demandé au tribunal administratif d'Orléans d'annuler l'arrêté du 5 avril 2017 par lequel le préfet du Loiret a refusé de lui délivré un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire et a fixé le pays de destination.

Par un jugement n° 1702595 du 10 novembre 2017, le tribunal administratif d'Orléans a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 19 mars 2018, M.B..., représenté par MeC..., demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif d'Orléans du 10 novembre 2017 ;

2°) d'annuler l'arrêté du préfet du Loiret du 5 avril 2017 ;

3°) d'enjoindre, sous astreinte, au préfet du Loiret de lui délivrer un titre de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale ", ou subsidiairement de réexaminer sa situation, dans un délai de deux mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 200 euros à verser au conseil de M. B... au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.

Il soutient que :

- le jugement attaqué est irrégulier faute d'avoir répondu au moyen tiré de la méconnaissance des dispositions de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la décision, en tant qu'elle refuse de lui délivrer un titre de séjour sur le fondement des dispositions du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, est entachée d'une erreur de droit et d'une erreur de fait compte tenu de la date de son arrivée en France en 2010, de l'ancienneté de son séjour, de la communauté de vie avec sa compagne et de la naissance de ses deux enfants alors que le préfet ne pouvait pas prendre en compte la circonstance qu'il n'était pas dépourvu d'attaches dans son pays d'origine.

- elle méconnaît les dispositions de l'article L.313-14 du même code eu égard à la date à laquelle il a quitté le Sénégal et à sa situation personnelle et familiale en France ;

- elle est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation de sa situation et méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ainsi que celles de la convention de New-York compte tenu de sa situation familiale.

Par un mémoire en défense enregistré le 6 novembre 2018, le préfet du Loiret conclut au rejet de la requête.

Il soutient qu'aucun moyen de la requête de M. B...n'est fondé.

M. B...a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 27 février 2018.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n°91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le décret n°91-1266 du 19 décembre 1991 ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de M. A...'hirondel et les conclusions de M. Derlange, rapporteur public, ont été entendus au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. M.B..., ressortissant sénégalais, né le 8 avril 1980, relève appel du jugement du tribunal administratif d'Orléans du 10 novembre 2017 qui a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 5 avril 2017 par lequel le préfet du Loiret a refusé de lui délivrer un titre de séjour, a assorti ce refus d'une obligation de quitter le territoire français dans le délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel il serait renvoyé à défaut de se conformer à cette obligation dans le délai requis.

Sur les conclusions à fin d'annulation :

2. Aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui ".

3. Il ressort des pièces du dossier que M. B... établit résider habituellement en France depuis au moins 2012 et vivre en concubinage avec Mme D...dont deux enfants sont nés de cette union, MoustaphaB..., le 21 octobre 2015, qu'il a reconnu le 29 décembre 2016, et Bakosso MohamedB..., le 10 mars 2017. Par ailleurs, il n'est pas contesté que MmeD..., qui est titulaire d'une carte de résident, a de très fortes attaches en France pour y être entrée dès l'âge de quatre ans et où vit l'ensemble de sa famille, en l'occurrence ses parents et ses frères et soeurs dont trois ont la nationalité française, et pour occuper un emploi d'intérimaire au sein des sociétés Adecco et Derichebourg. Eu égard à ces très fortes attaches, la vie familiale ne pouvait pas, sans obstacle, se poursuivre hors de France. Par suite, dans les circonstances particulières de l'espèce, l'arrêté contesté, qui a porté au droit de l'intéressé au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels il a été pris, a méconnu l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.

4. Il résulte de ce qui précède, et sans qu'il soit besoin d'examiner la régularité du jugement attaqué et les autres moyens de la requête, que M. B... est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif d'Orléans a rejeté sa demande.

Sur les conclusions aux fins d'injonction et d'astreinte :

5. Eu égard au motif d'annulation de l'arrêté contesté, le présent arrêt implique, sous réserve d'un changement dans les circonstances de droit ou de fait, que le préfet du Loiret délivre à M. B... un titre de séjour portant la mention " vie privée et familiale " dans un délai de deux mois à compter de la notification du présent arrêt, sans qu'il soit besoin d'assortir cette injonction de l'astreinte sollicitée.

Sur les frais liés au litige :

6. M. B... a obtenu le bénéfice de l'aide juridictionnelle. Par suite, son avocat peut se prévaloir des dispositions de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat le versement de la somme de 1 500 euros à Me C...dans les conditions fixées à l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 et à l'article 108 du décret du 19 décembre 1991.

DÉCIDE :

Article 1er : Le jugement du 10 novembre 2017 du tribunal administratif d'Orléans et l'arrêté du 5 avril 2017 du préfet du Loiret sont annulés.

Article 2 : Sous réserve d'un changement dans les circonstances de droit ou de fait, le préfet du Loiret délivrera à M. B... un titre de séjour portant la mention " vie privée et familiale " dans le délai de deux mois suivant la notification du présent arrêt.

Article 3 : Le versement de la somme de 1 500 euros à Me C...est mis à la charge de l'Etat dans les conditions fixées à l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 et à l'article 108 du décret du 19 décembre 1991

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à M. E...B...et au ministre de l'intérieur.

Une copie sera transmise au préfet du Loiret.

Délibéré après l'audience du 2 janvier 2019, à laquelle siégeaient :

- M. Pérez, président,

- Mme Brisson, président assesseur,

- M. A...'hirondel, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 18 janvier 2019.

Le rapporteur,

M. F...Le président,

A. PEREZ

Le greffier,

A. BRISSET

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

2

N° 18NT01212


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nantes
Formation : 2ème chambre
Numéro d'arrêt : 18NT01212
Date de la décision : 18/01/2019
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. PEREZ
Rapporteur ?: M. Michel LHIRONDEL
Rapporteur public ?: M. DERLANGE
Avocat(s) : SCP MADRID CABEZO FOUSSEREAU

Origine de la décision
Date de l'import : 19/08/2025
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nantes;arret;2019-01-18;18nt01212 ?
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