Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. A... a demandé au tribunal administratif d'Orléans d'annuler l'arrêté du 19 janvier 2018 par lequel le préfet du Loir-et-Cher a décidé sa remise aux autorités bulgares, responsables de l'examen de sa demande d'asile, ainsi que l'arrêté du même jour l'assignant à résidence, dans le département pour une durée de quarante-cinq jours.
Par un jugement n° 1800316 du 29 janvier 2018, la magistrate désignée du tribunal administratif d'Orléans a rejeté sa demande.
Procédure devant la cour :
Par une requête enregistrée le 1er mars 2018, M. A..., représenté par MeC..., demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement de la magistrate désignée du 29 janvier 2018 ;
2°) d'annuler les arrêtés du 19 janvier 2018.
Il soutient que :
- l'arrêté portant remise aux autorités bulgares est contraire aux stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales dans la mesure où il ne pourrait disposer en Bulgarie d'une procédure assurant le respect de la convention de Genève ;
- l'illégalité de l'arrêté portant assignation à résidence résulte de l'illégalité de l'arrêté portant remise aux autorités bulgares.
Vu les pièces desquelles il ressort que la requête a été communiquée au préfet du Loir-et-Cher, pour lequel il n'a pas été produit de mémoire.
M. A... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 12 mars 2018.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- le règlement (UE) n° 604/2013 du Parlement européen et du Conseil du 26 juin 2013 ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991, modifiée, relative à l'aide juridique ;
- le décret n° 91-1266 du 19 décembre 1991 modifié ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le rapport de Mme Gélard a été entendu au cours de l'audience publique.
Considérant ce qui suit :
1. M. A..., ressortissant afghan, relève appel du jugement du 29 janvier 2018 par lequel la magistrate désignée du tribunal administratif d'Orléans a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 19 janvier 2018 par lequel le préfet du Loir-et-Cher a décidé sa remise aux autorités bulgares, responsables de l'examen de sa demande d'asile, ainsi que de l'arrêté du même jour l'assignant à résidence dans le département pour une durée de quarante-cinq jours.
Sur les conclusions à fin d'annulation de l'arrêté de remise aux autorités bulgares :
2. Aux termes de l'article du point 2 de l'article 3 du règlement (UE) n° 604/2013/UE du 26 juin 2013 susvisé : " Lorsqu'il est impossible de transférer un demandeur vers l'Etat membre initialement désigné comme responsable parce qu'il y a de sérieuses raisons de croire qu'il existe dans cet Etat membre des défaillances systémiques dans la procédure d'asile et les conditions d'accueil des demandeurs, qui entraînent un risque de traitement inhumain ou dégradant au sens de l'article 4 de la charte des droits fondamentaux de l'Union européenne, l'Etat membre procédant à la détermination de l'Etat membre responsable poursuit l'examen des critères énoncés au chapitre III afin d'établir si un autre Etat membre peut être désigné comme responsable. Lorsqu'il est impossible de transférer le demandeur en vertu du présent paragraphe vers un Etat membre désigné sur la base des critères énoncés au chapitre III ou vers le premier Etat membre auprès duquel la demande a été introduite, l'Etat membre procédant à la détermination de l'Etat membre responsable devient l'Etat membre responsable ". En vertu de l'article 17 de ce règlement : " 1. Par dérogation à l'article 3, paragraphe 1, chaque Etat membre peut décider d'examiner une demande de protection internationale qui lui est présentée par un ressortissant de pays tiers ou un apatride, même si cet examen ne lui incombe pas en vertu des critères fixés dans le présent règlement (...) 2. L'Etat membre dans lequel une demande de protection internationale est présentée et qui procède à la détermination de l'Etat membre responsable, ou l'Etat membre responsable, peut à tout moment, avant qu'une première décision soit prise sur le fond, demander à un autre Etat membre de prendre un demandeur en charge pour rapprocher tout parent pour des raisons humanitaires fondées, notamment, sur des motifs familiaux ou culturels, même si cet autre Etat membre n'est pas responsable au titre des critères définis aux articles 8 à 11 et 16. (....) ". Si la mise en oeuvre, par les autorités françaises, des dispositions de l'article 17 du règlement n° 604/2013 doit être assurée à la lumière des exigences définies par les dispositions du second alinéa de l'article 53-1 de la Constitution, en vertu desquelles : " les autorités de la République ont toujours le droit de donner asile à tout étranger persécuté en raison de son action en faveur de la liberté ou qui sollicite la protection de la France pour un autre motif ", la faculté laissée à chaque Etat membre de décider d'examiner une demande de protection internationale qui lui est présentée par un ressortissant de pays tiers ou un apatride, même si cet examen ne lui incombe pas en vertu des critères fixés dans le présent règlement, est discrétionnaire et ne constitue nullement un droit pour les demandeurs d'asile. L'article 20, alinéa 3 de la directive 2011/95/UE du Parlement Européen et du Conseil du 13 décembre 2011 susvisée dispose : " Lorsqu'ils appliquent le présent chapitre [contenu de la protection internationale, y compris la protection contre le refoulement], les Etats membres tiennent compte de la situation spécifique des personnes vulnérables telles que les mineurs, les mineurs non accompagnés, les personnes handicapées, les personnes âgées, les femmes enceintes, les parents seuls accompagnés d'enfants mineurs, les victimes de la traite des êtres humains, les personnes ayant des troubles mentaux et les personnes qui ont subi des tortures, des viols ou d'autres formes graves de violence psychologique, physique ou sexuelle. " Enfin, aux termes des stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " Nul ne peut être soumis à la torture ni à des peines ou traitements inhumains ou dégradants. ".
3. Il est constant que la Bulgarie est un Etat membre de l'Union européenne, partie à la convention de Genève du 28 juillet 1951 sur le statut des réfugiés, complétée par le protocole de New-York, et à la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales. Si, ainsi que le soutient M.A..., le Haut-commissariat aux réfugiés avait demandé, en janvier 2014, la suspension temporaire des réadmissions vers la Bulgarie, celui-ci ne recommande plus cette suspension, depuis le mois d'avril 2014, en raison notamment des crédits supplémentaires de l'Union européenne alloués à la Bulgarie pour le traitement des demandes d'asile et du soutien du Bureau européen en matière d'asile, et se borne à inviter les Etats à s'assurer que la remise de l'étranger aux autorités bulgares s'avère compatible avec la protection des droits fondamentaux, en portant une attention particulière au transfert de certains groupes vulnérables, tels qu'ils ont été mentionnés au point 2 ci-dessus, dont M. A...n'établit pas faire partie. Par ailleurs, par les documents qu'il produit, et notamment un extrait du rapport annuel 2016/2017 de l'ONG Amnesty International et des photos non datées, M. A...n'établit pas que sa vie ou sa sécurité serait menacée en Bulgarie. Par suite, le moyen tiré de la méconnaissance des stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ne peut qu'être écarté.
Sur les conclusions à fin d'annulation de l'arrêté l'assignant à résidence :
4. Eu égard à ce qui a été dit au point 3, le requérant n'est pas fondé à exciper de l'illégalité de l'arrêté portant transfert aux autorités bulgares à l'appui de ses conclusions dirigées contre la décision l'assignant à résidence.
5. Il résulte de ce qui précède que M. A... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, la magistrate désigné du tribunal administratif d'Orléans a rejeté sa demande.
DECIDE :
Article 1er : La requête de M. A... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. B...D... A... et au ministre de l'intérieur. Une copie sera transmise au préfet de Loir-et-Cher.
Délibéré après l'audience du 13 décembre 2018 à laquelle siégeaient :
- M. Francfort, président,
- Mme Gélard, premier conseiller,
- M. Pons, premier conseiller.
Lu en audience publique, le 10 janvier 2019.
Le rapporteur,
V. GELARDLe président,
J. FRANCFORT
La greffière,
E. HAUBOIS
La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
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N° 18NT00930